
de la chaleur ; à quoi on remédie en verfant un
peu d’eau dans le trait fans retirer la fcie, ce qu’on
doit faire d’abord qu’on fent la moindre réfiftance ,
afin de ne pas laiflér à la fcie le temps de s’engager
ou d’échauffer l’ivoire.
Quand on fcie l’ivoire à fec ; d’abord qu’on fent
que la fcie commence à s’engager , on la frotté
avec un morceau de peau ou de laine, fur lequel
on a étendu de la graine, laquelle facilite le paflage
de la fc ie , mais ce qui eft moins bon que l’eau,
q u i, en rempliffant le même objet, a de plus l’avantage
de conierver la fraîcheur de l’ivoire.
Quand on débite l’ivoire, ainfi que l’écaille &
la corne, on le place dans l’étau ; & quand ce font
de petits morceaux qu’on veut débiter , on les aflùre
dans un petit étau, & ce dernier dans le grand,
afin que les pièces foient expofées à moins d’effort ;
ce que d’ailleurs un ouvrier intelligent prévient toujours
, foit en foulageant la main qui conduit la
fcie, foit en foutenant de l’autre les morceaux qu’il
débite.
L’ivoire fe travaille affez bien avec les outils ordinaires
; mais il vaut cependant mieux fe fervir des
écouennes, grandes & petites , & grêles.
On fe fert auffi de limes, tant pour le dreffer
que pour en terminer les contours quand ils ont
été découpés à la fcie.
Il ne faut pas cirer l’ivoire ; mais on le polit en
le frottant d’abord avec de la ponce broyée à l’eau,
& enfuite avec un morceau de peau de buffle &
un peu d’huile d’o live, & de tripoli en poudre très-
fine.
La dureté de l’ivoire & le beau poli dont il eft
fiifceptible , l’ont fait regarder „dans tous les temps
comme une marchandile précieufe & propre aux
ouvrages les plus délicats ; mais la facilité qu’il a de
fe fendre , le rend difficile à travailler.
Il feroit fans doute intéreflant de découvrir un
fecret qui, remédiant à cet inconvénient, pourroit
multiplier l’ufage de l’ivoire. M. Hériflant, médecin,
femble avoir ouvert la voie pour ce procédé, dans
un mémoire lu à l’académie des fciences de Paris ,
il y a quelques années. Il développe un fyftême particulier
fur les os, à l’appui duquel il répète diverfes
expériences d’o s , & même d’ivoire moîléfié.
Quoi qu’il en fo it, voici un procédé par lequel
on prétend rendre l’ivoire auffi maniable que le
parchemin, fans craindre qu’il éclate. Il n’eft befoin,
pour produire cet effet, que de le tremper dans la
moutarde ; on l’y laiflèra plus ou moins de temps,
fuivant l’épaiffeur de la piece qu’on veut amollir.
L’ivoire devient en peu de temps mou & capable
de recevoir telle forme qu’on voudra lui donner.
Quand on l’a pétri, on le laiffe fécher ; il fe raffermit
& reprend fa première folidité à méfure que l’humidité
dont il eft imbu s’évapore. Les artiftes qui
feront ufage de ce fecret, pourront le perre&ionner,
& l’expérience leur donnera des lumières plus étendues
fur cet objet.
Diofcoride dit qu’en faifant bouillir l'ivoire avec
la racine de mandragore, l’efpace de fix heures il
s’amollit, enforte que l’on en peut faire tout ce
qu’on veut.
Autrement. Pour amollir l’ivoire, prenez trois
onces d’efprit. de nitre, quinze onces de vin blanc
ou du vinaigre, ou même de l’eau de fontaine •
mettez-y tremper l’ivoire jufqu’à ce qu’il devienne
mou & fouple ; ce qui arrivera fans feu entrois ou
quatre jours.
Autrement. Prenez de la foude d’Alicante noire
une livre, de la chaux vive trois quarterons ; mettez
ce mélange dans deux pintes d’eau bouillante, &
laiffez repofer la liqueur pendant trois jours ; & iî
elle eft prefque rouge , elle eft affez forte, finon
il faut y remettre des drogues fufdites jufqu a ce
qu’elle le pardiffTe. Pour lo r s , on y fait tremper
Y ivoire ou les os que l’on veut amollir, pendant
quinze jours.
