
former un caraâère régulier & gracieux. Pour
aller tout d’un coup à Peffentiel, je n’en démontrerai
que trois qui fufltfent à toutes les opérations
que la plume produit. Veuloir en préfenter davantage
, ce feroit tomber dans une prolixité en-
uuyeufe & embrouillée , plutôt que d’éclaircir &
de parvenir à l’exécution d’un art néceffaire à tous
les hommes»
Première Jituation.
La première fituation eft celle que l’on appelle à face , c’eft-à-dire la plume droite devant le corps,
& dont les angles placés fur la ligne horizontale,
ne font pas plus élevés l’un que l’autre , tant au
fommet qu’à la bafe d’un à-plomb ou d’un jambage.
Chaque extrémité de ce jambage, qui a toute la
largeur du bec de la plume, préfente deux angles.
Celui qui eft à droite s’appelle l’angle des doigts,
parce qu’il eft produit du coin de la plume qui eft
du côté des doigts ; l’autre, par la même raifon, fe
nomme l’angle du pouce, parce qu’il eft aufli produit
du coin de la plume qui eft du côté du pouce.
Il faut bien diftinguer ces angles , car ce font d’eux
que dépendent toutes les fituations de la plume,
8c c’eft de ces fttuations bien entendues & bien
rendues que provient la beauté de l’écriture. Que
l’on jette un coup d’oeil fur la première démonf-
tration, on connoîtra premièrement que les lignes
horizontales A , B , paffent au fommet & à la bafe
de l’à-plomb fans aucun excédent, ce qui n’arri-
veroit pas fi les angles étoient inégaux. Secondement
, on diftinguera par les chiffres i & 2,, les
angles du pouce pour le haut & le bas ; de même
par le 3 & le 4 , les angles des doigts au fommet &
à la bafe.
Cette fttuation n’ell affeâée à aucune écriture.
Elle ne fert uniquement que pour la terminaifon de
plufieurs lettres finales , & autres effets de plume
dont je parlerai dans la fuite. Son principal mérite
eft de donner l’intelligence des angles , laquelle
eft indifpenfable pour exécuter tous les mouvemens
employés dans l’art d’écrire. |
Seconde fituation
La fécondé fituation eft oblique. On entend par
ce terme que la plume eft placée de manière que
l ’angle des doigts furmonte celui du pouce de la
moitié de l’épaiffeur de l’à-plomb , au lieu qu’à la
bafe , l’angle du pouce eft plus bas que celui des
doigts de la moitié de l’épaiffeur du même à-plomb,
parla raifon que ce qui eft de moins fur le haut, doit
fe trouver de plus fur le bas. La fécondé démonftration
rend cette fituation fenfible ; les lignes A , B,
qui font en obliquité parallèle renferment l’à-plomb
dans le biais qu’il exige, & les lignes C, P , horizontales
font voir au fommet l’angle des doigts 1 qui
excède de la moitié, comme à la bafe l’angle du
pouce 2 qui defcend de même de la moitié.
Cette fécondé fituation eft employée pour l’exé-
fution de l’écriture ronde, qui étant droite, exige
plus d’oblique. Elle eft aufli deftînée pour les écritures
bâtarde & coulée ; mais comme on eft obligé
de, rapprocher un peu le bras du corps pour donner
à ces deux dernières écritures la pente qu’elles
doivent avoir , il arrive que l’angle des doigts pour
le haut , & l’angle du pouce pour le bas, font
moins fenfibles. Par ce principe, il eft aifé de concevoir
que la fituation oblique eft généralement
confacrée à toutes les écritures ; la différence con-
fifte dans le plus ou le moins, le plus pour la
‘ ronde, & le moins pour la bâtarde & la coulée.
^Troifième fituation.
La troifième fituation eft de travers , parce que
la plume placée prefque de côté, produit un à-
plomb de gauche à droite en defcendant. Les lignes
A , B, obliques parallèles qui renferment le jambage,
démontrent combien la plume doit être tournée*
fur le côté du pouce ; & les lignes horizontales
C , D , font voir que l’angle des doigts 1 eft élevé
confidérablement fur celui du pouce , de même
que celui du pouce 2 defcend en même proportion
au deffous de celui des doigts.
