
que bon vernis clair au lieu de ceux que nous ve- I
nons d’indiquer ; un tel vernis feroit très-utile pour
conferver l’argent qui eft fort fujet à noircir ou à devenir
rougeâtre ; & c’eft par cette raison que l’on
préfère les tapifleries de cuirs dorés à celles en argent
, parce que l’or fe conferve beaucoup mieux.
Les cuirs dorés ou argentés étant avancés jufqu’à
ce point-là, il ne refie plus pour les finir qu’à les
peindre. On emploie pour cela des couleurs à
l’huile, & on oblerve de les coucher très-légèrement,
afin que l’argent n’étant pas totalement couvert
, donne de l’éclat & de la vivacité aux couleurs.
Nous ne détaillerons point ce travail, qui fe fait
uniquement par la main d’un peintre. Quand celui-ci
a achevé fon ouvrage & que la peinture efl fèche, on
coupe avec des cileaux ce qui déborde le contour
de la planche qui a fervi à imprimer, & on coud
les carreaux pour former la tenture.
Il efl à remarquer que cette efpèce de tapiflerie
fe conferve mieux dans un appartement un peu humide
que dans un autre fort fec , ou qui feroit expofé
au midi, car la chaleur du foleil les fait écailler.
Quand ces tapifleries fe font noircies par la
pouflière, on pafle deflus, fans les étendre, une
éponge mouillée qui enlève tout ce qui les ter-
nifloit; on peut après cela leur redonner de l’éclat
avec une couche de colle ou de blanc d’oeuf. Mais
fl la couleur efl écaillée,. on ne peut raccommoder
ce défaut qu’en peignant la tapiflerie de nouveau.
Dorure fur Cuir, fur Argent, Etain & Verre.
Prenez un pot neuf bien plombé, de la grandeur
qu’il vous plaira ; ayez un fourneau ; mettez dans
le pot trois livres d’huile de lin au moins , & laiflez
cette huile fur le feu jufqu’à ce qu’elle foit cuite, ce
que vous connoîtrez en trempant une plume dedans
; fl la plume fe pèle, l’huile efl cuite : alors
ajoutez-y de réflne de pin, huit onces ; de fànda-
raque, huit onces; d’aloès hépatique, quatre onces;
le tout bien broyé ; mettez tout cela à la fois, en
remuant bien avec une fpatule, augmentant le feu
fans cefler de remuer, jufqu’à ce que tout fe fonde
& devienne liquide; laiflez cuire lentement; éprouvez
de temps en temps fur papier ou fur l’ongle la
confiftance; fi le mélange vous paroît trop clair,
ajoutez-y une once & demie d’aloès fuccotrin; quand
il vous femblera cuit, retirez-le de deflus le feu;
ayez deux fachets appareillés, en forme de cola-
toire ; coulez dedans ces fachets le mélange avant
qu’il foit refroidi; ce qui n’aura point été fondu
reflera dans le premier; le refte paflera dans le
fécond, & fera le vernis à dorer. Vous le garantirez
de la pouflière ; plus il fera vieux, meilleur il
deviendra. Quand vous voudrez l’employer fur
verre, pour lui donner couleur d’o r , il faudra que
le verre ou la dorure foit chaude, & vous l’étendrez
avec le pinceau.
Autre dorure fur Parchemin , Cuir ,& autres ouvrages
dont l on fait tapifferies & tranches de livres.
Prenez trois livres d’huile de lin; vernis, poix
grecque, d e chaque une livre, demi-once de poudre
de fafran : faites bouillir tout ceci en une poêle
plombée, jufqu’à ce qu’y trempant une plume
vous la retiriez comme brûlée; alors.vous ôterez
votre mixtion de deflus le feu, & vous prendrez une
livre d’aloès hépatique, bon & bien pulvérifé, & la
jetterez peu à peu dedans, obfervant de remuer
avec un bâton , car autrement le mélange monte-
roit : fi, malgré le mouvement, il montoit, vous
l’pteriez du feu, & le laifleriez repofer ; puis le remettriez
, le laiflant derechef bouillir, remuant toujours
avec le bâton.
