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tion. Nous dirons Amplement qu’elle fe fabrique,
plus communément chez les ferruriers qui font les
tuyaux de poêles : on en trouve de toute grandeur,
& les petites dont on fait ufage dans les maifons
particulières, font garnies d’un fourneau de tôle,
propre à recévoir la quantité de charbon néceffaire
pour l’opération.
Cet uftenfile doit d’autant mieux être préféré à
tout autre, qu’il efl plus commode , & que le café
fe trouve toujours grillé plus uniformément, fi l’on
obferve ce qui fuit.
On met la graine de café dans le tambour, de
manière qu’elle n’excède pas la moitié de la broche
qui la traverfe ; on l’expofe d’abord fur un feu modéré
, & on obferve de tourner de temps à autre
en fens contraire: lorfque le café commence à
donner de la fumée, on l’agite plus fortement, en
fecouant le tambour à plufieurs reprifes, & en proportion
de l’èpaiffeur de la fumée.
Lorfque la pellicule qui fert d’enveloppe à cette
graine fe détache avec éclat, on retire la broche
du fe u , & on continue d’agiter jufqu’à ce que le
café ait acquis une belle couleur de marron clair ,
tirant fur le violet: alors on verfe ce café grillé
dans un van , ou un vaifléau plat qu’on expofe à un
air libre ; on le vanne, tant à l’effet d’en rejetter les
pellicules qui s’en font détachées , & qui commu-
niqueroient au café un goût de brûlé , que pour
faire refroidir cette graine plus promptement. On la
jette enfuite dans une boîte qui n’ait aucucie odeur,
& on n’en fait moudre qu’au fur & à mefure qu’on
en a befoin.
De la maniéré de tirer la teinture du Café.
Lorsqu’on a fait réduire le café grillé en poudre ,
o-n en délaie une once dans une chopine d’eau froide,,
ou chaude , cela eft prefqu’indifférent, pourvu que
cette eau ne foit pas bouillante ; je confeillerois
néanmoins de la délayer de préférence dans de
l’eau froide.
Dans ce dernier cas on approche le vaifleau- du
feu ; & lorfque le liquide commence à bouillir,
on y plonge une cuiller de bois, à l’effet de ramener
à la fuperficie la moufle favonneufe du café,
qui s’eft précipité au fond du vaifleau ; puis on retire
la cafetière du feu, & on fème une ou deux pincées
de fucre en poudre fur cette écume.
On laifle repofer pendant quinze ou vingt minutes
, & on verfe cette liqueur par inclinaifon : lorfque
cette opération fe fait avec l’exaétitude requife,
on remarque que cette teinture de café eft plus fa-
lubre, plus agréable & plus oléagineufe que celle
qui auroit bouilli plus long-temps, & dans laquelle
on auroit fait entrer la colle de poiffon , ou la poudre
de corne de cerf ; car on doit obferver que, fi
ces deux ingrédiens ont la propriété de rendre la
liqueur du café plus limpide, ces fubftances ont
aufli celle de coaguler & de précipiter avec le marc
du café, l’huile gommeûfe qui communique à fa
teinture cette ©nchiofité qui fait que l’amertume
de la liqueur fe trouve nQn-reulement moins Lèche
& plus agréable, mais fert encore*à ralentir la grande
a&ivité du café.
Enfin j’eftime , ajoute M. Dubuiffon, que la méthode
de coller le café produit dans cette liqueur le
même effet, que fi elle avoit fubi une trop longue
ébullition, ou qu’elle eût refté pendant quatre ou
cinq heures auprès du feu ; car il en eft du café
comme des différentes teintures , décodions ou
infufions qu’on retire de tous les végétaux : ces liquides
agiffent toujours en raifon des degrés de
coétibn, d’atténuation, ou d’altération qu’on leur
fait fubir.
Lorfqu’on a tiré le café au clair , on jette de l’eau
fur le marc qu’on agite, & auquel on fait feulement
jeter un bouillon ; on laifle repofer , on tire
au clair cette fécondé teinture, on y ajoute une
dofe de café proportionnée ; car cette liqueur a encore
un degré de force déterminé , qu’on peut
augmenter ou diminuer à volonté.
