
du criftal teint, dont la couleur imite véritablement
celle de la pierre fine que l’on nomme girafol,
L’ouvrier approche de la flamme jufqu’à trois ou
quatre reprifes, la perle encore-adhérente à ion
tuyau. Il ne préfente à chaque fois qu’un point de
la circonférence, lprfque la chaleur a amolli le globule
en cet endroit. Si l'on fouffle dans le tube,
la matière cède tant foit peu & forme une petite
élévation , & même fa couleur difparoît, fuppofé
que l’artifte ait employé du girafol teint. On pratique
plufieurs accidents de la forte fur la même
perle ; après quoi on la fépare du tube & on la
borde.
Des différentes formes de perles.
Quoique la forme fphérique , ou à peu près
fphèrique, foit celle que la nature femble affeéter
le plus communément dans la formation des perles.,
cette forme n’en eft cependant pas un cara&ère
fpécifique. On en trouve qui portent la figure d’une
poire, d’une olive, d’une amande. L’art les imite
pareillement ; il s’étend même jufqu’à façonner,
fous le nom de plaque, un corps qui reffemble à
la produftion naturelle que les joailliers appellent
coques de perles.
Lorfqu’il eft quefiion de fabriquer une plaque,
on commence par foufller une bouteille ovale, &
on l’applatit pendant qu’elle eft encore chaude entre
les branches d’une pince ou bruffelle large, dont
la furface intérieure eft tant foit peu bombée. On
perce enfuite la plaque aux quatre coins , ou feulement
aux deux bouts ; ce qui fe fait en chauffant
l’endroit que l’on veut percer , & en foufflant dans
le tube pendant qu’il eft encore dans la flamme,
pour que l’air puiffe s’ouvrir aifément un paffage ;
enfin avec la lime on fépare la plaque d’avec le tube
dont on s’eft fervi pour la former.
Quelquefois on foude fur les plaques des émaux
de différentes couleurs, & on les y arrange fy-
métriquement, dans la vue d’imiter unxntourage
de pierres précieufes ; & afin d’y donner plus
d’éclat, l’artifte y colle intérieurement des feuilles
de métal.
En général, toutes les différentes formes de perles
artificielles, quelle que foit leur forme, fe fouf-
flent à la lampe d’émaiÛeur, mais avec des tours
de main particuliers, que la pratique & l’induftrie
indiquent allez.
De Veffence d'orient.
Couvrir une perle ou la mettre en couleur ( expref-
fions fynonymes dans le langage des patenôtriers )
c’eft enduire Veffence d'orient l’intérieur des globules.
Nous avons déjà dit que l’ablette fourniffoit la
matière principale de cet enduit; mais on feroit
dans l’erreur fi l’on s’imaginoit que la fubftance
même de l’écaille produisît de la couleur ; elle n’eft
due qu’à une couche argentine extrêmement mince
, dont le corps folide de l’écaille çft recouvert.
Il ne faut pas moins de quatre mille ablettes pri-
fes au hafard, fans choix de groffeur, pour donner
une livre d’écailles , laquelle ne rend pas quatre
onces de teinture nacrée ; de forte qu’il entre environ
dixrhuit ou vingt mille poiffons dans la com-
pofition d’une livre de cette brillante liqueur. Il
eft vrai que les écailles du ventre & des côtés font
les feules dont on faffe ùfage , celles du dos étant
brunes , & d’ailleurs fort peu chargées de matière
colorante.
Pour extraire la couleur de l’écaille d’ablettes
on doit, après l’avoir lavée pour en ôtèr une certaine
colle naturelle qui lui fert de vernis & en
quelque forte de dèfenfe contre les effets du frottement
, la triturer pendant un quart d’heure dans
un vafe de terre où l’on a mis fuffifante quantité
d’eau ; puis exprimer le tout fortement à travers
un linge dont le tiffu foit un peu ferré.
