
d'aucune vis pour faire tenir le manche ; on ajufte
feulement le manche entre les bandes d’argent qui
font foudées fur les platines, & on abat en chân-
frin les bords de l’argent tout autour des côtes, de
manière qu’il ne foit plus poffible de les ôter qu en
redreflant le ferti des bandes d’argent.
Couteau à tête d’aigle ; c’eft une efpèce de couteau
fans clou, à manche d’écaille , dont les bandes d’argent
font découpées. Ce couteau eft monté à tenons
& à T , fans vis au manche. Pour cet effet, lorfque
les bandes font foudées , on y fait les découpures ,
feftons & autres ornemehS qu’on veut ; on fait
chauffer un peu la côte .d’écaille, que l’on a auparavant
ajuftée de la largeur néceffaire ; & l’on fait auffi
chauffer la platine avec fes bandes prefque rouges ;
alors on pofe cette platine de couteau fur une platine
à redreffer les cornes ; on met promptement la côte
d ’écaille fur la platine du couteau, & on ferre le tout
dans l’étau entre les deux platines à redreffer. Les
feftons & autres ornemens s’impriment fur le côté de
l’écaille, de manière que le tout étant réfrôidi, ne
peut être féparé .qu’en caftant l’écaille par morceaux.
Il faut que les bandes d’argent aient demi-ligne
.d’épaiffeur pour pouvoir s’imprimer dans l’écaille,
fans fe plier ou fe caffer.
Couteau à double joint ; c’eft un couteau fermant,
& lorfqu’il eft ouvert on ne voit point la place oh fe
loge la lame , au moyen d’un reffort qui la cache.
voici de quelle manière cela fe fait : fur le bout
du grand reffort on ajufte )e reffort de double joint,
à queue d’aronde , lequel étant mince dans toute fa
longueur & ajufte de la largeur de l’ouverture,
couvre le vide entre les platines; on abat un peu
la queue du talon de la lame pour faire porter le
bout du petit reffort, de façon que quand on veut
fermer le couteau, ce petit reffort accompagne le
talon de la lame pour s’aller repofer fur le grand
jeffort, tandis que le tranchant de la lame fe referme
fur lui.
On produit le même effet en pratiquant huit petits
,-refforts, ou quatre fur chaque platine, qui ont affez
d’élafticité & de jeu pour obéir à l’entrée de la lame,
.& fe rejoindre quand elle eft ouverte.
Couteaux communs /qui fe ferment.
Parmi les couteaux qui fe ferment, les plus communs
& les moins chers s’appellent jambettes , à caufe
de leur figure ; Euflache du Bois, d’un ancien &
habile ouvrier de Saint-Etienne en Forez ; couteaux
à la dauphine, couteaux à la capucine ; couteaux à
un clou & à deux clous, &c.
Il fe fait une grande quantité de ces couteaux communs
à Saint-Étienne & à Chamberi dans le Forez,
ainfi que dans beaucoup de villes de France &
ailleurs. Il éft fans doute intéreffant d’en fuivre la
fabrique & d’en connoître les procédés, que M.
Fougeroux deBondaroy, de l’Académie des Sciences
, a décrit avec beaucoup d’exaéfitude , mais dont
il doit nous fuffire de donner ici le précis.
JLgi plupart de ces couteaux n’ont qu’un feul clou
qui traverfe la lame & le manche ; ce clou forme I
une goupille qui permet à la lame de fe replier,
quand le couteau eft ouvert, la lame a un talon quiI
la retient dans une fituation droite &. l’appuie fur le I
manche; ce talon s’appelle à Paris talon à lentilUsM
Voilà ce qu’on nomme des couteaux à un clou, i
D’autres., nommés couteaux à deux c lo u s ou à UI
capucine, font plus foignés qùe les précédens. Ils I
ont deux clous à la partie oh la lame tient au manche, I
Un de ces clous forme une goupille fur laquelle I
tourne la lame, & le fécond fait un arrêt fur lequel |
s’appuie le talon de la lame lorfqu’elle eft dreffée.
Quoique ces ouvrages foient très - communs j|
très-fimples & à vil prix, il faut cependant beaucoup!
. de travail avant que de les mettre dans le coin*
merce ; mais les mêmes opérations s’exécutant tou-l
jours par les mêmes ouvriers , ils acquièrent l’habitude
de faire bien & promptement.