Lorfque tout fera bien incorporé, vous l’ôterèz
du feu, le laiflerez repofer, puis le paflferez par un
linge dans un autre vaifleau, dans lequel vous le
garderez. Quand vous voudrez l’employer pour
dorer parchemin ou cuir, vous donnerez d’abord
une afliette de blanc d’oeuf ou de gomme; vous
appliquerez enfuite une feuille d’étain ou d’argent;
vous coucherez par deflus votre vernis tout chaud,
& vous aurez auflitôt une couleur très-belle, que
vous laiflerez fécher au foleil : 'après quoi, vous
imprimerez ou peindrez les couleurs qu’il vous
plaira.
- Manière de dorer la tranche des livresl
Pour dorer la tranche des livres, prenez la grof-
feur d’une noix de bol d’Arménie, la grofleur d’un
pois de fucre candi ; broyez bien le tout à fec &
enfemble ; ajoutez-y un peu de blanc d’oeuf bien
battu, puis broyez derechef.
Cela fait, prenez le livre que vous voudrez dorer
fur la tranche ; qu’il foit relié , collé, rogné, &
poli ; ferrez-le fortement dans la prefle à rogner,
le plus droit & égal que faire fe pourra; ayez un
pinceau, donnez une couche de blanc d’oeuf battu,
que cette couche foit légère ; laiflez-la fécher, donnez
une couche de la compofition .fufdite ; quand
elle fera bien fèche, poliflez & raclez-la bien ; &
lorfque vous voudrez mettre l’or deflus, mouillez
la tranche d’un peu d’eau claire avec le pinceau ;
puis fur le champ y appliquez les feuilles d’or ou
d’argent : quand elles feront fèches, vous les polirez,
avec la dent de loup. Cela fait, vous pourrez travailler
deflus, tel ouvrage , marbrure, &c. qu’il
vous plaira.
Papier doré 6* argenté.
Il y a de plufieurs façons de papier doré ; lavoir,
celui à fleurs ou fonds d’or qui fe fait en Allemagne
, mais dont l’or n’eft que du cuivre , au lieu
que celui d’argent- fabriqué dans le même pays efl
d’argent fin; car celui qui fe fait avec de l’étain efl
d’un oeil fi plombé, qu’on n’en fait pas de cas. Ces
fortes de papiers fe fabriquent à Francfort, à Nuremberg.,
&c. Le papier doré fur tranche efl: du
papier à lettre.
Le papier doré par petit feuillet & fait d’or fin,
fert à plufieurs ouvrages, particulièrement dans les
couvens de religieufes qui en ornent des reliquaires,
de petits tableaux de dévotion & autres choies ; cm:
ployant auffi au même ufage du papier argenté &
des cartons dorés fur tranche, fabriqués par petites
bandes , avec lefquelles elles exécutent tous ces
petits rouleaux dorés qui font dans les reliquaires
& autres ouvrages de leurs mains.
Ces papiers, tant dorés qu’argentés, auffi bien
que les cartons qu’on vient de dire , fe fabriquent
à Paris. Mais à l’égard du papier doré d’Allemagne,
on ne l’imite point ici par la grande raifon que,
tirant le cuivre en feuille de cette contrée, il deviendrait
trop cher. Ce papier fe fait avec des planches
de cuivre jaune évidées, bien en fond, autour
des mafles & des contours gravés ; les feuilles
de cuivre appliquées par-tout fur la feuille de couleur
qu’on veut dorer, font pofées fur la planche
de cuivre qui doit être chaude, comme à peu près
le font les fers dont fe fervent les doreurs de couvertures
de livres quand ils les employent ; puis
paflant le tout entre deux rouleaux ou cylindres,
tels que peuvent être ceux de la prefle en taille-
douce , la planche en gaufrant le papier fait attacher
l’or ou l’argent deflus, puis la feuille, étalée
pour la laifler refroidir & fécher, s’épouflette pour
en ôter tout l’or des endroits où n’ont point mar- ;
qué lès ©rnemens, figures & traits de la planche
de cuivre, ce qui la perfectionne & la met en état
d’être vendue.
Dorure des Carions & Papiers.
N. B. On a rapporté à l’article des Cartons, les
procédés que M. Papillon enfeigne pour dorer &
argenter les cartons, les papiers d’éventails, &c.~
Manière d'employer fur le Verre l'Or & l’Argent,
foit en feuille, foit en poudre.
L’or & l’argent-, foit en feuilles, foit en poudre,
s agglutinent au verre par des mordans, Le fuc d’ail
tres-connu pour opérer cet effet, ne c.onvient que
pour le métal en feuilles : on frotte le verre avec
une goufîe d’a il, & auffi-tôt on applique une feuille
fl’or ou d’argent de façon qu’elle ne fafîe ni pli,
ni ride.