La colature, ayant été verfée dans de très-grands
verres capables de contenir jufqu’à deux pintes de
liqueur, doit y refter trois ou quatre jours. Au
bout de ce temps , l’on décante l’eau furabondante,
& l’on recueille avec foin le précipité qui eft l’effa
c e la plus pure & la plus parfaite. Cependant,
comme 1’écaiÛe- qui vient de la fournir n’eft pas
encore abfoltiment dépouillée, on la ta^derechef
& l’on obtient une fécondé teinture moins argentée
que la première, mais dont on ne laiffe pas de
tirer parti pour la fabrique des perles de moindre
qualité.
Le grand fecret confifte à préferver ces teinnires
de la putréfaâion. Quelques artiftes qui font parvenus
à le découvrir, le tiennent extrêmement
caché.
Nous croyons que ce fecret confifte à employer
de Yalkaîi volatil dans une certaine proportion que
quelques effais indiqueront promptement.
On appelle mal à propos le précipité des écailles
de Tablette effence d'orient. Cette dénomination
lui convient mal, puifqu’elle n’eft pas plus effence
ni liqueur, que ne l’eft un fable extrêmement fin
ou du talc pulvérifé, délayé avec de l’eau. Il eft
vrai qu’on ne peut bien Ta retirer des écailles de
Tablette qu’en les lavant , & que pour être employée,
elle demande néceffairement, comme beaucoup
de terres à peindre, à être mêlée avec de
1 eau : mais néanmoins, fi on Tobferve avec une
bonne loupe, on la diftinguera facilement du liquide
dans lequel elle nage, & Ton s’affurera que loin
d’être liquide, elle n’eft qu’un amas d’une infinité
de petits corps ou de lames fort minces régulièrement
figurées', & dont la plus grande partie font
taillées quarrément.
Quoiqu’on emploie à deffein des broyemens affez
forts pour enlever ces lames des écailles ,• on ne
les brife, ni on ne les plie ; du moins n’en découvre
t-on point qui foient brifées ou pliées ; &
fuivant les obfervations de M. de Reaumur, ces
petites lames paroiffent au microfcope à peu près
égales} & toujours coupées en ligne droite dans
f
leur grand côté. L’argent le mieux bruni n’approche
pas, dit-il , de l’éclat que ces petites lames
préféntent aux y eu x , aidés du’ microfcope.
Il réfulte de-là, qu’étant minces & taillées régulièrement,
elles font très-propres à s’arranger fur
ie verre, & à y paroître avec le poli & le brillant
des vraies perles : enfin elles1 cèdent aifément au
plus léger mouvement, & femblent dans une agitation
continuelle, jufqu’à ce qu’elles foient précipitées
au fond de Teau.
Manière de couvrir les perles.
Veffence de perles ne s’emploie jamais feule ; on
en mêle une certaine quantité avec de la colle de
poiffon qu’on a fait diffoudre dans de Teau , &
qu’on a paffée enfuite à travers un linge fin.
La beauté des perles dépend principalement des
proportions de ce mélange, où la cherté de Tablette
ne fait que trop fouvent prodiguer la colle de
poiffon.
La liqueur doit être un peu tiède lorfqu’on s’en
f«rt, fans quoi elle manqueroit de fluidité. Ce font
ordinairement des femmes qui l’emploient.
Pouf cet effet, chaque ouvrière s’étant munie
d’un chalumeau de verre qui fe termine en pointe ,
trempe cette pointe dans un vafe rempli de couleur,
tandis que par l’extrémité oppofée elle aipiré
affez de cette même liqueur pour en remplir la
capacité du chalumeau ; alors elle enfonce tant foit
peu la pointe dans l’oeil de la perle qu’elle veut
couvrir, & foufflant légèrement dans fon chalumeau
, elle en fait fortir la quantité de matière
néceffairë pour enduire l’intérieur du globule qu’elle
fecoue fur le champ ; afin de le couvrir par-tout
avec égalité : &. même cette précaution ne feroit
pas capable feule d’empêcher la liqueur de fe rapprocher
enfuite par fon propre poids, fi Ton né-
gligeoit celle de jeter la perle lecouée dans une
efpèce de tambour ouvert, qu’une femme balotte
continuellement fur la table, & autour de laquelle
font placées les ouvrières.
