
les plus fines & les plus mûres, on les coupe tranf- I
verfalement en deux parties ; on pofe un tamis de
crin fur une terrine de grès ; on prend ces parties d’oranges
l’une après l’autre ; on les tient d’abord entre
le pouce & l’index d’une main, & de l’autre on exprime;
puis on les place entre les deux paumes des
mains, & on exprime en fens contraire, jufqu’à ce
qu’il ne forte plus de fuc.
On rafl'emble les pépins dans le coin du tamis ;
car fi on exprimoit lur ces pépins, l’acide du fuc
d’orange en détacheroit des parties qui communi-
queroient à la liqueur une amertume défagréable ;
oc quand il y a une certaine quantité de ces pépins,
ainfi que des filamens qui fe font détachés en exprimant
ces parties d’oranges, on la rejette comme
inutile.
Lorfque cette opération eft finie, on verfe la liqueur
dans de grofles bouteilles de verre qu’on tient bien
bouchées ; on laiffe repofer jufqu’à ce que le dépôt fe
foit précipité au fond du vaifleau ; on foutire avec
un fiphon; on paflele marc au travers delà chaufle
de drap ; on mefure la liqueur, à laquelle on ajoute
une neuvième partie de bonne eau de fleurs d’orange
, & on y fait fondre douze onces de fucre par
pinte.
Quand le fucre eft bien fondu, on verfe le liquide
dans les mêmes vaiflèaux, qu’on tient enfuite bien
bouchés, qu’on a foin d’agiter pendant quinze jours ;
puis on mefure encore, & on ajoute une chopine
cTefprit-de-vih pour chaque pinte de liquide.
On agite fortement le mélange ; ©n le met en ré-
ferve dans un tonneau, quand on a une fuffiiante
quantité de liqueur ; mais au moins dans un vaif-
feau qui foit affez grai^d pour contenir la totalité ;
on laide repofer.
Le vin d’orange eft peut-être la liqueur la plus
agréable & la plus falubre de tous les vins de liqueurs
connus ; mais il a le même inconvénient
que les vins d’Efpagne de la meilleure qualité, qui
ne font vraiment potables, que quand ils ont plu-
fieurs années de vétufté.
Vin de Raifin Mufeat.
On clioifit le raifin mufeat le plus mûr ; on le
monde de fa grappe ; on ôte tous lès grains yerds
ou pourris, puis on i’écrafe, on ajoute deux onces
de fleurs de fureau pour cinquante livres de raifin.
On Verfe le tout dans une grande poêle qu’on
place fur un fourneau ; & quand on a fait jeter un
bouillon couvert à ce liquide, on le verfe dans un
vaifleau de bois.
Vingt-quatre heures après cette opération, on
place des clayons fur des terrines de grès; on y
jette le marc qu’on enlève d’abord avec une écumoire
; on laine repofer la liqueur pendant quatre
ou cinq heures ; on la foutire par inclinaifon ; on
verfe le dépôt fur le marc, & quand il eft bien
égoutté, on le jette dans un gros linge ; on exprime
fous la prefle ; ou mefure le liquide, puis on y fait
fondre dix onces de fucre en pains pour chaque
pinte de liqueur.
On ajoute enfuite une chopine d’efprit-de-vin
pour chacune defdites pintes ; on met la liqueur en
réferve pour-n’en faire ufage qu’un an après fa
compofition.
Ratafiat ou Vin de Raijîn noir, appelle Franc-Pineau.
On clioifit le raifin le plus mûr poflible; on
l’égraine ; on rejette tous les grains gâtés ou verds ;
on écrafe dans un mortier de marbre, en roulant
avec un pilon de buis.
On fait jeter un bouillon couvert à cette matière
liquide ; on laiffe refroidir pendant vingt-
quatre heures ; on place des clayons fur des terrines
de grès; on y range le marc qu’on enlève
d’abord avec une écumoire, puis on laifle repofer
la liqueur pendant quatre ou cinq heures.