Pour les endurcir , on peut faire diffoudre de
l’alun dans de l’eau , & y mettre de l’eau de feiche
en poudre , autant que d’alun , faire bouillir l’eau
jufqu’à pellicule , & y mettre l’ivoire ou les os
tremper environ une heure , & l’ayant retiré, le
mettre à la cave pendant quelques jours.
Nous avons rapporté ci-devant, à l’article de la
Corne, différens autres procédés pour l’amollir &
la mouler, lefquels peuvent également convenir à
l’ivoire.
Manière de blanchir VIvoire.
I Quant à la manière de blanchir l’ivoire fale, on
fait que la méthode la plus ufitée eft de l’expofer à
la rolée du mois de mai ; cependant cela eft fujet à
bien des inconvéniens. En effet, il faut un affez
long temps, quelquefois même plufteurs années
de fuite, la rofee n’étantq>as tous les ans abondante
dans le mois de mai ; de, plus , elle ne peut pas
l’être exactement dans tous les replis & dans toutes
les moulures de l’ivoire elle n’enlève point le
jaune de la fumée qui s’y eft incorporée ; enfin,le
foleil qui frappe l’ivoire ^ après une grande rolée,
peut y caufer des gerçures, & augmente infailliblement
celles qui y font.
Au contraire , le procédé qu’on va indiquer n a
point tous ces inconvéniens ; il rappelle l’ivoire à
fa blancheur naturelle , & l’opération ne demande
pas plus de cinq ou fix jours.
On prend un petit cuvier proportionné à la grandeur
des pièces d’ivoire que l’on veut blanchir, au
fond duquel doit être un trou que l ’on bouche avec
de la paille , comme dans les cuviers ordinaires : on
met dans ce cuvier un morceau de pierre à chaux
vive , & enfuite environ un quarteron de cendres
de brandevinier ; c’eft l’efpèce de tartre qui fe forme
au fond des alambics ou chaudières dans lefquelles
on diftille de l’eau-de-vie.
On place enfuite dans ce cuvier des bâtons en
croix au deffus de la pierre à chaux, fur lefquels on
place les morceaux cfivoire que l’on veut blanchir,
car s’ils touchaient à la chaux vive , infailliblement
elle les feroit lever par écailles. ,,
O n verfe de l’eau fur la ch a u x , froide d abord ,
enfuite tiède, puis enfin bouillante ; opération qu’on
répète plufteurs fois : la v apeur qui s’élève de la
chaux lorfqu’elle s’éteint y pénétre l’ivoire jufque
dans fes plus petits re p lis, traverfe fes p o re s, en
détache la crade la plus enracinée ; auffi doit - o n
avoir grand foin de tenir le cuvier c o u v e rt, pour
empêcher les vapeurs de s’échapper.
On reprend la même eau qui s’eft écoulée par le
bas du cuvier ; on la rejette de nouveau fur l’ivoire ;
car cette eau de chaux étant alors éteinte , peut
baigner l’ivoire, qui, au bout de cinq ou ftx heures,
eft difpofé à devenir de la plus grande blancheur.
On a alors une terrine pleine d’eau fraîche & une
vergette un peu rude , avec laquelle on broffe
l’ivoire en le trempant de temps en temps dans
Peau. Alors l’ivoire devient du plus beau blanc
dont il foit fufceptible.
Si l’ivoire qu’on veut blanchir eft appliqué fur
quelque fond, 11 faut avoir foin de le détacher, fans
quoi il ne feroit pas pofftble de le bien nettoyer.
Pour blanchir l’Ivoire gâté.
Prenez d’alun de roche ce qu’il en faut, à proportion
de la quantité des pièces que l’on veut reblanchir
, & tant que l’eau en foit bien blanche ;
alors, faites-la bouillir un bouillon , & mettez-y
tremper l’ivoire pendant environ une heure , le
frottant avec de petites brofles de poil ; puis met-
tez-le fécher à loiftr dans un linge mouillé , autrement
il fe fendroit.
Autrement. Prenez un peu de favon noir, appli-
quez-le fur la pièce d’ivoire , approchez-le dû feu ,
& après un bouillon, effuyez le.
Pour blanchir Vivoire verd, 6» reblanchir celui qui ejl
devenu roux.
Prenez de l’eau où l’on a éteint de la chaux v iv e ,
mettez-y l’ivoire , & faites bouillir l’eau jufqu’à
ce que l’ivoire paroifle blanc.
