
le tour, le font dans des moules en plâtre faits exprès
, & dans la forme convenable aux ouvrages.
Operation du tour.
La terre étant préparée , l’ouvrier la difpofe en
mottes, de grofleur proportionnée aux ouvrages
qu’il veut faire, qu’il manie & remanie plufieurs
fois pour leur donner laconfiftançe propre à prendre
la forme convenable. Il les arrange enfuite aux
environs du tour, pour les travailler l’un après
l’autre.
Ceci fa it, il monte fur le tour, fig. i de la pi. IV ;
il s’affied fur le banc ou fiège A , après y avoir placé
une efpèce de couffin. Affis un peu vers la droite du
tour, il appuie fon pied droit fur la planche B , pour
fe foutenir, & dé l’autre pouffe la roue C du tour à
grands coups & à différentes reprifes , jufqu’à ce
qu’elle ait un mouvement rapide , qu’il continue
toujours d’entretenir pendant la façon de l’ouvrage ;
alors il prend une des mottes qu’il a préparées, la
jette fur la tête D du tour, pour l’y attacher, Supprimant
ou ajoutant un peu de terre qu’il tire de
celle E , pofée fur l’établi du tour, fi la motte fe
trouve trop groffè ou trop petite.
Enfuite il trrempé fes mains dans l’eau placée
en F. fur l’établi, les applique fur la motte, & la' ferrant
peu à peu , l’allonge & la fait monter en forme
de quille.À , fig. 11, planche IV ; & , le pouce
appuyé en B , même figure, fur le bout, il la fait
defcendre , l’élargit peu à peu , fig-12 > en arron-
diffant félon la forme du vafe A ; l’égalifant &
unifiant avec l’une des! eftocs, même planche, fig. 2 & 3 .pour le dedans, & celle de fe r, fig. 4 , pour le
dehors ; la main en dehors & en dedans, -tant en
montant qu’en defcendant, déterminant les dimenfilons
par une ou deux jauges BB , fig. 13 , de mefure
convenable, placées à demeure fur le chandelier
pofé fur la table du tour.
La pièce tournée, on la coupe avec un fil, de
fer ou de laiton , fig. 10 de la même planche I V ,
àpeu'près femblable à ceux dont on fe fert pour
couper lé beurre ; l’ouvrier enlève la pièce avec fes
deux mains, & lapofe fur une planche ou voliçhe
d’environ huit à neuf pieds de longueur , placée
près de lui.
Il prend enfuite une autre motte qu’il jette fur
la tête du tour pour en faire un pareil vafe , & recommence
jufqu’à ce qu’elle foit remplie ; puis il
la tranfporte fur les rayons , pour donner le temps
aux ouvrages qui font deffus , de s’effiiyer & de
Lécher pour pouvoir être tournaffés & redreffés,
Si l’ouvrier a de très-petits vafes à tourner, il jette
fur la tête du tour une motte d’une grofleur indifférente
, la fait monter en aiguille , fait le vafe
avec le pouce ou le doigt , fouvent fans éftoc,
lorfqu’il n’y peut entrer, & de la même manière
que nous venons de le voir pour les autres ; il le
coupe enfuite avec l’aiguille , fig. ç , pl. IV , qui
eft une pointe de fer emmanchée qu’il tient ferme
dans la main droite pendant que le vafe tourne,
le prend enfuite de l’autre main , le pofe fur la
planche , & recommence jufqu’à ce qu’il l’ait remplie
; il la tranfporte comme les autres fur les
rayons.
Il faut obferver de ne point trop laiffer fécher
les ouvrages ; ce que l’on peut éviter en les couvrant
de linges mouillés lorfqu’il y en a un affez
grand nombre, & qu’ils commencent à devenir un
peu fermes ; on met à part ceux qui doivent être
tournâmes, & on en tranfporte une partie près du
tour.
L’ouvrier remonte fur le tour pour faire la tour*
najjîne, & jette à cet effet fur la tête A , figure /,
planche V , une motte B ; pouffe la roue avec le
pied, comme il a fait pour ébaucher les vafes , &
avec fes deux mains il donne à la motte à peu près
la forme de l’intérieur des vafes.
