On détache a fiez facilement le réfidil, lorfqu’on a employé du nitre pur ; mais s’il contient beaucoup
de fel commun, il s’attache fi fort au fond du
v a fe , qu’on a beaucoup de peine à l’en féparer.
En Saxe, on mêle avec le nitre & le vitriol, le
réfidu de quelque ancienne diftillation, pour empêcher
que celui de la nouvelle ne s’attache.
Autres procédés par lefquels on peut obtenir des
eaux-fortes.
Voici quelques autres procédés indiqués dans la
colleâion de Neuchâtel, par l’annotateur de l’art
traité par M. de Machy.
i°. On peut employer avec avantage, pour obtenir
des eaux-fortes y le fe l cathartique amer , dans
les endroits où il eft à bon compte, comme près
des falines. >
Pour cet effet, on diftille le falpêtre avec une
ou deux parties de fel amer. L’eau-forte qui en pro- j
vient eft très-bonne , & le réfidu fournit du tartre
vitriolé & de la magnéfie, qui peuvent rendre par
leur prix cette diftillation fort avantageufe.
a°. On peut encore fe fervir du vitriol blanc, dans
les endroits où il n’eft pas exceflivement cher. Une
livre 8c trois onces de ce vitriol, fuffifent pour dé-
«çompofer une livre de falpêtre, 8c l’on eft perfua-.
dé que le réfidu feroit plus utile que celui de la
diftillation avec le vitriol ordinaire.
3°. Le foufre même peut fervir, mais il y a trop
de danger à l’employer, & on ne le confeille pas.
4°. L’arfeniç dégage très-bien l’acide nitreux. Si
l ’on diftille parties égales d’arfenic & de falpêtre ,
on obtient, en mettant dans le récipient autant
d’eau qu’on a pris de falpêtre, une eau-forte excellente
, bleue, & très-fumante.
5°. M. Simon, habile chimifte Allemand* emploie
un mélange de vitriol & de lapis de pyrmiefon
ou de tribus ; 8c il obtient par ce moyen une eau-
forte qu’il vante extrêmement, & dont on fait beaucoup
de cas pour les couleurs aufïi-bien que pour la
teinture.
On prend cinq livres de vitriol calciné, fix livres
de nitre, 8c une once d e lapis de tribus , que l’on
diftille dans une cornue, à laquelle eft adapté un récipient
où l’on met cinq livres d’eau. De cette manière,
on obtient dix livres d’efprit de nitre très-
pur , d’un beau bleu, & un peu fumant.
Il eft remarquable que l’argent diffous dans cette
eau-forte, dépofe au bout d’un certain temps un peu
de chaux d’or.
Des différentes qualités $ eaux-fortes.
Les qualités des eaux-fortes ne font pas toujours
lqs mêmes ; elles doivent néceffairement varier
beaucoup à raifon de leur fabrique ? plus ou moins
foignée , ou plus ou moins altérée. Sans parler ici
de Vefprit de nitre ordinaire , ni de Vefprit de nitre
fumant, lés eaux-fortes, proprement dites , fe fous-
divifent en première, fécondé, & troifième forte
çn force ; & les marchand? en ÿftinguçnt çncçre un
plus grand nombre d’eipèces, auxquelles Us raetwM
des prix différens.
Les acheteurs d’eaux-fortes , pour juger cle leur
qualité, en verfent une goutte fur une pièce de
cuivre, & apprécient à l’oeil leur degré de force •
par la vivacité avec laquelle le cuivre eft corrodé *
par la forme ronde que conferve la goutte fur la
pièce de monnoie , par le brillant que prend le cuivre
ainfi corrodé, & par la profondeur de la cor-
-rofion.
Mais il eft aifé de fentir combien une pareille
épreuve eft équivoque, on jugeroit mieux de fa
qualité par fon poids. En effet ,• la continence des
■ bouteilles & leur tarre étant connues, la plus pe-
fante doit renfermer l’acide le plus concentré.
Une bouteille qui, remplie d’eau, pèfe feize gros"
en pefe vingt à vingt 8c demi, étant remplie
d eau-forte ordinaire , telle qu’elle eft dans le commerce
, & vingt-quatre , lorfqu’elle eft remplie d’efprit
de nitre fumant.
