
Réparations.
Lés réparations à faire fur les anciennes couvertures
d’ardoifes font de deux fortes : les menues
réparations , & les remaniemens à bout.
Dans les premiers, il ne s’agit que de fubftituer
des ardoifes à celles qui ont été rompues ou détachées.
La difficulté eft de clouer celles qui font les
plus élevées ; & fila latte eft pourrie , on remet
des bouts de lattes qu’on attache fur les contre-
lattes.
Quelquefois les couvreurs, après avoir arraché
les. clous d’une ardoife rompue & en avoir enlevé
les fragmens , taillent une ardoife neuve & la fourrent
entre les autres ardoifes pour remplacer celle
qui étoit rompue fans la clouer. Quand le toit eft
fort plat , cette ardoife peut fubfifter aflez longtemps
en place ; mais quand le toit eft un peu
roide, elle eft lu jette à tomber, ou à être dérangée
par des coups de vent. C’eft donc une négligence
dangereufe qtie de ne pas attacher toujours l’ardoife
fur les lattes.
Lorfqu’il faut faire les remaniemens à bout ou
remettre des ardoifes à un égout, on doit échaf-
fauder, ou , fi l’on v e u t , 'on fe fert de longues
échelles qui s’étendent jufques fous l’égout ; mais
on a foin qu’elles ne portent point deffiis les ardoifes
de 1 égout, qui fe romproient foüs le poids ; & que
le haut de l’échelle foit plus écarté de la muraille
que l’égoût ne fait de faillie , fans quoi le couvreur
ne pourroit avoir aflez de liberté pour travailler ;
mais if fe procure cetté facilité en attachant au haut
de l’échelle une chaife renverfée, comme on voit
fig. 31 } pl. //, dont les pieds, portant für la muraille
au deflous de l’égoût , écartent aflez le haut de
l’échelle , pour que le couvreur puifle opérer facilement
; & pour éviter que l ’échelle qui ne repofe
que fur cette chaife, qui a peu de largeur, ne fe
renverfe , il pafle deux perches entre les échelons
& les montans de l’échelle pour empêcher de
tourner.
Couverture en bardeau.
On appelle bardeau, de petites planches refendues
, comme l*e merrain, mais qui n’ont que douze
à quatorze pouces de longueur ; leur largeur varie.
Quand ces petites planches ont été fendues dans les
forêts, on les fait drefler & réduire à quatre ou cinq
lignes d’èpaifleur par des tonneliers qui fe fervent
jmiir cela d’une doloire : on fait auffi du bardeau
avec des douves de vieilles futailles. Quand le
bardeau a été ainfi travaillé., les couvreurs l’emploient
; ils le clouent fur la latte comme l’ardoife.
Mais pour tailler proprement le bardeau & le
mettre de largeur , les couvreurs fe fervent d’une
hachette ; ils le percent avec une vrille pour y
placer le clou , fans quoi le bardeau pourroit fe
fendre. Ces petites planches s’emploient de la même
manière que les ardoifes, & font une couverture
.très - propre ; on en à vu employer fur des flèches
de clochers, & fur des moulins : le bardeau réfiftÿ
mieux aux coups de vent que l’ardoife ; mais l’eau
s’amafle entre le recouvrement, & fait pourrir le .
bardeau aflez promptement, à moins qu’il. ne foit
fait de coeur de chêne de la meilleure qualité. La ■
légèreté de fon poids eft un des principaux avan-
•tages de cette couverture.
En Allemagne & en Suifle on fait le bardeau |
avec du fapin -, plus ou moins épais, groffièrement
taillé &fort ferré. Les toits font fort plats, pour don-
11er moins de prife au vent ; mais comme le bardeau |
eft léger, on l’attache à la latte par le moyen d’une
entaille ou d’un crochet, ou bien on le charge de
greffes pierres qui le tiennent en place.
En Suifle on met un bardeau fous chaque joint de
-tuile pour rendre les couvertures & plus chaudes I
& plus sèches, en les défendant du paflage du vent I
& de la pluie.
