
plomb, j’y en mis aufli d’enduits de diverfes autres
matières que je m’étois propofê d’éprouver en même
temps. Comme mon deffein ètoit d’adoucir le tout
parfaitement, j’y fis tenir le feu pendant quinze
heures, & je penfois que c’étoit au moins deux à
trois fois plus de temps qu’il n’êtoit néceffaire.
Cependant, quand je vins à retirer les ouvrages
du fourneau , je ne trouvai pas même les plus,
minces entièrement adoucis, Si, tous etoient confi-
dérablement écaillés.
Q u’on me permette de continuer le détail dans
lequel j’ai commencé à entrer, de pourfuivre l’hif-
toire de ces expériences ; elles doivent nous donner
des idées plus jtiftes, plus précifes, fur les caufes ,
de l’adouciffement, & fur la manière de le conduire
, que celles que nous avons eues jufqu’ici. Si
nous rapportions fimplement les réfultats de ces-
expériences * pour prouver ces réfultats , il nous
faudroit revenir, & peut - être plus d’une fois, à
parler de ces mêmes circonftances que nous aurions
omifes ; nous ne gagnerions rien du côté de la
brièveté : ce feroit avec moins de clarté que nous
déduirions les principes, que nous avons à établir.
Pour revenir donc au fingulier & mauvais fuccès
de l’expérience dont je viens de parler, je l’attribuai
à ce que les enduits .étoient peut-être trop
humides brique je les avois mis dans le fourneau ;
que l’humidité les avoit foulevés on s’évaporant
trop fubitement ; qu’elle avoit ouvert des paffages
au feu pour attaquer le fer & le faire écailler. Ten-
duifi$ de nouveau d’autres ouvrages je fis fécher
avec foin les couches dont je les avois recouverts,
& je les remis dans mon fourneau de réverbère. Je
tirai des effais de temps en temps ; les premiers me
firent voir du fuccès > ils étoient adoucis auprès de
la furface ; il faut fe rappelier que c’eft toujours
par-là que l’adouciffement commence : je fis continuer
le feu, & je continuai, après quelques heures ,
à tirer des effais ; ils me contentèrent peu, lorfque
je remarquai qu’ils s’étoient éeaillês , & que, qui
pis ètoit, l’adouciffement ne fembloit pas y avoir
fait de progrès. La couche qui étoit adoucie dans
les premiers effais, ne le cédoit point ou peu en
épaifleur à la couche adoucie dans les derniers.
Cependant, pour pouffer l’expérience à bout, j’entretins
pendant cinquante-trois heures un feu que
je croyois ne devoir être néceffaire que pendant
quatre à cinq. Enfin, je l’éteignis-Tous les ouvrages
qui furent tirés du fourneau , n’avoient pas une
couche adoucie plus épaiffe que celle des effais qui
furent examinés les premiers ; mais ils avoienî beaucoup
plus d’écailles : le milieu étoit blanc, & au
plus piqué de quelques points.. noirs. J’avois renfermé
dans des creufets bien lutés, des morceaux
de fonte entourés de la même ppudre qui compo-
feit l’enduit des autres. Ici l’on ne pouvoit pas reprocher
à l’enduit d’avoir mal défendu le fer contre
la flamme, & d’avoir par-là occafionné les écailles ;
cependant les morceaux de fer qui n’avoient eu
aucupair, étoient très - confidêrablement écaillés.
Une feule obfervation , à laquelle je fus heu-
reufement attentif, me parut propre à découvrir la
caufede ces mauvais fuccès, & le moyen infaillible
d’en avoir de meilleurs. Pour tirer de l’obfervation
dont je veux parler les mêmes conféquences que
nous en tirâmes, il faut avoir préfent l’ordre dans
lequel fe font tous les progrès de l’adouciffement
de la fonte blanche. Rappelions - nous donc que
dans de la fonte très - blanche qui fe cuit dans un
creufet au milieu de la compofition d’o s , & de
charbon , les premiers degrés d’adeuciffement fe
font a-percevoir près de fa furface, & font marqués
par des points gris dont elle- devient piquée en
cet endroit. A mefure que radoueiffement avance,
des points gris paroiffent à de plus grandes diftaïices
de la furface, & le nombre de ceux qui en étoient
proches fe multiplie ; car par la fuite elle devient
entièrement grife , & entièrement grainée. Cette
grainure paffe fucCeflivement par différentes nuances
de gris , de plus grifes en plus grifes, & qui fuc-
ceflivement gagnent le centre : enfuite des nuances
les plus grifes , il fe fait un retour à des nuances de
plus claires en plus claires, toujours en commençant
par la furface. Enfin , l’adouciffement étant
pouffé plus loin, il fait paroître un cordon femblable
par fa couleur & fà tiffure à la caffure de divers fers
forgés. Voilà l’ordre ordinaire. Quand lé cordon de
fer commence, l’intérieur eft adouci, eft devenu
tout graine; il eft gris. L’obfervation dont je veux
parler, c’eft que je remarquai que les fers fondus,
que je retirai du fourneau de réverbère , avoient
tous à leur Caffure le cordon ; mais que plus avant
ils n’étoïent ni gris, ni grainés : leur tiffure & leur
couleur y étoient prefque les mêmes que lorfqu’ils
avoient été mis au feu ; à peine étoient-ils piqués
de quelques grains gris.
