
bout, il fuit que ce dre fleur parcourt douze ceiits
toiles ou une demi-lieue par heure.
Lorfqu’il y a une botte du poids d’environ vingt-
cinq livres de dreffé, l’ouvrier en prend le bout du
côté de l’engin fur lequel il frappe, pour que les
bouts, grands & petits', ne furpaflfent pas les uns
les autres , & îl lie tout avec un bout de fil de laiton
; il attache enfuite à fa cuifle gauche, proche
le genou, la chauffe {fig. 21, n. 2 , pl. I I ) . Il s’aflied
à terre, ayant la jambe droite ployée de façon que.
le bout du pied foit fous fa cuifle gauche, ce qui
donne une efpèce de reflort à fon genou , & qui eft
néceflaire pour couper ce fil avec la force {fig- 12,
pl. I I ) , dont il met le bout du bras le plus long ( &
qui eft plat, ainfi qu’il fe voit au profil joignant )
tous fon jarret droit ; enfuite il coupe ce fil de la longueur
de trois ou quatre épingles, que l’on nomme
tronçons, en mettant la cueillée ou poignée de fil,
lié e , ainfi qu’il eft dit ei-devant, fur la chauffe
{fig- 21, pl. I I ) , & la ferrant avec la croffe de fer n
entre les crampons r , s , de telle forte qu’elle excède
d’environ un pouce la longueur de trois ou quatre
épingles auxquelles' le fil eft deftiné. L’on met en-
fuite une boîte de fer {fig. 10 ,pl, I I , & n. ip ,fig. 21
même planche) au bout de la cueillée dont la longueur
eft ici de quatre pouces neuf lignes pour la longueur
de trois épingles du n°. 20, ou de quatre du
îi°. 12 , laquelle le dreffeur tient bien ferme de la
fnain gauche ; & de la droite il coupe la cueillée à
environ quatre lignes de cette boîtée, pour fuppléer
à ce dont les épingles font raccourcies en leur fai-
fant la pointe , & ce avec la force fufdite, en appuyant
fur le bras le plus court. 11 met cette partie
coupée dans une febille , & après avoir ôté la
croflette n,fig, 21 n. 2 ,il recule le lien delà cueillée,
& l’ayance fur la chauffe en recommençant l’opéra-
fion précédente jufqu’à fon bout. Et pour cette
drefîee de cinq toifes de longueur, dans la boîte ci-
devant dite de quatre pouces neuf lignes, l’ouvrier
a employé vingt-deux minutes de temps, & ainfi
des autres, proportionnément à la raifon inverfe de
Jeur longueur.
Pour dreffer le fil des différentes groffeurs & couper
les tronçons, le dreffeur a un fou de la douzaine
jd’épingles , conipofée de douze milliers, & il fournit
le treizième millier par deflùs le marché, pour
}es défeâueufes.
Un ouvrier peut en faire de la forte huit-ou dix
douzaines par jour, & gagner par conféqpçnt 8 ou
*o fous,
L’engin, le tourniquet, & la table qui les porte,
peuvent valoir 6 liv.
La chauffe coûte 4 liv.
La force, que l’on nomme auffi cifeauxou cifailles,
goûtent 3 liv. 10 f.
Et chaque boîte à couper les tronçons coûte 10 f.
Le dreffeur remet enfuite ces tronçons à l’empoin-
£eur, qui fait la pointe à chaque bput avec la meule
repréfentée par la fig. $ de la vignette., & la fig. 16
fat 4 ç la plt I I , compose d’unç grande roue de cinq
pieds & demi de diamètre, dont les jantes font re-
creufées d’iln pouce en auget pour tenir la corde
laquelle roue a fa manivelle de treize pouces de longueur,
& eft portée fur deux poteaux de charpente
ainfi qu’il eft figuré par le deflin. A feize de diftance
de milieu en milieu, eft une efpace de billot contenant
dix-huit pouces en carré par en bas, quinze
pouces par le haut, lequel eft creufé, ainfi qu’il fe
voit. Dans la fig. 16 eft repréfentée la meule deflinée
plus en grand au deffous, laquelle eft de fer trempé,
& a fix pouces de diamètre fur un pouce huit lignes
d’épaifleur, avec un oeil de deux pouces neuf lignes
dans le milieu. La furface de cette meule eft taillée
un peu obliquement. Dans l’oeil l’on place une efpèce
de couronne de bois ou tampon carré en dedans
, pour y placer le fufeau d’acier de huit pouces
dix lignes de long & fept lignes de gros en carré,
portant à deux pouces deux lignes de l’un des bouts,
la petite roue ou noix , de huit lignes de diamètre
dans le milieu, fur quatorze lignes de large.
