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i° . Il faut tenir la vaiffelle d’étain toujours très-
propre.
' 2°. On doit la laver dès qu’on s’en eft fervi, & la
faire fécher tout, de fuite.
30. On doit la tenir dans un lieu bien fec 8c
expofé à l’air, fans quoi il s’y forme des taches vertes
très-dangereufes.
40 II faut bien fe garder de k laiffer, comme il
n’eft que trop ordinaire, dans les cuiftnes où il
fume.
5?. Il eft dangereux d’y mettre des mets ou
boiffons dans lefquels il entre des acides, comme
du vinaigre , du jus de citron, 8c par conféquent
point dû falade dans des plats ou afïiettes d’étain.
Le fruit cuit ou confit, y devient aufli très^mal
fain. La cerife, fur-tout la gelée des fruits aigres,
ainfi que les câpres, 8cc.
Le vin & la bière perdent aufîi leur falubrité dans
des vaiffeaux d’étain.
Obf irvations fur les différentes manières d'allier
l'étain.
M. de Jufti, chimîfte Allemand, connu par plufieurs
ouvrages utiles, a publié dans fes OEuvres
chimiques, imprimées à Berlin en langue allemande
en 1760, quelques obfervations fur les différentes
manières d'allier l'étain, dont on va donner le précis
dans cet article ; cela fèrvira à compléter ce
qui a été dit plus haut fur cette matière.
Les différentes fubftances métalliques avec lesquelles
communément les poçjers-d’étain allient ce
métal,-font, foit du plomb, foit du cujvre, foit
du laiton ou cuivre jaune, foit du tombac , foit
du fe r , foit du zinc, foit du bifmuth , foit enfin
du régule d’antimoine. Quelquefois ils font entrer
un ou plufieurs de ces métaux & de ces demi-
métaux dans leur alliage , & chaque potier-d’étain
fait fouvent un grand myftère de ion alliage , qu’il
croit ordinairement beaucoup meilleur que celui
de fon voifin. M. de Jufti a donc Cru devoir examiner
les effets que ces différentes fubftances peuvent
produire lorfqu’elles font jointes avec l’étain.
i°. Le plomb devroit être entièrement exclus
des alliages d’étain ; en effet, quoiqu’il rende les
vaiffeaux d’étain à meilleur marché, 8c plus faci'-v
les à travailler, le plomb eft eaufe que l’étain noircit
beaucoup plus promptement à l’air. Mais ce qui
eft encore plus effentiel, c’eft que le plomb doit
être regardé comme un véritable poifon ; tous les
fels 8c tous les acides agiffent fur lu i, 8c le font
palfer avec les àlimens dans l’eftomac, où il peut
{aire de très-grands ravages. M. de Jufti rapporte
un fait dont il a été témoin, & qui prouve bien
le danger qu’il y a à fe fèrvir de vaiffeaux d’étain
allié avec du plomb ; il dit qu’en Saxe toute une
famille fut attaquée d’uné maladie très-longue &
très-particulière, & à laquelle les médecins ne
connurent rien pendant fort, long-temps , jufqu’à
c - qu’à, la fin on découvrit que cette maladie
venoit d’avoir mangé du beune qui avoit été
confervé dans u n . vaiffeau d’étain allié avec du
plomb.
20. Le cuivre, foit pur, foit jauni par le zinc
comme il eft dans le laiton & 4e tombac, rend
l’étain fonnant, & lui donne de la confiftance fi
l’on en met deux ou trois livres fur un quintal
d’étain, qui devient par-là affez. femblable à de
l’argent ; maison a fuffifamment prouvé que l’irfage
des vaiffeaux de cuivre dans un ménage ne peut
être que très-dangereux.
30. L’alliage de l’étain avec le zinc n’eft point
non plus exempt de danger ; ce demi-métal doit
être nuifible pour la fanté , vu que M. de Jufti dit
qu’il renferme une fubftance arfenicale que fes
expériences lui ont fait découvrir ; quelques grains
de fleurs de zinc prife intérieurement fumfent pour
faire un très-grand ravage dans le corps humain ;
d’ailleurs le zinc fe diffout avec .une très-grande
facilité dans tous les acides & même dans tous
les vinaigres. Enfin, le zinc étant très-volatil, fe
dégage 8c fe difîipe à chaque fois qu’on fait fondre
l’étain avec lequel il a été allié.