Je fa vois que cette fingularité ne pouvoit être
attribuée à la mine de plomb , comme mine de
plomb ; car, pendant que les fers avoient foutenu fi
inutilement l’aftion du feu du fourneau , j’àvois
expofé au feu de forge, delà fonte épaiffe renfermée
dans un creufçt ou elle étoit enveloppée de mine
de plomb : çet-te fonte y avoit été adoucie dans
moins de trois quarts d’heure, au point de fe laiffer
très-aifément limer & percer ; mais comme le'feu
n’avoit pas duré aflêz, elle n’avoirpas pris de cor-»
dqn de fer. De la fonte qui avoit fouffert le feu
pendant cinquante-trois heures , avoit un cordon
de fer à fa furface , & n’étoit point adoucie inté-»
rieurement ; celle qui n’avoit fouffert lé feu que
trois quarts d’heure, étoit adoucie à fond, Sc n’avoit
point encore de çprdon de fer.
— Ces expériences ainfi. «emparées, me parurent
! démontrer qu’il ne falloit chercher le vrai dénoue*
I ment“de ces variétés que dans la différente activité
du feu qui avoit été employé. La crainte de faire
fondre les ouvrages de fer mis dans le fourneau de
réverbère, m’avoit empêché de rendre ce feu aufli
violent qu’il eût dû l’être ; les ouvrages n’y étoient
pas devenus blancs ; ils avoient peu paffé la couleur
F E R
'de cerife : il n’en avoit pas été de même de la fonte
qui avoit été mife dans le creufet expofé au feu de
forge. Voilà donc comme je raifonnai alors , &
comme nous devons raifonner à préfent , pour
rendre raifon de tous ces phénomènes. Si l’on
chauffe un morceau de fe r , & qu’on ne lui donne
pas tout le degré de chaleur qu’on peut lui donner,
ce fer fera plus chaud auprès de fa furface que vers
l’intérieur; c’eft par la -furface que la chaleur commence.
Une pièce de fer très-épaiffe pourroit être
rendue rouge à fa furface, pendant que l’intérieur
de la même pièce feroit encore tout noir.. Cela
étant, fi un ouvrage de notre métal, enduit comme
il le doit être pour être adouci, n’eft échauffé que
jufqu’à un certain degré , ce degré pourra être tel
près de la furface, qu’il foit fuffifant pour y adoucir
la fonte, c’eft-à-dire, pour lui enlever les foufres
& les fels auxquels elle doit fa dureté , mais les lui
enlever lentement & peu à peu. Plus avant, où la
chaleur a moins de force, elle ne pourra rien , ou
pourra peu. Continuons ce degré de chaleur : les
progrès de l’adouciffement ne feront que pour ce
qui eft près, de la furface; là le fer perdra de fa
blancheur, il deviendra piqué de points gris : ces
points fe multiplieront , le fer aura une couche
grainée, & fncceflivement cette couche paffera par
les grainures différentes, & arrivera au cordon de
fer forgé ; une plus longue durée de feu ôtera à ce
cordon de fes foufres ; & s’il lui en ôtç jufqu’à un
certain point, il .le defféchera trop , les parties du
fer ne feront plus affez liées enfemble : la première
couche trop defféchée fe brûlera, & ne deviendra
plus qu’une écaille, ùn fer-noir, caflant, nullement
ductile, qui ne tiendra plus à la couché fuivante.
Tout ce que fera un pareil feu continu, ce fera de
former de nouvelles écailles à mefure que l’adou-
ciffemejit pénétrera un peu plus dans fintérieur.
