fixer à la ligne pins près ou plus loin de l’haim ,
fuivant la profondeur de l’eau oïi l’on pêche, on
fourre dans le même trou où paffë la ligne, un petit
morceau de bois appointi, ou encore mieux, un
tuyau de plume, qu’on peut retirer aifément ^ &
qui fait l’office d’un coin pour empêcher que la ligne
ne coule dans le trou, afin que le. liège refte à l’endroit
qu’on jugé convenable. Il importe que le liège
n’ait que là groffeur néceffaire pour fe foutenir fur
l’eau ; car un morceau de liège trop gros effarou-
cheroit le poiffion. Pour lès pêches où l’on fait fau-
tillerl’haim à la furface de l’eau, il ne faut ni plomb,
ni liège. Quand on pêche certains poiffons, comme
la carpe , l’haim doit traîner fur le fond : pour
d’autres poiffons , il faut que l’haim foit entre deux
eaux ; & généralement parlant, il convient qu’il foit
plus près de la furface de l’eau durant les chaleurs
que par le froid. On doit régler fur ces coniidé-
rations la diftance qu’il faut mettre entre le liège ,
le plomb & l’haim.
Il ne refte plus qu a attacher l’hain à l’extrémité
de la ligne : ce qui peut fe faire de différentes façons.
Pour les fort petits hains qui font terminés
par un anneau, on paffe deux fois le bout de la
ligne dans, l’anneau ; on le couche fur le corps de
l’hain, auquel on le joint par plufieurs tours d’une
foie cirée : enfuite on relève le bout de la ligne vers
l’anneau, & on continue les révolutions du fil de
foie. Pour en arrêter le bout, on fait quatre ou cinq
révolutions de foie fur une aiguille un peu groffe ,
dans l’oeil de laquelle on a enfilé la foie ; on retire
cette aiguille vers le crochet de l ’hain, & ainfi la
foie fe trouve engagée dans les révolutions qu’on a
faites en dernier lieu ; on ferre l’une après l’autre
ces révolutions ; enfin on tire le bout de foie,
qui fe trouve engagé entre l’hain & les révolutions
qu’on a faites fur l’aiguille. De cette façon, l’extrémité
de la foie eft arrêtée fort proprement & foli-
dement.
Quand les hains font terminés par un applatiffe-
ment, & qu’ils ne font pas très-fins, on peut les
arrêter par un noeud.
Des differentes manières d’amorcer Us hains pour pêcher
à la ligne.
Quand on amorce avec de petits infe&es, il faut
les traverfer jufqu’à ce qu’ils aient paffé le barbillon :
quelquefois un feu l, enfilé fuivant fa longueur,
fuffit ; car les hains que l’on emploie pour cette
pêche font fort déliés. Lorfque les infeâes font bien
petits, on les-pique par le travers, & on en met
plufieurs enfemble.
Pour pêcher durant la nuit, comme il faut que
Vappât foit plus apparent, on pique prefque toujours
deux vers de terre par le travers du corps :
ils s’agitent alors beaucoup, & la moindre clarté
fuffit pour les faire appercevoir par les poiffons.
Il y a une infinité de vers qui peuvent fervir
d’appâts, principalement ceux qui fe trouvent dans
les fumiers de vache & de cochon, ou dans la
tanée. En général, on eftime pour la pêche ceux
qui vivent long-temps dans l’eau. A l’égard des gros
vers de fumier, on fait entrer la pointe de l’hain du
côté de la queue, & on la fait fortir auprès de la
tête.
On amorce encore avec de petits poiffons ; mais
c’eft à ceux qui traiteront des pêches , que nous
devons laiffer le foin de faire connoître ces différentes
elpèces d’appâts^naturels : nous allons feulement
parler des artificiels.
Des infetdes artificiels qu’ on emploie en Angleterre pour
pêcher à la canne.
Les Anglois prenant un fingulier plaifir à pêcher à
la canne , le grand ufage qu’ils ont de cette pêche,
les a mis à portée d’effayer quels étoient les infe&es
qui pouvoient leur fournir les meilleurs appâts : &
comme ces infeétes ne paroiffent qu’en certains mois
de l’année, ils fe font attachés à imiter la forme &
la couleur qu’ils ont reconnu être les plus propres à
attirer le poiffon.
