
nature en puiffe faire un fer doux. Ne pourroît-on
pas encore foupçonner que les entrepreneurs du
moulip' d’Effonne ne fe-contentant pas de l'avantage
réel de la machine, aient cherché à y joindre du
merveilleux ,'8cà furprendre l’attention de MM. les
commiffaires , par le changement impofiible du fer
caflant en fer doux ?■ Nous avons l’expérience confiante
de la diverfité des fers entre1-eux. Ces- fers ,
après le travail des applatiffoirs , relient chacun
dans leur nature , mais- feulement plus épurés^
Ori a tenté plufieurs fois de filé r le fé r dans les
cylindres ,* on doit être convaincu que fur - tout
pour dégroffir, il n’a manqué que l’exaélitùde 8c la
précifion.
A rt. X I I . Batterie.
L ’équipage d’une forge & d’une batterie eft le
même ; une cheminée, deux foufflets mus par l’eau,
lin atelier de marteau : la différence eff qu’au foyer
d’une batterie ., il n’y a point de contrevent du
deffus, ni d’aire ; que le fond eff à environ fept
pouces de la tuyère , le trou du chib à la hauteur
de la tuyère ; le bafche dans l’intérieur de la cheminée,
couvert ; c’eft par fon côté que fè met le
charbon. Les marteaux font de la même forme
que ceux dé forge ; ils ne pèfent que quatre à cinq
cents.
L’objet des batteries eff de rendre le fer de forge
propre à différefis ufages , par fon étendue, fon
peu d’épaiffeur, fa foupleffe ; il prend alors le nom
général de tôle , & les fîirnoms particuliers de
rangette, à étrille, à ferrure, à cric , p'alafl're , ronde,
couvercle de four, enfeignes, fers de charrue. La différence
de ces efpèces cpnfifte dans l’étendue & l’é-
paiffeur ; ce qui les fait chauffer 8c battte différemment;
Pour faire la rangette on coupe le fer , qui,
-au fortir des forges , eff d’environ trente lignes de
largeur fur douze d’épaiffeur,. en morceaux pefant
environ huit livres : chaque morceau fe chauffe à
Liane, & fe bat en deux chaudes, puis on le plie
en deux, & s’appelle doublon ; & en deux autres
chaudes, on lui donne la largeur d’environ quatre
pouces, fur douze à treize de longueur; ce qu’on
appelle arbelagefDQ-Yà. , on prend quatre doublons
enfemble , trempés en eau d’arbue , pour empêcher
les feuilles de fe fouder les unes aux autres : on les
c&anffe couleur de cerife, & bat à quatre chaudes ;
ce qui leur donne environ dix pouces de largeur,
& dix-neuf à vingt de longueur. On y joint quatre
autres doublons en pareil état, 8c on bat les huit
doublons en deux chaudes couleur de cerife , qui
les réduifent à leur dernière perfeâioii. La; rangette
porte quatorze à quinze pouces de largeur , fur
vingt-un à vingt-deux de longueur : il entre ordinairement
huit doublons dans un paquet pefant cinquante
livres , poids de marc ; les paquets fe lient
en deux‘endroits avec des bandes de tôle coupées
à la cifaîlle. Quand les feuilles font plus larges ou
plus longues les unes qpe les autres 3 ouïes égalife
avec les cifailles ; quand il y en a de. percées, cre-
vàffées, ou mal fabriquées., on les coupe pour faire
lès liens ; ces liens fervent à la ferrure des féaux &
autres ; on en fait même quelques paquets.
La tôle à étrille , de dix à onze pouces, fur trente
à trente-deux, fe bat en fix doubles, avec autant de
chaudes que la rangette : huit à neuf doublons au
paquet de cinquante livres.
La tôle à ferrure de différens échantillons, fe bat
en un doublon à différentes chaudes , fuivant la largeur
8c épaiffeur.
Le palaftre fe bat en feuilles de neuf à quatorze
pouces de largeur, fur quatre à dix pieds de longueur
8c de différentes épaiffeurs : c’efl; avec le palaftre qu’on
garnit le bas des portes cochères , les bornes, 8tc.
La tôle à réchaud , de fix à fept pouces , fur
vingt-un à vingt-deux, fe bat à huit doublons : 20
à ai au paquet de cinquante livres.
La tôle à cric pour les- équipages , de fix à fept
pouces de largeur, fur quatre à cinq lignes.d’épaiffeur
, 8c quatre pieds environ de longueur , fe bat
en feuilles.