On foutire par inclinaifon, on verfe fur le marc
le dépôt qui s’eft précipité au fond des terrines;
& quand il eft bien égoutté, on le jette dans un
gros linge ; on exprime fous la prefle ; on mefure
le liquide ; on fait fondre dix onces de fucre dans
chaque pinte, à laquelle on ajoute une chopine
d’efprit-de-vin.
On agite le mélange qu’on met en réferve pour
n’en faire ufage que l’année fui vante.
Vin de Pêches.
On fait choix de pêches Magdeleine qui foient
mûres, dont la peau loit d’une belle couleur rouge,
jaunâtre & vive : on rejette, toutes celles qui ont
une partie de la peau verdâtre, morne & obfcure.
On les fépare en deux parties ; on jette les noyaux
fortans de la pêche , dans un vaifleau qu’on a rempli
à moitié d’eau-de-vie re&ifièe ; on place chacune
de ces moitiés de fruits les unes à côté des
autres dans une terrine de grès ; on les écrafe en
appuyant feulement le pouce fur la peau de chacune
de ces moitiés; & quand on en a fait trois
lits, on arrofe avec de l’eau acidulée d’une cuillerée
d’efprit de citron, qu’on jette dans une pinte de ce
liquide pour vingt-cinq pêches.
On continue d’arranger & d’arrofer de trois en
trois lits : lorfque la terrine eft remplie , on laifle
infufer pendant quinze ou vingt heures, puis on
écrafe bien exactement toutes ces parties de fruits.
On fait encore infufer vingt - quatre ou trente
heures ; on enveloppe enfuite cette matière liquide
dans un gros linge , qu’on exprime d’abord doucement
fous la prefle, jufqu’à ce qu’il n’en découle
plus rien.
Quand le tout a été bien exprimé, on jette le
marc, on mefure la liqueur, on y fait fondre dix
onces de fucre par pinte ; & lorfque le fucre eft bien
fondit, on verfe le tout dans un vaifleau qu’on ne
remplit qu’aux deux tiers de fa capacité, & qu’on
tient bouché.
Quand il commence à fe former dans la liqueur
un léger mouvement fermentatif, ce qui arrive ordinairement
le huit, neuf ou dixième jou r, on foutire
tire par inclinaifon, on mefure la teinture qu’on
a tirée des noyaux de pêches par le moyen de
l’eau-de-vie rectifiée.
On verfe une partie de cette teinture dans le
vaifleau qui contient le fuc des pêches ; on agite
fortement; on mefure le furplus de la quantité
d’eau-de-vie qui doit encore entrer dans la liqueur,
à. raifon d’une chopine par pinte , fi la première
quantité n’a pas été fuffifante ; on verfe cette eau-
de-vie fur les mêmes noyaux.
On laifle infufer pendant un mois, ou bien on
jette le tout dans une cucurbite; on la place dans
l’on bain ; on la couvre de fon chapiteau aveugle ;
on lute la jointure, puis on échauffe & on entretient
le liquide pendant quarante-huit heures au 70e
degré.
Lorfqu’il eft refroidi, on démonte la calotte, on
foutire par inclinaifon ; on verfe cette fécondé teinture
dans un vaifleau , on jette une quantité fuffifante
d’eau de rivière fur les noyaux de pêches qui
font reftés dans la cucurbite.
On la couvre d’un chapiteau armé de fon réfrigèrent
; on ajufte le ferpentin avec le récipient,
puis on fait diftiller, & on laifle couler la liqueur
jufqu’au degré de l’eau bouillante.
On démonte l’appareil ; on jette le réfidu comme
inutile ; on verfe le produit, ainfi que la teinture
qui étoit en réferve, dans le vaifleau qui contient
la liqueur; on agite fortement, & on laiffe repofer.
Vin de Cerifes.
Lorfqu’on a fait choix de cerifes qui font dans
leur plus grande maturité, on les monde de leurs
queues quon jette, & des noyaux qu’on met en
réferve, pour en faire l’ufage que nous dirons ci-
après. On fait également choix de merifes bien
noires, on les monde feulement de leurs queues.
Ces fruits étant ainfi préparés, on pèle cinq
parties de cerifes & une partie de merifes, on les
jette dans un mortier de marbre, on les écrafe en
roulant le pilon de buis, on les jette dans une poêle
à confiture.