Des fers qui auront foutenu le fou pendant plus
d’heures, étant caffés, ne laifferont pas voir fur leur
caffure dq£ couches adoucies plus épaiffes ; mais ils
auront de plus épaiffes écailles. C’eft précifément
ce qui s’étoit paffé dans les deux fournées dont j’ai
parlé. Les morceaux de fonte tirés du feu après
fept à huit heures, étant refroidis & caffés , fai-
foient voir fur leur caffure dos couches adoucies,
aufli épaiffes que les morceaux de fer retirés du feu
après cinquante-trois heures ; le feu n’avoit donc
ete employé pendant la plus confidérable partie du
temps, qu’à former des écailles.
Donnons à préfent Un feu plus violent à d’autre^
pièces enduites comme les premièces. Echauffons
autant & plus le centre de celles-ci, que nous n’avons
échauffé la furlace des autres. Alors nous mettrons
les foufres du centre en état de partir ; continuellement
ils feront enlevés. Lorfqu’une pièce aura
pris à fa furface un cordon de fer forgé, nous n’au-
Tons pas à craindre qu’elle s’écaille, parce que les
foufres qui s’échappent de l’intérieur abreuvent continuellement
ce cordon de fer; ils lui rendent ce
Sus le feu lui fait perdre.
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Nous avons averti ailleurs que l’adouciffement
eft d’autant plus prompt que la chaleur* eft plus
confrdérable. Mais pour les ouvrages enduits, ce
n’eft pas affez de regarderie grand degré de chaleur
comme' plus avantageux, il devient néceffaire. De
là il fuit que l’attention efferitielle à avoir pour
adoucir des ouvrages recouverts d’un enduit, c’eft
de les chauffer confidêrablement nous avons déjà
fait remarquer que ’cet enduit ne peut, jamais être
fait d’une compofition qui contienne beaucoup de
matière huileufe : par conféquent la furface du ♦
fer s’écaillera fi elle n’eft humeâée par ce qui s’eif
échappe de l’intérieur de ce fer même.
'Le grand avantage de cette façon de l’adoucir j
eft aufli la facilité de réchauffer promptement.
Qu’on ne foit point inquiet de ce que le fourneau
de réverbère dont n.ous avons parlé n’a pas produit
affèz d’effet ; on lui en fubftituera aifément qui donneront
toute la chaleur néceffaire, & où l’adoucif-
fement fera aufli prompt qu’on peut le fouhaiter.
Pour travailler en grand félon notre première
façon (Tadoucir , on renferme les ouvrages dans
des caiffes où il eft long de les amener à un degré
de chaleur confidérable, fur-tout ceux qui en occupent
le milieu & qui ont de l’épaiffeur. Pourquoi,
demandera-t-on, ces ouvrages fi lentement échauffés
ne s’écailleront-ils pas? Ils s’écailleroient aufli s’ils
n’étoient entourés que de poudre d’os ;- & nous
avons trouvé que, pour arrêter la- produ&ion des
écailles, il étoit néceffaire d’y joindre la pouflière
de charbon ; que celle-ci empêche la furface du fer
d’être trop promptement defféchée ; qu elle lui redonne
de la matière huileufe. Nous avons alors affez
expliqué à quoi fervoit cette poudre : mais nous
voyons de plus à préfent jufqu’à quel temps elle
doit être d’ufage ; qu’elle ne l’eft que jufqu’à ce que
le centre d'une pièce ait-été fuffifamment échauffé
pour s’adoucir. oi dans cet inftant on pouvoit féparer
tout le charbon qui a été mêlé avec les^os, les os
feuls ne feroient plus écailler le fer. Nous verrons
pourtant dans l i fuite, qu’il y a un temps où la
poudre de charbon deviendroit néceffaire : ellè l’eft
au commencement & à la fin de l’opération.
. Ce n’eft qu’à mefure que les faits différens fe
multiplient, qu’on peut multiplier les explications
sûres. Il m’étoit. arrivé plufieurs fois d’adoucir du
fer fondu dans de petits creufets pleins de feule
poudre d’o s , fans qu’il s’y fût écaillé ; j’avois cru
que, quelque circonftance particulière , difficile à
démêler, avoit empêché les écailles de paroître.
Cette circonftance eft, que les petits creufets avoient
été mis au feu de forge ; le centre du fer y étoit
devenu chaud ^u point de s’adoucir‘avant que les
écailles euffent le temps de fe former fur fa furface.
Nous avons répété, 8t même de refte, que les
ouvrages recouverts d’un fimple enduit peuvent être
échauffés vite, & à quel point on le veut. En continuant
des effais fur cette manière d’adoucir, &
- toujours avec la mine de plomb, je ne pus voir
fans furprife combien la durée de l’opération fe