
tance de déterminer au jufte quelle doit être la
proportion du vitriol au falpêtre ; car ., fi l’on prend
trop peu de vitriol, tout le falpêtre ne pouvant
être décompofé-, la portion qui ne l’eft pas, eft,
pour ainfi dire, perdue, & l’on obtient moins d’eau-
forte que l’on n’auroitdû en avoir. S i, au contraire,
on prend trop de vitriol, le furplus eft en pure perte,
& rend , par l’acide vitriolique qui s’en dégage,
l’eau-forte impure.
Pour trouver la proportion que l’on doit établir,
il n’eft point de meilleur moyen que celui de con-
fulter les qbfervations que, les chimiftes ont faites
fur cet objet.
Bernhard, célèbre chimifte Allemand, ayant
pris parties égales de falpêtre & de vitriol calciné,
lavoir, huit livres de chaque forte, retira du réfidu
de la diftillation près d’une livre de falpêtre ; & ayant
répété la même expérience à plufteurs'reprifes , le
rélultat fut toujours le même, à quelque petite différence
près.
D ’après ces expériences , 1a meilleure proportion
feroit donc de prendre fept parties de falpêtre, contre
huit de vitriol calciné , ou feize de vitriol ordinaire
, car le vitriol perd la moitié de fon poids,
quand on le calcine à blanc, & un peu plus en le
calcinant à rouge.
Pott eft aufti d’avis qu’en prenant parties égales
de vitriol calciné & de falpêtre, tout le falpêtre ne
peut pas être décompofé, & qu’alors on en prend
trop peu ; mais qu’en mettant le double de vitriol,
on en prend trop. Il faut donc en revenir à la proportion
moyenne qui vient d’être prôpofée.
Il eft ordinaire dans cette calcination de voir le
lut du dôme fondu , vers l’endroit où il couvre les
goulots ou pots, par la force des vapeurs rouges &
élaftiques de l’eau-forte ; il faut que l’ouvrier foit
attentif à boucher les crevaftes, à mefure qu’elles
donnent iftiie-à ces vapeurs rouges.
Si les cuines fe trouvoient humides , ou le vitriol
trop phlegmatique , l’air qui fe développe dans la
décompofition du falpêtre eft fi impétueux, qu’il
foulève la cuine, & la jette avec fracas hors de la
galère , en brifant même quelquefois le dôme.
Pour éviter ces ac-cidens autant qu’il eftpoflible
il faut faire un bon choix des cuines, ne les remplir
qu’au tiers de leur capacité, faire calciner le vitriol
, & conduire le feu par dégrés, fans trop fe
hâter de le rendre vif. ,
Il faut laifler refroidir pendant douze heures au
moins les cuines & les pots, avant de les débiter
afin de donner le temps aux vapeurs répandues
dans l’appareil de fe con-denfer. ,
On verfe l’eau-forte très-concentrée, dans des
bouteilles à part.
Voici quel eft le réfultat des expériences du chimifte
Allemand , pour déterminer la quantité d’eau-
forte qu’on obtient par ce procédé.
i®. Quan-e livres de falpêtre, & quatre livres &
demie de vitriol calciné, ont donné en douze heures
de temps, en mettant deux livres d’eau dans le récipient,
quatre livres d’efprit de nitre concentré au*
mêlé avec deux livres d’eau, étoit de la force de
celui qu’on a dans lè commerce.
2.0.. Trois livres de falpêtre, & trois livres &
demie de vitriol calciné , ont donné en douze heures
de en mettant vingt-quatre onces d’eau dans
le récipient, trois livres d’eau-forte, qui mêlée avec
une livre & demie d’eau, rendit quatre livres &
demie d’eau-forte, de la force de celle du commerce.
3°. Six.livres de falpêtre, avec fept livres de
vitriol calciné , 8c ftx livres d’eau , mifes dans le
récipient, donnèrent près de douze livres de bonne
eau-forte , après un feu de vingt-quatre heures. 4°- Bernhard , ayant diftillé quatre-vingt livres de
falpêtre, avec quatre-vingt livres de vitriol calciné
qu’il avoit diftribué dans plufteurs cornues &
ayant mis quatre-vingt livres d’eau dans les réci-
piens , obtint, au bout de vingt - quatre heures
cent foixante livres de bonne eau-forte.
