
On met à chaque extrémité du filet une bouée, où
tient un orin qui a plus de longueur que l’eau n’eft
profonde. Les plombs du pied , qui pèfent chacun
quatre onces, font diftribués à un pied & demi les
uns des autres. Les lièges qui bordent la tête font
efpacés de même.
Le filet qu’on nomme refegue ou rejfaigue, tant à
Marfeille que fur plufieurs autres côtes de Provence
, & qui fert pour une pêche qui porte ce
même nom, diffère de la fegetière, en ce qu’il a
communément les mailles moins ouvertes. Celles
de fa nappe font de neuf au pan ; & celles des
entremaux ont trois quarts de pan d’ouverture. Le
filet a fix pans de hauteur. Les plombs dont il efi
garni, font de huit à la livre , & diftribués à un
pan les uns des autres. Les liège.s font arrondis, &
larges d’un tiers de pan.
La refegue peut être tendue, foit près de terre,
foit en pleine mer.
• A Ceuta , fitué à l’embouchure du détroit de la
Mèditerrannée , fur la côte d’Afrique, on fe fert de
bateaux pendant toute l’année, pour pêcher avec
des filets que les Efpagnols nomment boniteras,
parce qu’on n’y prend que des bonites , & quelques
autres gros poiflons eftimés. Ces filets font
des tramaux , qui ont feulement trente à quarante
brades de longueur, & qu’on cale par fix ou fept
brades d’eau. Les bateaux ne font armés que de
trois ou quatre hommes qui font a la part.
En parlant des battudes de Provence & des ar-
maillades de Languedoc , nous avons dit qu’il y en
avoit de tremaillées. On les tend comme celles qui
font àfimple nappe. Les battudes tremaillées de
Catalogne ont deux ou trois cents brades de longueur
, fur quatre brades de chute. Elles reftent
toute la nuit tendues en pleine mer.
Des dreiges.
La tedure des dreiges a fix pieds de chute, &
depuis deux cents cinquante jufqu’à deux cents
quatre-vingt brades de longueur, fuivant la force
des équipages. Elle eft compofée d’un nombre de
pièces de tremail , qui ont depuis quinze jufqu à
dix-huit brades de longueur, qu’on réunit les unes
aux autres.
Comme ce filet eft fort cher, il n’appartient pas
en entier à un pêcheur; chacun en fournit une ou
deux pièces, & il a part au profit de la pêche proportionnellement
à ce qu’il a fourni.
Un filet ne dure ordinairement qu’une faifon,
même en ayant foin de le radouber ou ramender
à tous les démarrages.
Nous avons dit qu’à tous les tramaux il falloir
que la flue fût confidérablement plus étendue que
les hamaux , dont les mailles doivent être fort
grandes. A l’égard du filet de la dreige, il faudroit
qu’une maille de hameaux contînt fept mailles de
là flue ; cependant cela varie fuivant qu’on fait les
mailles de la flue plus ou moins ferrées, celles des
Jtamaux rçftant les mêmes,
On traîne ce filet fur des fonds qui n’ont quelquefois
que cinq à fix brafles d’èau, & d autres fois
dans des endroits où il y en a trente-cinq ou qua-
rante. JRHJ
Pour que le filet puifle rèfifter a 1 effort qu on
fait pour le traîner, on le borde tout autour avec
une ralingue, ou, comme difent quelques pêcheurs,
un bouchet, aux angles duquel on fait des anfes ,
pour y amarrer le$ cordages ou bras qui fervent à
le traîner. Afin d’empêcher que le filet ne^fe couche
fur le terrain , & faire enforte qu’il traîne fur le
fond dans une fituation à peu près perpendiculaire,
on attache des lièges fur la ralingue d’en haut ; &
fur celle d’en bas , des bagues de plomb , dont
douze à quatorze pèfent ordinairement une livre.
Suivant l’ordonnance, il eft défendu de mettre plus
d’une livre & demie de plomb par brafle de filet ;
ainfi il faut vingt-quatre à vingt-fix livres de plomb
pour garnir une pièce de filet de dix-huit brafles. Il
eft évident qu’en chargeant le pied du filet de
beaucoup de plomb, on le fatigueroit,^ ainfi que
l’équipage , lorfqu’il faudroit amener a bord la
teflpre. Ce n’eft cependant pas dans la vue de ces
ménagemens, foit de l’équipage , foit du filet, que
le poids du left a été fixé par l’ordonnance ; mais
: afin de favorifer la multiplication du poiflon , &
d’empêcher que les pêcheurs ne bouleverfent les
fonds, comme ils le faifoient en joignant à beaucoup
de plomb des barres de fer & des chaînes qui la-
bouroient le fond prefque comme leut fait une
charrue.
