
qu’on a enlevées de deffus l’étain fondu , fe jettent
dans l’eau, & on les écrafe pour les remettre au
fourneau avec les crades qui peuvent contenir encore
des parties métalliques. Les fcories peuvent
être employées jufqu’à deux ou trois fois dans la
fonte, pour achever d’en tirer l’étain qui peut y être
refté.
On verra dans l’explication des planches & dans
les planches tome I I des gravures ; le développement
d’un autre fourneau qui eft d’ufage pour le
grillage & la fufion de la mine d’étain.
JDes differentes fortes 'd’étain.
Les potiers d’étain diftinguent l’étain doux, qui
eft le plus fin, d’avec l’étain aigre qui ne l’eft pas
tant.
L’étain doux étant fondu & coulé, puis refroidi,
eft uni, reluifant & maniable comme le plomb.
Celui-ci qu’on appelle du Pérou, & qu’on nomme
petits chapeaux ou étain de Melac , eft le plus
eftimé.
C ’eft de cet étain doux que les faéfeurs d’orgues
font les tuyaux de montre de buffet, & les miroitiers
le battent en.feuilles pour donner le teint aux
glaces avec le vif-argent.
Aloi dans Vétain.
Pour employer de l’étain doux en vaiffelle, les
potiers d’étain y mettent de Y aloi. Cet aloi eft
du Cuivre rouge, qu’on nomme cuivre de rofette,
fondu à part, & que l’on incorpore dans l’étain auffi
fondu.
La dofe eft d’environ cinq livres de cuivre par
cent d’étain doux : quelques-uns n’y en mettent que
trois livres, & une livre d’ètain de glace ou bif-
muth; & pour lors il perd fa qualité molle , & devient
ferme, dur & plus fonnant qu’il n’étoit.
A l’égard de l’étain aigre, on y met moins de
cuivre, félon qu’il l’eft plus ou moins, & quelquefois
point du tout, principalement fi on veut l’employer
en poterie d’étain, & qu’on en ait de vieux
qui ait fervi, pour le mélanger, ce qui l’adoucit.
Étains d’Angleterre & autres efpèces.
Les étains qui nous viennent-d’Angleterre, font
fous plufieurs formes différentes.
Les uns font en lingots, les autres en faumons,
& les autres en lames qu’on nomme verges.
Les lingots pèfent depuis trois livres jufqu’à trente-
cinq.
Les faumons, depuis deux cens cinquante livres,
jufqu’à environ quatre cens.
Et les L imes ou verges, environ une demi-livre.
Les faumons font d’une figure carrée , longue &
épaiffe comme une auge de maçon, mais tout pleins.
Les lingots font de la même forme, & les lames
font étroites & minces.
Il fe tire des Indes Espagnoles une forte d’étain
très-doux, qui vient en faumons fort plats, du
poids de cent vingt à cent trente livres.
Il en vient aulïi de Siam par mafles irrégulières '
que les potiers d’étain nomment lingots, quoiqu’ils
foient bien différens de ceux d’Angleterre. *
L’étain d’Allemagne qui fe tire de Hambourg, eft
en faumons de deux cens jufqu’à deux cens" cinquante
livres, ou en petits lingots de huit à dix
livres, qui ont la figure d’une brique; ce qui les
fait appeller de l'étain en brique.
L ’étain d’Allemagne eft eftimé le moins bon à
caufe qu’il a déjà fervi à blanchir le fer en feuille ou
fer-blanc.
Les potiers d’étain fe fervent du çinc pour déeraf-
fer l’étain lorfqu’il eft fondu, avant de l’employer
pour le jeter en moule, fur-tput fi c’eft de la vaif-
felle. Il faut prendre garde d’en mettre trop, car il
oecaûonne des foufflures aux pièces.
Ces foufflures font de petits trous cachés dans l’intérieur
des pièces, fur-tput fi elles font fortes, & ces
trous ne fe découvrent qu’en les tournant fur le
tour.
Une once ou environ de zinc, foffit pour décraffer
quatre a cinq cens livres d’étain fondu.
