
fait monter les lignes ; & s’il penche fur la gauche
, les lignes defcendent:. En fe conformant aux
règles de la pofition du corps, on ne tombera pas
clans cette faute.
On va encore de travers en écrivant les écritures
bâtardes & coulées, dont l’effet de la pente
efl d’entraîner naturellement les lignes en bas, quand
on n’a pas l’attention d’élever chaque lettre un peu
plus que celle qui la précède , mais d’une manière
infenfible, c’efl-à-dire que s’il y a plufieurs jambages
de fuite, le fécond doit être imperceptiblement
plus haut que le premier, en obfervant de
le defcendre imperceptiblement moins bas , & ainfi
des autres. Cette rè^le efl immanquable lorfqu’elle
fe pratique fans exces.
P L A N C H E X V .
Des différentes écritures de bâtardes.
De même que l’écriture ronde, celle que l’on
appelle italienne, plus ordinairement bâtarde ,
fera diftribuée en cinq claffes. Des pièces dans chaque
genre plus longues auroient mieux convenu,
mais cela ne pouvoit fe faire dans cet ouvrage,
où l’on étoit fixé à un certain nombre de planches.
Quoi qu’il en foit, j’ai fait enforte dans le peu que
j’ai donné, de conferver l’efprit de chacune de ces
écritures. Quant à la pratique, on fuivra tout ce
que j’ai dit aux explications de la planche précédente
au fujet de la ronde. Je me reflreins ici à
ne parler feulement que fur ce qui concerne chaque
écriture en particulier.
Sur la première..
Cette première efl précifément ce qu’on nomme
groffe bâtarde. C ’efl par cette écriture que l’on commence
un jeune homme qui n’a pas befoin de la
ronde. Quand ce caraâère efl d’une bonne grof-
feur, on l’appelle titulaire , étant toujours employé
aux titres fupérieurs des ouvrages. . Comme le génie
de cette écriture efl la fimplicitéfur-tout en
groffe , c’efl la raifon pour laquelle les lignes n’ont
de diflance que trois corps. L’exercice de ce ea-
raâère efl excellent pour former la main , en s’attachant
à 4’égalité des lettres , à la jufleffe de la
pente, & à la fituation de la plume. Souvent,
lôrfque cette fituation efl négligée, il arrive que
la plume fe trouve fur l’oblique des doigts ; ce
qui efl un grand défaut, & par conféqùent le plus
à éviter.
Sur la fécondé.
Cette fécondé, qui efl de la moyenne \ efl le
caraâère qui fuit la groffe. Il fert pour les fous-
titres , & pour perfeâionner la main des élèves ;
dans fon foutien , ce qui n’efl pas le plus aifé. La
diflance des lignes efl de trois corps feulement,
& celle entre chaque mot dans toutes les écritures
efl de deux corps. La diflance réglée pour les lignes
»e caufe aucun embarras , parce .que dans le travail
de la bâtarde, on fuit flriâement les principes
dans la hauteur des têtes & la longueur des queues
cè qui ne s’obferve pas av;ec tant d’exaâitude dans
les autres écritures , où la main peut prendre plus
d’effor. v
Sur la troisième.
C ’efl de la petite bâtarde pofée & ordinaire.
Comme elle efl affez difficile , elle exige dans l’ar-
tifle une fûreté de main inconcevable, ainfi que
toutes les petites en général. Cette écriture n’efl:
fufceptible d’aucun ornement étranger ; la fimpli-
cité en efl la bafe, & fa beauté efl le fruit du travail
& de l’application.
Sur la quatrième.