Pour polir & blanchir l’ivoire, il faut l’enchâfler fur
le tour ; & après l’avoir mis en oeuvre-, prenez de la
prêle & de la pierre ponce en poudre bien menue ,
& avec de l’eau , frottez tant que l’ouvrage paroifle
bien uni par-tout ; on le polit en le frottant &
tournant avec un linge bien blanc, & un morceau
de cuir de mouton. Etant bien échauffé fur le tour,
prenez du' blanc d’Efpagne avec un peu d’huile
d’olive, puis frottez encore à fec avec du blanc
feul, & en dernier lieu avec un linge blanc feul,
& l’ivoire fera blanc & poli.
Pour blanchir les Os.
Prenez de la chaux v iv e , & une poignée de fon
que vous mettrez dans un pot neuf, avec fuffifante
quantité d’éau que vous ferez bouillir, y ayant mis
Içs os jufqu’à ce qu’ils foient entièrement degraiffés.
Arts £» Métiers. Tome II. Partie /*
Pour colorer les Os en •verd.
Prenez un peu de verd-de-gris bien broyé, mef^
tèz-le dans un vaiffeau de cuivre avec du vinaig
re , puis mettez-y les os. Enfuite couvrez b:en le
vaiffeau , & lutez-le de manière qu’il n’y entre
point d’air : étant ainft fermé, mettez-le pendant
dix ou quinze jours dans le fumier de cheval ; &
au bout de ce temps, vous retirerez les os qui feront
bien verds & ne perdront point cette couleur.
Autrement. Prenez du verd-de-gris bien broyé,
mettez-le dans du lait de chèvre, tant que ce lait
devienne très-verd; puis mettez le tout dans un vafe
d’airain ou de cuivre avec les os ; couvrez bien le
vafe , & mettez-le enfuite dans le fumier pendant
huit jours ; après quoi, vous ôterez les os qui feront
fort bien colorés.
Si vous voulez qu’ils le foient davantage, faites-
les bouillir dans de l’huilé de noix ; plus ils y bouilliront,
plus ils augmenteront en couleur. Vous les
polirez enfuite avec la moëlle de fureau , & pour,
les iuftrer, vous les frotterez d’huile de noix.
Autrement. Prenez une pinte de fort vinaigre
verd-de-gris pulvérifé & limaille de cuivre jaune,
de chacun trois onces ; une poignée de rue ; le tout
étant bien pilé enfemble , mettez-le dans un vaif-
feau dë verre que vous boucherez bien, après y
avoir mis les os que vous voulez teindre ; enfuite,
mettez ce vaiffeau à la cave au frais pendant quinze,
jours ou davantage, & les os feront teints»
Pour teindre les Os en noir.
Prenez ftx onces de iitharge, & autant de cjhaïuc
vive ; mettez le tout bouillir dans de l’eau commune
, & les os en même temps vous remuerez
toujours tant que l’eau commence à bouillir ; alors ,
.ptez-la du fe u , & agitez-la toujours tant qu’elle
foit refroidie. Alors les os feront teints en noir.
Pour teindre les Os 6» en faire divers ouvrages au
moule.
Prenez douze livres de chaux vive , & d’alun de
roche calciné Une livre ; faites bouillir le tout dans
de l’eau, jufqu à ce que la troiftème partie de l’eau
foit évaporée ; puis ajoutez-y deux livres de chaux
vive ; faites encore bouillir l’eau jufqu’à ce qu’elle
puiffe foutënir un oeuf fans enfoncer. Alors, laif-
fez-la repofer, puis diftillez-la par le filtre ; prenez
douze livres de cette eau , & demi-livre de bréfil
râpé, avec quatre onces de raclures d’écarlate ;
faites bouillir le tout quelques minutes à feu lent;
après quoi, ôtez-en ce qui eft clair & net, & met--
tez-le dans un vaiffeau à part.
Enfuite, mettez d’autre pareille eau fur les fèces
d’écarlate & de bréfil, le tiers de la première
quantité ; faites encore bouillir quelques minutes ;
remettez cette liqueur claire avec l’autre teinture,
& coniinuez tant que l’eau ne prenne plus de teia-
ture.
Enfin j prenez des rapures d’os qui aient bouda
Y y.