La tôle à enfeigne fe bat en feuilles à quatre enfemble
, portant treize à quatorze pouces de largeur,
fur dix-huit de hauteur , une ligne d’épaiffeur ; on
peut en battre de plus grandes..
Les tôles rondes pour poêles 8c poêlons , fe
battent en deux feuilles , ménageant un endroit plus
étroit au milieu de la feuille ; c’eft où on lès pfte : cet
excédent eft pour fouder la queue ; elles fe finiffent
en les élargiffant à deux doublons.
Les couvercles de four fe battent en feuilles à demi
rond en quatre chaudes ; 8c on achève de les battre
quatre enfemble.
Dans toutes les tôles, les feuilles du milieu
s’élargiffent toujours plus que les autres ; c’eft pour
cela qu’aux deux dernières chaudes on les change.
C’eft aufli dans les batteries qu’on prépare les
tôles pour le fer blanc ; elles fe battent à plufieurs
doublons, entre un marteau 8c une enclume bien
dreffés. Les feuilles fe coupent d’échantillon à la ci-
faille , 8c fe vendent au cent pour être blanchies &
étamées.
Les fers de charrue fe battent feuls à différentes
chaudes , fuivant leur force 8c étendue ;, on en fabrique
de huit jufqu’à quinze livres.
Pour fabriquer un millier de tôle afforti de plufieurs
échantillons, on paffe au maître batteur 1060
jufqu’à i ioo de fer, 8c 30 ou 3:5 vans de charbon ;
je van équivalant à cinq pieds.
Le maître batteur doit avoir foin du foyer, de
l’équipage du marteau,. qu’il doit bien dreffer, 8c de
tous les outils. Dans lés batteries où l’eau 8c les matériaux
ne manquent- pas , les ouvriers fe relayent
comme dans les forges : quatre ouvriers peuvent faire
cinq à fept cents dé tôles en vingt-quatre heures ;
cela dépend beaucoup du fer , du charbon , de l’eft
pècé de marchandise 3, 8t de l’adreffe des ouvriers'
On fait aller une batterie en groffes forges , quaheï
on le juge à propos ; il n’y a que le foyer à changer.
A r t . XIII. La filerie.
L’objet de la filerie eft de donner au fe r , par la
figure ronde, la furface polie 8c égale , la diverfité ,
la flexibilité, un degré d’utilité qui s’étend depuis
les baguettes de dix lignes de diamètre, en nuances
infiniment multipliées , juiqu’à nous procurer les
plus fines cordes des tympanoras, même de remplacer
la fineffe des cheveux : nous n’entendons ici
que donner l’explication de la manufacture , fans
indiquer tous les ouvrages auxquels le fer filé s’emploie.
• ;
Filer le f e r , eft l’obliger de paffer par des ouvertures
dont il prend le diamètre : comme ce travail
demande beaucoup de forcé, on a eu recours à l’eau
pour faire mouvoir une roue. On a un cylindre de
bois tournant fur fes empoifes ; ce cylindre eft armé
de cames, q u i, appuyant fur une queue , la, fait
baiffer ; elle eft relevée après le paffage de la came,
par une perche élaftique, tenant à la queue par la
chaîne. La queue ne peut baiffer , que le montant,
auquel elle'eft attachée, ne foit tiré en arrière, 8c
ce à proportion de la longueur de la came : ce
montant a un mouvement libre de deyant en arrière
, par une cheville de fer qui le traverfe dans
la pièce de bois.
Au devant du montant il y a un anneau de fer
dont la racine eft arrêtée de l’autre coté par une clé ;
cet anneau s’appelle davier ; il reçoit un crochet de
l’anneau de la groffe tenaille ; cet anneau , avec fon
rolongement 8c fon crochet , s’appelle chaînon.
’anneau du chaînon enfèrme les bouts ceintrés de
la tenaille ; le montant ne peut être tiré , que le
chaînon ne le foit, ainfi que la tenaille , dont les
mâchoires ferrent à proportion que les branches font
ferrées, 8c décrivent en reculantautant d’efpace que
le montant; la perche élaftique faifant remonter la
queue. Le. montant 8c le chaînon font également!
renvoyés : le chaînon ne peut être vepouffé qu’il hé
defferré les tranchés., 8c conféquemment les mords
de la tenaille. Si nous imaginons que la tenaille tienne
un morceau de fer , elle le ferrera 8c tirera en reculant.