Cette quatrième efpèce de bâtarde efl celle que
l’on appelloit bâtarde coulée , & qui étoit en ufage
dans le fiècle paffé & au commencement de celui-
ci. Cette écriture, à laquelle les gens de cour donnent
, avec raifon , la préférence, la moins en pratique
dans le public , mériteroit d’être adoptée par
toutes les dames & les perfonnes de condition,
à caufe de fa netteté , qui la rend d’une leélure
très-facile. Elle fe lie de pïés en têtes, non pas
comme la coulée ordinaire, dont les jambages font
arrondis à la bafe & angulaires à leur fommet,
mais en faifant fortir la liaifon du -bas pbfitif des
jambages qui font angulaires, pour être portés au
fommet de chacun de ces-jambages qui font arrondis
dans le haut. Toutes les têtes font doublées
pour mieux les joindre, & les queues font terminées
fans bouton. La coutume efl encore de n’employer
, dans cette écriture, que des lettres fem-
blables & les plus fimples , fans chercher à varier
leurs formes comme dans les autres écritures. Par
toutes ces règles, cette écriture qui fe fait en tenant
la plume longue dans les doigts , efl la feule en
bâtarde qui foit rèfervée pour l’expédition. La dif-
tance ordinaire des lignes efl de quatre corps ; on
peut cependant n’en donner que trois en raccour-
èiffant les têtes & les queues. Enfin cette écriture
doit être légère, un peu longue, & ne rien tenir
abfolument de ce qui pourroit contribuer à la rendre
pefante.
Sur la cinquième
La cinquième bâtarde repréfente l’êcritiiré ufitée
pour les manufcrits ,• fur-tout pour ceux qui font
latins. Elle doit être de la plus grande fimplicité,
& d’un caraâère nourri fans être lourd, & parfaitement
foutenu. Les majeures , pour l’ordinaire,
font romaines, fouvent faites en .or & remplies
d’ornemens. Ce genre d’écriture en manufcrits peut
être orné de vignettes , foit fimples , foit colorées
avec des traits auffi nouveaux que précieux. La
diflance des lignes varie beaucoup. Pour avoir un
principe certain fur ce fu je t, j’ai confulté divers
ouvrages remarquables par leur brillante exécution.
Dans les unes j’ai trouvé deux corps ; alors les
tètes n’ont d’élévation qu’un demi-corps , & les
cueues n’ont de longueur que les trois quarts de
ce même corps. Dans les autres , la diftance eit
de deux corps & demi ; alors les tetes s élevent
d’un demi-corps , & les queues defcendent d’un
corps entier. Il en efl encore d’une troifième efpèce
dont les diflances font de trois corps. C ’efl celle
qui m’a fervi de lo i, parce qu’elle communique
plus de légéreté. Dans cette dernière règle, les
têtes paffent d’un corps, & les queues baiffent d’un
corps & demi. Voilà tout ce que l’on peut dire de
plus intêreffant fur ce genre d’écrire, qui efl beau
a la vue, & long dans l’exécution.
Il efl peu d’ouvrages eh écriture, où il n’y ait
un titre fupérieur, & quelquefois un fous-titre.
L’ufage efl d’employer la groffe bâtarde pour l’exécuter
, & c’efl pour cette raifon qu’elle efl appelée
titulaire. On fe fert auffi , pour le même objet,
de l’écriture brifée, mais cela efl rare. A l’égard
des fous-titres, ils fe font en moyenne ronde, &
auffi en moyenne bâtarde, lorfque l’on ne fait pas
le caraâère françois.
Un titre doit être fait proprement & avec fy-
métrie. Il efl des occafions où il produit de beaux
effets ; c’efl au génie de l’artifle a les faifir.
La ronde & la coulée ne font jamais employées
pour les titres fupérieurs , encore moins certaines
écritures que l’on appelle, l’une coupée, & l’autre
ondée , que les ignorans nomment auffi tremblée.
Ces deux dernières , qui fentent le colifichet, font
entièrement méprifées , & ne fervent que pour
amufer les enfans & les gens fans goût.
On efl obligé fouvent de placer dans les marges
de quelques ouvrages des notes ou des obfer-
vâtions importantes. Elles fe font en petite ronde
minute , ou en petite bâtarde. Toutes deux doivent
avoir un caraâère plus fin que celui de la
pièce qu’elles accompagnent ; toutes deux doivent
avoir de la netteté & de la précifion.
