
d’abord paroît vétilleufe. Il y a des ouvrières dont
l’unique métier eft de rouler, fur des brochettes
minces & pointues, de petits morceaux de papier
très-fin, & taillés de façon qu’il en doive réfulter
des efpèces de cônes extrêmement alongés.
Ce font ces cônes, lefquels portent environ un-
pouce ou un pouce & demi de longueur, que les
patenôtriers dèfignent fous le nom de carton.
Des femmes chargées de cartonner les perles placent
leurs aiguilles dans les papiers ainfi roulés,
qui deviennent alors, en quelque forte, les gaines
ou les fourreaux de ces petits infirumens ; & elles
percent autant de perles qu’il s’en peut placer fur
chaque carton : puis, après avoir retiré l’aiguille,
elles féparent les perles de leur axe commun, &
retranchent avec des cifeaux le papier qui en excède
le canal intérieur ; enfin, elles en forment
des rangs, fe fervant, pour çet-effet, d’aiguilles
longues, menues, & proportionnées au diamètre
des calibres. ( Cet article eft extrait du mémoire de
M. Varenne de Beoft , correfpondant de l'académie
royale des fciences de Paris , fur l'art d'imiter les
perles fines.)
Des faujfes MarcaJJltes.
Le fieur Brière, patenôtrier, fabrique une forte
de colliers auxquels il donne le nom de faujfe mar-
caffite. Ils en ont en effet l’apparence , quoique de
même matière extérieurement que la perle fa&ice
ordinaire ; mais leur enduit intérieur n’eft pas dû
à l’écaille d’un poiffon : c’eft le règne minéral, c’eft
l’étain qui fournit la couleur de la faujfe marcajfite.
Elle doit à cet étamage, non-feulement tous fes
reflets, mais encore la propriété de pouvoir être
tranfportée dans les pays chauds , fans effuyer les
inconyéniens auxquels la perle remplie-de cire y
eft expofée.
Cette dernière qualité des colliers étamés leur eft
d’autant plus effentielle, qu’ils font beaucoup plus
analogues au teint des peuples ^brunis par le foleil,
qu’au teint des Européens.
Il eft aufli des cas ou il femble que le théâtre
s’accommoderoit fort bien de la faujfe marcajfite
employée fur des habits de caraâère, tels que ceux
des magiciens, & en général des divinités fôuter-
raines. Elles y produiroient un bon effet; & ces
mêmes globules , foufflés de grofletir convenable,
diftribucs à propos fur les corps d’architeâure de
certaines décorations d’opéra, communiqueraient
à peu de frais un grand air d’éclat & de magnificence.
Communautés des patenôtriersr émailleurs.
Il y a dans Paris trois communautés différentes
de patenôtriers.
i° . Les uns fe nomment patenôtriers boutonniers
d’émaillé verre 6* cryftallïn. Ôn les appelle plus communément
émailleurs.
a*. Les autres font appellés patenôtriers en bois
6* corne, & ne travaillent que fur ces matières. Ils
font préfentement partie du corps de la mercerie,
fuivant l’article x n i des ftatuts des marchands merciers
grofliers, joailliers, du mois de janvier 171-»,
30. Le troifième corps eft celui des patenôtriers
en ambre, jais & corail, érigé en corps de jurande
fous le règne de Charles IX.
Il n’eft pas permis à ces derniers de travailler fur
des matières fa&ices ; ils font obligés d’employer
des chofes naturelles & de les tailler fur des roues
de grès. Ils ont. voulu fe faire incorporer en 1718
aux patenôtriers-émailleurs ; mais ceux- ci s’y font
toujours oppofés, fous prétexte qu’ils ne vouloient
pas les admettre à faire de fauffes perles.
Les émailleurs - patenôtriers ont compofé fort
long-temps une communauté.particulière ; ils font
à préfent corps avec les maîtres verriers-fay entiers,
à qui ils ont été unis.