Une couverture particulière à la ville»de Naples , I
eft ce qu’on appelle lajlrico ; c’eft une efpèee de ci- I
ment dont les terrafles & les defîus dés maifons, I
tous en pente , font couverts. Il eft formé avec de ■
la chaux & de la terre appelée pou^olane , qui font H
détrempées, broyées & battues à différentes re- H
prifes. Ce travail eft fort long quand on veut le bien I
faire ; mais il eft très-rare qu’il le foit aflez bien pour f i
n’être pas fujet aux lézardes ou autres crevafles. C ’eft I
cette couverture particulière qui procure à Naples I
le fpe&acle le plus agréable de voir en été la plus h
grande partie des habitans, après le coucher du ,fo- t ;
leil , prendre l’air frais fur ces terrafles. Cette efpèee E
de couverture , fans être plus coûteufe que celle en |j
tuiles , lui eft infiniment fupérieure , par fa durée & M
par fon agrément.
Couverture en lave.
Après avoir donné la conftru&ion des couver- |
tures en chaume, en tuile, en ardoife, en bardeau, I
il eft à propos de traiter ici de la couverture en lave, I
pour ne rien omettre de ce qui concerne les diffé- I
rentes efpèces de couvertures, & compléter l’art [
du couvreur. Nous fuivrons le Traité de M. Cour- l
tivron en l’abrégeant.
La lave propre pour la couverture des bâtimens I
dont il va être queftion, n’eft point cette matière I
qui fort à demi vitrifiée des volcans, & à laquelle I
on donne le nom de lave quand elle eft refroidie & I
figée ; celle dont il s’agit ic i, eft une forte de pierre
plate qui fe détache aifément, & qui fe tire à dé- I
couvert des carrières, dont elle forme la fuperficie ; I
fouyent la lave recouvre une pierre épaifle, quel- I
quefois un roc v i f , & d’autres fois encore un gros I
fable appîani./ On trouve des carrières de lave dans I
des lieux élevés, à mi-côte, quelquefois même juf- I
qu’au pied des montagnes & dans des plaines : pref-
que toute la partie de la Bourgogne qui eft,connue
fous le nom de bailliage de la Montagne ou de Chatil• I
Ion 3 a des carrières de lave dans les lieux les plus I
élevés ; la plaine de Chanceru en eft toute couverte.
Il y en a auffi en Franche-Comté, en Champagne
g, eH Lorraine. Dans toutes ces provinces on s’en
fert pour couvrir les maifons avec d’autant plus de
profit, que cette efpece de couverture, qui coûte
peu, ’eft très-folide. . . ..
La lave fe tire, comme on vient de le d ire, des
carrières en tables plus ou moins grandes , avec
une èpaiffeur différente; mais le tireur les réduit
- à un pied, dix-huit pouces, ou deux pieds de longueur
tout au plus, fur autant de largeur, & ne lui
faiffe jamais plus d’un pouce d’épaiffeur : elle peut
; s’employer avec quatre à cinq lignes d èpaiffeur &
f toutes les autres dimenfions intermédiaires. Au for-
[ tir de la carrière , on la difpofe par petits tas arron-
I dis, rangeant les laves irrégulièrement les unes
t fur les autres, & laiffant un vuide au milieu pour
I que le foleil & l’air les faififfent & les fechentplus
I aifément. . „
La charpente des couvertures en lave doit etre I auffi forte & conftruite de la même maniéré que
K celle des couvertures en tuile, avec cette différence
I pourtant, qu’on ne donne à la hauteur de l’aiguille I de la ferme que la moitié de la largeur du bâtiment :
■ fi la charpente avoit plus de roideur, les laves y
I tiendraient moins folidement. Tous les bois doi-
I vent en être 'choifis d’un fort équarriffage. Les
I chevrons ne doivent pas être efpacés de plus d’un
t pied ou quinze pouces. L’efpece de latte qu on em-
K ploie pour la couverture en la ve, conftfteen brins
I de chêne de dix, douze, quatorze ou quinze pouces
I de circonférence par le pied, & de douze à dix-
■ huit pieds de long. Le charpentier, après les avoir
fuperficiellement équarris de deux faces, les fend
dans toute leur longueur; le rond ainfi divife forme
deux lattes ; il les attache en travers fur les chevrons
avec des clous, ou plus ordinairement avec des
chevilles, à la diftance de trois pouces & demi 1 un
de l’autre, ayant attention que les bouts des lattes
portent toujours fur la muraille du pignon & fur
