
Le fer le plus doux eft le meilleur pour la filière :
on fe fert de celui qui a paffé à la fenderie, ou qu’on
a battu fous le martinet ; choififfant celui q u i,
par fa groffeur, approche le plus de l’èpaiffeur qu’on
veut donner au fil. L’ouvrier fait chauffer le bout
des baguettes , afin de les arrondir & diminuer fur
la longueur d’environ fix pouces ; ce qui s’appelle
amorcer. Il préfente à la plus groffe filière la partie
amorcée, & dirige la tenaille, dans les mords de
laquelle il en fait recevoir l’extrémité, & donne
l'eau à la roue : l’ouvrier eft aflis à côté, tenant d’une
main un linge trempé dans l’huile autour du fe r , &
de l’autre main rèçoit le fil au fortir des mords.
Pour dégroflir du gros f i l , il n’y a que deux ou trois
cames à la roue : pour du fil plus petit, il peut y
en avoir davantage , fur-tout fi l’arbre eft gros. Un
même arbre peut faire marcher plufieurs ateliers.
Quand le fer eft ébarbè à la première filière ,
l’ouvrier le prèfente à une de moindre diamètre , &
ainfi de fuite. Pour le plus gros fer , il faut dix à
quinze filières ; pour le moyen , vingt à trente ; le
plus petit, trente à quarante: cette opération va très-
vite , chaque coup de tenaille pouvant tirer deux
pouces. L’arbre monté à deux cames, peut faire
dix tours par minute ; conféquemment tirer quarante
pouces : plus le fer eft fin, plus l’arbre peut
aller vite , & être chargé de cames. Deux ouvriers
en gros fil peuvent fabriquer cent cinquante pefant
par jour ; en moyen, quatre-vingt ou cent au deffous :
le plus ou le moins dépend de la fineffe. Quand on
veut filer extrêmement fin , comme le- frottement
n’eft pas violent, on peut le tirer à bras d’hommes.
Pour un mille de fer nié gros & moyen, il faut environ
trois pintes d’huile & quatre vans de charbon.
Il y a un déchet d’environ cinquante livres par
mille. Les fils de fer gros & moyens fe mettent dans
les manufaânres en bottes de vingt-cinq livres,
liées en quatre endroits : pour le fil fin , les bottes
font depuis cinq à quinze. ( Cet article efl de M.
B ou ch u , maître des forges à Veuxfàulés, proche
Château-Vilain. )
Ex plica t ion détaillé e e t raisonnée des
Planches relatives à l’Art du Fer & aux grojfes
Forges§ tome I I des gravures.
On a divifé les planches relatives à cet art, en fix
ferions ; la première contient les planches relatives
à Xexploitation des mines, & aux différentes préparations
dont èlles font fufceptibles ; la fécondé contient
des planches qui ont rapport aux fourneaux a
fe r , oit on fond des gueufes ; la troifième contient
celles qui ont rapport aux fontes marchandes, fous
le titre de fourneau en marchandife ; la quatrième
feôion contient les planches relatives à forge proprement
dite, où on convertit le fer de gueule en
barres ; la cinquième feftion renferme toutes les
planches relatives aux deux fortes de fenderie ; la
fixième feétion préfente le plan & la vue perfpe&ive
d’un patouillet double pour laver des mines de fer.
PREMIÈRE SECTION.
D e Vexploitation des mines & de leurs pripa»
rations,
P L A N C H E P R EMI È R E .
Tirage de la mine en roche à fond & près la fuperficie
de la terre.
La première vignette repréfente une campagne
dans laquelle on a percé plufieurs puits pour tirer la
mine à fond, foit mine en roche ou mine en grès.
Fig. r, mineroi, ou ouvrier mineur qui tourne la
manivelle du treuil m n, à la corde duquel eft fuf-
pendu un panier à anfe, femblable à celui que l’ouvrier
, fig. 2, verfe fur le tas de mine qui eft auprès
de lui. c d ef, les quatre jambettes ou fermes qui
foutiennent le treuil ; plus loin l’on voit l’ouverture
d’un autre puits, a b, lès fupports du treuil.
