
On fe précautionne d’autre part de cuillers de
terre bien corroyée & bien cuite, creufes, larges
autant qu’il fe peut pour entrer fans peine dans le
col du ballon. Ces cuillers ont un.manche d’une
longueur proportionnée à la capacité du ballon ,
de maniéré qu étant placées , le creux de la cuiller
fe trouve dans le centre. Ce manche eft ‘terminé
par un bouchon de la même terre, ajouté fur chaque
col des ballons pour les remplir exaâement.
Pour plus d’exa&itude, on peut terminer ces bouchons
par un rebord plus large que n’eft le diamètre
du ballon, & garnir dans le travail ce rebord avec
un lut gras, ou même de l’argile détrempée.
Toutes ces chofes étant en état, on a fait dans
un mortier oui* ous une meule, un mélange des
plus exafts de quatre parties de foufre fur une de
nitre bien pur ; d’autres ne demandent qu’un cinquième
de nitre, & d’autres qu’un fixième.
Le mélange étant bien'fait, on en charge une des
tuiliers, en interpofant deux ou trois lits de filaffe
ou étoupes extrêmement minces & même cardées.
On a mis au préalable dans le ballon trois à quatre
pintes d’eau, qu’on a chauffée par le moyen du
bain de fable, & du petit fourneau pofé fous l’ef-
cabelle. Sitôt que l’eau eft allez chaude pour répandre
des vapeurs dans le ballon & l’en obfcurcir,
on allume le mélange contenu dans une des cuillers,
& on la place promptement dans le.ballon
de manière que fon col foit exactement fermé par
*e b° ucth?n ajuffé au manche de cette cuiller.
L’intérieur du ballon eft fur le champ rempli de
vapeurs blanches qui le rendent opaque, comme i
dans le procédé de l’efprit de fel fumant, & ce
phénomène dure autant que la flamme, enforte
qu’il fert à indiquer quand il faut changer de cuiller.
A l’aide de ce léger artifice, le foufre qui fe con-
fume réduit la filaffe dans l’état de charbon ; ce char-,
bon fait détonner le nitre, & ce dernier donne une
nouvelle activité à la combuftion du foufre ; enforte
que les artiftes Anglois ont tiré parti de deux propriétés
contraires, remarquées par les phyficiens
entre le foufre & le-nitre. Le premier abforbe beaucoup
d’air en fe confumant, l’autre en produit beaucoup
lorfqu’il détonne; de-là réfulte qu’il s’en trouve
toujours affez dans l’intérieur du ballon , quoique
bien clos , pour ne pas étouffer la flamme.
Lorfque la première cuiller eft confumée, on en
tient une autre toute prête qu’on lui fubftitue , &
ainfi de fuite jufqu’à ce que le ballon fe trouve à
peu près rempli à moitié de fa capacité ; alors il
faudroit d’une part trop de feu pour échauffer le
fluide, & la capacité vuide du ballon fetrouveroit
de l’autre trop circonfcrite fi l’on continuoit; ainfi
on tranfvafe le produit, qu’ri ne s’agit plus que de
déphlegmer s’il en eft befoin, car il paraît qu’en
Angleterre on n’en prend pas b peine.
Il eft inutile de faire obferver que chaque ballon
doit avoir au moins deux cuillers dont les bouchons
foient ajuftés à fon col. On fent aufli que
malgré les précautions pour éviter les sapeurs fuir
fureufis, il s’en exhale toujours aflei pour exiger cm*
dans un travail en grand le laboratoire foit fn!!
cieux, bien ouvert, & placé dans un endroit très-
ilolé > pour ne nuire en aucune forte aux voiT.nl
ni à leurs poffeffions. Üns
galêre à ^ bIe convient fupêrieurement pour
déphlegmer l’huile de vitriol. On emplit de vaftes
cornues de verre jufqu’aux deux tiers de leur capacité
avec la liqueur retirée des ballons ; on y ajufte des
récipiens proportionnés ; on les recouvre prefque
tout entières de fable ; alors on échauffe peu à peu
& on pouffe le feu par degrés affez fortement pour
chaffer le phlegme , dont les dernières portions fur-
tout ont de la peine à s’élever.
On s’apperçoit qu’il en eft fortr affez, lorfque les
gouttes qui tombent par le col de la cornue font
lentes à tomber, & forment un petirfifffement en
tombant dans le récipient.