Lorfque le mordant efl fe c , ce qui arrive promptement,
on peut travailler fur l’or & fur l’argent
comme ori le dira ci-après.
L’huile d’afpic, dont les émailleurs fe fervent,
peut etre auffi employée pour attacher fur le verre
lor & l’argent en feuilles. Ce mordant efl cependant
plus propre pour appliquer l’or & l’argent en
poudre; on peut même afîùrer qu’il efl le meilleur
de ceux que l’on peut employer.
On fait ufage de la. gomme arabique pour appli-
quer l’or fur laporcelaine ; mais elle efl plus fujette
a fe bourfoufliér au feu que l’huile d’afpic.
On prendra donc de l’huile d’afpic un peu épaifle,
pas tout-à-fait autant que celle dont fe fervent les
omailleurs. On en étendra avec une brofl'e fur le
verre de couleur, une couche très-légère , mais
res-egaie . on examinera avec une loupe s’il n’y
pas refté du poil, & s’il ne s’eft point attaché
de pouflière : en ce cas , on enlèverait' les corps
étrangers avec la pointe d’une aiguille , & l’on
pafleroit encore la brofle pour étendre la couche
du mordant ; il s’y attachera, & avec un pinceau .
neuf à longs poils, on paflera plufieurs fois légèrement
fur la totalité1, pour attacher l’or ou l’argent au
mordant & les rendre très-unis.
Enfuite, avec de l’eau médiocrement chargée de
noir de fumée, on deffinera le fujet qu’on veut
repréfenter ; & l’on enlevera le métal avec une
pointe pour découvrir le fond & faire les hachures
deftinées à promener les. ombres. En un mot, on
fera fur l’or-& l’argent ce que l’on fait pour def-
finer fur le papier, ©u pour graver fur le cuivre.
Lorfque le deflin fera terminé, il faudra expofer-
le verre au feu fous une mouflle, dans un fourneau
d’émailleur, pour difliper le mordant qui a fervi
à happer l’or & l’agent, fur-tout fi l’on emploie
l’huile d’afpic, & faire éprouver au verre une chaleur
aflez forte pour que le métal s’attache au verre
fans qu’il fe déforme. Si le métal n’étoit point adhérent
au verre, on feroit expofé à gâter l’ouvrage
en appliquant le verre blanc fur le verre de couleur
, car il feroit impoffible de placer le verre blanc
fur le verre de couleur, fans quelque frottement
capable de déranger le travail.
On vient de dire qu’il falloit difliper le mordant
avant que d’appliquer le verre blanc, fur-tout fi l’on
a employé de l’huile d’afpic ; fans cette précaution
le mordant répandrait en fe brûlant une fumée
entre les deux verres, qui faliroit l’or & l’argent.
Il faut auffi que le mordant foit diflipé à une chaleur
très-lente & graduée, fans quoi, en fe bour-
foufllant par une chaleur d’abord trop v iv e , il formerait
une quantité prodigieufe de petites véfu»
cules qui, en fe crevant, feroient autant de trous,
& rendraient par conféquent l’ouvrage fort défar-
gréable.
Il arrive quelquefois que le verre fe bourfouffle
lorfqu’il efl expofé au degré de chaleur néceflaire
pour attacher l’or au verre, parce qu’il fe trouve
de l’air entre le centre du verre & le corps fur
lequel il efl appliqué, ce qui pourroit embarraflec
l’artifte lorfqu’il viendrait appliquer le verre blanc
fur le verre de couleur. On évitera cet inconvénient
par le choix du corps fur lequel on doit mettre
le verre pour l’expofer au feu fous la mouflle.
Quand l’or fera fixé fur le verre de couleur, oft
pourra lui donner beaucoup de b filant par le
moyen du brunifloir; on pourroit même produire
une variété agréable en ne le bruniflànt que de
certaines parties; par ce moyen, l’or mat & l’or
bruni, l’argent mat & l’argent bruni fourniraient,
pour ainfi dire, quatre couleurs ; & ce mMange
de parties égales de poudre d’or & de poudre d’argent
pourroit encore en donner deux autres.
Alors on placera le verre blanc fous celui de
couleur, & on le portera fous la mouflle dans le
fourneau d’émailleur, fur une plaque de fer couverte
de blanc d’Efpagne ; & par un.feu gradué s' L1 ||