L’étain en feuilles eft de l’étain neuf du plus doux,
qu’on a battu au marteau fur une pierre de marbre
bien unie.
Il fe tire de Hollande une autre efpèce. d’étain
battu, dont les feuilles font très-minces & ordinairement
roulées en cornet ; elles font ou toutes
blanches ou mifes en couleur feulement d’un côté.
Les couleurs qu’on leur donne le plus communément
font le rouge, le jaune, le noir & l’aurore : ce
n’eft qu’un vernis appliqué fur l’étain. Cette forte
d’étain fe nomme appeau.
On nomme etain en treillis ou en grilles, certains
ronds d etain a claire voie, qui font attachés aux
boutiques des potiers' d’étain, & qui leur fervent
comme de montre ou d’étalage.
Ces treillis font pour l’ordinaire d’étain neuf doux
fans aloi, c eft-a-dire, qui eft tel qu’il étoit en faumons
ou lingots, à la fonte près qu’on lui adonnée
pour le mettre en treillis.
Les potiers d’étain mettent l’étain en.treillis pour
la facilité de la vente, étant plus aifé de le débiter
de cette manière qu’en lingots ou faumons.
L étain d’antimoine, que les potiers d’étain nomment
vulgairement métal, eft de l’étain neuf qu’on
a allie de régule d’antimoine, d’étain de glace ou
de bifmuth , & de cuivre rouge, pour le rendre plus
blanc, plus dur, plus fonnant. Cet alliage fe fait en
mettant fur un cent pefant d’étain, huit livres de
régulé d’antimoine, une livre d’étain de glace , &
quatre à cinq livres de cuivre rouge plus ou moins,
fuivant que l’étain eft plus ou moins doux. On ne
l’emploie guère qu’en cuillers ou fourchettes, qu’on
polit en façon d’argent.
Étain plané.
C ’eft de l’étain neuf d’Angleterre, qu’on nomme
étain plané, parce qu’il eft travaillé au marteau for
une platine de cuivre ,, placée fur une enclume avec
un
linon deuxcyirS decaftorentrel’enclume Sçlaplatine.
Cette manière de planer l’étain le rend très-uni tant
deffus que deffous, & empêche qu’il n’y parodié
aucuns coups de marteau ; il n’y a que la vaiflelle qui
fe plane. . ^
Etain fonnant ou Etain fin.
C’eft celui qui eft un peu moindre que le plané
où il y a pl«s de vieux étain , & qui eft plus aigre ;
ce qui le rend inférieur à l’étain plané & à meilleur
marché.
Etain commun.
On le fait en mettant quinze livres de plomb fur
un cent d’étain neuf, ou vingt livres fi l’étain neuf
eft bien bon.
Les potiers d’étain vendent à différens artifans
une forte de bas étain, moitié Aplomb & moitié
étain neuf, qu’ils appellent claire foudure ou claire
étoffe ; cette efpèce d’étain eft la moindre de toutes.
Il n’eft pas permis aux potiers d’étain de l’employer
dans aucun ouvrage, fi ce n’eft en moule pour la
fabrique des chandelles, à quoi il eft très-propre. On
en fait auffi quantité de petits ouvrages, que l’on
appelle bimblot, ménage d’enfant ou colifichet.
Etain en rature ou rature d’étain.
C’eft de l’étain neuf fans alliage , que les potiers
d’étain mettent en petites bandes très-minces, larges
d’environ une ligne à deux, par le moyen du tour
& d’un inftrument coupant nommé crochet ; cet étain,
en rature fort pour les teintures. On nomme auffi.
ratures d’étain ,. tout ce que les'crochets ôtent fur I
les pièces que les potiers d’étain font obligés de
tourner.
EJfai de l’étain.
On peut faire de la manière' fuivante l’effai de
Pétain , pour en connoître la qualité & le titre.
On prend une pierre de craie dure fur laquelle on
fait un trou rond comme la moitié d’un moule de
balle , qui contient environ deux onces d’étain ;
on y joint une petite coulure de deux pouces de
long & d’une ligne de large^, & à peu près auffi
proronde, & cela fur la furface plate de la pierre ;
& par le moyen de cette coulure, qu’on nomme le
jet, on emplit ce trou d’étain fondu, & lorfqu’il eft
froid, on voit fa qualité.