On achèye de fécher, dans une étuve, les perles
au fortir du tambour ; après quoi on les trempe
dans l’efprit-de-vin, d’où ayant été retirées quelques
minutes après, elles retournent à l’étuve pour
la fécondé fois.
Toutes les perles en général, foit rondes , foit
ovales, ou plates, &c. fe traitent à peu près de
la même façon, fi Ton en excepte la femence de
perles.
De la femence de perles.
Ee grain de là femence de perles ne permet guère
par fa petiteffe qu’on le prenne féparément entre
ies doigts pour le mettre en couleur. On en jette
on affez grande quantité à la fois fur des plaques
de fer qui ont des rebords , & qu’on agite jufqu’à
oe que, par une fuite de la forme fphérorde appla-
tie, grain , il ceffe de rouler fur la plaque, &
prefente naturellement en haut l’un de fes yeux.
Céft alors que l’ouvrière y place commodément
la pointe de fon chalumeau ; mais elle remplit tout-
à-rait le globule de la matière argentée.
Effence colorée.
Quelquefois à l’effence on ajoute une teinte rouge
, jaune, bleue, &c. Mais ces couleurs étrangères
à la nature de la perle , dont la blancheur &
la pureté font le principal mérite, font rarement
employées aujourd’hui par les émailleurs-patenô-
triers.
Opération de mettre en cire.
Après avoir couvert les perles, il refte encore à
leur faire fubir deux opérations avant quelles foient
en état d’être livrées aux enfileufes de colliers.
La première confifte à les mettre en cire, la fécondé
à les percer & à les cartonner»
On commence par fondre de la cire vierge dans
un vaiffeau large d’ouverture ; puis ayant mis une
bonne quantité de petites ou de moyennes perles
fur une efpèce d’écumoire, 011 la plonge dans ce
bain ; on la retire lorfque la cire a rempli la cavité
des perles ; puis on tes verfe fur une table r
d’où pretque incontinent l’ouvrière les détache à
l’aide d’un couteau, & les promène rapidement
entre fes mains , à l’effet de féparer les globules
que la cire extérieure tient encore réunis.
Cependant, afin d’achever de les nettoyer entièrement,
il devient indifpenfable de les tenir renfermées
quelques heures, dans un linge mouillé
& de les frotter enfuite de nouveau.
Si les perles font un peu groffes , ou s’il s’agit
de mettre en cire des plaques, des amandes , des
poires , des olives , des cabochons (fortes de perles
qui doivent ces différens noms à leur forme extérieure
} l’écumoire ne fauroit y être employée commodément.
On lui fubftitue un petit bâton plat que
Ton trempe en partie dans la cire, & qu’on retire
fur le champ du vaiffeau. Pendant que la cire qui
s’y eft attachée eft encore chaude , on s’en fert comme
de maftic pour affujettir par fon moyen un certain
nombre de perles fur le bâton ; & de nouveau:
on le replonge ainfi chargé dans la cire fondue*
Opération de percer & de cartonner.
Lorfque les perles ont été mifes en cire , on les
perce avec des aiguilles montées fur de petits manches.
La feule précaution qu’exige ce travail, confifte
à tenir les perles dans des vaiffeaux de fer ou
de terre , placés fur de la cendre chaude ; au
moyen de-quoi Tinftrument pénètre dans la cire
avec plus de facilité.
On s’en tient là , fuppofe que l’on n’ait à percer
que du très-commun ; mais fi Ton travaille de la
marchandife plus diftinguee , il faut cartonner v
c’eft-à-dire , garnir intérieurement le canal de la
perle avec du papier, de telle forte qu’en y pafi-
fant du f i l , il ne puiffe pas s’attacher à la cire»
Rien de plus facile que cette opération T quü