Ces expériences montrent évidemment qu’une
livre de falpêtre donne une livre & demie d’eau-
forte , par un feu de douze heures, & près de deux
livres par un feu de vingt-quatre-heures, fi l’on fuit
les proportions indiquées ci-defifus ; ce qui s’éloigne
bien du calcul des diftillateurs ordinaires, qui n’attendent
que quinze livres, d’eau-forte, de douze
livres de falpêtre.
Ce qui refte dans la cornue, après cette diftillation
, eft un mélange dé fer, qui a été calciné &
privé de, tout phlogiftique, 8c de fe l de duobus,
compofé de l’alkali du nitre, uni à l’acide vitriolique
qui étoit contenu dans le vitriol de mars.
On lave cette matière dans une fuffifante quantité
d ea.ii bouillante j le fel de duobus fe difiout en
: entier; on filtre la liqueur, & on la fait criftallifer
fucceflivement à plufieurs reprifes, pour en obtenir
tout le fel.
La matière qui refte fur le filtre, eft le fer calcine
8c debarrafîé de toute matière faline : on la lave,
& on la fait fécher. Les poliffeurs de glaces s’en fervent
en gui-fe d’émeri}.
Le traitement des eaux-fortes par le vitriol de
cuivre, ou par l’alun, fe fait comme avec le vitriol
martial ; au refte on ne doit jamais employer l’alun
que calciné.
Il faut ohferver ici que dans le commerce V on
appelle eaux-fortes k s acides obtenus du falpêtre par
l’argile ; efprit de nitre, l’acide'obtenu par le vitriol;
& efprit de nitre fumant, l’acide qui provient d'ë
l’huile de vitriol.
Troïjîetne procédé , pour obtenir Vefprit de nitre
fumant.
Il y a deux méthodes, dit M. Macquer, dans
fon Diéiionnaire de Chimie, ufttées pour obtenir
Fefprft de nitre très-fort & très-fumant ; la première
eft par l’intermède du vitriol martial ,• 8c la fécondé,
par Y acide vitriolique pur.
Pour extraire l’efprit de nitfe fumant, par l’intermède
du vitriol martial, on fait d’abord calciner ce |
vitriol jufqu’au jaune orangé, pour lui enlever toute
fa criftallifation ; d’une autre part, on fait bien
fêcher du nitre très-pur, de la troiftème cuite , ou
même pour le mieux purifier encore par une quatrième
criftallifation. On réduit ces deux matières
en poudre, on les mêle exactement enfemble, à la
dofe de parties égales.
On entonne cette poudre dans une bonne cornue
de grès : il eft à propos de fe fervir pour cela d’un
tuyau de papier, qui s’introduit jufques dans le
ventre de la cornue. On évite par-là que quelques
parties du mélange ne reftent attachées à fon col.
On place la cornue dans un fourneau de réverbère
, fur les barres-duquel on a placé une aflâette
de terre, remplie de fablon. On adapte à la cornue
un grand ballon de v erre, percé d’un petit trou.
On le lute à la cornue avec le lut gras; on recouvre
ce lut par le moyen d’un linge, chargé d’un autre
lut de chaux éteinte à l’air, délayée avec du blanc
d’oeuf, le tout affujetti avec une ficelle.
On procède après cela à la diftillation, par un
feu très-lent. Le ballon fe remplit bientôt de vapeurs
rouges qui s’y condenfent , tandis qu’une autre
portion de l’efprit de nitre diftillé peu à peu en
goutte, & l’on continue cette diftillation. jufqu’à ce
que la cornue étant rouge il n’en forte plus rien.
On laifte après cela refroidir les vaifteaux : .on
les délute avec précaution, & l’on verfe promptement
la liqueur du ballon , dans un flacon de criftal
bien net & bien fec , dans, lequel on a placé un
entonnoir de verre. On bouche promptement ce
flacon avec fon bouchon de criftal, 8c on le coiffe.
Cette méthodede diftiller l’efprit de nitre fumant,
eft celle dont fe fert M. Baumé ; elle eft excellente à
tous égards. Le petit plat de terre , rempli de fable,
fur lequel pofe le fond de la cornue , eft très-utile ,
pour empêcher que malgré les précautions qu’on
prend , elle ne s’échauffe trop promptement & trop
inégalement, ce qui la feroit cafter à coup fûr. Le
lut gras d’argile 8c d’huile de lin, réfifte affez bien
aux acides, oc bouche très-exa&ement; mais comme
il refte toujours mollaffe, il a befoin d’être maintenu
par le linge enduit de lut de chaux & de blanc
d’oeuf.