L’édit de leur éreéfion en corps^ de jurande a été
donné en 1566 par Charles IX , & enregiftré la
même année. En 15.99, Henri IV confirma leurs ftatuts
, & y ajouta quelques articles. Enfin, Louis XIV
réunit', par arrêt du confeil du 21 feptembre 1706,
lçs deux communautés des émailleurs & des verriers
, pour ne faire à l’avenir qu’un feul & même
corps , fans cependant déroger à. leurs ftatuts.
Les ftatuts de l’édit de Charles IX contiennent
vingt articles, & l’augmentation accordée par les
lettres patentes de Henri IV , trois autres.
Par l édit, les maîtres n’avoient que la qualité
de patenôtriers & boutonniers en émail ; les lettres
y ajoutèrent le yerre & le criftallin.
La cQmmimauté eft régie par quatre jurés, dont
deux s’élifent par année.
Pour être reçu maître, il faut avoir fait cinq ans
& huit jours d’apprentiflage ; & après une information
préalable des vie & moeurs, un apprenti eft
admis au chef-d’oeuvre.
Chaque maître ne peut avoir qu’un feul apprenti
à la fois.
Les veuves reftant en viduité, jouiffent du privilège
de leur défunt mari ; à l’exception des apprentis
qu’elles ne peuvent pas engager, mais bien les
continuer.
Les yeuves fk les filles de maîtres donnent la
franchife aux apprentis qu’elles époufent.
Les maîtres de la communauté peuvent faire
toute forte de patenôtres, boutons d’émail, dorures
fur verre & émail, pendans d’oreille jolivetés,
& autres ouyrages femblables, avec-émail, canon,
& criftallin paflant par le feu & fourneau.
Us peuvent aufli enfiler toutes Ceintures, carcans,'
chaînes, colliers, braflelets, patenôtres & chapelets
, des mêmes matières & de pareille fabrique,
& même les enrichir & orner d’or & d’argent battu
& moulu.
Au refte, ces communautés n’étant pas comprifes
dans l’édit du 11 août 1776, portant nouvelle création
des corps de marchands, & des communautés
d’arts & métiers, le roi en a rendu l’exercice libre
en fe conformant aux réglemens de police.
En 1706 , les émailleurs furent unis avec les
yerriers 3
verriers; & il fut réglé que pendant les dix premières
années, les quatre jurés feraient élus avec
égalité, c’eft-à-dire, de façon qu’il y^ auroit deux
émailleurs & deux verriers; & qu’après les dix ans
expirés, l’éleftion feroit entièrement libre, & fe
feroit à la pluralité des voix.
Au moyen de cette union, ils ont tous également
la qualité de maîtres émailleurs, patenôtriers, boutonniers
en émail, verre & criftallin , marchands
verriers , couvreurs de flacons & bouteilles en
ofier, fayence, & autres efpèces de verres, de la
ville & fauxbourgs de Paris.
Explication des Planches de Vart de l'Emailleur ,
tome IL des gravures.
Planche I. Emaïlleur d la lampe. La vignette repréfente
l’intérieur d’une arrière-boutique ou d’un
cabinet, dont tous les jours font fermés par des
rideaux, afin que l’émaiüeur puifle mieux voir la
flamme de fa lampe. ^
L’émailleur tient de la main gauche une pièce
d’ouvrage montée au bout d’un chalumeau, dans
la flamme de la lampe.
Bas de la planche.
Fig. 1, couteau d’acier dont fe fert l’émailleur
pour trancher les pièces d’émail, & les féparer du
tube qui a fervi à les fouffler.
Fig. 2 , plan de la lampe de l’émailleur , placée
dans fa cuvette.
Fig: 3 , n°. 1 , élévation perfpe&ive de la lampe
féparée de fa cuvette.
Fig. 3 9n°. 2 , gouttière placée dans la lampe , le
long de laquelle la mèche eft couchée.
Fig. 4 , cuvette de la lampe de l’émailleur.