Lorfque le vaifleau eft rempli, on le place fur
le fourneau, puis on échauffe ; quand le liquide a
fait un bouillon couvert, on le verfe dansunvaif-
feau de bois qu’on a expofé à l’air libre.
Après cette opération, on laifle refroidir ce liquide
pendant vingt-quatre heures ; on place en-
fuite des clayons lur des terrines de grès ; on y
jette d’abord le marc qu’on enlève avec une écumoire.
On laiffe repofer quatre ou cinq heures la première
liqueur qui a coulé , puis on foutire par inclinaifon;
on verfe le dépôt fur le marc, & quand
il eft bien égoutté, on le verfe dans de gros linges
qu 011 met l’un après l’autre fous la prefle, & on
exprime fortement, puis on mefure la liqueur.
On fait fondre dix onces de fucre en pains, par
pinte de liquide ; quand il eft bien fondu, on ajoute
une chopine d’efprit-dê-vin pour chaque pinte ; on
Arts & Métiers. ' Tome 11. Partie I.
agite le mélange qu’on met en réferve dans un vaif-
feau, pour n’en faire ufage que fix mois après.
Par ce moyen, on a un vin de cerifes qui doit
être d’autant plus falubre, que les principes conf-
titutifs de ces fruits font confervés dans toute leur
intégrité.
A l’égard des noyaux qui ont été réfervés , on
les jette dans une terrine avec une petite quantité
d’eau, on les frotte les uns contre les autres avec
la paume des mains, jufqu’à ce qu’on en ait détaché
toutes les pellicules qui font fort adhérentes
au bois de ces noyaux.
On les fait enfuite fécher, & on en forme le
compofé de l’eau ou huile de noyaux de cerifes.
La plupart des particuliers & des artiftes écrafent
ces noyaux fraîchement mondés, & non-feulement
ils les font entrer dans le vin ou ratafiat de cerifes,
mais ils y ajoutent encore l’oeillet, la canelle, la
framboife, le macis & le gérofle.
Quoique l’affociatiort de ces différentes fubftances
ne foit envifagée, au moins par le plus grand nombre
, que comme une affaire de goût, il n’eft pas
moins évidemment démontré que ces fubftances
aromatiques abforbent l’odeur & la faveur du fuc
des cerifes. Il femble que dans le cas où l’on vom-
droit communiquer des vertus plus ftomachiques
à cettp efpèce de vin de liqueur, il conviendroit
beaucoup mieux de n’y faire entrer que la vanille ,
parce qu’une quantité proportionnée de cette fubf-
tance, qu’on feroit préalablement infufer dans l’ef-
prit-de-vin qui doit former partie de ce compofé,
produiroit de meilleurs effets ; d’ailleurs, l’odeur
& la faveur de la vanille ont beaucoup plus d’analogie
avec le fuc exprimé des cerifes, que toutes
les autres fubftances aromatiques.
Vin de Framboife.
Ce vin eft compofé d’une partie de grofeilles &
d’une partie de mûres, fur cinq de framboifes ;
mais comme les mûres font plus tardives , on comr
pofe ce vin en deux temps différens, comme il fuit.
Lorfqu’on a fait choix de trente livres de framboifes
d’une belle couleur rouge, & de fix livres de
grofeilles fraîchement cueillies, on les monde de
leurs queues & de leurs grappes qui font inutiles,.
On jette dans un mortier une partie de la gro-
feille , qu’on écrafe d’abord , à laquelle on ajoute
une partie des framboifes.
On écrafe encore en roulant doucement le pilon*
mais affez long-temps pour que ces deux fruits foient
mêlés intimement, & on continue jufqu’à ce que
tout le fruit foit employé.
On jette le liquide dans un vaifleau de grès , on
laifle repofer pendant vingt-quatre heures , puis on
le verfe dans de gros linges, qu’on exprime d’abord
très-doucement, & l’un après l’autre, fous
la prefle. .
Après quoi l’on mefure la liqueur ; on y fait
fondre huit onces de fucre en pain par pinte ; on
mefure enfuite autant de chopines d’efprit-de-vin,