Les vapeurs de cet efprit de nitre fumant font
très-expanfibles, 8c fe condenfent difficilement. Il
eft effentiel par cette raifon , de mener la diftillation
fort lentement, d’éviter de la faire par un temps
chaud, d’interpofer un petit mur de brique entre
le ballon 8c le fourneau, pour empêcher ce vaiffeau
de s’échauffer , de le couvrir de linges mouillés ,
qu on renouvelle de temps en temps ; 8c, malgré
toutes ces précautions, on eft obligé de déboucher
de temps en temps le petit trou du ballon , pour
donner iffue aux vapeurs trop raréfiées ou trop
abondantes, fans quoi tout l’appareil fe creveroit
avec explofion.
• Lorfqu’on s’apperçoit que les gouttes fe fuccèdent
rapidement, & qu’en débouchant le. petit trou U
en fort un brandon de vapeurs rouges en fiflant,
8c qui s’élance à plus d’un pied , c’eft une marque
que les vaifteaux font prêts à crever ; il faut rallen-
tir le fe u , 8c déboucher très-fréquemment le petit
trou, jufqu’à ce que tout cela foit beaucoup modéré.
Enfin, on doit avoir grande attention, lorfqu’on
verfe l’efprit de nitre dans fon flacon, de fe mettre
dans un courant d’a ir , 8c de prendre le deffus du
vent, pour éviter de refpirer, des vapeurs qui font
corrofives 8c malfaifantes. On doit par la même fai- .
fon boucher avec un torchon l’ouverture du ballon, 1
auflitôt que la tranfvafion eft faite ; car il fume en- '
core pendant plus de douze heures.
Quand l’efprit de nitre qu’on obtient par la méthode
qui vient d’être décrite , a été diftillé avec
une bonne quantité de vitriol bien calciné, il eft
dans fon plus grand degré de concentration ; fes vapeurs
font d’un rouge r-oux, prefque brun ; elles
font en même temps plus expanubles 8c moins
difpofées à fe.condenfer en liqueur, ce qui eft caufe
que l’on en perd une grande quantité. Elles approchent
beaucoup des vapeurs nitre.ufes qui s’élèvent
de la diflolutidn des métaux , & fur-tout du fer &
du zinc , par l’acide nitreux.
On attribue à un chimifte nommé Rodolphe
Glauber, le procédé pour obtenir Y efprit de nitre
fumant par l’acide vitriolique pur. Ce procédé ne
s’exécute prefque jamais dans une galère, mais dans
un fourneau de réverbère, comme dans la diftilla-,
tion précédente.
C’eft fur ce fourneau à demeure que les diftilla*
teurs placent lin cercle de terre cuite , d’un diamètre
égal à celui de fon foyer. On lui donne trois à -
quatre pouces d’épaifteur, 8c un pied 8c demi de
hauteur. Il eft maintenu dans cètte hauteur par deux
bandes circulaires de fer doux, 8c il a une échan- .
crure vers un de fes bords , pour faire paffer le col
d’un vaiffeau connu fous le nom de cornue ou
retorte. Après avoir luté comme pour les cuines,
on furmonte le tout d’une voûte applatie , ouverte
vçrs fon fommet, pareillement échancrée vers fon
bord, appellée dôme , 8c faite de la même terre.
Ayant mis dans la cornue la quantité convenable
de nitre bien pur , légèrement defféché, 8c la moitié
de fon poids d’huile de vitriol très-concentrée, on
place au col de la cornue, un vafte récipient ou ballon
de verre, on ajufte le dôme , 8c on lute toutes
les jointures avec de la terre à four.
On tire de Savigny, près Beauvais , des ballons
de grès d’une capacité très-vafte, 8c bien moins
cafuels 8c moins coûteux que les ballons de verre.
Ils font très-propres pour la diftillation de l’efprit,
de nitre fumant.
Le tout étant luté & féché , on établit le feu par
degrés , avec de petits' éclats de bois bien fecs, fendus,
8c coupés fuivant le^ diamètre intérieur du
fourneau. On continue le feu , on l’augmente jufqu’à
donner à la cornue une couleur rouge de ce-
rifes. On iaijTe refroidir ; enfin on obtient cettq
N n il