Quand elle fera defferrée , elle reprendra fa
place par fon propre poids , qui la fait couler le long
d’un plan incliné ; étant retirée , elle mordra 8c tirera,
& ainfi de fuite. Voilà ce que ç’eft qu’une filerie.
Il y a des montansaüxiqùelsie mouvement eft donné
de côté. Imaginons que le montant eft prolongé' en
en-bas; 8c que la came , aü lieu d’en abaiffer , en
pouffe la queue pour que l’ouvrier foit le maître
d’arrêter le mouvement de la tenaille : la partie qui
eft expofée au frottement de la camme , eft garnie
d’une fauffe queue bien coulante entre deux anneaux
de fer ; à la tête de la fauffe queue , prend fine corde
qtii paffant fur une poulie attachée au-deffus de l’atelier
, vient fe rendre à un morceau de bois flexible ,
attaché par une de fes extrémités au plancher, vers
1? pied de l’ouvrier, élevé de l’autre de la hauteur
de la Came ; l’ouvrier mettant le pied fur ce morceau
de bois, le fait baiffer, 6c conféquemment fait
lever la fauffe queue ; moyennant quoi, les cames
paffent fans rien rencontrer.
La tenaille eft de fer, 8c pour dégroflir, peut pefer
jufqu’à deux-cents livres; le chaînon de cinquante à
foixa nte ; il y en a de différentes groffeurs. La tenaille
peut avoir deux pieds de longueur : laforce doit être
aux branches, depuis le clou au mords. Cette
partie porte quatre à cinq pouces de largeur, fur
trois à quatre, pouces d’épaiffeur : le derrière des
mords eft évidé pour le paffage du fer, qui doit fe
tirer à côté. L’intérieur des mords eft entaillé, pour
que le fer ne puiffe s’échapper quand il eft ferré.
L’équipage eft monté fur un châflis élevé-, pour
que l’auge logé en deffus puiffe être dirigé 8c réparé,
commodément ; fur ce châflis eft fortement attachée
en plan incliné une pièce de bois de 18 à 20 pouces
d’écarriffage, nommée atelier ; le refte du châflis eft
garni de planches. Le montant eft rendu mobile pas
une mortaife pratiquée dans l’atelier , 8c ne peut fe
dévoyer, au moyen d’une broche de fer qui traverfe
la partie enfermée dans l’atelier. Quand la
queue eft en retour , l’extrémité de l’atelier eft encochée.
Quand la queue n’eft qu’un prolongement
du montant, l’atelier eft percé à jour : pour que la tenaille
defeende aifément par fon propre poids ; on
en élève les branches, 8c le deffous eft garni d’une
plaque de fer.
Contre les mords de la tenaille de l’atelier, portent
quatre montans de fer de deux pouces d’écarriffage
, fur fix pouces de hauteur , bien clavetés en
deffous, mortaifés en deffus : ces montans fe répondent
deux à deux, à la diftance de quinze à vingt
lignes ; une paire éloignée de l’autre d’environ un-
pied : c’eft dans ces montans *que fe placent les
filières.-
U ne filière eft un morceau d’acier de trois pouces
de largeur, fur un pouce d’épai,fleur, 8c deux à
trois pieds de longueur. Le morceau d’acier fe perce
en échiquier de deux rangs de trous de différens
diamètres; moitié plus larges en devant que contre la
tenaille pour l’encrée du fer , pour que le frotte-
mènt fe faffe fur une moindre étendue. Pour faire
un trou, il faut trois poinçons. Quand le morceau
d’acier,eft chauffé, on frappe furie plus gros poinçon
pour l’enfoncer jufqu’au tiers, enfuite un de moindre
diamètre , 8c finalement Le plus petit. On n’attend
point que le troifièmè poinçon perce.à jour z quand
on voit l’empreinte de l’ouverture , on laiffe refroidir
l’acier pour l’achever à froid. Les trous fe placent
à un pouce de bord 8c à un police de diftance les uns
des autres : quand ils font tous recherchés, ou trempe
la filière , 8c on la place dans les montans de fer,
où elle eft arrêtée en deffus par les clés , en deffous
8c des côtés par des coins. Il faut que le milieu de la
tenaille foit vis-à-vis les trous du bas. Quand on
veut faire travailler ceux du deffus , on ne fait que
mettre fous la tenaille une lame de fer d’un pouce
d’épaiffeur.
Ç c c ç ij