On peut encore tirer la teinture du café & le
paffer au clair, & promptement, par le moyen
d’un alambic portatif, dont voici l’explication.
On a un cône ou petit alambic de fer blanc
allongé, percé en bas vers fa pointe de plufieurs
trous ; on a enfuite une chauffe d’étoffe, avec un
cercle de fer blanc , qui s’adapte dans l’intérieur de
l’alambic ; on y met le café moulu, on verfe deffus
l’eau bouillante ; la liqueur fe filtre, paffe très-claire,
& tombe en filets dans un vafe qui eft deffous ; le café
; eft fait tout de fuite, bien clarifié & bon à prendre.
Le marc qui refte eft épuifé beaucoup plus que
par l’autre méthode , & n’eft plus qu’un caput
mortuum. Voyeç PI. I I I du Diflillateur-Liquorijle,
fig. 4 , y , 6 , 7 , tome II.
Nous ne parlerons pas de l’huile ejfenùelle du café
tout apprêté, ni des tablettes de café, ni du café
à la grecque , ni du café d la fultane, fait avec la
graine du café crud, jeté dans l’eau bouillante, ni
d’autres inventions ou annonces femblables, qui
ont été abandonnées auffitôt qu’eflayées, parce
qu’eHes ont paru plus nuifibles qu’avantageufes.
Café au lait.
Quelques années après que l’ufage du café fut
établi à Paris , les diftillateurs imaginèrent d’en faire
fans eau, & ils fervoien-t de ce café au public pendant
toute la matinée. Quoiqu’on ait totalement
abandonné cet ufage, j’ai néanmoins cru devoir
donner la manipulation de ce café , pour qu’on
foit plus à portée d’eftimer fi l’on a été fonde en
principes , ou fi ce n’a été que par goût pour la
nouveauté , qu’on en a admis ou rejeté l’ufage.
Cette opération confiftoit à mettre une quantité
déterminée de lait dans une poêle de cuivre rouge »
ou dans un chaudron d’airain ; & lorfque le lait
eommençoit à bouillir, on jettoit une once & demie
de café en poudre, par pinte de lait.
On le faifoit bouillir légèrement pendant environ
demi-heure ; on agitoit fortement avec une fp:1"
tule de bois de chêne, &par ce moyen on iioit plus
intimement les parties du lait avec celles du café ;
& avant de retirer le vaifleau du feu, on y ajou-
toit une quantité proportionnée de caramel.
On agitoit encore la liqueur, à deffein de rendre
le mélange plus uniforme ; on la mettoit enfuite
repofer dans une cafetière de fer blanc; mais comme
le marc ne fe précipitoit que très?difficilement, on
faifoit ce café le fôir, & on ne le droit au clair
que le lendemain matin : on le faifoit enfuite
chauffer au bain-marie , & les artiftes les plus délicats
l’entretenoient dans le bain, jufqu’à ce que
la totalité eut été diftribuée au public.
O r , fi les parties cafeufes & butyreufes du lait
ont la propriété d’envelopper & d’embarrafl'er les
parties fubtiles, ainfi que les fels volatils du café,
& que les parties actives dn café aient réciproquement
la faculté de divifer les parties butyreufes &
cafeufes du lait, de manière qu’elles fe diftri-
buent plus uniformément ; le café qui a été fait ainfi
avec le lait pur, contenant plus de parties nutritives
, fembleroit convenir mieux aux perfonnes maigres
& phthifiques, que le café à l’eau dans laquelle
on ajoute Amplement le lait ou la crème.
D u T h é .
Le thé, dit M. Kempfer, eft une petite feuille
defl’échée , roulée, d’un goût un peu amer, légèrement
aftringent, agréable, d’une odeur douce, qui
approche du foin nouveau & de la violette. Cet
arbriffeau dont les feuilles font fi recherchées, croît
feulement à la hauteur d’une braflé, & quelque
chofe de plus.
Ce n’eff pas une chofe fort aifée que la récolte
du thé ; voici de quelle façon elle fe fait au Japon.
On trouve pour ce travail des ouvriers à la journée
, qui n’ont point d’autre métier : les feuilles ne
doivent point être arrachées à pleines mains ; il les
faut tirer avec beaucoup de précautions une à une ;
& quand on n’y eft pas ftylé, on n’avance pas
beaucoup en un jour ; on ne les cueille pas toutes
en même temps : la récolte fe fait à deux fois ,
aflfez fouvent à trois.
