
prépare en faifant diffoudre dans une partie de
l’eau-forte n°. I I I , autant d’argent qu’elle en pourra
diffoudre , & en y mêlant huit à neuf parties d’eau
diftillée. Quelques artiftes y ajoutent une diffolu-
tion de terre d’alun dans l’efprit de nitre.
VIII. Pour obtenir l'eau-forte des teinturiers , tout
ce que l’on fait eft de prendre dans une diftillation,
un peu plus de falpêtre que l’on n’a coutume,
ayant foin de mettre affez d’eau dans le récipient,
pour qu’elle ne foit pas trop forte. On affure qu’en
ajoutant à de l’eau-rorte, mais pure, un peu de
diffolution de mercure, les couleurs en deviennent
& plus belles, & plus durables. Ce qui eft-affez
vraifemblable, puifque la diffolution de mercure
dans l’acide nitreux, délayée avec une portion convenable
d’eau, teint la foie en beau rouge , couleur
indeftru étible & la plus folide qui exifte.
IX. h'eau régale des teinturiers , doit être de nature
à conferver l’étain diffous dans la chaleur.
Toute fa préparation confifle à faire fondre un quart
de livre de fe l, dans une livre d’eau-forte n°. II.
La meilleure fe fait en mêlant foixante-fix pintes
d’efprit de nitre concentré, avec douze parties
d’efprit de fe l, du plus concentré, & cent foixante-
cinq parties d’eau.
X. L’eau-forte pour les ouvriers en laiton , fe fait
en mêlant une partie d’eau regale des teinturiers,
avec vingt parties de l’eau-forte n°. II.
XI. L’ eau-forte des chapeliers, eft compofée d’une
livre d’eaù-forte ordinaire, dans laquelle on diffout
une once de mercure , & à laquelle on ajoute , fi
l’on v eu t, du vinaigre. Ceux qui prennent deux
onces de mercure pour chaque livre d’eau-forte, ont
tort ; car alors cette eau-forte agit trop fur les peaux,
& forme une efpèce de croûte fur les poils.
Appareil des Diftillateurs d*Eau-forte de Roubais.
Il y a différentes autres manières de traiter les
eaux-fortes. M. de Machy cite en exemple l’appareil
des diftillateurs de Roubais, qui eft un bourg
dans la Flandre Françoife.
Sous une vafte cheminée , dit cet habile chi-
mifte, on établit un fourneau long de huit pieds ,
qu’on divife en quatre ouvertures larges chacune
d’un pied, 'fur un pied & demi de haut : c’eft le
cendrier; le foyer a neuf pouces de haut; le bas
du foyer eft garni d’une grille, & le haut d’un ;
cercle rond , qui fert à placer les potins : c’eft le
nom qu’on donne aux marmites de fer fondu, dont
le diamètre eft de quinze à feize pouces dans le
fond, & qui va en diminuant infenfiblement, juf-
qu’à n’avoir à leur orifice, que trois à quatre pouces.
Ces marmites portent ordinairement deux à
trois pieds de hauteur.
Ces marmites étant pofées fur leur cercle, on
achève la conftruéfion du fourneau, jufqu’aux deux
tiers de leur hauteur, en laiffant entre elles & les
parois du fourneau , un pouce & demi à deux pouces
d’efpace vide.
Ces marmites ou cucurbites de fe r , doivent être
recouvertes chacune par un vafte chapiteau de terre
cuite , conforme à ceux connus en chimie , a l’exception
qu’il a deux becs , & que chaque bec à un
pouce de diamètre.
On met dans chaque potin ou marmite, depuis
quatre jufqu’à dix livres de falpêtre de première
cuite, & depuis huit jufqu’à vingt livres de vitriol
calciné en jaune ; C’eft-à-dire , le double du poids
du falpêtre, & le tout proportionnellement à la
capacité des marmites, qui ne doivent être pleines
que jufqu’à moitié.
Le mieux, fuivant l’éditeur de Neuchâtel, eft de
ne pas excéder dix livres du mélange à diftiller ; &
la marmite doit être large au bas, afin que la couche
foit mince, & que le feu la pénètre fuffifamment.
On lute les chapiteaux avec de la terre détrempée
, & on ajoute des pots ou ballons de terre à
chacun des becs. Alors on établit dans le' foyer,
fous les quatre marmites , le feu avec du charbon
de tourbe; c’eft de la tourbe qui a perdu fa première
humidité.