Les lames des couteaux du Forez font faitesI
entièrement d’acier que l’on tire de Rives en Dau-|
| phiné. Cet acier a du nerf & une certaine duéHlite,l
mgme à froid ; qualités qui les rendent préférables I
pour ces petites fabriques à la grande fineffe qu’on :
.exigeroit pour les ouvrages recherches.
■ Cet acier, avant que de paffer dans les mainsI
des couteliers de Saint-Étienne, a été réduit à uneI
épaiffeur convenable pour en faire des lames. Cette
réduction, au cette efpèce de laminage , fe prépare
dans la petite ville de Chambord fous de gros marteaux,
ou martinets, qui font mus par le moyen
d’un filet d’eau qui tombe fur une roue à aubes. Il
eft inutile d’entrer ici dans lès détails de la chauffe, j
d.e la forge & de la réduftion de l’acier, qui'font les
mêmes procédés employés dans les forges de fer & ,
autres, & dont nous parlerons particulièrement dans
l’article du fer converti en acier. Revenons au travail
propre du coutelier.
L’ouvrier fait chauffer l’extrémité d’une des lames
d’acier qui ont été étirées, la porte fur l’enclume
pour lui faire prendre la forme d’une lame de couteau
; il frappe plus d’un côté que de l’autre , pour
préparer'le tranchant & le dos du couteau. On
nomme ce travail, rabattre la lame, le tranchant &
le dos du couteau.
Pour former l’extrémité de la lame, qui, dans
quelques-uns de ces couteaux communs, eft arrondie
& relevée un peu du côté du dos, l’ouvrier pofe de
champ fa lame fur le dos de l’enclume, & frappant
fur ce qui doit faire le tranchant, il l’oblige de fe
relever un peu, Enfuite , il travaille de nouveau le
I tranchant à cette partie de l’extrémité de la lame qu’il
a redreffée, & il s’y prend pour rabattre cette paude,
comme il l’a fait pour le tranchant du reftant de la
-lame. .
Il faut diftinguer dans la lame : i° . l’extrémité,
qu’on nomme la pointe ; i° . le tranchant .ou le coupant
; 30. le dof » qu’on nomme le corps de la lame ;
4°. la fécondé extrémité par oh elle s’attache dans
le manche & qu’on appelle le talon. La bpnté d’une
lamç dépend de la perfe&ion d$ toutes ces partie*
| A ua„a la lame du couteau a pris à peu près -la ]
ferme qu’elle doit avoir, on la détache de la longue
Bame d’acier au moyen d’un tranchant qu on pote
leffus ; & qu’on frappe d’un ou deux coups de marteau
11 y a ordinairement fur 1 enclume des marques
bui indiquent lalongueur que doivent avoir ces lames.
V Nous avons déjà dit que les lames font retenues
lâans le manche du couteau à l’aide d’une broche
sou goupille de fil de fer qui la traverfe, ainfi que
k manche fur lequel elle eft rivée.
| Pour faciliter le jeu de la lame fur le mânche ,
pn ferme en biais le talon ou cette extrémité de la
Em e , & on y fait pour terminer l’angledu côté du
IBos , un bouton qui reffemble a une tete de clou,
fc e bouton venant à porter fur le manche du couteau
, fert d’arrêt à la lame , & 1 empeche de fe
i-enverfer. . ,
K L’ouvrier fait cette efpèce. de talon de la lame
fur la carne de fon enclume , & frappant tantôt fur
le tranchant, tantôt fur le plat de la lame , il allonge
icette partie qu’il a relevée, & quil renverfe a lé -
fquerre ; enfuitp par le bouton qui doit la terminer,
il place le talon de la lame qu il a fait bien chauffer
feans la fente d’un tas, oh elle eft comme dans une
jjfefpèce dç clou,yère, & avec le marteau il eft facile
$e former le petit bouton qui reffemble a la- tete
d’un petit clou.
K On perce la lame vers le milreù de la largeur du
talon avec un poinçon , dont la pointe eft fort
moufle. Un feul coup fuffit fouvent ; ou en retournant
la lame , un fécond coup de marteau, applique
fur l’endroit de la boffe , détache le môrceau.
