
èpaiffe : elle fera en rifque de mal venir. Mais fi
l’ouvrage demande abfolument qu’il y ait des parties
très-groffes, très-renflées , qui tiennent à des
parties minces, le plus lur fera de mettre les noyaux
dans les endroits renflés, afin qu’ils viennent creux:
la forme de l’ouvrage n’en fera point changée, &
les endroits qui auroient été considérablement trop
épais, n’ayant plus qu’une épaifleur proportionnée
à celle des parties minces, avec lefquelîes ils tiennent
, il n’y aura plus la même difpofition à s’y
faire des vides qu’on ne veut pas. La manière de
tirer les jets contribue encore extrêmement à faire
venir les pièces avec plus ou moins de foufflures :
il y auroit bien des préceptes à donner, fi on vouloir
en donner pour tous les cas qui peuvent fe
préfenter ; mais un feul avis peut difpenfer d’entrer
dans ce détail. Quand il fera arrivé qu’une pièce
fera mal venue, parce que quelque partie ne fe
fera pas bien remplie, on tirera les jets d’une autre
façon la fécondé fois qu’on moulera cette pièce.
On n’aura pas varié ces tentatives trois à quatre
fois par rapport aux pièces les plus difficiles, qu’on
parviendra à trouver la bonne direâion des jets ;
& une fois trouvée, c’eft pour toujours pour de
femblables pièces.
Il eft arrivé à des pièces que je n’avois pas mis
refroidir à une chaleur douce, de fe cafler plufieurs
heures, & même un jour après qu’elles avoient été
entièrement refroidies : cet accident arrive aulîi
quelquefois au verre. M. Homberg, pour conferver
les verres auxquels il avoit fait prendre l’empreinte
de pierres gravées, les égrifoit tout autour ; & il
prétendoit qu’alors ils. étoient hors de rifque. On
défigureroit nos ouvrages de fer fondu, fi on les
égrifoit ; on pourroit tout au plus faire cela à leurs
jets : mais cet accident m’a paru fi rare, qu’il ne
me femble pas être de ceux à qui il importe beaucoup
de trouver remède ; & je doute même que
les ouvrages qui, après avoir été tirés du moule,
auront été refroidis au milieu des charbons, y
foient fujets.
Un dernier avertiffement que je donnerai encore
aux fondeurs, fera de faire les jets, les canaux qui
conduifent la matière dans les creux des moules, le
plus minces qu’il leur fera poffible; qu’ils ne donnent
aux jets & évents que ce qui eft néceffaire pour que
la matière coule facilement; qu’ils compenfent autant
qu’ils pourront par la largeur, ce qu’ils donne-
roient en profondeur, au moins lonqu’il s’agira
d’ouvrage qu’on aura befbin d’adoucir. Il feroit dé-
fagréable d’être obligé d’adoucir avec eux tous les
jets qui y tiennent : il faut donc cafler les jets. O r ,
s’ils ont Fépaiflfeur ou une épaifleur approchante de
celle de quelques-unes des parties de l’ouvrage,
dans le temps qu’on frappera fur le je t , il arrivera
fouvent qu’on caflera quelques - unes des parties
minces , qui ne feront pas expofées à cet accident,
fi les jets font minces.
Quand il y a de gros jets, & qu’on veut abfolument
les abattre, tout ce que j’ai trouvé de plus
fur, c’eft de mettre fouvrage à la forge, & de le
faire rougir fur-tout où on veut le cafler ; on le portera
enfiiite fur l ’enclume ; on fera enforte que la
partie qu’on veut féparer du refte n’y pofe point à
faux : on mettra deflùs un cifeau, & l’on frappera
fur le cifeau, comme pour lui faire couper du fer
forgé, mais pourtant à petits coups.