Cette troifième fituation , qui n’eft propre à aucune
écriture, eft cependant utile pour plûfieurs
lettres tant mineures que majeures , & pour placer
les pleins , foit c o u r t s ou quarrés , en deffus & en
deffous comme j’aurai foin de le faire connoître
dans les occafions.
C ’en eft affez fur les fituations de la plume que
l’ufage & un peu d’application rendront familières,
fi l’on obferve la pofition du corps & la tenue
de la plume fuivant les règles décrites aux explications
des premières planches.
Sur les pleins s les déliés & les liaifons.
La connoifiance des effets de la plume dépend
de la diftin&ion des pleins , des déliés & des liaifons.
On appelle plein, tout ce qui n’eft pas produit
du tranchant de la plume ; il n’importe de
quelle fituation ce plein foit formé. On nomme
délié le trait le plus menu que la plume produife.
On appelle liaifons tous les traits fins qui attachent
les lettres les unes, aux autres. Il eft aifé de
concevoir que le délié & la liaifon ne font p?.s la
même choie. Les maîtres de l’art les diftinguent en
confidérant que le délié fait partie de la lettre même,
au lieu que la liaifon ne fert que pour la commencer
, la finir & la joindre. Les liaifons dans l’écriture
ne doivent point être négligées ; elles font à cet
art ce que l’ame eft au corps. Sans les liaifons point
de mouvement, point de feu , point de cette vivacité
qui fait le mérite de l’écriture expédiée.
Toutes les; liaifons & quelques-uns des déliés
font produits parl’aâion du pouce, & par l’angle dé
la plume qui appartient à ce même doigt. Comme
cff .angle fatigue le plus dans la conftruétion des
lettres , c’eft par cette raifon qu’il eft plus long &
plus large dans la taille de la plume. Suivant mon
principe, toutes le$ liaifons font cpurbes, & elles
Dllt plus de grade que toutes celles qui font produites
par la ligne diagonale. Il y a toutes fortes
de liaifons, de rondeurs à jambages , de jambages
à rondeurs de rondeurs à rondeurs, de jambages
i jambages, de pies en têtes , & plufieurs autres
que l’on pourra remarquer dans les pièces d écritures
& les alphabets lies.
P T. A N C H E V I .
L’art'd’écrire a des.élémens primitifs , dont la
pratique eft indifpenfable pour acquérir la conftruc-
tion de ceux qui compofent tout fon enfemble. Ces
élémens fe rèduifent, ainfi que dans le deffin , à
deux lignes., qui font:la droite & la courbe ; ce
font elles qui fervent à produire toutes les formes
quel’efprit peut, fournir, & que la main peut exécuter.
- .. ,
Sur les deux lignes radicales.
La première démonftration expofe au trait Ample,
tant pour la ronde que pour la bâtarde /entre
les deux lignes horizontales A B , les deux élémens
qui font la fource de tous les autres, c’eft-à-dire, les
lignes courbes & droites. La première C eft une
ligne droite defcendante depuis 1 jufqu’à 2. La
fécondé D eft une partie courbe defcendante depuis
3 jufqu’à 4.' La troifième E eft une autre partie
courbe en remontant depuis 5 jüfqu’à 6. Enfin la
quatrième F eft encore une ligne droite en remontant
depuis 7 jufqu’à 8. On a choifi, avant d’en
venir aux effets de la plume , la démonftration du
trait fimple1, comme étant celle qui peut donner une
idée plus précife de ces deux lignes primordiales.
De la réduction des deux lignes aux pleins.