■ Le nom ou la marque de l’ouvrier font gravés en
jwelief fur un poinçon d’acier bien trempe , dont on
■ tait l’empreinte fur la lame en le pofant a froid-, _&
le frappant affez fort pour que. les caraéteres s im-
•priment fans percer.
f On vient de voir que les couteaux a un clou font
|peten,us, étant ouverts , par un bouton qui s’appuie
ifur le manche ; maïè ce bouton déborde le manche
iquand le couteau eft fermé, & il devient tres-incom-
Smode; on a donc imaginé de retrancher le bouton,
jf&. de former au talon de la lame une efpece de dent
|ou de prolongement qui-s’appuie, quand le couteau
eft ouvert, furune broche ou un fécond clou place
»un peu en arrière au deffous du clou fur lequel
; tourne la lame.
■ Les couteaux à deux clous ne diffèrent de ceux a
'lun clou , que par le talon de la lame ; & c’eft aufli
cavec un tas qu’on donne au talon des lames .à deux
i dou.s , la figure qui convient. Le tas fait alors l’effet
i d’une étampe , fur laquelle lé talon étant chaud , fe
«moule en le forçant à coups de marteau d’entrer
«dans les échancrures de cette étampe.'
Monture des Couteaux communs.
K Quand les lames font préparées, il faut les joindre
| i aux manches-; c’eft ce qu’on appelle monter les couteaux. I Comme les- manches demandent différentes opé-
iÿ nations, on les dlftribue , pour plus de célérité ,
entre divers ouvriers qui ont le même genre d’ouvrage".
L’un eft près d’un étau , dans lequel il pofe &
ferre horizontalement le manche de bois ; un autre
ouvrier, avec une fcie à main, fait une ràinure dans
toute la longueur du manche &. à une certaine profondeur
pour recevoir la lame ; enfuite, avec la
même fcie , il fait à la tête du manche l’entaille oh
doit fe loger le talon de la lame.
Quand les manches ont été ainfi refendus, qn le?
porte à d’autres ouvriers, aflis devant un établi, qui
font le trou propre à la goupille. Us ont pour cette
opération un chevalet garni de fon foret & de fon
archet. La mèche de ce foret eft foutenu dans des
ouvertures pratiquées à un montant qui forme un
des côtés de l’établi. On ajufte les lames dans les
manches ; ils coupent le fil de fer qui fait la goupille.
Ils mettent enfuite ijn oeil de^ cuivre , oir petite
rofette, ou virole ; fur la partie qui déborde le fil de
fer de l’un & de l’autre côté du manchè, & avec
quelques coups de marteau ils rivent le9 extrémités
de l’axe qui traverfe ôç. fixe la lame & les rofettes.
En ouvrant la lame, on marque la place oh porte
la tête de. la lame ; on achève de faire en cet endroit
une entaille affez profonde pour que la lame foit
droite lorfqu’on s’en fert. Voilà ce qui concerne les
couteaux à unr clou.
Pour ceux à deux chus, il y a de plus à examiner
oh doit fe‘ placer le fécond clou qui fert d’arrêt à là
lame. Oh paffe en cet endroit une fécondé broche
de fil de fer deftinée feulement à appuyer le talon
de la lame quand le couteau eft ouvert.
Il ne refte plus qu’à ébarber le manchodu couteau
à deux clous;avec des râpes debois,‘& des écouennes
de différentes grandeurs ; ce qui fe foit fans y mettre
beaucoup de façons & de temps.
On fait’éncore,à Saint-Etienne une efpèce de couteaux
à deux clous , que l’on appelle couteaux de
pièces , dont le manche eft de corne noire de bélier:
Ces manches ne font point moulés ; l’ouvrier qui
découpe les cornes , leur donne la forme convenable
;■ il les ébauche avec la râpe & la lime : il fait
avec la fcie l’ouverture néceffaire pour recevoir la
lame ; il monte enfuite la lame fur ces manches ,
qu’il achève & qu’il polit à la main , avec la pierre
ponce & l’fiuile d’olive.
D e s R a s o i r s . ’
Le Rasoir eft uninftrument compofé d’un railîanf
d’acier fin ,-& d’une châffe de bois, d’écaille ou de
baleine , duquel inftrument tranchant. & affilé on fe
fert pour couper la barbé.
Voici la manière dont fe fait le r^foir dans la
boutique du coutelier.
Il y a deux façons de le fabriquer : la première ,
au bout de la barre ; la f é c o n d é en bobèche.
Forger au bout de la barre , ceft employer un pur
acier fans le foutenir par un acier de moindre qualité.
En ce cas, il faut choifir un acier bien foin ,
point pailleux, tel que l’acier d’Angleterre, appelé