
flamme s'élève dans chaque cheminée T pôur aller
au deffus du creufét du milieu ; elle s’échappe en-
fuite par une ou plufieurs des ouvertures qui font
percées dans le couvercle du fourneau. Lorfque le
feu y a été allumé pendant plufieurs heures, la
flamme en fort avec violence , 8c s’élève fort haut.
1 J’ai regretté bien des fois de ce que fon activité de-
venoit fitot inutile ; fi elle eût continué plus longtemps
à agir contre les creufets, elle eût été capable
d’y produire beaucoup d’effet. J’ai donc cherché à
prolonger la durée de fon aâion , & pour cela j’ai
fait faire quelques changemens au fourneau précédent:
j’ai fait boucher toutes les ouvertures du couvercle
, & j’ai fupprimé une des grilles. En fa place
j’ai fait mettre un plancher folide ; j’ai fait percer le
mur du fourneau de part en part de quelques trous
peu élevés au deffus de ce plancher, 8c qui fe trou-
voient plus bas que le fond des creufets : ces trous
étoient deftinés à tenir lieu de ceux du couvercle.
L’effet qu’a dû produire cette nouvelle difpofîtion
s’imagine aifément. Le feu ayant été allumé fur la
feule grille qui a été laiffêe, c’eft-à-dire, entre un
creufet du bout, que nous nommerons le premier,
8c le creufét du milieu , la flamme a monté dans la
cheminée qui les féparoit, s’eft élevée jufques au
haut de ces creufets ; & ne trouvant plus d’iffue
dans le couvercle, elle s’eft détournée fur le deffus
du creufet du milieu; 8c de là eft defcendue par la
fécondé cheminée , pour aller chercher au deffous
du dernier creufet les feules ouvertures qu’on lui
avoit laiffées pour fortir. On fuppoferoit bien,
quand nous n’en avertirions pas,qu’on avoit empêché
toute communication par deffousentre le fond de la
première cheminée 8c celui de la fé c o n d é & que
cela eft aifé à faire par le moyen d’urfe petite cloifon.
Dans Tunique foyer qui étoit refté au fourneau,
je n’ai fait jeter qu’autant de bois qu’on y en jetoit
lorfqu’il avoit deux foyers. On n’a brûlé dans le
fourneau que la moitié de ce qui s’y brûloir ci-devant.
La flamme ne m’en a point paru cependant
moins conftdérable , & fon effet ne m’a pas paru
moindre; elle fortoit par le bas du fourneau aufîi
abondamment qu’elle étoit fortie auparavant par
fon ouverture fùpérieure , lorfqu’elle étoit produite
par le bois brûlé dans deux foyers. Il m’a donc
lemblé que par cette difpofîtion l’on épargneroit
conftdérablement de bois ; & l’épargne ira, d’autant
plus loin que le fourneau fera compofé d’un plus
grand nombre de creufets , & de creufets qui demanderont
une plus longue durée de feu. Car c’eft
ce n’eft que fucceffivement qu’elle s’élève, qifelie
vient à monter au haut des creufets, 8c ce n’eft que
fuccefïivement qu’elle defcend affez bas pour fortir
par les ouvertures qu’on lui a laiffées : pendant longtemps
fur-tout dans les opérations qui demanderont une
longue durée de feu , qu’on trouvera les avantages
de cette eonftru&ion ; & cela , parce que la petite
quantité de bois mife dans unfeul foyer n’agit aufîi
avantageufement qu’une plus grande quantité dif-
tribuée en plufieurs foyers, que lorfque la chaleur
du fourneau eft parvenue à un certain point. Quand
on ne vient que d’y allumer le feu dans un feul foyer,
la flamme ne fait pas dans un inftant, à beaucoup
près, tout le chemin que nous lui ayons fait faire ; j
il n’y a que la fumée qui s’en échappe. La
flamme avance à mefure que la chaleur gagne , 8c
on ne la trouve guere par-delà les derniers endroits
qui ont pris une couleur rouge. Ainfi le feu allumé
dans un feul foyer eft plus long-temps à échauffer le
fourneau, que le feu allumé dans deux ou plufieurs
foyers. Mais le fourneau eft-il parvenu à un certain
degré de chaleur, à être rouge , ou plus que rouge ?
il m’a paru v rai, quelque étrange que cela femble ;
que la même quantité de'bois qui eft néceffaire pour
entretenir dans ce degré de chaleur deux creufets ,
fuffit à peu près pour entretenir dans le même degré
de chaleur trois, quatre , & peut-etre tel nombre
de creufets qu’on voudra. Je n’ai pourtant pas
pouffé l’expérience fi loin ; je ne 1 ai faite que^ dans
des fourneaux où la flamme d’un foyer a eu à parcourir
trois ou quatre cheminées ; & je ne laiffe pas
j de me croire en droit d’en tirer une confequence
très-étendue , parce que je n’ai point vu ^que 1 activité
& la quantité de la flamme qui fortoit du fourneau
, après avoir parcouru un chemin quatre fois
plus long, aient fouffert quelque diminution Tenfi-
ble : quand on lui donnoit iffue par la première ou
par la féconde cheminée, elle ne fembloàt pas en
fortir plus abondamment que par la quatrième.