Walton & Cotton , qui paffent en Angleterre
pour d’excellens pêcheurs à la canne, ont décrit
fort en détail l’art d’imiter différentes efpèces d’in-
feétes : nous croyons devoir faire part à nos leâeùrs,
de leurs principaux procédés. Je dis des principaux ;
car il y a apparence qu’on nous faura gré d’abré-
I ger beaucoup les détails minutieux qui le trouvent
dans les ouvrages des auteurs que nous venons de
nommer.
Walton dit que les infe&es ailés , naturels ou
fadices, font très - avantageux pour la pêche des
truites, de l’ombre, des perches, des faumons, &c.
& que les plus petits font ordinairement préférables
aux gros : il ajoute que, par les temps fombres, il eft
à propos de faire ufage des infeâes qui font d’une
couleur claire ; & que par les temps fereins, lorfque
le foleil luit, il vaut mieux fe fervir de ceux qui
font d’une couleur obfcure : d’où il conclut qu’il
faut avoir des uns & des autres, pour s’en fervir
fuivant les circonftances que ilous venons d’indiquer.
Voici d’abord les différentes fubftances qu’emploient
ceux qui prétendent qu’il faut beaucoup
varier la forme & la couleur des infe&es.
Pour les empiles, on fe fert de la foie, du crin
du fil pite, des boyaux de vers à foie qu’on tire de la
Chine, & à leur défaut, des boyaux de chat.
Pour le corps des infeétes, du camelot, de la
moire, & d’autres étoffes fines de différentes couleurs.
Nous en difons autant de la laine filée & de
la foie torfe ou plate, qu’on frotte affez fouvent de
fils d’or & d’argent.
Pour former le velu dont certains infeétes font
couverts, ou les antennes, on prend quelquefois
de la laine qu’on tire des vieux tapis de Turquie,
les poils pris à différens endroits fur différentes efpèces
d’animaux, tels qu’écureuils, chiens, chats,
renards, lièvres, ours, veaux marins, même des
cochons
cochons qui ont des poils fins fous la gorge \ ou à
une tache noire auprès des yeux, &c.
A l’égard des ailes, on en fait quelquefois avec des
membranes minces, mais le plus fouvent avec des
plumes étroites qui garniffent le col & le deffus de
la tête des chapons & des coqs. Les canards, les
faifans, les pluviers, les paons, & beaucoup d’autres
oifeaux fourniflbnt auffi des plumes propres à ces
ufages : on leur donne avec des cifeaux la forme
qu’elles doivent avoir. Cependant Walton qui ,
comme nous l’avons dit, réduit les infeétes faétices
à un fort petit nombre, dit qu’on peut faire de très-
bons infeétes pour la truite & d’autres poiffons, avec
du poil d’ours mélangé de poils bruns pris fur différons
animaux. Il avertit feulement que, pour bien
juger de la couleur des poils ou d’une plume, il Les
faut placer entre l’oeil & Le foleiliiJ ' ':
Le talent de ceux qui s’adonnent à 'dès fortes de
petits ouvrages, conhfte à choifir entre toutes les
matières-que nous venons d’indiquer, & beaucoup
d’autres, celles qui font les plus propres par leur
couleur, leur force & leur tiffu, à imiter les infeétes
naturels: mais;Walton remarque qu’il faut 'effayer
de mêler avec des poils fins ceux de veau marin ,
qu’on peut teindre; ceux d’ours, & certains poils
qu’on trouve fous la gorge des cochons : parce que
ces poils, qui ont de la roideur, foutiennent les autres
qui fe couchent & s’affaiffent fur eux-mêmes quand
ils font mouillés.
Walton remarque encore qu’il faut proportionner
la groffeur des infeétes faétices, à cellq des naturels
qu on veut imiter.
Pour former uninfeéte artificiel, on tient la tige
de l’hain entre île pouce 8c le doigt index, la pointe
de l’hain en bas, l’anneau en dehors, & la courbure
du côté de la paume de la.main : puis , fi l’infeéte a
le corps un peu gros, on le forme avec une petite
bandelette d’une étoffe mince, qu’on affujettit avec
des révolutions d’un fil de foie. Lorfque le corps
doit être menu, on le forme uniquement par des
révolutions d’une foie torfe ou plate, qu’on choifit
d’une couleur convenable : 8c on y mêle un fil d’or
ou d’argent, quand l’infeéte a la couleur 8c le brillant
d’urt de ces métaux.