Voilà, au moyen du plomb, une force qui tire
en bas le pied du filet, pour qu’il fe place verticalement
dans l’eau. Il fa,ut appliquer a la tête du filet
une force contraire, qui tende à le porter vers la
furface. Pour cela, comme nous venons de le dire ,
on garnit la ralingue de la tête avec des morceaux
de liège, qu’on nomme flottes, cor ferons , corches ;
tous termes^ fyno'nymes. On choiflt les lieges les
plus épais 1 & on les diftribue fur la ralingue de la
tête, à environ vingt pouces les uns des autres,
plus ou moins, fuivant la bonté du liège ; car le
liège le moins ligneux a le double avantage d’être
plus léger , & de s’imbiber plus difficilement d’eau 9
que celui qui eft dur & poreux.
Des filets quon nomme proprement feines oufennes.
On comprend quelquefois fous la dénomination
de feine, toutes les efpèces de filets en nappe ; en
ce cas, on les diftingue en feines tendues fur piquets,
& feines flottées & pierrées. De celles-ci, les unes
font fédentaires, & les autres dérivantes aux cou-
rans. Les manets fe font ainfi trouvés confondus
avec les feines. On a été même jufqu’à nommer
les tramaux, des feines tramai liées. Comme il faut
que ces filets fe tiennent verticalement dans l’eau,
la ralingue qui en borde la tête, eft garnie de flottes
de liège ou de bois ; & la ralingue du pied eft chargée
de left. Aux extrémités de la ralingue de la tête,
font frappées des cordes plus ou moins longues,
‘ ^ rrn’ An
qu’on nomme les bras, lefquels fervent à tendre ou
à traîner le filet. - • * #
A l’égard de là grandeur des mailles, les pechetu s
la varient beaucoup. Quand ils fe propofent de
prendre de gros poiflons , ils les tiennent allez
larges ; & ils y trouvent le double avantage, de
moins fatiguer le filet, & d’avoir moins de peine
à le traîner. Mais lorfqu’ils veulent pêcher de fort
petits poiflons, ils tiennent néceffairement les mailles
très-ferrées ; & afin de. pouvoir traîner leur filet,
tantôt ils fe raflemblent en nombre confiderable ,
tantôt ils font leurs filets bien petits , ou encore ils
donnent différentes grandeurs aux mailles d une
même feine ; par exemple , ils emploient un fil
très-fin pour le% maillet qui font auprès de la ralingue
, où font attachées les flottes ; & en cet
endroit, ils tiennent les mailles de treize à quatorze
lignes d’ouverture en carré ; celles du milieu, qui
font d’un fil plus fort, font moins grandes ; enfin,
la partie du filet qui eft vers le pied, ou auprès de
la ralingue chargée de le ft, eft faite d un fil encore
plus fort ; & à cet endroit les mailles n ont que dix
lignes en carré. La longueur de ces filets varie depuis
huit brafles jufqu’à foixante , même plus ; & leur
chûte eft de quatre, cinq, fix pieds, & au-delà. ^
Dans les endroits où il y a peu d’eau , on traîne
à bras & à pied un filet fimple , plombé & flotte ;
en un mot, une petite feine de huit a dix brafles de
longueur, fur une brafle ou une brafle & demie
de chute. Quelques-uns de ces filets n’ont à leurs
bouts que trois pieds de hauteur » pendant quils
ont trois à quatre brafles de chute au milieu , afin
de former dans cèt endroit une efpèce de poche qui
retienne le poiflon, v
La tête du filet eft garnie de flottes de hege ; &
le pied de bagues de plomb. Quelquefois il n y a
qu’une corde au haut & une au bas du filet, qui
fe rejoignent à quelque diftance, & ne font plus
qu’une feulé corde, au bout de laquelle ils forment
comme une bandoulière pour traîner le filet.
La grandeur des mailles varie depuis douze lignes
jufqu’à quinze, fuivant l’cfpèce de poiflon qu on fe
propofe de prendre ; enforte qu’aflez fouvent elles
n’ont même que dix lignes en carré. Prefque toujours
les mailles du fond font plus ferrées que celles
des extrémités.
