
fois de vingt-cinq ou trente : c’eft ce que les pécheurs
appellent étaliers. Pour les affermir contre
Feffort de la marée, chaque pieu eft retenu par .une
corde qui forme un étai , frappée d’un bout à la
tête des pieux, & de l’autre aux piquets qui font
enfoncés dans le terrain à une petite diftance des
pieux, du côté par où l’eau vient avec rapidité. Il
n’y a point à craindre que les pieux fe couchent
du côté de l’eau : outre que le cours de l’eau les
en empêche, ils font trop bien retenus par le jkûds
de fous les guideaux ; mais on affermit encore les
deux pieux qui terminent les files de chèvres, par
un étai qui eft à peu près dans l’alignement des
pieux ; & cette corde fe prolonge dans toute la
longeur de l’étalier, étant bien tendue & attachée
par une boucle à la tête de chaque pieu. Cette manoeuvre
affermit les pieux, & elle en affujettit les
têtes à des diftances proportionnées a la largeur
de l’embouchure des guideaux. On tend à dix-huit
pouces au deffus du terrain, un pareil cordage, qui
affujettit les pieux par le bas.
L’embouchure des guideaux eft bordée d’une
corde affez forte, à laquelle on pratique des oeillets
pour pouvoir les attacher bien tendus à des anneaux
de fer qui font amarrés aux pieux. En tendant les
guideaux au bord de la mer, les pêcheurs mettent
toujours l’ouverture du côté de la terre, afin de
recevoir l’eau lorfque la marée baiffe : on conçoit
que ces étaliers doivent être folidement établis,
pour réfifter à l’effort que l’eau-fait fur une rangée
de filets qui s’oppofent à fon cours.
L’embouchure des guideaux eft fort grande ; &
comme ils fe joignent tous les uns aux autres, ils
forment, par leur réunion, une file de manches
toujours prêtes à recevoir les poiffons qui fuivent le
courant, gros & petits*
Tente des guideaux à bas étaliers.
Les pêcheurs étaliers riverains du mont Saint-
Michel , tendent des guideaux avec trois piquets,
dont deux fervent à tenir l’embouchure ouverte,
au moyen d’anneaux d’ofier qui font de chaque
côté , & dans lefquels on paffe les piquets ; la
queue du guideau eft amarrée fur un troifième
piquet, & ils tiennent le guideau le plus tendu
qu’il leur eft poffible. Par ce.moyen, ils ferment
les mailles qui font déjà fort étroites. On nomme
ces guideaux à petits étaliers ± mais ce nom convient
encore à d’autres dont nous allons parler.
Ceux qu’on appelle en Normandie bâches volantes
ou guideaux à petits étaliers , font ainfi nommés
parce que les piquets fur lefquels ces filets font
tendus, ne s’élèvent que.de trois ou au plus quatre
pieds au deffus du terrain. On les appelle aufîi vo,-
lans, parce que les pêcheurs les changent fouvent
de place & de difpofition, d’une marée à l’autre ,
fuivant l’état des bancs de fable, qui affez fréquemment
font mouvans.
Ces piquets ne font point retenus par des cordes.,
çorame le font les pieux des grands étaliers. Les
chauffes de ces .guideaux n’ont que deux ou deux
braffes & demie de longueur ; au lieu que celles
des grands en ont quelquefois fix ou fept. Enfin,
les petits étaliers fe placent fur les grèves fableufes
& vafeufes , ainfi que dans les plages où il fe forme
des courans. On tient affez fouvent les queues des
chauffes, tendues. & arrêtées par un piquet , au
moyen d’une ligne. -
Comment on a perfectionné les guideaux'.
Il eft fenfible que, fi l’on ne prenoit pas des
précautions pour tenir l’entrée des guideaux ouverte
, le filet s’affaifferoit fur lui-même, & le poif-
fon ne pourroit y entrer. Pour faciliter l’entrée du
poiffon, on fe contente de tendre l’embouchure du
filet fur un châflis , ou fur des perches qui font le
même effet.