Fig. 2 , ouvrier, ou aide qui reçoit le panier
chargé de mine lorfqu’il eft arrivé au niveau des
planches d f (fig. i qui recouvrent une partie du
puits ) , & le renverfe fur le tas de mine déjà tirée
de la minière, pour être enfuite tranfportée au
fourneau où elle doit être fondue. Auprès de la
fig. 2 , on voit l’ouverture A d’un autre puits, dans
lequel on a formé un cuvelage de charpente, pour
empêcher les terres qui font au deffus de la minière
d’ébouler, & de combler le puits ; au deffus on a
établi une machine mue par un cheval pour tirer
la mine. D , treuil vertical fur lequel les cordes
s’enroulent; le pivot inférieur de l’arbre ou axe de
ce treuil , repofe fur une crapaudine , fcèllée au
milieu d’une pierre placée au centre du manège, &
le pivot fupérieur eft faifi par un collet appliqué à
une des faces d’un des entraits de la charpente du
comble qui couvre le manège. F F , levier ; à l’extrémité
F duquel eft attaché le palonnier auquel le
cheval eft attaché ; on peut employer plufieurs chevaux
en multipliant le nombre des bras.' B C , deux
grandes poulies fur lefquelles paffent les cordes qui
s’enroulent & fe déroulent alternativement fur le
treuil D , pour tirer du fond de la mine les paniers
chargés de mine que l’on y attache : c’eft le feau B
qui. monte. H, toiture ou couverture du manège.
G, prolongement de la couverture fur le puits pour
mettre les poulies & les cordages à couvert. On ne
fait.guère la dépenfe de conftruire ce bâtiment & la
machine qu’il contient, que pour une minière abondante
, & dont l’exploitation, quelque confidérable
qu’elle foit, peut fe faire pendant long-temps par
la même ouverture ; telles font les mines en roche,
dont le banc a beaucoup d’épaiffeur, dans laquelle
on pratique des galeries en tout fens, réferyant le
nombre de piliers néceffaires, ainfi qu’on le voit
dans la, vignette du bas de la planche.
La fécondé vignette repréfente une campagne
& une montagne , dans lefquelles on tire une mine
en roche , foit à fond ou près la fuperficie de la
terre.
fig, 3 & 4ël exploitation de la mine en roche près
la fuperficie de la terre en travaillant à ciel découvert
, à la différence de l’autre coté de la vignette,
fig, ƒ & 6, où l’exploitation eft fouterraine.
Fig. 3, ouvrier qui, avec un pic, fubdivife un
quartier de roche qui a été féparè de la maffe.
Fig. 4, ouvrier qui perce un trou dans la maffe
pour y faire une mine, qui, étant chargée de poudre
à çanon, détache de la maffe des parties de roche,
què les ouvriers débitent enfuite pour en faciliter le
tranfport ; Cet ouvrier fe fert, pour percer le trou ,
d’une barre de fer ronde, dont l’extrémité inférieure
eft acérée & taillée en pointes de diamant par des
fillon^ triangulaires qui fe croifent à angles droits,
comme aux martelines de fculpteurs, en levant &
laiffant retomber alternativement cet outil dans le
trou que l’on commence avec un pic ou autre outil
convenable ; l’ouvrier obferve de tourner alternativement
cet outil dans fes mains, afin que les
pointes de l’extrémité inférieure frappent dans diffé-
rens endroits; il a foin aufli de verfer de l’eau dans
le trou , non-feulement pour la confervation de
l’outil, mais auffi pour faciliter l’extraâion & écoulement
des parties de la roche qu’il a broyées. Lorfque
le trou eft percé à la profondeur requife, on charge
la mine en y int-roduifant la quantité de poudre né-
ceffaire dans une,cartouche de papier ; on place en-
fuite la verge de fer qui eft auprès de la lettre c, dans
le trou de la mine, obfervant que la partie inférieure
de la verge de fer pénètre dans la cartouche ;
on remplit enfuite le trou jufqu’à fon ouverture
avec de la terre que l’on foule fortement, ou avec
un coulis de plâtre, fi on en a. Enfuite on retire la
verge ou aiguille de fer, au lieu de laquelle on met
d'e la poudre qui fert d’amorce,, & la mine eft achevée:
il perefte plus qu’à y mettre le feu au moyen
d une mèche lente qui donne aux ouvriers le temps
de s’éloigner./, première foncée, e, première berme
oii relais, d, fécondé foncée, c, fécondé berme ou
relais., b, troifième foncée, banc ou lit de la mine.
d) le fond de*la mine.