Ceci fait, l’ouvrier la laiffe un peu fécher, & la
reprend enfuite pour l’arrondir , l’égalifer , & l’a-
j ufter en A , fig. 2 -, pl. V , d’une grandeur propre
à les tenir fermes ; ce qu’on appelle alors la tour-
najjîne ; enfuite il les renverfe , & les applique
deffus en A , fig. 3 , l’un après l’autre pour les
lôurnàjfer , ayant foin de les ajufter le plus horizontalement
qu’il eft poffible, & pouffant de nouveau
la roue du tour , il dreffe d’abord le cul B
du vafe avec l’un dès tranchans A A des taürnafjins,
fig. 4 & 7 ; il creufe le fond ; fait le bord ; fupprime
les boffes', dreffe depuis le centre jufqu’aux bords
A , fig. i , 2 & 3 , & de cette manière les. arrondit
& les finit.
On garnit, enfuite les vafes d’oreilles , oreillons,
anfes , manches , boutons , enfin , de toutes les
pièces qui leur conviennent.
Après quoi l’ouvrier remet la planche qui porte
ces vàfès fur les rayons pour les faire fécher entièrement,
& paffe ehfuite à d’autres, jufqu’à ce
qu’ayant affez de cru, c’eft-à-dire, affez d’ouvrages
préparés à être mis au feu , pour emplir le four,
on fe difpofe à enfourner.
Des ouvrages moulés.
Les ouvragés moulés fe font en cette manière :
on prend d’abord des mottes préparées ; on les
applatit fur une table , fig. 17, pl. V , par le fecours
d’un rouleau ou roulette , fig. 21, ou d’une billette,
fig. 1 , planche VI, leur donnant une épaiffeur bien
égale, unie & convenable aux ouvrages.
On enduit enfuite les moules,pl. V,fig. 13,14*
/ƒ & 16, de cette terre applatie, & avec une éponge
& de l’eau , on l’étend par-tout également fur Je
moule , obfervant de l’enfoncer avec le pouce ou
le doigt dans tous les creux, & de lui faire prendre
exa&ement la forme du moule.
Cela fait , on remplit tous les creux pour en
rendre la furface unie ; on l’y laiffe enfuite fé-
journer pendant quelque temps ; la terre fe féchant
fe refferre , ce qu’on appelle prendre retraite , &
fort d’elle-même du moule.
On garnit alors les pièces d’oreilles , anfes s
manches -, & c .; & on les place fur des planches ]
dans les rayons, pour achever de s’effuyer & de fe
fécher pour être mifes parmi le cru.
Manières de placer le cru dans le four.
Pour parvenir à faire cuire le cru, il eft deux
manières de l’enfoutner ; l’une avec gafette , &
l’autre en échappade ou chapelle.
La première fe fait de cette façon. On a foin
d’avoir des gafettes, fig. 7 & 8 , pl. VI. efpèce de
cylindres creux bifeuités. ( On appelle ainfi toute
fortes de vafe cuit au four qui n’a point, été ver-
niffé.)
Ces gafettes ont environ neuf à dix lignes d’é-
paiffeur , & depuis dix-huit jufqu’à deux pieds de
hauteur, d’un diamètre à peu près égal à la diftance
d’un troii à un autre trou, dont la voûte inférieure
AA du four, fig. 1 , pl. VII, eft percée, ayant en
trois endroits, à différente hauteur, des trous triangulaires
A A , fig. 7 & é?, pl. V I , dont un des angles
fait le fommet, garnis chacun de pernettes, fig. 16,
fl. VI, dont trois par trois A A , fig. 9 & 10 , même
pl. VI, foutiennent fur leurs angles le cru encafté
ou enfermé dans les gafettes, ou des tuiles rondes
ou ovales,/g. y & 6, pl. V I , portant quantité de
petits vafes BB , fig. 11 & 12 , même planche.
La fécondé manière d’enfourner, appelée échappade
ou chapelle, fe fait par le moyen de plufieurs rangs
du tuiles, fig. 20, pl. V I , pofées près les unes des
autres, & foutenues chacune par trois ou quatre
piliers, ƒ /p, même planche., dans.l’intervalle des
quatre en A A , fig. 21, même planche.