L’étain doux eft clair, uni, d’égale couleur deffus
& deffous ; il fe retire comme un petit point au milieu
dé l’effai.
L’étain fin aigre fe retire plus au milieu, & pique
de blanc fur la furface ; il eft uni & luifant par
deffous.
L’étain fin qui eft moins bon, eft tout blanc deffus
& deffous. '
L’étain commun eft tout blanc auffi , excepté ou
la queue du jet joint le rond de l’effai , où il fe
trouve un peu brun , & plus ce brun paroît avant
dans l’e ffai, moins l’étain eft bon : enforte que ft
Arts & Métiers, Tome II, Partit 11%
l’effai perd toutfon blanc & devient brun en entier,
ce n’eft plus de l’étain commun , mais de la claire
étoffe, que tous les potiers d’étain ne peuvent travailler.
On peut cependant remettre cette claire en etain
commun, ft for chaque livre on m-et une livre de-
tain fin. * ' . ' ( -
L’étain fin qui fe trouve abaiffe, fe rétablit en y
mettant une quantité foffifante de bon ..étain neuf ou
du plané.
Autre maniéré d’effayer l’étain.
Il y en a qui effaient d’une autre manière : on
prend un moule de cuivre rouge à faire des balles
de plomb, & on jette de l’eau dedans ; on pèfe les
balles des différens étains qu’on a jetés. , & on
eftime que le plus léger eft le meilleur : ceft ce
qu’on appelle effayer à la balle.
Enfin,' une méthode d’effayer plus commune &
plus ordinaire, eft de toucher avec un fer à fonder
la pièce qu’on veut effayer, & on connoît fi elle
eft bonne ou mauvaife à l’infpeftion de là touche.
La touché eft un coup de fer chaud en coulant ,*
qui dénote la qualité de l’étain. S ileftjî/z, 1 endroit
touché eft blanc & pique, un petit point au milieu;
au commun, l’endroit touché eft brun autour’& çlanc
au milieu j moins il y a de blanc, moins 1.etain eft
bon : cela-a affez de rapport à l’effai à^la pierre ,.
& les gens du méfier s’en fervent plutôt pour ei-
faÿer quelque pièce douteufe, que pour effayer des
faumons ou gros lingots ; car pour ceux-ci, il faut
revenir à l’une ou F autre des deux maniérés ci-^
deffus. v, .
Ufage & dangers de l’etain.
L’ufage le plus ordinaire de l’étain eft en poterie :
on en fait des affiettes, des plats, des pots, des
pintes, & toutes fortes d’uftenfiles de ménage. ^
Mais une chofe que bien des gens ignorent, c eft
que l’ufage des vaiffeaux d’ètain peut être très-per-
nicieux/-, non-feulement lorfque ce métal eft allie
avec du plomb, mais eiicore lorfqu’il eft fans alliage.
M. Margràff, célèbre chimifte de Berlin , a fait voir
que toits les acides végétaux agiffoient fur 1 étain,
& en diffolvoientune partie. Ce lavant prouve auffi
que l’étain contient prefque toujours de 1 arfenic,
non que cette fubftance foit de l’effence de ce métal,
mais parce que fouvent les mines d’etain contiennent
ce dangereux métal, qui, dans 1 opération de
la fo.fi.on, s’unit très-facilement avec l’étain, & ne
s’en fépare que très-difficilement. M. Margraff conclut
delà, que l’ufage journalier des-vaiffeaux d e-r
tain doit être très-pernicieux à la fante, fur-tout fi on
y laiffe féjourner des liqueurs aigres ou acides.
Avis des Médecins de Stade fur la vaiffelle d etain.
Les médecins de Stade en Saxe, pénétrés des
affreux défaftres qu’entraîne fréquemment l’ufage
de la vaiffelle d’ètain, indiquent les précautions
qu’on doit prendre pour s’en fervir fans inconvé-
niens. ■
PPB