
Au quatrième, les nerfs recourbés par la violence
du feu, feront des grains très-durs , mais aifés à i
féparer les uns des autres ; le rempliffage brûlé,
couleur noire & fontes point coulantes.
Plus de chaleur achève de détruire le grain, rend
la matière fpongieufe, aifée à caffer ; les -débris
friables , comme on le voit au fer brûlé : de-là on
peut conclure que les fontes vives font de la meilleure
qualité.
Nous fommes entrés dans ce détail pour faire entendre
que la qualité du fer vient de l’efpèce de mine;
que quand un fer eft doux de fa nature, il peut
•néanmoins être caffant, ou par le trop de remplif-
fage qui gonfle & éloigne les nerfs , ou par la forme
circulaire qu’un trop grand degré de chaleur ou la
trempe lui aura fait prendre. Otez au premier ce qui
l’embarraffe ; au fécond rendez l’extenfion & la fou-
pleffe par le mélange de nouveaux fondans ; & à la
trempe , par unrefroidiffement naturel, vous aurez
du fer doux relativement à la qualité de la mine.
Employez tout ce que vous voudrez ; d’un fer caf-
fant par la nature de la mine, vous n’en ferez jamais
un fer doux.
L’exaâitude-du produit d’un fourneau dépend de
l’égalité du vent, de la régularité des charges , de
l’uniformité des mines & des charbons , & de l’intelligence
du fondeur dans fon travail.
Le travail confifte à garantir du feu toutes les parties
du bas, mais principalement la tuyère. Pour cet
effet il faut y veiller, en ôter ce qui s’y attache ou
l ’embarraffe, & ne-pas la laiffer échauffer faute
d’arbue.
Avec les matériaux que nous avons fuppofés , un
fourneau échauffé peut, à vingt charges, produire
cinq milliers de fonte en vingt-quatre heures, &
foutenirun an & plus de travail. On dit qu’il y a des
efpèces de mines qui produifent, à travail é g a l,
jufqu’à fix & fept milliers : en tout cas , la qualité
des mines, des charbons, le manque de foin ou d’in -.
telligence, en réduifent fouvent le produit à moins
quelquefois de trois milliers. Quand les charges
rendent moins , fans qu’il y ait de dérangement
dans un fourneau, il eft bien clair que cela vient
de la qualité de la mine.
Il y a plufieurs chofes effentielles ; les dimenfions
qu'on donne à un fourneau, l’inclinaifon des parois,
le foyer qui eft le plus grand efpace au-deflus des
échalages, la pofition de la tuyère, l’ouverture du
deffus.
L’inclinaifon des parois, facilite la defcente de
lamine ; donc, fi vous en avez qui defcendent plus
difficilement, qui fe mettent en maffes, vous pourrez
augmenter l’inclinaifon ; fi elle s’attache aux
angles , vous pouvez les arrondir ; fi le degré de
chaleur n’eft pas affez grand au foy er, outre qu’une
plus grande inclinaifon des parois donnera un plus
grand efpace, vous l’agrandirez encore en le cein-
trant ou en élevant la tour & la bune. La tuyère
doit être pofée de façon qu’elle diftribue le vent
également : c’eft à fon paffage que ïes mines en dif*
folution font forcées de fe féparer des corps étrangers
, par la violence & le-rafraîchiffement fubit du
vent. En l’examinant un peu de temps, on voit cette
féparation par le produit des étincelles, qu’une feule
ou plufieurs parties de mines accrochées jettent en
forme d’étoiles. Cette féparation eft auffi fenflble &
brillante à la coulée des gueufes, la fraîcheur de
l’air ou du moule comprimant les refforts dès parties
extérieures les fait éclater, & ce à proportion du
degré de froid. Bien plus fenflble encore, fl vous
jetez en l’air de la fonte liquide : mieux enfin à la
compreffion du gros marteau fur les loupes ou renards
, dont on rapproche les parties étendues par
la chaleur , quand il fe trouve des parties de fontes
mal travaillées daus les foyers de la forge.
Nous n’avons ceffé de répéter le mélange de l’ar*
bue & de la caftine avec la mine. La raifon eft que
la caftine fondant la première, chaque partie fe
groflit de fa voifine, & en tombant laide des vides
qui donnent entrée à la chaleur. L’arbue réflfte plus
long-temps, & tient tout cette matière liée & criblée
dans le foyer, jufqu’à ce que la mine en fondant
l’entraîne elle-même, à quoi contribue beaucoup la
pefanteur des charges qui fe renouvellent par le
deflus. Si vous mettez féparénientla caftine, la mine,
l’arbue ; l’une fond d’abord, la mine tombe toute
crue, & l’arbue refte : au lieu que dans le mélange
tout defcend uniformément.