Enfin, on place le cru comme on voit, fig. 1,
pl. V I I , dans l’intérieur du four, avec gafette en
B , & en échappade en C.
Le four étant plein, on le bouche. On a foin d’y
laiffer une ouverture , afin de ’’etirer les montres,
& s’affurer quand les marchandifes font cuites.
Les montres font de petits vafes qui fervent à indiquer
pas leur cuiffon, celle du refte des pièces
enfournées.
Manière de faire Vémail, le blanc ou le calciné , &
de le préparer pour en faire la couverte.
Quand le four eft bouché, on met le blanc ou
l’émail fous le four, dans une foffe faite de fable,
pour y être calciné & réduit en émail ; & ceux qui
font la belle fayence , y mettent auffi leur couverte
à calciner.
Voici une bonne compofition pour la fayence
ordinaire , telle que celle, de Nevers. Prenez 100
livres de calciné, 150 de fable de Nevers, 2,5 de
falin. Le falin, c’eft le fel de verre. Quant au cal-
ûné, c’eft un mélange de 20 livres d’étain fin, &
100 livres de plomb. On met le tout enfemble
dans la fournette : on calcine, & l’on a une poudre
blanche jaunâtre.
Il ne faut pas que la fournette foit trop chaude ;
il faut feulement que la matière y foit tenue bien
liquide : on la remue continuellement avec un rable
de fe r , jufqu’à ce qu’elle foit réduite en poudre,
& d’une couleur tirant fur celle du fourre pâle.
La fournette eft une efpèce de petit fourneau de
réverbère.
Cuiffon de la fayence.
La cuiffon de la fayence eft très-difficile : elle demande
de l’expérience. O11 commence par allumer
un petit feu dans le foyer de la bouche. La bouche
eft une ouverture profonde , oblongue, antérieure
au four à poterie , & prefque de niveau avec la
première voûte du four ; c’eft proprement le foyer
du four.
L’on fume les marchandifes en entretenant le feu
modéré pendant 6 , 7 , 8 , 9 , 10 heures, félon la
qualité de la terre dont la marchandife eft faite.
On augmente enfuite le feu peu à peu, en l’avançant
vers la première voûte du four. Quand on croit
pouvoir augmenter le feu , on le fait du degré
moyen entre le plus petit & le plus violent, en
mettant des bûches fendues en deux, en quatre, à
travers la bouche. On entretient ce feu pendant
deux ou trois heures , puis on couvre la bouche
tout-à-fait. On donne grand feu , jufqu’à ce que les
marchandifes foient cuites, obfervant de ne pas conduire
le feu irrégulièrement, & de ne pas exciter
la fougaffe.
La fougaffe eft une grande & forte flamme excitée
par un feu irrégulièrement conduit & poüffé avec
trop de violence , qui paffe fubitement par les trous
de la voûte., & qui gâte les marchandifes. L’ignorance
ou la négligence donne lieu à cet inconvénient;
il ne faut que laiffer tomber le bois dans le
foyer avant que d’avoir perdu la plus grande partie
de fa flamme.
Dèfournement.
On quitte le four au bout de trente ou de trente-
fix heures ; puis on défourne. Il y a en a qui défour-
nent en vingt ou vingt-quatre heures : c’eft félon
que la terre eft plus ou moins dure à cuire. Quand
on a défourné, on a foin de conferver les tuiles &
les piliers , pour en faire encore ufage. Quant aux
vaiffeaux fêlés, ils ferviront à mettre fécher la terre.
Pour la bonne marchandife que l’on appelle bifeuit ,
on la portera à l’endroit du laboratoire , où. elle doit
recevoir le blanc ou l’émail.
Du blanc ou de Vémail pour la couverte.
Après avoir défourné, on defeend dans la voûte
d’en bas, & l’on en enlève le blanc Ou l’émail que
l’on y a mis, & que la grande chaleur du four en
feu a calciné, & réduit en un gâteau ©u maffe de
verre blanc comme du lait & opaque. On rompt
le gâteau avec un marteau , & on l’épluche, c’eft-
à-dire , qu’on ote le fable qui y éft attaché ; puis on
I l’écrafe bien menu , & ori le porte au moulin où il
y a de l’eau, félon la quantité de blanc qu’il peut
contenir.