
qu’on eftime devoir le faire, c’eft-à-dire, jufqu’à
ce que l’efprit foie dépouillé de tout corps hétérogène
;*çe qu’on recoqnoît à l’odeur & à la faveur
agréables de cette liqueur.
On fait fondre du fucre blanc dans une fufïifante
quantité d’eau fimple, on le mêle avec l’efprit, &
on laide vieillir le mélange.
Cette liqueur ne peut s’exécuter en France, par
l’impolfibilité de le procurer la même qualité de
fruits ; mais on peut y fubftituer d’autres fubftances
analogues à l’odeur & à la faveur du marafquin,
telles que la fleur de pêcher, & le noyau de cerife.
Voici les procédés de M. Dubuiffon.
Première compofition du Marafquin de France.
Choififfez deux livres de fleurs de pêcher fraîchement
cueillies ; féparez-en les pétales & les étamines
, que vous jetterez dans une cucurbite javec
cinq pintes d’efprit-de-vin commun ; écrafez grof-
fièrement les calices & les piftils ; mettez-les dans
une petite badine avec deux pintes d’eau de rivière
; échauffez & entretenez ce liquide pendant
une heure au quatre-vingtième degré de chaleur.
Retirez le y aideau du , & laiffez-le refroidir
à un air libre : jettez enfuite le tout dans la même
cucurbite placée dans fon bain-marie ; couvrez-la de
fon chapiteau aveugle ; lutez la jointure ; chauffez
& entretenez la liqueur pendant trois jours, à raifon
de douze heures par jour , au foixante - onzième
degré.
Il faut procéder à la diftillation fuivant les règles
de l’art ; & quand la liqueur du thermomètre eft
montée jufqu’au quatre-vingt-unième degré, changer
de récipient & laiffer couler la liqueur jufqu’au
degré de l’eau bouillante ;’ puis démonter l’appareil
& mettre en réferve le dernier produit, pour n’en
faire ufage que dans une fécondé opération.
Nettoyez le vaiffeau ; verfez le premier produit
avec deux pintes d’eau ; placez-le dans fon bain ;
couvrez-le d’un chapiteau aveugle; lutez la jointure;
échauffez au foixante-onzième degré, & laif-
fez le liquide en digeftion aufïï long-temps que
pour l’infiifion.
Quand tout eft refroidi; on démonte la calotte;
on couvre la cucurbite d’un chapiteau armé, de fon
réfrigèrent ; on ajufte le ferpentin avec le récipient ;
on, procède à la rectification.
Cette opération, qui commence au foixante-qua-
torzième degré, doit s’effeéhier depuis ce terme jufqu’au
foixante-dix-neuvième. Alors on met le produit
en réferve, pour en faire ufage comme il fera
dit ci-après.
On change de récipient ; on laiffe couler jufqu’au
degré de l’eau bouillante ; on démonte l’appareil ;
on verfe ce dernier produit avec celui de la première
diftillation.
Seconde opération.
Lorfque les cerifes furent dans leur parfaite maturité
, dit M. Dubuiffon, je choifis trois livres de
leurs plus sjros noyaux ; je les jetai dans une terrine
de grès avec une pinte d’eaif; je les frottai
les uns contre les autres avec la paume des mains'
à l’effet de les dépouiller d’une pellicule qui eft fort
adhérente au bois, & lorfque l’eau fut falie par
cette pellicule, je la renouvellai autant de fois*qu’il
fut néceffaire.
Quand ces noyaux furent totalement mondés"
je les mis dans des clayons, & lés fis fécher en
les expofant à l’ardeur du foleil, jufqu’à ce que
la peau, qui fert d’enveloppe aux amandes qu’ils
renferment, ne donnât plus de faveur quelconque.
Les noyaux étant bien defféchés, j’écrafâi grof
fièrement bois & amandes, que je jetai dans une
cucurbite avec quatre pintes d’efprit-de-vin reftifié;
je la couvris d’un chapiteau aveugle; je lutai la jointure
, & je fis infufer pendant quarante-huit heures
au même degré de. chaleur que ci-deffus; je briffai
repofer pendant deux jours ; je tirai au clair par in-
dinaifon , & je mis cette teinture de noyau en
réferve pour en faire l’üfage que je dirai en fon
temps; je verfai quatre pintes d’eau-de-vie reCifièe,
fur le marc qui étoit refté dans la cucurbite ; je la
plaçai dans fon bain, & la couvris de fon chapiteau
aveugle ; je lutai la jointure, & je laiffai infufer
pendant quatre jours au même degré de chaleur ;
j’obfervai d’agiter avec une baguette autant de fois
que le liquide fe refroidit.