Quelque paradoxe qu’il y ait à avancer qu on entretiendra
au même degré de chaleur dix à douze
creufets, & peut-être davantage , avec à peu près
! la même quantité de bois neceffaire pour en entretenir
un à ce même degré, l’experience y femble
conduire, 8c le raifonnement ne fe trouvera pas
même contraire à l’expérience. Car, fuppofons que
les chemins qu’a à parcourir la flamme fucceflive*
ment entre tant de différens creufets qu’on voudra,
font également chauds. Suppofons de plus, que les
bords de ces chemins, ou , ce qui eft la même
chofe, les parois intérieures du fourneau 8c les fur-
faces extérieures des creufets ont pris un degré de
chaleur égal à celui de la flamme du bois, qui brûle
librement, ce qui n’eft pas un degré de chaleur ex-
ceflif. Il n’y a peut-être nulle raifon alors-, pour que
la flamme, après avoir parcouru dix à douze pieds,
foiten moindre quantité 8c ait moins d’aftivité que
lorfqu’elle n’avoit par couru que trois à quatre pieds.
La flamme qui s’eft trop élevée au deffus d’un foyer,
fè refroidit, pour ainfi dire, s’éteint par 1 attouchement
des corps voifins ou de l’air. Nous n avons pas
d’idées trop claires de la naturedu feu; mais les plus
claires que nous en puiflions prendre, c’eft que fon
aâivité dépend du mouvement, d’un certain mouvement
, fi Ton v eut, 8c fl l’on veut encore, d’un
mouvement qui ne peut être pris que par certaines
matières: mais une matière plus enflammée quune
autre, toutes chofes d’ailleurs égales , a une plus
grande quantité de ce mouvement, d’où dépend
l’aétivité du feu; 8c cette matière devient de moii^
*n moins enflammée, de moins en moins feu, à me-
fure qu’elle rencontre des corps qui lui ôtent de ce
mouvement. Ainfi l’air , les parois noires des cheminées
arrêtent le mouvement de la flamme ; mais
dès que les parois feront rouges, dès que les corps
qui toucheront la flamme auront une activité égale
à la Tienne, qu’ils feront prefqu’aufli feu qu’elle, leur
attouchement ne s’affoiblira pas.
Nous concevons, à la vérité, que la matière qui
fait la flamme fe eonfume continuellement, 8c par
conséquent que la flamme ne fauroit fubfifter longtemps.
Mais cette idée n’eft pas affez démêlée ; elle
tient du préjugé qui nous a fait trop étendre ce qui
arrive continuellement aux feux de nos foyers ordinaires.
Une autre expérience que nous avons vue
bien des fois, nous apprend qu’une matière ne fe
eonfume pas de cela feul quelle a pris un certain degré
de chaleur, de cela feul qu’elle eft allumée ; la
poudre de charbon, quelque violemment qu’elle
foit échauffée dans des creufets bien clos, ne fe détruit
point ; elle ne fe confomme que quand elle eft
expofée à l’air. Tant que la flamme circule entre nos
creufets fans trouver d’iffue , elle eft dans un état
femblable à celui de la poudre de charbon renfermée
dans des creufets ; de même elle ne doit pas diminuer
en quantité, ni perdre de fon aâivité. En un
mot, le feu ne paroît éteint, détruit, ou que quand
on arrête le mouvement de la matière enflammée,
ou que quand cette matière eft difperfée par évaporation
ou autrement : ni l’un ni l’autre ne peuvent
arriver à la flamme qui eft entre nos creufets. Il
eft au moins très-fûr que, dans unfourneau conftruit
fur le principe que nous venons de donner, on peut
entretenir dans un grand degré de chaleur une longue
fuite de creufets avec peu de bois. Tout fe réduit
à difpofer des cloifons de manière que la flamme
foit obligée de paffer alternativement au deffus d’un
creufet, 8c au deffous de celui qui le fuit. Mais cette
voie excellente pour les entretenir dans ce degré de
chaleur, ne pourroit le leur donner qu’à la longue ;
je voudrois donc qu’on commençât par les faire
rougir par le moyen du charbon, ce qui feroit toujours
aifé en.débouchant Tes ouvertures des couvercles
8c quelques-unes pratiquées au bas du fourneau.