Cela pofé , les fubftances que l’on pourra, fans
danger , faire entrer dans l’alliage de rétain font ;
i°.|le fer, qui, commèjon fait, n’a point une qualité
nujftble à l’homme , 8c qui au contraire dans
de certains cas eft un très - bon remède : ainfi,
quoique ce métal foit attaquable par les fels, il ne
pourra produire aucun mal ; a°. le régule d’antimoine
: on peut en fureté l’allier avec l’étain, vu
que les fels qui entrent dans les alimens ne le
diffolvent point, 30. le bifmuth : quoique l’ufage
intérieur de ce demi-métal ne foit point entièrement
exempt de danger, on n’a pourtant pointa
redouter fes mauvais effets dans l’alliage de l’étain,
vu qu’il ne fe diffout que très-difficilement dans
les acides les plus forts.
De ces réflexions , M. de Jufti conclut que c’eft
le fe r , le régule d’antimoine 8c le bifmuth que
l’on peut faire entrer impunément dans les alliages
de l’étain : voici fon procédé.
On prendra du régule d’antimoine ; la méthode
pour l’obtenir à meilleur marché, fera de prendre
uqe livre 8c demie d’antimoine crud , que l’on
réduira en une poudre très-fine ; on la mêlera avec
Aine livre de «barbon pulvérifé ; on mettra ce
mélange dans un plat de terre non verniffé, &
garni à l’extérieur d’un enduit de terre graffe ; on
arrangera le mélange de manière qu’il n’ait guère
qu’un pouce d’épaifleur. On fera ainft calciner le
mélange en remuant fans interruption jufqu’à ce
qu’il n’en parte plus aucune odeur de ioufre, &
jufqu’à ce que la matière ait rougi dans toutes fes
parties; par cê moyen l’ôn aura une chaux d’antimoine
que l’on mêlera avec une livre & demie
de flux noir, fait avec trois parties de tartre cnid
& une partie de nitre que Fon fera détonner avec
un charbon allumé?. On mettra la chaux d’antimoine
avec le flux noir dans un creufet que l’on
placera dans le fourneau de forge; on fera fondre
k mélange , ' 6c lorfque le tout fera fondu , on
biffera 'refroidir le creufet, on le caftera , & l’on
aura environ une livre de régule d’antimoine propre
à faire faillage qui fuit.
On prendrg une livre dti régule qui vient d etre
décrit ; on y joindra une livre 8c demie de limaille
de fer , bien lavée 8c féchée enfuite. On mêlera
bien ces deux matières après les avoir pulvérifées ;
on les mettra dans un creufet que l’on en remplira
à un pouce près ; on couvrira ce creufet avec un
couvercle, 8c on le placera, foit dans un fourneau
à vent, foit dans un fourneau de forge. Lorfque le
mélange fera fondu , ce qui arrivera plus ou moins
promptement , fuiyant la force du feu que l’on
donnera , on y joindra une livre de bifmuth, 8c
l’on pouffera le feu pour que les fubftances mêlées
entrent parfaitement en fufion ; alors on videra
la matière fondue dans un cône, 8c l’on aura un
alliage d’une couleur blanche 8c brillante qui pèfera
environ trois livres. On joindra ces trois livres à
un quintal d’étain ; on les fera fondre enfemble,
8c l’on aura un alliage d’étain folide, fonore, d’une !
couleur prefque aufîi belle que l’argent , en un
mot, qui ne le cédera point à l’étain tonnant d’Angleterre.
Fondre l'étain & le jeter en moule.
Lorfqu’un potier d’étain^eut mettre l’étain en
oeuvre, il le fait cf abord fondre ;. il faut avoir une
chaudière de fer qui tienne à proportion de ce
qu’on a à fondre. Ceux qui fondent dss faumons
ort des foffes ; c’eft une forte de trou plus long
que large, bâti en brique fous une cheminée; on
met le feu dedans la foffe 8c les lingots fur la
flamme du bois qu’on y allume , 8c à l’aide d’un
fouffiet à main , pareil à celui dont fe fervent les
orfèvres, ils fondent plus aifément 8c plus promptement.