On fait quelquefois ufage d’un pèfe-liqueur gra»
due, pour connoître les différentes qualités des
eaux-fortes. Le pèfe-liqueur cité par M. de Machy,
eft un aréomètre ordinaire, dont la tige porte huit
pouces de long, fur une ligne 8c demie à deux lignes
de diamètre. Cet aréomètre pèfe., y compris fon
le ft, dix gros. & demi. On marque fur un rouleau
de papier, renfermé dans le tube de verre, l’échelle
ou les degrés de force des eaux-fortes, &on
reconnoit tout de fuite, par ce moyen , les qualités
& les prix des eaux-fortes. Mais il faut que ce pèfe-
liqueur foit tres-fenfible pour déterminer au jufte
la force des eaux-fortes, parce que la différence
de poids dans les différentes fortes eft peu confi-
derable, 8c difficile à fe faire remarquer.
Les eaux-fortes fe pèfent ordinairement dans des
plateaux de bois, 8c non dans des plateaux de cuivre
y 8c l’on a^oin que le même plateau ferve toujours
à recevoir les bouteilles ou tonries.,.afin que
les poids de fer, mis dans l’autre plateau , ne foient
fujets à aucune altération, par l’acide qui peut
tomber durant la pefée.
Epreuves des Eaux-fortes.
Il arrive fouvent que les eaux-fortes font impures
, par la décompofition d’un peu de fel marin,
dont eft chargé le falpêtre , qui fe mêle à l’acide
nitreux dans le temps de la diftillation. On dit d’une
eau-forte ainfi altérée , quelle tourne au blanc.
Pour découvrir cette altération , les diftillateurs
font dans l’ufage de verfer dans l’eau-forte, mife
à l’épreuve, quelques'gouttes de diffplution d'argent,
faite dans l’acide nitreux; 8c ils jugent par
l’épaiffeur du blanc qui fe forme fur le champ, de
la quantité vd’acide marin mêlé à leur liqueur.
Véfprit-de-nitre obtenu par le vitriol, eft fur-
tout très-fujet à fe charger d’efprit de fe l , 8c même
d’acide vitriolique. Cependant, quoique cëtte eau-
forte foit impure, comme elle eft affez concentrée,
on l’étend dans de l’eau, 8c elle fert, en cet état,
5, certains artiftes qui n’exigent pas une eau-forte,
ni très-forteI ni très-pure, comme les relieurs., les
chaudronniers , les fondeurs en cuivre, &c. On de-
couvre la préfence de l’acide vitriolique dans leau-
forte en y jettant quelques gouttes de la diffolu-
tion de mercure, qui forme un précipité plus ou
moins jaunâtre., en raifon de la quantité d’acide vi-
triolique qui y eft contenu. S r,
On fe fert encore avec fucces, pour découvrir
la préfence de l’acide vitriolique dans l’eau-forte,
de quelques gouttes de la diffolution de plomb dans
le vinaigre, lefquelles forment auflitôt un précipité
blanc. Si l’eau-forte contient de l’acide du fe l, il fe
forme le même précipité, mais avec cette différence
, que le précipité qui réfulte dans le premier
cas ne’ fe diffout pas comme celui-ci, en ajoutant
dix fois autant d’eau diftillée qu’on a pris d’eau;
Voici comme on purifie les eaux-fortes.pour les
affinages. Après avoir effayé par quelques gouttes
d’argent, combien il peut y avoir d’efprit de fe l, on
met depuis un fcrupule jufqu’à un gros d’argent
par livre d’eau-forte de la prèmière force , on met
le tout dans un matras fur le feu.
L’argent étant diffous par l’eau-forte , rencontre
l’acide marin , avec lequel il fe précipite fous forme
d’un caillé blanc, qu’on laiffe bien raffeoir ;_on
verfe par inclinaison l’eau-forte qui fumage , 8ç qui
prend alors le nom d'eau-forte de départ.
On peut aufii) fép'arer le caillé blanc de l’eau-
forte , 8c les autres faletés, en la filtrant par un
papier de pofte doublé , qui ne contient pas de parties
animales, comme le papier à filtrer ordinaire.
Un autre procédé pour purifier l’eau-forte, indiqué
par l’éditeur du recueil des arts de Neuchâtel,
& qu’il dit fupérieur à la méthode ordinaire , con-
fifte à prendre un peu de mercure , & à le diftil-
ler avec l’eau-forte qu’on veut purifier. Alors l’acide
de fel & de vitriol refte uni au mercure , 8c
l’eau-forte paffe très-pure dans le récipient. Le mercure
n’eft pas pour cela perdu , car le fel mercuriel
qui refte dans la cornue, peut fervir à différentes
autres opérations.