Je laiffai repofer pendant vingt-quatre heures;
je tirai également par inclinaifon, & mêlai cette
fécondé teinture avec l’efprit de fleurs de pêcher
que j’avois mis en réferve ; je verfai deux pintes
d’eau de rivière fur le marc qui étoit refté dans la cucurbite
; je l’agitai fortement de temps à autre avec
une cuiller de bois ; je coulai au travers d’un tamis ;
je jetai le marc comme inutile, & mis le liquide en.
réferve pour en faire ufage comme ci-après. Ceux
qui font confifter le mérite d’une liqueur plutôt dans
fa couleur blanche que dans fa faveur, feront diftil-
ler cette fécondé teinture au lieu de la foutirer par
inclinaifon.
Je verfai tout l’efprit aromatique que j’avois ré*
fervé, dans une cucurbite que je plaçai dans fon
bain ; je la-couvris d’un chapiteau aveugle ; je lutai
bien hermétiquement la jointure, & je fis circuler
pendant quatre jours , en obfervant d’entretenir le
liquide au foixante-dixième degré de chaleur. Pendant
que cette opération s’effeâuoit, je fis clarifier
dix-huit livres-de fucre fuivant là méthode ordinaire
: quand l’écume qui monte fut blanche, & qu®
le firop fut cuit, je tirai le vaiffeau du feu ; jé laiflai
bien refroidir , & j’y verfai les deux pintes de teinture
laiteufe provenante des noyaux de cerifes ,
que j’avois mife en réferve ; j’ajoutai enfuite l’efprit
aromatique qui avoit circulé pendant quatre jours.
J’agitai fortement le mélange , & le verfai dans
de groffes bouteilles de verre que je tins bien bouchées
; je laiffai repofer pendant huit jours, en
obfervant d’agiter.le vaiffeau une ou deux fois par
jour ; je collai & laiffai éclaircir ; je foutirai, paffai
le dépôt à la chauffe, & je mêlai le tout enfemble.
Si on exécute ces procédés avec la même exactitude
, on trouvera que l’odeur & la faveur de ce
marafquin artificiel font auffi agréables que celles
du marafquin qui a été fabriqué avec les cerifes
de la Dalmatie. Quant aux propriétés qu’orf pour-
roit attribuer à l’une ou à l’autre de ces liqueurs,
je crois être fuffifamment autorifé à conclure que
les principes de la fleur du pêcher & de la fécondé
teinture des noyaux de ceriles , font au moins auffi
falubres que ceux qui compofent la liqueur appellée
marafquin de Zara, dont l’odeur & la faveur agréables
ne proviennent que de la peau & des amandes
de ces différentes efpèces de cerifes. .A l’égard de
l’efprit ardent qu’on tire de ce fruit, il ne peut
foutenir la comparaifon avec notre efprit-de-vin
qu’après avoir été .artiftement reétifié.
Quant à la première teinture plus amère , que
, nous avons tirée des noyaux de cerifes, & qui a
[ été mife en réferve, on clarifiera fept ou huit livres
de fucre fuivant la, méthode ordinaire ; & lorfqu’il
[ fera cuit au liffi, on retirera le vaiffeau du feu, on
I laiffera refroidir, & l’on y verfera cette teinture;
I ôn agitera le mélange; on le mettra dans un vaif- i
I fèau, & on fera éclaircir comme il a été dit.
Rojfoli.
Mettez dans un alambic des rofes mufquées , du
I jafmin d’Efpagne, de la fleur d’orange, un peu de
E Canelle & de gérofle ; mettez de l’eau ; après vingt-
I quatre heures d infufion diftillez, & tirez tout ce qui
I paffera d’aromatique; mêlez-y un bon tiers en poids
I d efprit-de-vin, & fix onces de fucre par pinte. On
I colore cette liqueur en cramoifi.
Eawde Noyaux de cerifes.