Comme la matière du fer en fufion pèfe davantage
, elle fe précipité dans le creux & fous le vent,
où elle en trouve déjà en bain, & où les fcpries en
fufion plus légères furnagent : quand elles Ont le
degré de liquidité convenable, aidées du vent, elles
fortent par le deffus de la dame, & ce à mefure que
le creufet fe remplit. Quand les craffes commencent
à vouloir fortir, l’ouvrage du fondeur ou de celui
qui le remplace , eft de remuer avec un ringard la
fonte en fufion dans le creufet, ce qui aide la dépuration
du métal ; cela defferre le devant du fourneau
, & donne liberté aux craffes de fortir. Il verra
auffi fi la tuyère n’eft point embarraffée ; & dans le
cas où les matières qui viennent du deffus l’êchauf-
feroient ou en boucheraient l’ouverture, d’un coup
de ringard par le deffus de la dame, il la débarrafTera
& la rafraîchira de pâte d’arbue. Les craffes trop liquides,
annoncent une trop grande quantité de caftine
; les tenaces & gluantes, trop d’arbue. L’ouver*
rare du deffus trop étroite, défaut où tombent les
fondeurs qui cherchent à augmenter le degré de chaleur
, fait brûler l’ouvrage : la raifon en eft fenflble;
il faut une ouverture proportionnée à une circulation
d’air convenable, & on a yu combien il entre d’atf
dans un fourneau.
Les fourneaux font fujets à beaucoup d’àccidens.
Les plus communs font la déflagration de latuyere,
de la tympe, de toute- une partie de l ’ouvrage, les
barbouillages, les éruptions. La déflagration peut
venir, i° . d’une mauvaifeconftruélion, ou faufie
direéiien du total ; a0, d’une partie de l’ouvrage mal
jointe: a°, d’une fauffe pofition des foufflets ; 4°-
• • jjiinç?
mines attachées au-deffus du foyer ; ç®. de la qualité
de la mine. v
Dans le premier cas , il n’y a point de remede, il
faut mettre hors ; c’eft arrêter le fourneau : dans le
fécond , à force de rafraîchir d’arbue les parties attaquées
du feu , on parvient à y faire fondre des
parties qui rempliffent les vides ; c’eft ce qu’on appelle
plombage : dans le troifième , il n’y a pas à hé-
fiter à reâifier la pofition des foufflets : dans le quatrième
, il faut, avec de longs ringards du deffus de
la bune, détacher les parties accrochées aux ang] e s ,
& pendant quelques charges augmenter la caftine &
le vent. Ces morceaux feront aifément criblés par I
la fufion de la caftine , & fondus par une augmentation
de chaleur , finon ils occafionneront un barbouillage,
comme nous le dirons dans le cinquième
cas. Ou mêlez différentes mines , ou fi vous ne pouvez
, ajoutez-y les parties d’arbue convenables. Ces
accidens n’arrivent jamais fans faute. Dans le cas où
la tuyère ferait bien endommagée du fe u , il faut
arrêter les foufflets, défaire le moins de maçonnerie
qu’on pourra, y en fubftituer une nouvelle, & la
réparer avec pierre & arbue le mieux que vous
pourrez ; & du deffüsmettant de l’arbue de ce côté-là,
vous parviendrez à la plomber , & à continuer
utilement votre ouvrage. Si c’eft la tympe qui eft
brûlée, il faut arrêter les foufflets , boucher le feu
avec de la terre, ouvrir le mur aux deux bouts , &
y en mettre une autre, que vous maçonnerez avec
- pierre & arbue.
Comme avec l’alongement qu’on fait à la tuyère
avec de i’arbue, on peut tourner le vent plus d’un
côté que d’un autre , c’eft à un fondeur à fe fervir
de ce remède quand il voit quelques parties attaquées
, jufqu’à ce qu’il foit parvenu à les plomber.
