
OrangeJJe , ou Ratafiat d'orange* . .
Lorfqu’on aura fait choix de la même quantité
& de la même qualité d’oranges que pour la liqueur
fine d'orange ci-deffus, on enlèvera également les
écorces de ces fruits par petites lames , pour qu’il
n’y refte que le moins de blanc qu’il fera poflible.
On laide tomber ces parties d’écorces dans une
terrine de grès , qu’on a placée devant foi ; &
quand cette opération eft finie, on met les oranges
qui ont été dépouillées, en réferve, pour en üfèr
comme ci-après ; puis on place deux grandes terrines
l’une à côté de l’autre , dans l’une defquelles
on verfe huit plntfes d’efprit-de-vîn re&ifié.
On prend les petites lames d’écorces, l’une après
l’autre ; on les ploie entre les deux pouces & les
index ; on exprime fur l’efprit-de-vin, de manière
à rompre toutes les petites cellules qui renferment
les globules de l’huile elTentielle qui réfide dans
ces parties d’écorces. Lorfque chacune de ces lames a été exprimée, on la plonge en ligne perpendiculaire
dans l’efprit-de-vin , & on la jette dans la
terrine qu’on a placée à côté de celle-ci.
Quand la totalité a été exprimée , on verfe l’ef-
prit-de-vin dans le vaifleau qui contient toutes les
parties d’écorces ; on laifle infufer pendant deux
heures ; on place un tamis fur la même terrine
qui contenoit l’efprit-de-vin ; on jette le tout dans
ce tamis , & on met la liqueur qui a paffé au travers
, dans un vaifleau qu’on tient bien, bouché ;
on jette les écorces dans une cucurbite, avec quatre
pintes d’eau de rivière ; on la place dans fon bain-
marie ; on la couvre d’un chapiteau ; on ajufte
le récipient; on lute les jointures ; on place le
thermomètre, & on fait difliller en entretenant le
fe u , de manière que l’opération fe termine au
foixante-dix-huitième degré de chaleur.
On démonte l’appareil ; on verfe le produit dans
la teinture qu’on a mife en réferve, & on jette le
furplus comme inutile; on fait enfuite clarifier dix-
neuf livres de fucre comme ci-deffus ; & lorfqu’il
eft cuit jufqu’à la même confiftance , on rètire le
vaifleau du feu , & pendant le temps que ce firop eft à refroidir, on mouille & on tord fortement une
ferviette fine ; on l’étend fur une terrine ; on l’attache
avec une ficelle qu’on pafle à la circonférence
de ce vaifleau; puis on coupe tranfverfâle-
ment & par moitié toutes les oranges qu’on avoit
mifes en réferve, & on place d’abord chacune de
ces moitiés de fruits entre le pouce & l’index,
la coupure en deflous ; on preflè avec la main
droite ; on place ces mêmes écorces entre les deux
paumes des mains, & on-exprime en fens contraire
jufqu’à ce que tout le fuc en foit forti , en
obfervant toutefois de ranger la pulpe & les pépins
dans un coin cTe la ferviette, parce que l’une &
l’autre partie communiqueroient à la liqueur une
faveur amère & défàgréable.
Lorfque la totalité du fuc de ces fruits eft pafîee au travers de la ferviette, on retire celle-ci ; on
mêle & on agite fortement ce fuc d’oranges avec
le firop ; on ajoute enfuite l’efprit aromatique : on
agite encore , puis on verfe le mélange dans de
groffes bouteilles de Verre.; on laifle repofer ; on
colle & on foutire cette liqueur comme ci-deflus.
Il arrive quelquefois qu’une partie du dépôt refte
fur la fuperficie de la liqueur : alors on agite le
vaifleau de huit en huit jours , jufqu’à ce que la
totalité de ce dépôt fe foit précipitée.
Fine orange citronnée.
Pour la compofition de la liqueur appellée fine
Orange citronnée , on çhoifira quatorze oranges &
huit citrons de la même qualité que ceux dont on
a fait ufage ci-deflus. On enlèvera également les
écorces de ces fruits , par petites lames , qu’on
jettera à mefure dans une cucurbite ; puis on y
verfera neuf pintes eTefprk-de-vin commun, à l’effet
d’en retirer d’abord la teinture fpiritueufe qu’on
coulera au travers d’un tamis.