Les pêcheurs attachent aux deux bouts du filet
un bâton , dont la longueur égale la largeur que le
filet a à fes extrémités. On met le gros bout “ U
bâton , qu’ils nomment bourdon , en bas , on
attache ce bâton au bout du filet. ^
On attache aux extrémités de.ces bâtons, deux
cordes qui fe réunifient à une petite diftance ; &
c’eft à ce point de réunion qu’on amarre les bras ,
■ qui ont quelquefois foixante ou foixante-dix brafles
de longueur. Enfin, on ajufte au gros bout de ces
bâtons, qui répond à la corde plombée, un morceau
de plomb pefant cinq ou fix livres, pour qu’il contribue
avec le left à faire prendre au filet une ppfition
Verticale. .
Arts & Métiers. Tome II. Partie i l •
Les pécheurs ayant ainfi difpofé leur filet au bord
de l’e auU s le portent le plus avant qu’ils peuvent
dans l’eau, y entrant fouvent jufqu’aux aiffelles, &
tenantHes bâtons des bouts auffr élevés qu’ils peuvent
au deffus de la furface de l’eau. Souvent deux
autres hommes leur aident, en foulevant le milieu
du filet; & quand il s’agit de mettre le filet à l’eau ,
les deux aides le faififfent par la ralingue flottee ,
pour qu’il prenne une pofition verticale.
Le filet étant à l’eau, les pêcheurs qui en tendent
les extrémités , fe forment une bandoulieie avec
les cordes qui font les bras; & entrant dans l’eau
prefque jufqu’aitcou, ils traînent le filet dans une
longueur d’environ cent brades, à peu près parallèlement
au bord de l’eau. Peu a peu les deux pêcheurs
fe rapprochent l’un de l’autre, faifant décrire
au filet une portion de cercle ; & étant réunis, ils
tirent, le filet fur le fable, OÙ ils prennent les poiflons
qui fe trouvent renfermés dans la feine, & les incitent
dans leur panier. ' , ■
Les pêcheurs.nomment cette tramee de filet, uu
trait. Ils "continuent â faire de nouveaux traits, tant
que la matée le lent permet ; car lorfqu elle monte ,
elle lès force de s’approchât de la côte, & les oblige
enfin de fe retirer plus tôt ou plus tard, fuivant les
parages & la forcé dès matêès. ,
Ce filet, qui eft fort en ufage fur quantité de
' côtes , & particulièrement auprès d’Oleron , fe
nomiii colleret, â caufe de la manière dont on le
traîne-Maispn conçoit qu’il ne petit pas être fort
grand parce que les hommes qui font dans leait
mfqu’aux aiffelles, perdent prefque tout leur poids ,
& ainfi ont très-peu de force pour le traîner, deux
fur chaque bras. . . , . . .
A la côte du Bas-Médoc , on fait ufage d une
feine qu’on nomme traîne, qui â trente ou quarante
brafles de longueur : fà ehûtfe, au milieu, eft de
trois briffes, & feulement d’une braffe & demie à
fes extrémités, où eft attaché Un bâton, comme
au colleret. Les mailles des extrémités ont un bon
pouce d’ouverture en carré.; elles .fe retreçiffçnt en
approchant du milieu, où à peine on peutpaffer lç
doigt. Le haut du filet éft garni dé flottes ; mais il
n’y a point de plomb au bas. U n cordage d uu pouce
de grofféut tient lieu de left- . . Tv
À l’embouchure des rivières d Orne 6ç de Lhve,
ainfi que fur les grèves d’entre ces deux rivières,,
on fait, la pêche' des eqiulles, avec un filet que les
pêcheurs appellent femme , comme étant un diminutif
de la feine ; mais la manière de s en fennr eft
particulière. Les mailles de ce filet font enlofenge,
& ont environ trois lignes d’ouverture , montées
fur des lignes affez déliées. Cette nappe eft fimple ;
elle a au plus une braffe de chute, & fix brades de
longueur : aux deux bouts fo’nt attachées des perches
ou g,miettes, qui font longue.s de fept à huit pieds.
Du filet dit boulier, bouillière, beuliche , bouliech.
Le filet qu’on nomme grand boulier, à la cote de
Narbonne, eft, comme l’aiffaugue , formé de deux
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