30. EJjfais de différentes matières pour adoucir le fer.
Nous fuppofons qu’au moyen des arts connus,
une fonte blanche & bien affinée a été fondue &
jetée dans des moules dont elle a rempli exactement
les empreintes ; en un mot, qu’on a ou qu’on
peut avoir des ouvrages de fer fondu bien condition*
nés, mais qu’il refte à les adoucir, pour leur ôter
partie de leur roideur, & fur-tout leur dureté, &
les mettre en état de fe laiffer réparer. L’importance
dont ce fecret m’avoit paru, me l’a fait chercher il
y a déjà long-temps, & même avant que je fon-
geaffe à celui de convertir le fer en acier. Il n’y
avoit pas de doute qu’il ne fallût faire agir le feu
pour opérer dans le fer fondu un changement pareil
à celui que je fouhaitois ; mais je croyois avoir
preuve que l’on ne devoit pas l’attendre de l’aélion
immédiate du feu dans les contre-coeurs des cheminées
des groffes cuifines, qui confervent leur dureté
, quoiqu’ils aient refté pendant longues années
en une place où ils ont été chauffes vivement & à
; bien des reprifes. Quoi qu’il- en foit de cette idee,
je penfai qu’il falloit renfermer dans des creufets le
fer fondu qu’on cherchoit à adoucir, & l’entourer
de matières qui, avec le fecours du feu, feroient capables
de produire *cet effetr
Après diverfes tentatives, dont quelques - unes
m’avoient fait croire que j’étois dans la bonne voie,
j’abandonnai pour quelque temps ce travail, pour
fuivre celui de la converfion du fer en acier, qui
étoit en quelque forte la matière du temps. Tous
les jours on voyoit des gens qui fe préfentoient avec
ce prétendu fecret, & qui répondoient mal aux ef-
pérances qu’ils vouloient donner. J’ai dit que j’abandonnai
mes expériences fur le fer fondu, pour
fuivre celles de la converfion du fer en acier ; j’au-
rois dû dire que je crus les abandonner : je les
continuai réellement, en travaillant à convertir le
fer en acier, mais d’abord fans y penfer. Je me trouvai
bien du chemin fait pour adoucir le fer fondu;
je me vis difpenfé de bien des expériences compo-
fées, par lelquelles il eût fallu paffer avant de parvenir
aux expédiens fimples qui fuffifent ic i, Ion*
que je fis attention à la manière de rectifier les aciers
qui ont le défaut de fe laiffer difficilement forger ,
ou , ce qui eft la même chofe, à la manière de dé-
cômpofer l’acier. ~
En phyfique, l’expérience & le raifonnement
doivent s’entre-aider ; ceux qui ne veulent que des
expériences , & ceux qui ne veulent que des raifon-
nemens, s’ôtent la moitié des fecours néceffaires
pour avancer dans la phyfique utile. Toutes mes
réflexions & toutes mes expériences fur la nature
du fer & de l’acier m’avoient donc appris qu’en con-
vertiffantle fer en acier, on le rapprochoit du premier
état où il avoit été ; que plus il étoit, pour ainfi
dire, acier, plus il étoit proche de redevenir fonte
de fer ; que les aciers trop pénétrés de Tels & de
foufres, avoient de commun avec la fonte, de fe
laiffer forger difficilement, & de fe laiffer plus aifé-
ment ramollir par le feu que l’acier & le fer ordinaire.
Nous avons même cru être conduits par ces
raifonnemens & ces expériences, à conclure que la
fonte, de fer bien affinée, bien pure, eft une forte
d’acier, mais la plus intraitable de toutes. L’acier
difficile à forger devient un acier qui foutient bien le
marteau, fi on lui enlève fes foufres & fes Tels fu-
perflus : la fonte a encore plus de foufres que l’acier
ordinaire, quel qu’il foit.
Qu’y avoit-il de plus naturel que de pouffer plus
loin ces conféquences ; de penfer que, fi la fonte ,
le fer fondu , eft abfolument incapable de foutenir
le marteau, & eft en même temps fi dure, c’eft
qu’elle eft exeeffivement pénétrée de foufres & de
tels ; que c’eft ce qui la rend en même temps plus
fufible, plus aifée à ramollir par le feu que ne font
le fer forgé & l’acier ? Je n’eus nulle peine à croire
que des foufres fuffent capables d’augmenter jufqu’à
ce point la dureté d’un métal. On connoît la grande
dureté de certaines pyrites qui ne font ni métal, ni
pierre, quoiqu’on leur donne fouvent ce dernier
nom affez improprement, qui ne font prefque que
foufres & Tels. Qu’on les réduife en poudre & qu’on
les mette fur les charbons-, elles y brûlent pref-
qu’entièrement; elles y flambent comme le foufre
commun, & répandent la même odeur. Cependant,
ces mêmes pyrites font fi dures , qu’aùtrefois on en
faifoit, pour les arquebufes à rouet, un ulàge pareil
à celui qu’on fait aujourd’hui des cailloux pour les
fufils.