les chevrons, fans jamais porter à vuide, ce qui
attireroit tôt ou tard la ruine de la couverture.^
La lave fort brute des mains de l’ouvrier qui la
tire, & on la tranfporte en cet état au pied des
maifons qu’elle doit couvrir. Elle eft alors d’une
forme irrégulière ; c’eft le couvreur qui la taille avec
une efpece de petite hachette ou hachotte non tranchante,
dont le côté oppofé a la forme d’un marteau
aflez fort pour caffer les bavures & abattre les
angles des laves inégales.^ Le couvreur ne taille à
terre que les plus épaiffes qu’il doit employer directement
fur les murailles, & qu’il appelle gouttières
&$ doubles gouttières : il leur donne une forme a
peu près quarrée ; il ne taille de ces laves épaiffes
qu'autant qu’il en faut pour faire deux rangs, cha- j
cun de la longueur du bâtiment, pour chaque mu- 1
raille. Il taille les autres fur la charpente même du
toit, avec le même infiniment. La îavefe monte
de main en main avec une échelle, le long de laquelle
il y a autant de manoeuvres qu’il en faut pour
atteindre depuis le tas de laves au pied du bati-
jufqu’au faîte. Un couvreur les choiftt-en bas,
Scies donne au manoeuvre qui le fuit, Scelles paf-
fent de main en main jufqu’à un fécond couvreur
qui . les reçoit fur le toit & les pofe, lavoir-,, les
gouttières & doubles gouttières fur la muraille,
oc les autres entre deux lattes , de rang en rang
jufqu’au faîte, de maniéré quelles y raient affu-
jetties, & ayant foin de charger également les parties
oppofèes-de la charpente, de peur quun cote
plus chargé ne fît reculer l’autre.
Comme les murs bien faits ont tpu jours un talus
: infenfible, il faut que le toit avance pour les garantir
de la pluie oc de la neige. Pour cet effet le
couvreur commence par mettre fur la mitraille la
double gouttière ou arrière-gouttière, fil avance
de trois à quatre pouces au-delà du bord du mur „
■ & fur cette arrière-gouttière I pofe la gouttière en
1 Favançànt auffi le plus qu’il peut , fans qu elle nique
de tomber, de forte que î’arriere-gouttære fert
de bras d’appui à la gouttière même. Le couvreur
aligne la double gouttière & la gouttière au moyen
d’un cordeau parallèle au mur tendu par deux ba-
tons ou fiches de fer . fixes aux deux extrémités
de la muraille. Quand le couvreur a pofé fes gouttières
, & employé fur la muraille deux rangs des.
laves les plus épaiffes, .il garnit les rangs fupèrieurs
jufqu’au faîte avec les laves qui font entre les lattes ;
il les taille à mefure avec la hachotte ou le matteau
, il aligne les rangs parallèlement au premier
tiré au cordeau, ayant foin que le joint de deux
laves tombe toujours fur le milieu, à peu près ,
de la lave inférieure, & couvrant chaque rang avec
une petite retraite de deux ou trois pouces. La lave
fe met à plat fur les lattes, elle y tient par fon propre
poids : chaque rang eft arrêté par le rang ultérieur
qui pèle fur lui. La couverture fe termine,
au faîte par deux rangs de laves raifes fur la réunion
des deux côtés du couvert : au moins c eft
ainfi que fe fait le faîtage des granges & des mair
fons des payfans. Les particuliers plus foigneux de
la confervation de leurs bâtimens, y mettent des
faîtières de tuile comme aux couvertures en mile,
& les affujettiffent en les p.fant fur un bon ht de
mortier; d’autres font les faîtières de pierres de,
milles larges de huit ou dix pouces , & groffiere-
ment arrondies; cette façon eft peut-etre la meilleure
dans les lieux où la pierre de taille eft a bon
marché. Lesfaves qui couvrent les pignons doivent
avancer de quelques pouces comme les gouttières.
Cette couverture en lave eft peu couteule, elle
réfifte à toutes les,intempéries de l’air , & Ion en
a vu durer jufqu’à près de quatre-vingts ans, tan»
avoir eu befoin de réparation.
Couverture d’une, feule piece.
En 1760, on a fait à Paris l’effai d’une nouvelle
efpèee de couverture, où il n’ëntre , m charpente,
ni tuile. Cette couverture eft d’ une feule piece. y elt
une compofition de mâche-fer, de tuilot pile, ce
de chaux , qu’on mêle bien enfemble, & dont on
§ut un très-folide mortier. Avec cette efpece de