Ces creufets devenus rouges, on boucheroit' ces ouvertures
, on allumeroit du bois dans un feul foyer,
8c bientôt la flamme circuleroit d’un bout du fourneau
à l’autre : quand elle a pris fa route , elle ne
s’en détourne pas dans l’inftant. Si Ton débouche
quelqu’ouverture qui pénètre entre les creufets , on
ne fauroit voir fans plaifir avec quelle viteffe elle
defcend. Des opérations qui feroient très-chères,
parce qu’elles demandent une longue durée de feu ,
pourroient par cet expédient fe faire à bon marché,
8c je ne doute point qu’on n’emploie avantageufe-
ment par la fuite cette circulation de la flamme pour
bien d’autres opérations.
De quelque manière que foit conftruit le fourneau
, dès qu’on le chauffera avec le bois, Ton
pourra hardiment former les creufets avec des plaques
de fonte. Je dis hardiment, parce que je fuppofe
qu’on aura l’attention de voir fi la chaleur ne
devient pas affez conftdérable pour les fondre, 8c
qu’il fera facile de l’arrêter avant qu’elle en foit là.
Plus le fourneau fera large, 8c plus on rendra les
plaques épaiffes : cette épaiffeur ne doit pourtant
pas paffer un pouce. A mefure qu’elles ferviront,
elles deviendront de plus minces en plus minces ;
à la fin de chaque fournée , la face fur laquelle le
feu aura a g i, fera recouverte d’une couche affez
épaiffe d’une poudre rouge ; c’eft un fafran de mars
qu’on fera bien deramafîer; il a les propriétés du
fafran de mars ordinaire, 8c-eft préparé fans addition
de foufres : on s’en fervira aux ufages où la médecine
l’emploie, êc à quelques autres dont nous
avons déjà parlé. Les plaques deviennent minces
par ce qui s’en détache pour fournir à cette poudre,
8c encore par des écailles qui s’y forment : mais ,
malgré cette poudre 8c ces écailles , elles durent
long-temps. Plus elles font minces, plus elles font
expofées à fe voiler : afin qu’elles ne viennent pas
au point d’en être trop contrefaites, ce qui changea
roit la figure 8c les proportions des creufets 8c des
foyers, on aura foin de les retourner, après chaque
fournée ; on mettra en dehors du creufet la face
qui étoit en dedans : le feu les redreffera, 8c même
il les fera, enfuite devenir convexes du côté où elles
étoient concaves. Si Ton veut les maintenir plus
fûrement dans leur figure à peu_près plane, fans être
dans la néceflité de les retourner fi fouvent, les précautions
fuivantes y contribueront.
On fuppofe quelles font de fonte grife ou noire.;
qui fe laiffe percer comme fe laiffe percer celle dont
on fait les poêles ; 8c en cas qu’elles ne foient pas de
fonte de cette qualité, après qu’elles auront fervi à
deux fournées , on pourra toujours exécuter ce que
nous allons propqfer. Ayant divifé leur hauteur
dans le nombre de parties qu’on voudra, trois ou
quatre fuffiront ; on tirera par ces divifions des lignes
parallèles, 8c dans chaque ligne on percera deux
ou trois trous de quelques lignes de diamètre ; dans
chacun de ces trous on fera entrer un boulon de fer;
ce boulon aura une tête percée quarrément, 8c propre
à; recevoir une barre de quarrillon, ou d’autre
fer plus mince ; la tête de chaque boulon fera fur la
face de la plaque, qui doit être en dedans du creufet
, 8c leur bout paffera tout au travers , jufques à
l’autre face, fur laquelle il fera bien rivé : dans toutes
les têtes des boulons, placées fur une même ligne
horizontale , on fera entrer une barre de quarrillon
de longueur prefque égale à la largeur de la
plaque. Il eft déjà vifible, que ces bart;es difpofées
-d’efpace en efpace , maintiendront la plaque. Mais
pour afîùrer encore davantage l’effet des barres ,
afin que quand elles feront arrangées, elles ne cèdent
point à l’effort de la plaque , on liera en quelque
forte enfemble les barres des deux plaques. Le
moyen en eft fimple. Je fuppofe que les barres tra-
verfantes font fur chaque plaque à des hauteurs cor-
refpondantes : on aura des morceaux de fenton de
P p p p ij