Il eft effentiel que la meule foit bien en équilibre
autour du fufeau; & pour l’y placer, l’on obferve
de faire l’oeil du tampon de bois d’environ cinq
lignes de diamètre de plus qiie la groffeur du fufeau
qui doit être placé, & d’en garnir l’intervalle avec
des cartes dont on remet ou oh ajoute une fuffifante
quantité, jufqu’à ce qu’ayant fait tourner le tout
obliquement, eri appuyant le bout du fufeau contre
; un endroit fixe , & tenant l’autre bout avec la main,
on s’apperçoive que la meule continue de tourne*
fur fon axe du côté où elle a été mife eu mouvement
, fans rétrograder de l’autre côté. Les ouvriers
emploient quelquefois beaucoup de temps à cette
opération, & l’on connoîtra ci-après qu’il eft très-
néceflaire d’obferver cet équilibre.
On pofe enfuite l’axe & la meule dans la fituation
repréfentée par la fig. / du bas de la pl. I I , contre»
deux morceaux de bois que l’on avance ou recule
autant qu’il eft néceflaire, après quoi on les arrête
fixement au moyen des coins de bois.
La corde qui fait tourner cette meule, eft de peau
de mouton, & elle»paflè fur la grande roue & fur la
petite fixée au fufeau ou eflieu, auquel la meule
étant arrêtée fixement, elle doit tourner avec le
fufeau.
Au devant de l’ouverture du billot {fig. f & 7 vig.
pl. I I ) & de la meule, eft un petit châflis d’un car-,
reau de verre, qui Tert à empêcher que les parties
de cuivre qui fe détachent de l’ épingle en faifant la
pointe, & qui font renvoyées avec vitefle de tous
côtés par là meule, ne fautent aux yeux de l’em-
pointeur.
Au bas de la fig,. 1, pl. I I , eft une plaque de tôle
ou fer-blanc, nommé aperçoir, & qui eft attache
fixement avec un clou à chaque coin, dont l’ufage
fera expliqué ci-après.
La roue à empointer, compris le billot & la corde,
coûte 3 6 liv.
Le fufeau d’acier pour porter la meule, pèfe deux
livre*, & coûte 3 1$,
U
La meiile pèfe quinze livres, & coûte 6 liv. à
raifon de 8 fous la livre.
Lorfque les hachures ou retailles de la roue font
ufées, il en coûte huit fous pour les refaire; mais
auparavant, cette meule peut empointer environ
trente douzaines de milliers d’épingles.
Pour faire la pointe aux épingles, nous avons jlit
précédemment, que le dreffeur remet à l’empoin-
teur les tronçons de la longueur des trois ou quatre
épingles, fuivant leur forte : celui-ci met le tout
dans une febille, & s’affied fur un couffin les jambes
croifées ; il prend une pincée d’environ vingt-cinq
tronçons de grofles, ou quarante de petites , ce
qu’il nomme tenaillée-, qu’il tient avec le pouce de
l’index de chaque main; après quoi il pofe cette
tenaillée contre l’apperçoir pour égaler lés pointes ,
& dans cette fituation il préfente fa tenaillée contre
la meule qui eft mife en mouvement par le tourneur
appliqué à la manivelle de la grande roue.
L’empointeur , en pofant fa tenaillée contre la
meule, la-tourne du pouce & }du gros doigt de la
main gauche, & l’appuie du pouce de la main droite ;
contre la meule ; ilretourne enfuite fa tenaillée pour
recommencer la même-opération.
Il y a à côté de la roue à empointer , une
pareille roue égale en toute chofe à la précédente
, à l’exception de la meule qui n’a que quatre
pouces de diamètre, un pouce & demi d’épaifleur ;
l’oeil ou vide dans le milieu , n’a que deux pouces
de diamètre , & les hachures de .cette dernière
meule font plus fines. Elle pèfe huit livres , & le
fufeau & le refte font femblables : l’ouvrier qui y
eft appliqué fe nomme repajfeur, & a également
fon tourneur.
L’empointeur remet ces tronçons ou épingles au
répaffeur , lorfqu’il en a empointé une certaine
quantité ; celui - ci fait la même opération que
l’empointeur en repaffant les pointes fur fa meule
par tenaillée , laquelle étant hachée plus près que la
précédente, les pointes y font adoucies & perfectionnées.