Pour réduire ces lignes originaires aux pleins
convenables, il faut les exécuter fuivailt l’art. Cette
exécution eft aufli fimple que naturelle. De toutes
les figures renfermées dans les lignes horizontales
A B , on commence par celle du C ,, qui eft droite
pour la ronde & penchée pour la bâtarde & la coulée
, & au chiffre 1 en defcendant & en pliant verticalement
les doigts , la plume étant dans la fituation
requife à l’écriture que l’on veut tracer, pour
finir au nombre 2. La figure D courbe fe Commence
par le trait délié 3 de droite à gauche en defcendant
& en pliant les doigts , obfervant à l’étoile
qui eft au centre & où fe trouve le plein de la plume,
de retirer infenfiblement fur la droite ( plus pour la
ronde que pour la bâtarde & la coulée ) en pliant
les doigts fur le poignet pour arrondir & finir par le
trait délié 4. La figure E courbe fe commence par
le trait délié 5 en remontant & en allongeant les
doigts , de manière qu’à l’étoile placée aü centre ,
on arrondit davantage fur la gauche en y pouffant
la plume avec modération ( plus pour la ronde que
pour les autres écritures ) , pour terminer enfin
par le trait délié 6. La figure F eft une ligne droite
Arts & Métiers. Tome II. Partie ƒ*
qui prend fa naiffance au nombre 7 > & CIU1va etl
remontant & en allongeant les doigts pour finir au
chiffre 8.
C ’eft de tous ces élémens que dérivent les caractères
de l’écrituré; & il eft de l’ordre des chofes de
faire connoître que c’eft de l’attention que l’on aura
eu de les bien peindre , que réfulte un caractère régulier.
Il n’eft pas befoin d’expliquer combien l’ufage
en eft effentiel. A la vue d’un fimple alphabet, on
diftinguera que toutes les lettres en fortent; que
tout jambage perpendiculaire ou penché naît des
figures droites ; que toutes parties concaves ou convexes
, foit droites ou penchées, proviennent des
figures courbes. Que de la jon&ion des deux lignes
radicales font émanées aufli toutes les lettres mineures
à têtes & à queues, paffant au deflus & au
deffous d’un corps d’écriture, & que les majeures
mêmes en tirent leur origine.
Sur la démoiiflration de la ligne mixte.
La ligne'mixte n’eft point une figure radicale 9
comme plufieurs l’ont prétendu. Tous les géomètres
la définiffent une ligne compofée de parties
droites & courbes. Suivant ce raifonnement, cette
ligne ne peut être radicale , puifque les lignes courbes
& droites en font l’effence. Quoi qu’il en fo it,
il faut convenir que l’exercice de cette figure^ après
celles dont je viens de parler, eft très-propre à conduire
aux lettres majeures , parce qu’elle donne de
la flexibilité aux doigts. Pour parvenir à l’exécution
de cette ligne, on doit la confidérer' fous trois formes
entre quatre lignes horizontales A B : dans fon
rapport avec les figures radicales ; dans la disjonction
dè fes parties , & dans fa conftruéfion totale.
Expliquons mieux tous ces objets. Dans le premier
exemple C , la ligne mixte qui eft au fimple trait
fe trouve dans la démonftration conforme à fon
/Origine. On voit que la courbe du haut 1 , produit
' un cercle fur la droite, de même que la courbe
du bas 2, produit un cercle fur la gauche. Le centre
3 expofe la ligne droite qui eft très-néceflàire
à cette figure. La démonftration fimple de cette
ligne étoit à fa place ; elle fert de préparation à
l’exemple D , ou les trois parties diftin&es & au
plein de la plume font plus d’impreflion. Dans
l’exemple E la ligne eft rendue dans tout fon effet.
Elle commence par un trait délié 1 de droite à
gauche, en courbant & en formant dans la def-
cente,fans ceflfer de plier les doigts, l’à-plomb 2
pour arrondir enfuite infenfiblement fur la gauche
, & terminer par le trait délié 3. On obfervera
que dans la ronde la ligne mixte doit être perpendiculaire
& penchée, ou fur la ligne oblique dans
les autres écritures.
Sur le mouvement que la main doit confient er en
écrivant,
La viteflè dans l’écriture eft l’ouvrage de la pratique
& du temps. Une main qui commence à écrire
ne doit pas fe précipiter 3 plie ne doit pas non plus.
A a a