On a trouvé un moyen très-ingénieux d’empêcher
les poiffons de fortir du filet, fans former aucun
obftacle à leur entrée, en plaçant un goulet avec
un cerceau qui tient ouverte l’embouchure.
Ce goulet eft un filet figuré comme un entonnoir,
dont l’ouverture du pavillon eft attachée au
cerceau. La pointe de ce filet fe termine,. & eft
foutenue dans l’axe du filet principal, par quelques
fils déliés : & pour que le poiffon entre aifément
dans le filet par des fentes qu’on pratique à la pointe
du goulet, ces fils font tendus mollement. Il eft
fenfible que le poiffon entre fans effort daps le corps
du filet par les fentes. Alors il fe trouve à l’aife dans
l’intérieur du filet, & ne s’avife point de chercher
à s’échapper par les fentes qui lui ont permis d’entrer.
Des verveux ou verviers, qiïon nomme aujji renards
, &c.
Le verveux le plus fimple eft un filet en forme
de cloche, & un peu conique, d’une ou deux braffes
de longueur, dont l’entrée porte trois ou quatre
pieds dé diamètre. Le corps de ce filet va. d’abord
un peu en fe rétréciflant ; enfuite il prend une forme
conique. A la pointe de ce cône, on fait un oeillet
qui fert à fixer le verveux dans l’endroit où on le
tend.
Le corps du filet eft foutenu par quatre, cinq ?
fix cerceaux menus & légers, qu’on met en de-
dans.
Dans l’amirauté de Nantes , où l’on fait ufage
du verveux qu’on pomme loup ; pour joindre l’une
à l’autre les gaulettes qui forment les cerceaux, on
en paffe les bouts dans des tuyaux de fureau.. Ailleurs
on fait cet ajuftement plus proprement avec
des révolutions d’un fil retors.
Le cerceau de l’entree eft plus grand que tous
les autres , dont les diamètres vont toujours en
diminuant.
On ajoute prefque toujours devant le cerceau
ce qu’on nomme la coëffe. Cette partie, qui s’évafe
beaucoup, eft foutenue par une. portion de cercle ,
dont les extrémités font affujetties par une corde
on une barre de bois qui s’étend de l’une à l’autre.
Au moyen de cette traverfe, le côté de la coëffe
qui eft en bas, ayant une forme plate, il s’applique
plus exactement fur le terrain.
Le verveux , non compris la coëffe , eft attaché
à toute la circonférence du premier cerceau ; &
comme le corps dé ce filet eft large, affez court,
& foutenu en plufieurs endroits par des cerceaux,
le poiffon en fortiroit aifément, fi l’on ne mettoit
pas en dedans un goulet, dans lequel on ajoute
fouvent un petit cerceau , pour que l’entrée en foit
plus accefliblè au poiffon.
C’eft ce goulet qui caraélérife le verveux , &
qui établit fa différence d’avéc le guideau. Si quelques
pêcheurs mettent un petit goulet à. l’embouchure
des guideaux, comme nous l’avons dit, c’eft
une perfeâion qui eft empruntée des verveux.
On conçoit que le poiffon qui s’engage dans le
goulet, paffe fans difficulté dans le corps du ver-
veüx par les fentes, à la pointe du goulet ; il en
écarte les fils , comme il fait les herbes qui fe pré-
fentent à fon paffage. Une fois qu’il eft dans le
verveux, il fe trouve à l!aife , & nage de tous côtés
fans jamais reprendre, pour en fortir, la route^
qu’il a fuivie en y entrant. On le trouve immanquablement
entre le corps du verveux & le gqu-.
let ; & comme il n’eft pas gêné, on le retire fain
& en vie : ce qui donne aux verveux un grand
avantage fur les guideaux.
Çe verveux eft le plus fimple de tous. On en
fait dé fort longs qui ont un petit goulet à chaque
cerceau.
Des verveux à plufieurs entrées.
Comme les poiffons nagent en tout fens dans
les eaux dormantes pour chercher leur nourriture ,
& que rien ne les détermine à fuivre plutôt une
route qu’iine autre , on fait des verveux qui ont
plufieurs entrées, quelquefois jufqu’à quatre, pour
que le poiffon y entre plus facilement.