On laiffé refroidir .(appareil & l’on entonne fur
le champ l’huile de vitriol, dont la pefanteur doit
être telle qu’une bouteille de pinte en contienne
trois livres fix à huit onces*
On la tranfporte pour le commerce dans de grof.
fes bouteilles de verre verd, plus larges que hautes
& qui contiennent quatre-vingt à cent livres.. Ces-
bouteilles font placées^ dans des bouteilles d-’ofier
à deux anfes , & remplies, bourrées même de foin
•pour les garantir de fra&ure & faciliter le tranf-
port. On ne laiffe paffer que le col très-court de
ces bouteilles, & on les bouche avec un morceau
d argile modelée & cuite, qu’on recouvre d’une
forte toile bien ficelée & d’un maftic commun.
Le.phlegme qu’on a obtenu durant là reftifica-
tion & qui eft plus qu’acidulé , fert à charger les
ballons où l’on doit brûler, le foufre, au lieu de
1 eaü qu’on y a mife la première fois- qu’on a travaillé.
Voilà pourquoi les Anglois ne rectifient plus.
Tout ce travail produit trois cents cinquante livres
au moins de bonne huile de vitriol commerçab'e,
pour 400 livres de foufre employé. O r , le foufre
étant au prix de dix-fept livres dix fols le quintal,
il en faut pour foixante-dix livres ; & celui de nitre
raffine des Indes, revient à quatre-vingt livres ;
ajoutez pour la journée de deux hommes, qui peuvent,
en vingt-quatre heures, employer cette dofe,
& qui dès le fecondjour peuvent conduire enfem-
ble la combuftion du foufre & la déphlegmation de
1 acide vitriolique, quatre francs ; de plus „.pour les
intérêts journaliers des avances néceffaires, douze
livres ; on a un total de cent foixante & fix livres
de depenfes , qui, produisant trois cens cinquante
livres d’huile de vitriol, b rendent à. neuf fols cinq
deniers & deux tiers la livre.
Le prix fera encore moindre fi on fuit le con-
fêil de Lewis, qui ne demande que vingt-quatre
livres de nitre, au lieu de cent,ce qui donne une
diminution de trois fols fix deniers par l i v r e &
rend l’huile de vitriol à cinq fols, fipt deniers &
deux tiers la livre.
On. a. effayé. de fitbftituer aux grands, ballons de
verre des vafes de terre de Savigny de même volume
• mais on a cru remarquer que l’huile de vitriol
contraéfoit dans ces derniers un état alumineux, qui
en altérait la vertu pour certaines manufactures ;
il a donc fallu revenir aux ballons de verre ; encore
faut-il que le verre foit de l’efpèce la plus dure &
la mieux recuite.
Autres Procédés.
Nous ne devons pas omettre d’ajouter aux détails
rapportés par M. de Machy, les obfirvations
de l’éditeur ou annotateur de Neuchâtel.
Comme je me fuis occupé, dit ce chimifte Allemand,
pendant long-temps de la fabrication de
l’huile de vitriol, je vais communiquer deux méthodes
que j’ai imaginées & mifes en pratique avec
fuccès. 1 i. ' ’ p . , ■
Il s’agit de décompofir lé foufre , afin d en .obtenir
l’acide. Pour cet effet, il y a deux indications
à remplir ; la première , d'avoir un courant d’air
qui entretienne l’inflammation ; la fé c o n d é d ’obtenir
un acide dépouillé de l’odeur fulfureufe que
lui procure le principe inflammable.
Pour remplir ce double but, je prends une fuite
de ballons de grès, qui communiquent les uns aux
autres. Ils font tous à moitié remplis d’e au, excepté
le premier qui repofe fur un fourneau à vent,
pendant que les autres repofint fur de petits fourneaux
qui contiennent affez. de feu pour faire évaporer
l’eau.
Je fais dans lè fourneau qui foutient le premier
ballon, un feu capable de le rougir. Alors, au moyen
d’un Ouverture de deux pouces pratiquée aux côtés
du ballon, j’y introduis continuellement du foufre.