L’empointeur d’épingles peut empointer quinze
douzaines de milliers d’épingles grofles & petites ,
dans un jour, compris le treizième en fus pour le
déchet, & il a 15 deniers par douzaines de milliers,
enforte qu’il pourroit gagner 18 fous par jour s’il
étoit fourni d’une fuffifante quantité d’épingles;
mais les meilleurs fabricans de Laigle ne débitent
par jour qu’environ fept ou huit douzaines de milliers
d’épingles, ce qui n’eft que la moitié de la
quantité fufdite ; çet empointeur pourroit travailler
pour deux fabricans , & dans ce cas gagner environ
fes 18 fous par jour, ce qui eft le prix le plus
avantageux des autres ouvriers qui travaillent à la
même fabrication; mais auffi leur fanté eft bien
altérée par la limaille & la pouffière du laiton qu’ils
refpirent en faifant leurs fonctions, le carreau de
vitre, &c. mentionné ci-devant, ne pouvant tout-
. su-plus que leur garantir la vue des parties les plus
grofîières de cette poudre.
Arts & Métiers. Tome II. Partie II.
Le tourneur de la roue de l’empointeur a 1 fou
9 den. de la douzaine de milliers, compris le treizième
en fus, ce qui paroit être un meilleur prix
que celui de l’empointeur qui n’a que 15 deniers;
mais ce tourneur gagne cependant la moitié moins ,
parce qu’il eft obligé en outre de battre le papier
qui fert à envelopper les épingles, & de les laver
avant de les faire blanchir, ainfi qu il fera expliqué
dans fon lieu.
Ce tourneur fait faire à la manivelle environ
quarante. - cinq tours par minute , & à la grande
roue par conféquent autant ; cette roue a cinq pieds
quatre pouces *de diamètre, dédu&ion faite d un
enfoncement d’un pouce à chaque bout. La petite
roue, ou noix a huit lignes de diamètre dans le fond
dé fon enfoncement ; & comme elle eft mue par
la même corde qui paffe fur la grande roue précédente
, la vitefle de cette petite roue doit être a
celle de la grande dans la raifon inverfe du diamètre
de l’une au diamètre de l’autre , 011 comme 96 eft
à 1 , c’eft - à - dire, qu’elle fera quatre - vingt - feize
tours , pendant que la grande n’en fera quun ; ou
comme cette grande en fait quarante - cinq par
minute , la petite roue ou la meule qui y eft fixée ,
feront chacune , pendant le meme temps , quatre
mille trois cent vingt- tours. Cette meule ayant fix
pouces de diamètre & dix-huit pouces un feptième
de circonférence , qui étant multiplié par quatre
mille trois cent vingt tours qu’elle fait en une
minute, font pendant une heure foixante - cinq
mille trois cent quatorze toifes deux feptièmes, ou
bien vingt-fept lieues & cinq cent quatorze toifes ,
à raifon de deux mille quatre cent par lieu.
En fuppofant d’après Guillaume Derham ( Théo*
logie phyfique , iroifième édition , page qp ) la vitefle
d’un boulet de canon de cinq cent dix verges de
Londres en deux fécondés & demie , ce qui revient
à cinq cent foixante & quatorze pieds de roi par
fécondé , la verge étant de trois pieds de Londres ,
& le rapport de ce pied au pied de ro i, étant comme
ï 5 à 16+050 on aura pour la vitefle du même boulet
pendant une heure, trois cent quarante-quatre mille
quatre cent toifes ; d’où il fuit que celle de la meule
I à appointer, mentionnée ci-deflùs , eft prefque la
cinquième partie de cette prodigieufe vitefle du
boulet de canon.
Si la meule ne fe trouvoit pas dans un parfait
équilibre autour de fon axe ou fufeau, il eft facile
de préfumer qu’avec une ■ auffi grande vitefle elle
agiteroit l’air de façon à procurer un grand bruit,
_& c’eft ce qui arrive effeftivement ; mais lorfque
cette meule eft bien en équilibre , il ne réfulte
aucun bruit de fon mouvement, ni par conféquent
de réfiftance>de la part deTair.
Le repafîeur gagne 1 fou par douzaine de milliers
d’épingles , y compris le treizième en fus; il en
fait une pareille quantité que l’empointeur , ainfi
il gagne par conféquent un cinquième de moins M 11 SÈS