Si l’infeéte doit être velu, on fe fert de ces mêmes
fils pour affujettir les poils ou le duvet, que l’on
coupe enfuite avec des cifeaux ; ou on en brûle
l’extrémité à la flamme d’une bougie , pour les réduire
à une longueur convenable.
Si l’infeéte doit être ailé, on forme ces parties
avec des plumes qui foient fermes 8c étroites, qu’on
taille avec des' cifeaux, pour leur donner la grandeur
& la forme des ailes de l’infeéte qu’on fe pro-
pofe d’imiter. Afin qu’elles foient affujetties fermement
au corps, on fait auprès de l’articulation ou de
l’attache des ailes au corps, plufieurs révolutions
de foie. Pour leur faire prendre la pofition qii’elles
doivent avoir, on eft fouvent obligé de faire plufieurs
révolutions qui fe croifent. On continue en-
fuite à former la partie poftérieure , tantôt rafe-,
Arts & Métiers. Tome II, Partie II,
tantôt velue, ayant eu foin auparavant d’ajouter
. plufieurs grands poils s’il eft néceffaire. Mais il faut
avoir attention que le corps de l’infeéte ne garniffe
pas toute la longueur de l’haim. Il convient même
qü’il ne s’étende pas jufqu’au barbillon.
Il paroît que ceux qui s’occupent d’imiter plufieurs
infeétes naturels, fuivent chacun leur goût,
8c réufiiffent d’autant mieux qu’ils ont plus d’adreffe
8c de patience : on a fait venir d’ Angleterre , de ces
infeétes faétices , qui font travaillés avec tant d’art
& d’adreffe , qu’on ne peut s’empêcher de les admirer;
8c on fera bien de les examiner avec atten-,
tion,. pour effayer de les imiter.
D ’après; les manoeuvres des Anglois pour imiter
les infeétes, naturels, nous croyons devoir rapporter
ici qüe Walton veut qu’on faffe le corps avec de la
laine filée:, verdâtre ou de couleur de faule, qu’on
brunità en plufieurs endroits avec de la foie cirée ;
ou bien on ÿ formera des raies avec du crin noir,
mêlé de quelques fils d’argent. ‘
La pratique de Cotton eft plus compliquée. Il dit
qu’i f faut former le corps de l’infeéte fur un grps
hairn, avec du poil de chameau, du poil lüifant
d’ôurs , 8c du duvet mollet qu’on aura levé fur les
poils .d’un cochon. On les mélangera fur du camelot
jaune; puis on paffefa fur toute la longueur du
cops“, de la foie jaune frottée de cire verte ; 8c on
fera les longs poils de la queue avec ceux de martre
ou de fouine; enfin , on formera les ailes avec des
plumes, de couleur gris-blanc, qu’qn trouve fur les
canards, -lefqüels on aura foin de teindre èn jaune.
On voit quèceux qui paffent pour les plus habiles
en ce genre, fiiivent des procédés très différens :
d’où l’on peut conclure qu’il ne s’agit que dé chercher
à imiter à peu près les infeétes. Il importe peu
par quel moyen on y parvienne. Il eft vrai que lés
uns réufliffént mieux que d’autres à cette imitation.
Obfervations fur la pêche à la ligne.
Comme prefque tous les poiffons -vivent de raf
pi ne , ils font naturellement curieux d’examiner lés
objets qui leur paroiffent'nouveaux ; 8: cette inclination
tourne à l’avantage dés pêcheurs, quand ils
favent en profiter : car les poiffons fe portant d’eux-
mêmes à examiner les appâts qu’on leur offre , ils
font ainfi engagés à s’en faifir. Mais le bruit les
effraie, ainfi que les mouŸemens que fe donneroit
; le pêcheur. C’eft pourquoiquand on à jeté la ligne ,
il faut refter immobile, ayant toujours l’oeil fixé fur
; le liège ; car ce font les moùvemeus de de liège qui -
indiquent que le poiffon a mordu'. Quand on s’en
1 apperçoit , il ne faut pas fè preffer de retirer la
ligne ; on doit donner au. poiffon le temps d’ayalèr
l’appât. Mais quand on voit qu’il traîne Le liège, on
peut juger qu’il cherche à fe retirer dans un croire ,
une fous-rive, ou . quelques herbiers : alors il faut
donner une fecouffe à la ligne pour piquer le .poif-
f©n, & faire entrer la pointe de l’haim dans fon gofier.
• C ’eft le moment où les gros poiffons fe“ toiirmen-
tent beaucoup : & bien loin de tirer la ligue, il faut
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