Fig. $, lampe de l’émailleur en perfpe&ive &
placée dans fa cuvette, avec le chalumeau qui lance
obliquement fa flamme.
Planche II. Emailleur â la lampe. Perles faujfes.
La vignette repréfente l’intérieur d’une chambre
obfcure , ou plufieurs ouvriers travaillent à la
lampe.
réduire en plus petits tubes, & en faire enfuite des
perles.
Fig. 2, ouvrier qui fouflle la girafol.
Fig- 3, ouvrière qui borde la perle du côté qu’elle
a été fëparée du tube.
Fig. 4 ouvrier qui fait du fil de verre.
j. Fig- S 9 ouvrier qui tourne le rouet fur lequel le
fil fe dévide.
Bas de la planche.
Fig. 6, table de l’émailleur vue par deflous, pour
montrer les rainures ou porte-vents qui diftribuent
le vent du foufflet aux quatre lampes.
FijJ- 7 » table de l’émailleur en perfpeâive, vue
du coté de la marche ou pédale qui communique le
mouvement au foufflet.
Arts 6* Métiers^ Fpme IL Partie I f
Fig. 8 , coupe tranfverfale de la table par le milieu
de fa longueur.
Planche III. Continuation du travail des perles,
faujfes. La vignette repréfente:
Fig. 1., ouvrière qui écaille le poiflbn nommé
ablette, dont l’écaille fert à colorer les perles.
Fig. 2, ouvrière qui fuce ,,avec un chalumeau de
verre , la liqueur dans laquelle l’écaille de l’ablette
eft diffoute.
Fig. 3 , ouvrière qui introduit, en foufflant dans
le chalumeau, une goutte de cette liqueur dans la
girafol ou perle fauffe, qu’elle jette enfuite dans
la corbeille qui eft placée dans le faffeau qui eft fur la
table.
Fig. 4 , ouvrière qui attache les perles fur un bâton
ou règle enduite de cire, pour les remplir de cire en
les plongeant dans la terrine qui eft devant elle.
Fig. $ y ouvrière qui cartonne, c’eft-à-dire qu’elle
introduit un rouleau de papier dans la perle.
Fig. 6 , ouvrière qui coupe le carton avec un
couteau.
Bas de la planche.
Fig. 1, perle ronde.
Fig. 2 , perle ovale.
Fig. 3 , bande de papier que l’on coupe fuivant la
direâion des lignes pon&uées , pour former de
chaque pièce un carton.
Fig. 4 , carton entièrement roulé prêt à entrer,
dans une perle.
Fig. ƒ , carton roulé en partie fur une aiguille.
Fig. 6 , perle ronde prête à recevoir le carton
qui eft à côté..
Fig. 7 » perle ronde enfilée fur le carton.
Fig. 8 , perle dont le carton a déjà été coupé d’un
côté.
Fig. p , règle fur laquelle les perles font collées
pour pouvoir les plonger dans la terrine qui contient
la cire fondue.
Fig. 10 y fas ou tamis percé de trous pour aflortir
les perles.
Fig. 1 /,'établi des figures 2 & 3 de la vignette
repréfenté plus en grand , pour que l’on puiue discerner
les différentes parties du laffeau ou berceau
qui eft pofé deffus , & auquel l’ouvrière, fig. 3 ,
communique le mouvement par la marche fur laquelle
elle pofe le pied.
Planche IV. De la peinture en émail. La vignette
repréfente un cabinet. .
Fig. 1, le peintre occupé à colorer un morceau
d’émail.
Fig. 2, émailleur qui paffe la pièce au feu après
qu’elle eft peinte.
Bas de la planche.
Fig. 1 , porte du chapiteau du fourneau.
Fig. 2 y moufle qui fe place dans le fourneau &
fous laquelle on fait fondre les émaux , vue du côté
de l’ouverture.
« Fig. 3 y élévation latérale extérieure de la moufle.'
H h h