Après trois heures de premier feu donné avec
le charbon dé tourbe, on met dans le foyer, à l’aide
d’une efpèce de pelle longue & plate, de la tourbe
en fubftance, ayant foin de l’arranger de manière
qu’elle ne foit pas empilée.
On augmente le feu jufqu’à faire rougir le fond
des marmites , & on les entretient en cet état
durant huit heures. On laiffe refroidir ; & lorfqu’on
délute, on trouve dans les' ballons une eau-forte
très-concentrée , que le diftillateur mêle à de l’eau,
pour la mettre au degré de force que lui demande
l’acheteur.
Autres appareils de diflillations d’Eaux-fortes.
L’éditeur des arts recueillis à Neuchâtel, cite
d’autres appareils pour la diftillation des eaux-fortes
, qu’il eft utile de connoître.
On peut diftiller les eaux-fortes, ou dans des
vaiffeaux entiers, ou dans des vaiffeaux compofés
de plufieurs pièces ; les’ uns & les autres peuvent
être de verre , de terre, de grès ou de fe r , & l’on
peut y appliquer le feu médiatement ou immédiatement.
Ordinairement le vaiffeau qui fait l’office de
cornue, ou qui.contient les matières propres à être
diftillées, eft d’une feule pièce ; mais, foit parce
qu’il eft plus facile de manier de grands vaiffeaux en
plufieurs pièces qu’en une feule, foit pour pouvoir
en tirer avec plus de facilité le réfidu ^ on a imaginé
d’en faire de deux pièces, qui fe joignent exaélement :
mais comme alors on eft obligé de garnir de lut
une grande circonférence, les avantages qu’on en
attendoit fe trouvent bien contre-balancés par la
perte de l’acide , qui fe fait à travers le lut.
On devroit donc chercher les moyens d’avoir
les avantages des vafes de plufieurs pièces, fans
en éprouver les inconvéniens.
Ce que j’ai trouvé de mieux à cet égard, dit
le chimifte allemand, c’eft de luter l’appareil avec
r du
au svpfe délayé, dans auffi peu de vin qu’il eft pof-
A b lfo n comprime fortement ce lut en 1 etendant,
on lé faupoudre avec un peu de vitriol calciné, on
le preffe encore par-tout également. v
Si les jointures ne fe trouvent pas trop près du
feu l’on fait fondre du foufre , & on y incorpore
du gypfe pulvérifé, en forte que le mélange refte
fluide à une chaleur confidérabie » on 1 applique
alors tout chaud.
On peut diftiller l’eau-forte dans le v erre, en
employant l’huile de vitriol, en appliquant le feu
immédiatement fous le verre , dans un fourneau.
Mais ordinairement on fe fert dintermede pour
diftiller l’eau-forte, foit avec le vitriol, foit avec de
l’huile de vitriol dans le verre. Les uns pofent la
cornue dans le fable, d’autres dans de la chaux
éteinte, ou du gypfe calciné ; d’autres mettent la
cornue’tout uniment dans une calotte. de terre, à
l’exemple de Viganus ; enfin d’autres la pofent dans
un pot de fer incliné, en ayant foin de faire repofer
le fond de la cornue fur un peu de fable : c’eft
ce qu’on appelle difiïller au pot.
La plupart cependant, quand ils diftillent dans,le
verre , garniffent la cornue d’un lut. |||
Pour enduire une cornue de verre, & s’en fervir
avec fécurité, .on prend de l’argile que l’on mêle
avec du fable fin , & du poil de vache. On l’applique
à différentes reprifes, en remettant une fécondé
couche auffitôt que la première eft sèche ; ou en
une feule fois, en appliquant fur le verre une bouillie
ou une pâte très-épaiffe qu’on ferre bien. Mais,
pour que l’argile puiffe s’attacher au verre , il faut la
mouiller avant que de l’appliquer. Les cornues étant
enduites & sèches, on peut, fi l’on veut, paffer une
couche d’huile fur l’enduit.
Le lut fuivant eft excellent, &refteroit attaché
quand même.le verre fe fondroit. Prenez quatre livres
de terre graffe , paffée par un tamis , une livre
de verre pilé, & autant de litharge, & deux .^poignées
de poil de vache ; unifiez le tout avec de 1 eau,
enduifez-en les cornues à l’épaiffeur d’un demi-
pouce. A mefure que le lut fe sèche, ferrez ou
comprimez-le, pour qu’il ne fe faffe point de fentes.