Les barbouillages viennent des mines mal nettoyées
, mal mélangées , &en conféquence mal dirigées
, tombant dans l’ouvrage quelquefois en gros
volumes, provenans ou des morceaux détachés,
comme nous l’avons d it, ou des mines gelées, ou >
trop humides, ou trop chargées d’arbue, ou des
mines trop sèches qui courent à travers les charbons,
ou de la qualité des charbons , ou de l’inégalité des
charges ou de trop de mines. „
Dans tous ces cas, le remède eft d’augmenter le
vent, de foigner que les morceaux ne bouchent la
tuyère, en les divifant à coups de ringard fans relâche
: faites aider les ouvriers , multipliez-les ; le
moindre retard eft capable d’arrêter le vent : rectifiez
vos charbons & les mines dans lés charges qui
fuivent. Il eft avantageux d’avoir des halles qui.ga-
rantiffent -vos matériaux des gelées & de là pluie.
Dans les grandes féchereffes on humeéte les mines,
pour les empêcher de couler trop vite. Quand malgré
le travail des ringards, qui doit principalement
avoir la tuyère pour but, vous avez lieu de craindre
que la quantité ou la qualité des matières qui
tombent deffus, n’infirment l’ouverture ; irifinuez-y
des charbons forts, qui entretiendront un degré de
chaleur dans cette partie.
Arts & Métiers.• Tome IL Partie IL
En général, quand un dérangement viendra de
manque de chaleur, gardez-vous bien de faire comme
la .plupart des fondeurs qui diminuent la quanrité
de mines ; au contraire, entretenez le même degré
tout au moins, mais choififfez celles qui fondent le-
mieux, ou joignez-y de la caftine.
Ces accidens fonttoujours très-mauvais; le moins
eft la perte de bien des matériaux , fouvent d’une
tympe , d’une tuyère , & la fin eft quelquefois la
mife - hors.
Un fourneau eft vraiment un eftomac qui veut
être rempli avec égalité, uniformité & fans relâche
; fujet à des altérations par le défaut de nourriture
, à des indigeftions & crudités par la qualité ou
l’excès, & veut des remèdes prompts. Vous connoif-
fez le mal aux fcories. Les mines chargées d’arbue
les rendent fi tenaces, qu’il faut les tirer avec les
crochets, les vuider à la pelle ; de forte qu’il en refte
beaucoup qui n’ont pu fe féparer de la fonte : le trop
de caftine les rend trop fluides , & dégraiffe, pour
ainfi parler, le métal. Les craffes des premières font
bourfoufflées, rapeufes , couleur de peau de crapaud
; les craffes des fécondés font blanchâtres &
légères. Les digeftions louables font d’un beau noir
p oli, mêlé de verdâtre.
Il arrive encore qu’il s’attache dans l’ouvrage &
le creufet même., des morceaux qu’il eft difficile de
détacher ; quand c’eft du côté de la ruftine , il n’y a
rien à craindre : le travail du ringard, quand il y
aura beaucoup de matière en bain, en viendra
bout : fi c’eft devant la coulée, & que les ringards
n’aient pu les détacher, le plus expédient eft de
lever la pierre qui eft fous le bouchage, qu’on
nomme auffi coulée, & d’y en fubftituer une beaucoup
plus élevée. Cette opération laiffant au fond
du creufet toujours de la fonte en bain, ce qui eft
attaché fe diffoudra , aidé de la pointe du ringard ,
fur-tout f i , après avoir coulé, vous y. jettez des craffes
de forges pulvérifées, & y tournez le vent de la
tuyère.
On entend que quand le fourneau eft en feu, il
faut qu’il foit fervi nuit & jour & fans relâche , puif-
que le moindre refroidiffement coagule les matières
en fufion : quand néanmoins il arrive quelque réparation
à faire, comme aux foufflets, on prend le
parti de le boucher. Quand les parois font de bri-,
que & l’ouvrage de grès, & qu’il n’y a rien d’en-:
dommagé , voits pouvez le vider entièrement
boucher le deffus avec une plaque de fonte garnie
d’arbue , pour ôter la communication à l’air ; fermer
la tuyère & le devant avec de l’arbue, achevant de
couvrir le devant par une grande quantité de fafins
fecs. Quand les parois & l’ouvrage font de pierre
calcaire , que lamoindre fraîcheur mettroit en difïo—
lution, vous laiffez fondre toute la mine qui eft dans
le fourneau , ne faifant les charges que de charbon,'
& vous bouchez çxaélement ; s’il ne prend point
d’air , vous trouverez au bout de plufieurs jours le
charbon à la même hauteur. En recommençant le
travail, vous ne lui donnerez de la mine que pat
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