Dans ce dernier cas , la première récolte fe fait
V,ers !a Premier mois de l’année japonoife,
c efi-à-dire, le premier jour de mars : les feuilles
alors n’ont que deux ou trois jours : elles font en
petit nombre, fort tendres, & à peine déployées ;
ce font les plus eftimées & les plus rares ; il n’y a
que les princes & les perfonnes aifées qui puiffent
en acheter, & c’eft pour cette raifon qu’on leur donne
le nom de thé impérial : on l’appelle aufli fleur de thé.
, Le thé impérial, quand il a toute fa préparation,
s appelle Tiki-Tsjaa , c’eft-à-dire thé moulu, parce
qn on le prend en poudre dans l’eau chaude : on
un dorme aufli le nom d’Udfi-Tsjaa , & de Taclié-
backi-Tsjaa, de quelques endroits particuliers où il
c^ lt* Lopins eftimé au Japon eft celui d’Udfi, petite
ville affez proche de Méaco. On prétend que le climat
y eft le plus favorable de tous à cette plante.
Le thé qui fert à la cour de l’Empereur & dans
la famille impériale, doit être cueilli fur une montagne
qui eft proche de cette ville. Aufli n’eft-il
pas concevable avec quel foin & quelle précaution
on le cultive.
Un fofle large & profond environne le plant.
Les arbriffeaux y font difpofés en allées , qu’on ne
manque pas un feul jour de balayer : on porte l’attention
jufqu’à empêcher qu’aucune ordure ne tombe
fur les feuilles ; & lors que la faifon de les cueillir
approche , ceux qui doivent y être employés s’abf-
tiennent de manger du poiffon, & de toute autre
viande qui n’eft pas faine, de peur que leur haleine
ne corrompe les feuilles.
Outre cela, tant que la récolte dure , il faut
qu’ils fe lavent deux ou trois fois par jour dans un
bain chaud & dans la rivière ; & malgré tant de
précaution pour fe tenir propres, il n’eft pas permis
de toucher les feuilles avec les mains nues : il faut
avoir cjes gants.
Le principal pourvoyeur de la cour impériale pour
le thé, a l’ihfpeâion lur cette montagne qui forme
un très-beau point de vue : il y entretient des commis
pour veiller à la culture de l’arbriffeau, à la
récolte & à la préparation des feuilles, & pour empêcher
que les bêtes & les hommes ne paffent le
fofle qui environne la montagne : pour cette raifon
on a loin de le border en plufieurs endroits d’une
forte haie.
Les feuilles ainfi cueillies, & préparées de la manière
que nous dirons bientôt, font mifes dans des
facs de papier, qu’on renferme enfuite dans des
pots de terre ou de porcelaine ; & pour mieux con-
lerver ces feuilles délicates, on achève de remplir
les pots avec du thé commun.
Le tout ainfi bien empaqueté eft envoyé à la cour,'
fous bonne & fûre garde , avec une nombreufe
fuite. De-là vient le prix exorbitant de ce thé impérial
; car, en comptant tous les frais de la culture
, de la récolte, ae la préparation & de l’envoi,
un kin monte à trente ou quarante thaels, c’eft-
à-dire , à quarante-deux ou quarante-fix écus, ou
onces d’argent.
Le thé des feuilles de la fécondé efpèce s’appelle,
dit M. Kempfer, Too-Tsjaa , c’eft-à-dire,
thé Chinois, parce qu’on le prépare à la manière
des Chinois.
On appelle Bau-Tsjaa celles de la troifième efpèce;
& comme elles font pour la plupart fortes &
groffes, elles ne peuvent être préparées à la manière
des Chinois, c’eft-à-dire, féchées fur des
poêles & frifées; mais comme elles font abandonnées
aux petites gens , il n’importe de quelle manière ou
les prépare.
Dès que les feuilles de thé font cueillies , on les
étend dans une platine de fer qui eft fur le feuj
& lorfqu’elles font bien chaudes , on les roule avec
la paume de la main fur une natte rouge très-
fine , jufqu’à ce qu’elles foient toutes frifées. Le feu
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