Dès que jè crus fuffifamment établi que la dureté
de la fonte de fer étoit produite par les foufres & les
fels dont elle eft pénétrée, il me parut que le fecret
de la ramollir, de l’adoucir, n’étoit que celui de lui
enlever une partie de fes foufres ; & que le moyen
d’y parvenir devoit être le même pour le fond, que
celui que nous avons employé pour corriger le défaut
des aciers difficiles à forger. Vraifemblable-
ment les mêmes procédés & les mêmes matières qui
avoient enlevé aux aciers intraitables leurs foufres
fuperflus, qui pouvoient même ramener ces ac-iers .
à être fer, dévoient opérer quelque chofe de fem-
blable fur les fontes, les mettre en un état approchant
de celui du fer forgé. On fait que les matières
qui produifent ce changement dans les aciers,
font des matières terreufes des plus alkalines ; &
que celles dont l’effet eft le plus prompt fur les
aciers, font la chaux d’os, & la craie réduite en une
poudre fine.
Prefque fûr du fuccès de mon expérience, je
renfermai dans des creufets des morceaux de fonte
blanche fort minces : ceux de quelques creufets
étoient entourés de chaux d’o s , & ceux des autres
de craie. Je donnai quelques heures de feu à ces
creufets, après quoi j’en retirai mes fontes. Lorfque
je vins à les effayer, je trouvai tout ce que j’avois
efpéré ; que les fontes , de dures, de rebelles à la
lime quelles étoient, s’étoient ramollies au point de
fe laiffer limer comme le fer.
Je comptai pourtant un peu trop fur ce fuccès ;
j’eus bientôt une nouvelle preuve dé ce dont on a
tant d’expériences, que les conféquences du petit au
grand ne font pas toujours bien certaines : je fis jeter
en moule des pièces de fer fondu d’une grandeur
raifonnable, épaiffes de plus d’un pouce, ou d’un
pouce & demi : elles étoient chargées d’ornemens ;
je les entourai de toutes parts de chaux d’o s , je les
renfermai dans un fourneau pareil à nos fourneaux
à acier, où elles pouvoient chauffer fans être expofées
à l’aâion immédiate de la flamme : elles y
foutinrent le feu pendant près de deux jours , & ce
n’étoit point trop pour leur épaifleur. Lorfque je
vins à les tirer du fourneau, je trouvai bien du mécompte:
ce n’eft pas que les ouvrages n’euffent été
adoucis autant que je me l’étois promis ; ils étoient
aifés à travailler : mais ils avoient un défaut qui s’ac-
commodoit mal avec l’efpérance des grands ufages
dont je m’étois flatté; leurs premières couches
s’en alloient toutes en écailles ; les feuillages minces
, les traits délicats qui étoient dans le modèle
& qui étoient bien venus dans l’ouvrage moulé,
étoient emportés par ces écailles. On eût pu travailler
ces pièces ; mais il eût fallu employer bien du
temps pour réparer tant de défordres. Ce ne feroit
pas affez que d’adoucir le fer fondu de cette façon ;
il ne feroit prefque d’aucun ufage pour les ouvrages
délicats.
Les mêmes principes qui avoient conduit à le
rendre aifé à travailler , conduifoient à découvrir la
Caufe de cet accident, & me firent efpèrer d’y trouver
remède. Les matières terreufes , alkalines , fe
chargent, s’imbibent des foufres dont le fer fondu
eft pénétré ; mais pendant une longue durée de feu ,
elles en enlèvent trop aux couches les plus proches
de la furface ; elles dépouillent les premières de tout
; ce quelles ont d’on&ueux , de ce qui lioit leurs parties
: ces parties alors fe trouvent défunies, & fe
détachent à la, fin fous la forme d’écailles friables ,
femblables à celles qui tombent de deflùs le fer qu’on
forge au marteau , ou du fer qui a été trop chauffé.
Ces écailles font d’autant plus épaiffes & en plus
grand nombre, que l’a&ion du feu a été plus longue.
Il n’arrive rien de femblable à des morceaux de
fonte qui ne foutiennent le feu que peu d’heures ; &
de là étoit venu le fuccès de mes premières expériences.
Je penfai qu’à ces matières trop abforbantes, qui
ne rendent point au fer ce dont elles fe font faifies ,
il falloit joindre une autre matière qui modérât leur
effet, qui, quoiqu’elle ne pût rendre au fer autant
qu’on lui ôteroit, fourniroit au moins affez de parties
huileufes pour hume&er ce qui fe feroit trop
defféché ; faire quelque chofe d’à peu près équiva*
O o o o ij