178 VOYAGE
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Mars.
. Sur les sept h eu re s, les naturels sont revenus à
bord, entre autres mon ami Moembe, qui m’a renouvelé
ses offres de service el ses protestations d’amitié.
Très-différent de ses compatriotes sous divers
rap p o rts, son caractère est doux , son humeur paisible,
et ses manières décentes, réservées el polies. En
un mot, l’on peut assurer que c’est un homme tout-
à-fait comme il f a u t , pour un habitant de Vanikoro.
Dès la veille, il m’avait long-temps entretenu de
son Aloua; tout ce que j ’avais pu saisir de son discours
avait été, qu’il désirait me présenter à cet Atoua,
car il était convenable que je lui fisse mon offrande.
Aujourd’h u i, il a remis la conversation sur le même
chapitre ; curieux d’apprendre quel était cet A to u a,
et en quoi consistait le culte qui lui était ren d u , j ’invitai
Moembe à m’accompagner à terre avec Williams,
et à me conduire devant sa divinité.
Nous descendîmes à une centaine de pas au nord
de la rivière. Au bord de la plage, parmi quatre ou
cinq cases, Moembe m’en désigna respectueusement
une qui, plus chétive et moins bien entretenue que
les' autres , était, disait-il, la résidence de VAtoua.
Pour preuve, il me montra du doigt le trou d’un de
ces crabes de terre si communs dans toutes les îles
de l’Océanie. Au premier ab o rd , je crus qu’il se moquait
de moi, et je lui demandai s’il n’existait pas
quelque autre Aloua plus puissant, plus considérable.
Alors Moembe étendit la main vers la montagne, et
je crus qu’il m’indiquait quelque autre endroit plus reculé
dans l’intérieur. Je lui fis signe de me conduire
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d e L’ASTROLABE. 1 7 9
a cet autre Atoua; il se mit à marcher devant moi;
jetais smvi par l’Anglais Williams et mon secrétah-e
B. Lauvergne.
Nous cheminâmes durant quelque temps par de
petits sentiers bien b a ttu s , au travers de plantations
plus étendues et mieux entretenues que toutes celles
que j’avais jusqu’alors observées. Ces plantations se
composaient surtout de taros et d’ignames ombragées
par des cocotiers , des bananiers , des arbres-à-pain
des inoearpus, spondias, etc. Après avoir marché
l’espace d ’un mille environ, nous arrivâmes sur le
bord de la rivière, dont le volume est encore considerable,
mais dont le cours est souvent barré par des
cascades dans le roc. Là cessaient les plantations, et
tous les cocotiers s’effacaient complètement devant
une forêt compacte.
Moembe m’engagea à revenir sur mes pas , assurant
que plus avant je ne trouverais que des arbres
sauvages, et des buissons où je me déchirerais
les jambes. Les nouvelles explications qu’il me donna
prouvèrent que la résidence du grand Atoua était le
sommet même du mont Kapogo suspendu sur nos
têtes; les nuages qui entourent habituellement ce piton
sont l’indice de la présence du dieu. Moembe me
fit particulièrement remarquer un rocher blanchâtre,
nu et escarpé, d’où les eaux se précipitent en cascade,
à la suite des grands orages.
Je ne m’arrêtai que le temps nécessaire pour que
Lauvergne dessinât un site éminemment pittoresque
au bord de la rivière ; puis nous reprîmes le cliemin
1828.
Mars.
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