A mefure que l’étain fond , la braife 8c la
cendre nagent fur l’étain, 8c on les dérange avec
la cuiller de fer avec laquelle on jette en moule ,
pour prendre l’étain net. -
De temps en temps, on retire les cendres qui
s’amaffent fur l’étain ; ç’eft ce qu’on appelle déchet :
on les réferve à part ; 8c quand on en a une quantité
, on les lave d’une manière qui fépare la
cendre 8c le charbon qui fe trouvent mêlés a’étain,
& cet étain fe fond dans une chaudière le feu
défions ; 8c par le moyen de la graifie 8c du fuif
qu’on met dedans, on réduit l’étain.
Il y en. a qui , pour fondre , ont une chaudière
qui eft maçonnée tout autour, 8c le feu eft fur
l’étain comme dans la fofle. Enfin, d’autres ( 8c
c’eft affez l’ufage en province, ou on ne fond pas
fouvent des faumons ) mettent la chaudière fur un
trépied le feu deflous.
De la préparation des moules.
Il faut préparer fes moules avant de jeter dedans ;
on fait que les moules font ordinairement de cuivre
ou potin ; les moules de vaifi’elles fontK de deux
pièces-j, la chape qui forme le.deflous de la pièce,
foit p lat, afliette , écuelle ou bafîin, 8c le noyau
qui forme le dedans. Cette préparation eft de les
écurer, puis d’y répandre dans tous les endroits où
l’étain doit couler , avec un pinceau de crin, de
la ponce en poudre délayée dans du blanc d’oeuf ;
ce qui s’appelle poteyer les moules : après quoi on
met chauffer le moule en dehors fi^ le feu , afin
qu’il foit allez chaud pour recevoir 1 étain ; on met
quelques morceaux de fer en travers la. fofle pour
fùpporter les moules.
Jeter Jur la pièce.
C ’eft jeter une anfe en moule fur un pot à vin*ou
à l’eau, ou autre pièce à laquelle il faut en joindre
une autre ; cela fe fait par le moyen d’un moule en
cuivre, compofé de plufieurs morceaux qui.s’ajuf-
tent les uns aux autres ; les moules font percés au»
endroits où l’anfe doit s’attacher à la pièce.
Pour jeter fur la pièce, on remplit les pots de fable'
ou de fon, excepté la gorge ; on le foule 8c on
l’arrête avec un linge ou papier, enfuite on met à
la bouche du pot en dedans , le linge dans lequel il
y a du fable mouillé qu’on nOmme drapeau à fable ,
puis ôn prend le moule d’anfe dont les pièces font
jointes enfemble , 8c tenues par une ou deux ferres
de fer ; on pofe le moule fur la pièce qu’on
tient devant foi fur les genoux ; enfuite on prend
de l’étain fondu 8c chaud dans une cuiller qui eft
fur le fournea'u : avec une- autre cuiller plus petite
qn jette.de l’étain dans le moule qui fe foude de lui-
même à la pièce , en trefondant l’endroit où il touche
; après quoi on le dépouille pièce à pièce, 8C
on continue de même jufqu’à ce que tout foit jeté.
Quand on n’a pas des moules convenables aux
grandeurs des pièces, on a des moules féparés dont
on rapporte les ânfés ou autres chofes qu’on veut
faire tenir pour finir un ouvrage , 8c cela s’appelle
mouler, ou ôn les joint par le moyen de la foudure
légère.
Il faut obfervér que la fcience pour bien jeter,
confifte à conferver le degré de chaleur, tant de
l’étain fondu que du moule ; fi l’étain chauffe trop,
il s’aigrit ; il faut y mettre quelque pièce qu’ort
réferve pour le rafraîchir ou diminuer le feu. Si le
moule s’échauffe trop, ce qui arrive ordinairement
aux endroits où l’étain tombe en jetant, 8c où il
revient, on le rafraîchit avec de l’eau qu’on y applique
par dehors avec un bâton entortillé de linge
mouillé par un bout, qu’on nomme patrouille. On
connoît que le moule ou l’étain font trop chauds,
quand les pièces viennent grumeleufes. Les grume-
lures font de petits trous fans nombre , qui ne
percent pas la pièce, mais la gâtent fort, parce
qu’ils paroiffent après le tour 8c la forge ; ainft on
aime mieux jeter un peu plus froid que trop chaud ;
cars’il vient quelques trous aux pièces , on les re-
verche. Il eft vrai que la vaiffelle d’etain fin doit
être jetée plus chaude que le commun , parce qu’on
la paillonne pour remplir les grumeaux, 8c qu’elle
J én fonne mieux.
P pp ij