I On pèfe trois livres de noyaux de cerifes prépa-
I res & deffechés ; on les écrafe; on les jette avec
I *\UIt pintes d’eau-de-vie reâifiée dans une cucür-
I bite qu’on place dans fon bain ; on la couvre d’un
IJ a?*teau av,eugie j on lute la jointure; on affujettit
I le thermomètre dans le bain ; on échauffe, & on
I ®ntretient le liquide pendant fix jours , à raifon de
I douze heures par jour, au 70e degré de chaleur.
R Autant de fois que la liqueur fe refroidit, on
I agite fortement avec une baguette qu’on introduit
■ par le tuyau de la cucurbite ; on laiffe repofer
1 pendant trois ou quatre jours ; on foutire par in-
I chnaifon ; on met cette teinture en réferve, & on
I jette deux pintes & demie d’eau de rivière fur le
I pW tpd dans la cucurbite,
I . n agite fortement avec une cuiller de bois,
I fïUls on k it clarifier & cuire au fort boulet dix-huit
I vres de fucre; & lorfque ce firop eft refroidi, on
I c°ule la teinture au travers d’un tamis ; on rejette le
I »narc comme inutile.
K « *pn_ve,rk cette liqueur laiteufe dans le vaiffeau ;
I orfqu’eüe eft bien incorporée avec le firop, on
ajoute la teinture fpiritueufe qu’on a mife en ré-
ferve; on agite le tout enfemble; on verfe la liqueur
dans de groffes bouteilles de verre, & on la fait
éclaircir fuivant la méthode ordinaire. •
Eau de Noyaux d’abricots.
Il y a beaucoup de petites recettes domeftiques
pour faire l’eau de noyaux d’abricots ; mais il faut
s èn rapporter à cet égard , comme dans, tous les
prodmts de l’art du diftillateur-liquorifte, à M. Du-
bmffon qui raifonne fi bien toutes fes opérations.
Voici fes procédés.
Ils confiftent d’abord à faire un bon choix de
vingt onces d amandes d’abricots bien nourries
on les jette dans l’eau bouillante; on agite avec
1 ecumoire , jufqu’à ce que la peau s’enlève en
prefiant 1 amande entre les doigts : alors on retire *
le vaiffeau du feu ; on coule le liquide ; on jette les
amandes dans l’eau froide, & on les monde de leur
ecoree ; puis on les fait fécher, foit à l’étuve, foit
en les expofant à l’ardeur du foleil, jufqu’à ce
qu elles foient caftantes.
On les écrafe groflièrement dans un mortier de
njarbre, & on les jette, avec neuf pintes d’eau-,
de-vie reélifiée , dans une Cucurbite qu’on place
dans fou bain-marie; on la couvre d’un chapiteau
aveugle; on lifte la jointure, puis on échauffe &
on entretient le liquide pendant fix à fept jours, à
raifon de douze heures par jour, au 70e degré d e .
chaleur; & chaque fois que la liqueur fe refroidit,
on agite fortement avec une baguette qu’on introduit
dans le vaiffeau diffillatoire.
On laifle repofer pendant deux ou trois jours •
on démonte le vaiffeau ; on foutire par inclinaifon ’
& on jette deux pintes & demie d’eau de rivière
fur le marc qu’on laiffe encore infufer pendant trois
ou quatre heures , en obfervant d’agiter de temps à
autre : on coule enluite au travers d’un tamis ; on
rejette le marc comme inutile, & on verfe la liqueur
laiteufe avec l’efprit de noyaux qui a été mis
en réferve.
Quand on veut paffer à la compofition, on fait
clarifier dix-huit li* e s de fiicre : lorfque l’écume
qui monte eft blanche, on fait cuire jufqu’à con-
fiftance du fon boulet; puis on retire le vaiffeau
du feu.
On le laiffe refroidir ; on y verfe une chopine
de bonne eau de fleurs d’orange ; on agite, & on
verfe enfuite l’efprit aromatique ; on agite encore
fortement, & on met le mélange dans de groffes
bouteilles de verre.
On laiffe repofer trois ou quatre jours, puis on
colle ; on foutire, & on paffe à la chauffe tout le
dépôt qui s’eft précipité au fond des vaifleaux.
■ Ceux qui veulent économifer, font entrer dans
’la compofition de leur eau de noyaux, y ne elpèce
d’amande qui vient de Provence, dont l'amertume
eft âcre,, & beaucoup moins agréable que celle
des amandes d’abricots.