Dans le cas où l’eau-forte contient beaucoup
d’acide vitriolique , un des meilleurs moyens de la
purifier, c’eft d’y verfer goutte à goutte une diffolution
de plomb, jufqu’à ce qu’il ne fe faffe plus
de précipité. «Par-là, tout l’acide vitriolique s’unit
au plomb*, 8c forme un fel indiffoluble qui va au
fond ; alors on emploie la diffolution d’argent,
pour féparer l’acide du fel.
Les teinturiers en écarlate ayant befoin d’une
eau-forte abfolument purgée d’acide vitriolique ,
ou peut s’en affurer, comme on l’a dit ci-deffus,
par la diffolution du plomb.
Au contraire , les graveurs Ont befoin d’une eau-
forte qui contienne un peu d’acide vitriolique,
parce qu’il arrêtera trop grande aélion de l’efprit
de nitre fur le vernis, dont ils ‘couvrent leurs planches
de cuivre.
Eau fécondé.
Veau fécondé, eft une eau-forte affoiblie ; foit
par de l’eau, foit par des matières étrangères. On
en vend de verte , de bleue , de jaune, 8c en toutes
fortes d’états, chez les épiciers détailleurs mais
quand on veut avoir de bonne eau fécondé, il vaut
mieux prendre de l’eau-forte pure, 8c la mettre
foi-même au degré de force qu’on le délire, en y
ajoutant plus ou moins d’eau.
Veau fécondé préparée pour faire ce que les chapeliers
appellent leur fecret, fe compofe avec une
livre d’eau-forte du plus bas prix, dans laquelle
on a fait diffoudre une .once de mercure. L’eau-
forte , chargée de cette diffolution, fe trouve alors
plus lourde.
Les chapeliers Allemands font diffoudre une à
deux onces de mercure dans une livre d’eau-forte,
8c y ajoutent un peu de vinaigre.
Divers autres procédés d'eau-forte & d’eau fécondé.
Voici quelques autres recettes d’eaux-fortes 8c
d'eaux fécondés , indiquées par l’éditeur de Neuchâtel.
I. Pour comppfer Vefprit de nitre fammif'ere, on
fuit les procédés indiqués pour l’efprit de nitre fumant
, excepté qu’on ne met point d’eau dans l’huile
de vitriol, non plus que dans le récipient, 8cque
l’on fe fert volontiers de retortes tubulées, pour
verfer l’huile de vitriol fur le falpêtre. Soixante
onces de falpêtre donnent avec la moitié d’huile
de vitriol concentrée, trente-une onces d’êfprit de
nitre flammifère. Afin de le rendre plus aéfif pour
l’inflammation des huiles , on y ajoute un cinquième
à un quart d’huile de vitriol concentrée.
II. Quand on ajoute une fois 8c demie plus d’eau
qu’on n’a pris de -falpêtre, on a Veau-forte commune
des orfèvres.
III. Si l’on n’ajoute qu’une livre 8c un quart
d’eau pour chaque livre de falpêtre, on obtient
une-eau-forte pour les orfèvres, très-forte.
IV. * En ne prenant que trois quarts de livre d’eau
pour chaque livre de falpêtre , on a par ce moyen
Veau-forte double des orfèvres.
V . Neuf parties de l’eau-forte n°. IV , donnent
avec une partie d’huile de vitriol, Veau forte double,
à l’ufage des fondeurs , qui leur fert à nettoyer leurs
ouvrages, au fortir du moule. Cette eau-forte eft
aufli connue fous le nom d'eau-forte double des graveurs.
Il eft cependant rarè que celle du commerce
ait cette force. Elle équivaut pour l’ordinaire à
celle que l’on feroit en mêlant neuf parties de l’eau-
forte n°. I I I , avec une partie d’huile de vitriol.
VI. Veau-forte commune des graveurs & fondeurs
peut fe faire en mêlant vingt parties de l’eau-forte
n°. I I I , fept parties d’huile de v itriol, 8c trente
parties d’eau.
VII. Veau-forte pour la gravure au pinceau, fe