On fent que cette matière s’enflamme fur le champ,
& qu’elle brûle avec une vîteffe inconcevable. L’air
du ballon étant prodigieufiment raréfie, celui qui
l’environne entre par l’ouverture dont je viens de
parler, & pouffe avec beaucoup cFimpétuofité les
vapeurs acides dans les ballons fuivans , garnis
d’eau. L à , elles fe condenfent dans les vapeurs de
cette eau, & l’air fort enfin dégagé de l’acide par
l’ouverture du dernier ballon qui n’eft que le. tiers
de celle du premier:
Pour peu qu’on ait quelques connoiffances en
phyfique, on comprendra qu’il y a un courant
dont la direction va du premier au derpier ballon ,
■ que ce courant entraîne ces vapeurs , & que l’air
qui en eft chargé ne peut fortir que par l’ouverture
du dernier ballon, & feulement après s’être
dépouillé de l’acide qu’il contenoit. Il eft fi vrai que
cet air ne contient pas la plus petite portion d’acide,.
que j’ai fait fouvent l’expérience avec un appareil
dé fept ballons, & elle m’a toujours rèufli.au point,
que dans la maifon perfonne iie fentoit l’odeur de
foufre, quoique je ne fiffe pas l’opération fous une
cli eminée..
Ce procédé, tout fimple qu’il eft, répond à. toutes
“ s indications. On fait que'plus le foufre brûle avec
vuefle , moins il a d’odeur fulfureufe, & que plus
la chaleur qu*on applique au foufre eft forte, plus
il fe confume avec vîteffe. Ainfi, |a chaleur que j’ap-
pliquê au premier ballon me procure une grande
chaleur avec un courant d’air violent ; il fait que je
puis brûler en peu de temps beaucoup de foufre, &
que j’obtiens un acide prefque dépouillé d’odeur.
On comprend que l’efprit de vitriol obtenu de
cette manière, contient plus ou moins d’eau, félon
la quantité du foufre qu’on a brûlé.
Pour avoir cet acide concentré, il faut faire évaporer
l’eau furabondante, en y ajoutant quelques
gouttes d’efprit de nitre, afin de détruire le peu d’odeur
fulfureufe qui pourrait y être refté. Cette concentration
peut le faire dans des vafes de plomb,
mais ceux de grès font préférables.
L’autre manière ne demande que deux ❖ aies;!
l’u n , qui contient l’eau par laquelle les vapeurs
acides doivent paffer pour fe dépouiller ; l’autre,
qui y communique, fert à faire brûler le foufre..
On y introduit le foufre par une ouverture latérale.
L’air qui entre par cette ouverture reffort par
le fécond vaiffeau, au moyen d’une pompe que
l’on y a appliquée, qui l’oblige à paffer au travers,
de l’eau, pour f i dépouiller des vapeurs acides qu’il,
contenoit, & entretient par- là le courant d’air.
Il y a encore un autre procédé nouveau, imaginé:
par M. Weber, qui confifte à faire l’huile de. v ir
triol avec du gypfi.
L’acide vitriolique eft de peu ou point d’ufage:
dans les monnoies mais il eft employé en grande
quantité dans plufieurs autres arts , tels que la.
teinture , la chapellerie, les manufactures d’Indiennes
,■ &c. il eft auffi d’un grand ufage dans la
chimie. C ’eft de tous les acides minéraux celui
qui eft le plus pefant & qui contient le plus de matière
faline fous un même volume donné;
H doit pefir une once fix gros & demi dans une
bouteille de la contenance d’une once d’eau.
L’acide vitriolique a la propriété de diffoudre'
beaucoup de matières métalliques, & de former
avec elles différentes efpèces de fils neutres, que.-
Ton nomme vitriols.
D E Ly E A U R È G A L JT.
L’eau régale eft un acide mixte,; compofé d’acide1
nitreux & d’acide marin.
On varie les proportions de- ces deux acides ,
fuivant l’ufàge que l’on veut faire de l’eau régale.
On lui x donné ce nom à caufi de la propriété
qu’elle a de diffoudre l’or, qui eft appellé le roi
des métaux.
L’acide nitreux que vendent les diftillateurs, n’eft
prefque jamais qu’une efpèce Seau régale, parce
que, pour le faire, ils n’emploient que du nitre de
la première cuite,. qui eft mêlé d’une grande quantité
de fil marin.
Quand on veut obtenir de l’acide pitreux- pur,
il>. faut employer du nitre de la troifiéme cuite.
On fait encore de l'eau régale avec de l’acide
nitreux & du fil. ammoniacTm. du.fil marin ord^-