On voit au deffus l’ouverture d’un percement
o, dans le coteau d’une montagne, par lequel les
eaux d’une mine fouterraine peuvent s’écouler.
L’autre partie de la même vignette repréfente
Sxpl°itation de la mine en roche fouterraine ; le
coteau eft fuppofé fraéhiré pour laiffer voir .l’inté-
depr de la montagne.
, mineur qui détache de la maffe un quartier
de roche , en frappant avec une maffe pelante fur la
tete des coins qu’il a placés dans une tranchée qu’il
a faite auparavant avec un pic : on met ordinairement
entre le coin & les côtés de la fente, de cales
de bois de chêne pour contenir le coin, & l’em-
pecher de rebondir fous le coup, c, bloc ou quartiër
de roche féparé de la maffe, d , panier dans lequel
en met la mine pour la fortir hors de la minière.
i pelle de bois pour charger les paniers ou les
brouettes.
^‘ë' 6, ouvrier qui tranfporte la mine, au moyen
d’une brouette fous le puits du minaret, par lequel
on en doit faire l’extra&ion. ghk9 différentes galeries,
les unes étançonnées, les autres fe foutenant
d’elles-mêmes, dont on a tiré la mine, e ƒ, foncée
pu puits recouvert de quelques planches répondant
au püits du minaret qui fert d’entrée à la minière
& par lequel on fait l’extraâion de la mine au moyen
de la machine (fig. 2, première vignette ) , que l’on,
voit repréfêntée en petit au haut de la montagne.
P L A N C H E I I .
Tirage & pranfport de la mine en grains 6* de la mine
fiuviaiïle.
La première vignette repréfente l’exploitation de
la miné en grains près la fiipërficie de la terre.
Fig. 1, mineur ou pionnier qui pioche la mine &.
en fépare les pierres inutiles.
Fig. 2, chargeur qui jette la mine fur le terrain,
& en forme des tas comme c de fi
Fig. 3, autre chargeur qui emplit le tombereau.
Fig- 4 > conducteur de la voiture.
A , mefure ou feuillette fervant à mefurer la mine
apres qu’elle eft lâvéé & tranfportée près .le fourneau.
B B, cercles de fer. C C , poignées.
La fécondé vignette représente la traité de la mine
fluviatile. ou des lacs.
L’eau eft fuppofée coupée verticalement pour
laiffer voir le travail qui fe fait au fond.
Fig. 1, pêcheur de mine, qui pouffe avec un rabot
A , la mine dans la trahie ou bourfe B C , que le fécond
ouvrier lui préfente.
Fig. 2 , pêcheur qui tient le manche de la truble ,
avec laquelle il,racle le fond du lac; cette truble eft
compofée d’un arc de fer, au fommet duquel eft
une douille qui reçoit un manche de bois de huit
ou dix pieds de longueur : fur l’arc de fer eft
attaché le filet qui forme la truble ou bourfe faite
de gros fil, & maillée, comme les filets de pêcheurs;
P L A N C H E I I I .
Calcination de la mine dans les fourneaux de For-
denbèrg.
La vignette repréfente deux fours de calcination.
,fou.s un même hangard ; l’un, fig. 1, eft vide, ainfi1
que l’on peut voir par la porte. A ; l’autre four, fig. 2 ,
;eft chargé , & la porte B fermée, comme il fera dit
ci-après.:
Ces fourneaux dont le plan eft un carré, ont exté*
rieurement 2,0 pieds dé chaque côté, & intérieurement
16 pieds de chaque côté, les murs ayant 2
pieds d’épaiffeur & 14 pieds de hauteur ; au milieu
d’une des. faces eft une ouverture ou porte ceintrée
ide 6 pieds de hauteur &4 de largeur : c’eft par cette
ouverture que l’on retire la mine lorfqu’elle eft
grillée ; mais pour charger le fourneau, on ferme
cette porte au moyen de 6 barreaux de fer pofés
horizontalement dans la baie , & foutenues à des