On en fait auffi de cubiques qui ont cinq entrées,
& qu’on nohime, pour cette raifon, quïn-
queportes.
Dans tous ces verveux, qui font montés fur un
bâti dé bois, il faut ménager une porte pour en
retirer le poiffon.
Des naffes.
Les naffes font des efpèces de paniers faits d’aufté,
de jonc, d’ofier, ou d’autre bois flexible, qui
étant à claire-voie, laiffent paffer l’èau fans beaucoup
de réfiftance ; mais les baguettes font affez
ferrées pour retenir le poiffon. C ’eft pourquoi on
les tient plus ou moins près les unes des autres,
fuivant l’efpèce de poiffon qu’on fe propofe de
prendre.
Les naffes ne font donc pas un ouvrage dè mail-
leur, mais de vannier ; & elles ne diffèrent effen-
tiellement de plufieurs efpèces de filets dont nous
avons parlé, que par la matière dont les uns &
les autres font faits. Au refte, on leur donne diver-
fes formes ; & , fuivant les côtes où l’on en fait ufage
, on les connoît fous différens noms , comme
naffe ynaffon, nanfe, lance, bire, bouteiltey ruche,
panier, boutterolle , &c.
Prefque toutes les naffes ont un ou plufieurs goulets,
qui permettent aux poiffons d’entrer, mais qui
s’oppofent à ce qu’ils fortent.
Ces goulets font faits avec des brins déliés & fou-
-ples d’auffe, de canne ou d’ofier, très-fins & élaf-
tiques, dont les bouts ne font point retenus par des
traverfes ; ce qui les rend affez flexibles pour ne
point former d’obftacle à l’entrée du poiffon dans
la naffe. Mais, attendu que, par leur reffort, ils
fe rapprochent les uns des autres auffitot que le'
poiffon eft entré, & comme les extrémités de ces
menues baguettes font taillées en pointe, le poiffon
ne peut fortir par où il eft entré.
Les naffes n’étant point'pliantes comme le font
les filets, on eft obligé de ménager une ouverture
pour en retirer le poiffon : c’eft quelquefois au bout
oppofé au goulet, & d’autres fois vers le milieu.
Ces ouvertures font fermées avec une petite trappe
, tant que la naffe eft à l’eau : on ne l’ouvre que
pour retirer le poiffon.
Des nanfes des Provençaux.
Les nanfes des Provençaux diffèrent très-peu de
ce qu’on appelle bouraque dans les ports du Ponant.
Elles font d’une forme ovale applatie. Affez fouvent
on ne fait en ofier que la charpenté qu’on enveloppe
avec un filet. Ces nanfes , qu’on fait volontiers
| ovales , ont à chaque bout un goulet en entonnoir,
par où le poiffon entre dans la nanfe : au deffus &
au milieu eft un trou fermé par une porte, qu’on
ouvre pour retirer le poiffon qui eft entré dans la
nanfe.
Des paniers de bonde.
Le panier que les meuniers mettent à leur vanne
de décharge , lorfqu’ils la lèvent pour laiffer écouler
l’eau qui pourroit endommager les chauffées,
fe nomme panier de bonde. Cette naffe eft un vrai
guideau d’ofier qui n’a pas de goulet ; mais le poiffon
n’en fort point, à caufe de la viteffe du courant.
On tend auffi, dans les courans d’eaux rapides ,
des naffes qu’on tient longues, & dont l’embouchure
eft évafée. On les fait longues, pour que le
poiffon n’ën forte pas ; l’embouchure eft évafée pour
qu’elle embraffe une plus grande portion du courant
; quelquefois on y ajoute des ailes de clayonnage
, & l’on, en fait des gors.
Des najfes en forme de trüble.
On fait, pour prendre des anguilles à la mer, des
naffes qui ne font qu’un panier profond au moins
de deux pieds. Ces nafies ont a 1 embouchure un
piedde diamètre, & elles fe rétréciffent de forte
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