Le lat anglois, dont voici la compofition, eft
auffi très-bon. Prenez du mâche-fer pulvérifé, du
fable fin , de vieilles cordes, hachées , de chacun
quatre livres-"; de la terre graffe, huit livres ; du
verre pilé & de la potaffe, de chacun une livre ;
faites du tout Une pâte avec de l’eau, & enduifez les
cornues comme à l’ordinaire.
Lorfque- les cornues font enduites & sèches, il
fauts’affurer fi elles ne font pas endommagées. Pour
cet effet, on les pofe fur une main , & on frappe
de l’autre les côtés ; fi le foii en eft clair, c’eft une
preuve qu’elles font entières.
Il faut alors les charger } la manière eft toute fim-
ple : on prend le falpêtre & le vitriol, ou fi au lieu
de vitriol, on prend de l’huile de vitriol, il faut
avoir l’attention de,ne mettre au plus qu’une partie
d’eau fur quatre d’huile de vitriol, parce que, fi
Arts & Métiers. Tor%e II, Partie U
la cornue vient à fe fendre, le lut eft alors en état
de retenir ce qu’elle renferme.
Les cornues chargées, on les met dans un fourneau
de galère ; ou on les pofe fur des barres de
fe r , dans des fourneaux à vent ordinaires, qui font
fort commodes, à caufe de la facilité qu’on a de diriger
le feu à volonté. Elles ne doivent pas être trop
grandes; il faut qu’elles ne contiennent que quatre
à fix livres de falpêtre. Les plus grandes ne doivent
point paffer huit livres , pour que la chaleur
puiffe les pénétrer fuffifamment.
Après les vafes de verre , les meilleurs font ceux
de grès; mais il faut avoir la précaution de n’y
appliquer le feu que par degrés, afin de les chauffer
peu à peu.
On peut fe trouver dans le cas de ne point avoir
des vales de grès, alors on peut recourir à d’autres
matières. On a fait de très-bonnes cornues, avec un
mélange de trois parties d’argile cuite , & de deux
de bonne argile réfraétaire. Après la première cuite,
on fait couvrir l’extérieur de ces cornues d’un
vernis , compofé de verre de baromètre & d’un
peu de nitre ; on les fait cuire trois fois, & on les
imbibe à chaque cuite d’une diffolution de borax.
L’emploi des vafes de fer, eft auffi en ufage pouf
la diftillation des eaux-fortes. Ceux dont on fe fert
communément, font des marmites qu’on furmonte
de grands chapiteaux de verre ou de terre ; on peut
auffi les couvrir d’un cône tronqué de verre, des
terre ou de fe r , auquel on‘adapte un chapiteau de
verre.
Mais ces vaiffeaux de fer ont deux inconvéniens ;
le premier , c’eft qu’ils ne peuvent fervir que pour
diftiller l’eau-forte avec le vitriol, & même alors
l’acide les détruit peu à peu, & l’on eft obligé de les
renouveller. Le feeret d’émailler le fe r , met à l’abri
de cet inconvénient. On fait aéluellement à Konigs?
brunn , dans‘le duché de Wirtemberg , des pots
de fer émaillés exprès pour les diftillations de l’eau«
forte, & leur emploi dans les fabriques eft fort avantageux/
Le fécond inconvénient, c’eft la difficulté de fortir
le réfidu. On fait qu’après la diftillation, cela donne
beaucoup de peine , & qu’il faut fe fervir du marteau
& du cifeau, ce qui expofe au rifque d’endom*
. mager les vafes. Ceux qui ne pourront pas avoir de
tels vaiffeaux émaillés, peuvent garnir de gypfe
l’intérieur de leurs marmites. Si cette pratique ne
met pas à l’abri de l’infenfible corrofion de l’acide
nitreux, elle donne du moins la facilité de retirer le
réfidu de la diftillation,
Galère à bain de fable.
M. de Machy fait encore mention d’une efpèce
de galère à bain de fable, qui peut fervir à ceux
qui voudraient diftiller des eaux-fortes dans des
! vaiffeaux de verre.
A l’endroit où la galère fe trouve élargie pour
former un fupport, fur lequel pofent les traverfes
dç fer fondu qui foutiennent les cuines, on établit*
O o