On jettera les mêmes parties d’écorces dans la
cucurbite, avec fix pintes d’eau , pour en retirer
la fécondé teinture qu’on coule également au travers
d’un tamis : on mêle ces deux teintures en-
femble ; & quinze jours après ce mélange , on
procède à la diftillation, pour laquelle on applique
le même degré de chaleur que peupla fine orange.
On mettra en réferve les oranges qui ont été dépouillées
de leur écorce, pour en faire ufage comme
ci-après ; & quand on veut paffer à la i compofi-
tion , on fait également clarifier & cuire au fort
boulet la même-quantité de fucre qui a déjà été
déterminée ; puis on y fait entrer deux pintes d’eau
de méliffe,- avec les mêmes précautions ; & lorfque
ces deux liquides ont été réunis, on y jette le île
des oranges , qu’on a préalablement exprimé & fait
paffer au travers d’une ferviette : on agite fortement
le mélange ; on ajoute les huit pintes d’efprit-
de-vin qu’on a retirées par le moyen de la diftii-
lation; on agite encore ; & on fait éclaircir cette
liqueur.
• OrangeJJe acidulée.
Pour la compofition de cette orangefle , on fui-
vra en tous points les mêmes procédés qui ont été
indiqués par la formule de l’orangeffe ci-deflus,
faite par infufion , à l’exception de ce qui fuit,
c’eft-à-dire , qu’on fera entrer dans celle-ci la même
quantité d’écorces de citrons que d’oranges , & l’on
ajoutera feulement le fuc de quatre citrons à celui
qu’on aura exprimé de la totalité des oranges qui
auront été dépouillées de leurs écorces.
On fait encore cuire dans l’eau de rivière , &
confire au fucre les parties d’écorces qu’on enlève
de ces fruits, & qu’on appelle çefles fie citrons,
yefies d’oranges.
. Ces écorces étant confites , on les arrange fur
des tamis ; on les fait fécher à l’étuve ; on les met
en réferve dans une boîte qu’on tient bien fermée
y pour en ufer au befoin. On mange de ces
écorces fèches ; on en compofe aufli différentes
boiffons. . . .
Pour cet effet, on en réduit une demi-once grof-
fièrement en poudre, qu’on jette dans une pinte
d’eau' froide ; on approche le vaifleau du feu ; on
l’échauffe fans faire bouillir ; on laifle repofer, &
on fait ufage de la liqueur, lorfqu’elle eft encore
chaude ; ou bien on y fait fondre une once & demie
de fucre blanc, & on y ajoute le fuc d’un bon
citron.
Eau cordiale de Coladon.
M. Coladon,-médecin à Genève, qui exiftoit
encore au commencement fie ce fiècle , avoit inventé
une eau cordiale, qui fut en très-grande vogue.
Cette liqueur étoit compofée avec l’huile effen-
tielle des écorces de citrons, retirée par le moyen
de l’expreflion & diffoute dans l’efprit-de-vin rectifié
, dans lequel, il faifoit entrer le fucre clarifié
avec l’eau de méliffe fimple.
Cette liqueur fut abandonnée par la difficulté
de fe procurer des citrons affez mûrs , & affez fraîchement
cueillis , pour que l’huile effentielle qui
réfide dans les écorces, n’eût éprouvé aucun degré
d’altération.
Mais elle a été depuis peu imitée & perfectionnée
avec fuccès, par M. Dubuiflbn , qui nous
en a donné les procédés fuivans.
Eau cordiale de M. Dubuiffon.
M. Dubuiffon fit venir de Gênes des citrons bien
mûrs, & bien confervés. Alors il ajuftà fur un
fupport un morceau de glace d’environ fix pouces
de diamètre, incliné au deffus d’un vaifleau rempli
jufqu’aux deux tiers de fa capacité d’efprit-de-
vin reâifié, &_totalement dépouillé de fon huile
graflè. Le morceau fie glace doit être difpofé de
manière que fa partie inférieure foit à fleur de l’ef-
prit-de-vin.
Quand tout cet appareil eft ainfi arrangé, on
verfe quatre pintes d’efprit-de-vin dans le vaifleau ;
on effuie légèrement avec une ferviette fine quarante
de ces citrons ; on enlève les écorces jaunes
par petites lames très-fines , qu’on laifle tomber fur
une afliette placée devant foi.