P L A N C H E X V I .
Des différentes écritures de coulée.
L’écriturç coulée doit être divifée , ainfi que les
précédentes, en cinq claffes, fur chacune defquelles
je ne dirai qu’un mot. En général, cette écriture
efl celle qui efl la plus en règne & la plus recherchée
, parce qu’elle s’écrit plus promptement que
les deux autres ; mais elle veut être bien faite &
bien frappée , pour que la leâure en foit plus facile
& plus belle aux y eu x , autrement elle fatigue &
dégoûte. L’on s’occupe fi peu à cette écriture chez
les maîtres, qu’il efl impoffible qu’on puiffe l’exécuter
dans un bon goût, & lui donner en expédiant
une forme correâe & gracieufe. D’où viennent
cette négligence & ces mauvaifes écritures
^ue l’on yoit tous les jours, linon du peu de cas
que l’on fait d’un art qu’on ne peut difconvenir
être une des parties effentielles de l’éducation ?
Sur la première.
Lorfqu’on s’efl fuffifamment exercé aux lettres
on doit s’appliquer à la groffe coulée : il faut,
comme je l’ai déjà d it, que la plume foit plus fendue
, & qu’elle loit tenue un peu plqs longue dans
les doigts, pour faciliter la liberté qui dans ce caraâère
ne s’acquiert que par un grand travail; mais
il ne faut pas d’abord précipiter fes mouvemens.
Ce n’efl qu’après avoir commencé par écrire pofé-
ment & dans les principes les plus réguliers, qu’on
peut les accélérer, en fe foutenant dans la même
viteffe. On exerce ainfi la flexion & l’extenfion
des doigts, l’on fe fortifie fur la forme, & l’on
donne l’habitude au bras de couler légèrement fur
lavable. La diflance des lignes doit être de quatre
corps. Si cette coulée étoit ornée de paffes, on
fer oit forcé d’en donner cinq & même fix.
Sur la deuxième.
On appelle ce caraâère moyenne coulee. On doit
y travailler jufqu’à ce quelle foit foutenue.& parfaitement
formée ; l’écrire enfuite avec plus de
viteffe , fans pourtant fe trop précipiter, & en liant
les mots tous enfemble s’il efl poffible. La diflance
" des lignes efl de quatre corps.
Sur là troifième.
La petite coulée pofée & ordinaire efl l’écriture
de la troifième claffe. Elle doit être exercée avec
beaucoup d’attention & affez de temps pour fe
rendre fûr dans ce caraâère, d’où dépend l ’écriture
coulée financière. Il efl évident que plus on aura
travaillé à la pofée, & plus on brillera dans l’expédition.
C’efl en faifant cette petite , que l’on
doit s’occuper à écrire de la groffe promptement
& de fuite, comme je l’ai déjà obfervé , parce
qu’elle entretient la forme, donne de la confom-
mation, & empêche le progrès des défauts qui
pourroient naître. La diflance des lignes efl de cinq
corps.
Sur la quatrième.
Celle-ci s’appelle coulée financière, parce qu elle
efl ufitée dans les bureaux. Cette écriture doit être
longue, légère, & tous les mots & caraâères doivent
fe joindre les uns aux autres. La diflance des
lignes efl de trois corps ; par la raifon que l’on ne
donne qu’un corps d’élévation aux têtes , de même
qu’un corps de longueur aux queues. Cette règle
n’efl cependant pas- générale ; car fouvent on fait
les têtes & queues plus courtes, ce qu’on appelle
coulée tondue. Plufieurs peuples embarraffent leur
écriture courante , en la faifant avec des têtes &
queues plus grandes qu’il ne faut. Les François
ont donné dans l’excès oppofè , puifque leur expédition
efl dénuée de ces parties Caillantes. L’une
& l’autre font contraires à cette loi fage qui défend