Lorfqu’on a dépouillé ainfi une demi-douzaine
de ces fruits, on prend les petites lames d’écor-
ees , luné après l’autre ; on les ploie à-cEverfes re-
prifes, entre le pouce & l’index ; on exprime à
une demi-ligne de diftance de la glace , & de ma-
m e à rompre toutes les petites cellules où eft
renrermee l’huile effentielle qui réfide dans ces
parties d écorces, qu’on jette enfuite comme inutiles.
-, ,,Plonge de temps à autre le bout des doigts
. ans lefpritfie-vin, à l’effet de diffoudre les particules
huileufes qui s’y attachent en exprimant ;
apres quoi 1 on verfe l’efprit aromatique dans un
vai eau que l’on tient bien bouché ; puis on agite
fix S * 6 * temPs cn £emPs ? pendant cinq ou
Lorfqu’on pafle à la compofition, on fait fondre
neuf livres & demie de fucre blanc, dans deux
pintes d’eau de méliffe bien limpide, & une cho-
pine d’eau de rivière, dans laquelle on fouette
un blanc d’oeuf; puis on fait clarifier fuivant les
règles de l’art, & on fait réduire-jufqu’à confiftance
de firop, dont la quantité doit fe monter à environ
cinq pintes & demie.
On exprimera le fuc de fix ou huit citrons, qu’on
çhoifira dans le nombre de ceux qui ont été dépouillés
de leurs écorces, puis après l’avoir filtré au travers
d’un papier jofepft, on le jettera dans le firop$
on agitera fortement, & quatre heures après, on
ajoutera l’efprit aromatique de citrons, qu’on remuera
encore fortement, & on verfera le mélange
dans de groffes bouteilles de verre, qu’on tiendra
bien bouchées : on laiffera repofer pendant huit
jours ; on collera, & o n foutirera la liqueur comme
il a été dit.
Mais comme cette liqueur conftituoit dans des
frais confidérables, non-feulement par rapport à
la plus grande quantité de fruits qu’on étoit obligé
d’y faire entrer, mais encore par la perte qui ré-
fultoit du grand nombre de ceux qui fe gàtoient
dans le tranfport, parce qu’ils avoient été cueillis
murs, & que ceux qu’on envoie ordinairement
ne fe, confervent que parce qu’ils ont été cueillis
étant encore verds , M. Dubuiffon imagina la compofition
fuivante.
Eau cordiale de M . Dubuijfon. Seconde compofition.
Dans une caiffe de citrons d’Italie, on choifit &
on met à part les fruits qui paroiffent plus mûrs ;
on les effuie légèrement, & on préfère ceux qift
ont l’odeur la plus fuave : pour s’en affurer, on
égratigne doucement avec l’ongle la fuperficie de
l’écorce jaune ; & lorfqu’on a fait un bon choix de
trente citrons , on verfe huit pintes d’efprit-de-vin
re&ifié, dans une terrine de grès ou de terre non
verniflee, puis on enlève les parties de l’écorce
jaune de ces fruits, comme il a déjà été dit.
On prend enfuite ces parties d’écorces l’une
après l’autre ; on exprime fur l’efprk-de-vin ; on
les y plonge en ligne perpendiculaire, & on les
jette' dans une terrine qu’on a placée à côté de
celle qui contient l’efprit-de-vin.
Après cette opération , on verfe l’efprit-de-vin
fur les écorces qui ont été exprimées ; on laifle
infufer pendant une heure, le thermomètre étant
à vingt degrés au deffus de la glace, & pendant
deux heures, s’il eft à fix degrés au deflous du
temperé; puis on coule le liquide au travers d’un
tamis de crin ; on le verfe dans un vaifleau ; on le
met en réferve ; on jette les ecorces dans une cucurbite
avec quatre pintes d’eau de rivière, & on
fait diftiller juiqu’au foixante-dix-huitième degré.
On démonte l’appareil ; on mêle le produit avec
l’efprit qui a été mis en réferve ; & lorfqu’on pafle
à la compofition , on fait fondre dix-neuf livres de
fucre, dans trois ou quatre pintes d’eau de méliffe