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s’il ne s’est assuré auparavant que , sous le rapport de la force
physique, son ennemi ne lui est point inférieur, attendu qu’il
aurait horreur d’abuser de sa faiblesse. Pour l’industrie , l ’activité,
la gaieté et la persévérance, aucune comparaison ne
peut être établie entre ces naturels et ceux d’aucune des îles
de l’Océan-Pacifique que j’ ai eu l ’occasion de visiter. Les
hommes, les femmes et les enfans sont tous en mouvement
depuis le lever du soleil jusqu’à son coucher, occupés à la
pêche ou à la fabrication des armes, des ustensiles de p ê ch e ,
des étoffes, des habitations et des pirogues. To ut ce qu’ils
font est exécuté avec beaucoup de goût et d’adresse, bien
qu’ils n’aient à leur disposition que des instrumens en coquilles,
en pierres et en dents de poisson. Par leurs lo is , il leur est
expressément défendu de rester couchés après le lever du soleil,
excepté en cas de maladie ou d’infirmité corporelle; aussi, la
dyspepsie, les maladies de foie et les mille et un maux qui
affligent les races civilisées, sont inconnus aux naturels de ces
heureuses îles.
En décrivant les vertus et les aimables qualités de ces insulaires
, je ne prétends pas faire entendre qu’il n’y ait point
d’exemples, ni de circonstances isolées où les lois ne puissent
être violées. Un état parfait de la société n’existe point et peut-
être n’existera jamais sur ce globe si riche en anomalies. La
néce.sslté même des lois indique le contraire. Frapper une
iemme est à juste titre considéré par les naturels du groupe de
Bergh comme une action inhumaine et barbare, quelle que
soit sa faute. Mais si une femme devient rebelle et désobéissante
envers son mari, qu’elle le maltraite, et que les
moyens de la douceur ne puissent la faire ch an g e r , elle est
transportée sur une petite île du gro up e, où nul n’habite que
des femmes; l ’homme qui se permettrait d’enlever l ’une d’entre
elle s, sans la permission du gouvernement, serait mis à mort.
Des punitions encore plus sévères sont infligées à l’homme qui
maltraite sa femme.
Pour les tours de force, d’adresse et d’a g ilité , quelques-uns
de ces naturels laisseraient bien loin derrière eux les hommes
qui se donnent en spectacle chez nous. Ils feront avec rapidité
une foule de pirouettes en avant et en arrière , sans avoir rien
d’élastique sous leurs pieds ; ils sont également habiles a courir,
sauter, grimper et lancer des masses pesantes, etc. Ils monteront
à la cime d’un cocotier h a u t , droit et poli comine le mât
d’un navire, en apparence avec autant d’aisance et d’agilité
qu’un marin monterait le long des enflécbures des haubans
quand elles viennent d’être reprises. Ils excellent aussi dans
l’exercice de la natation, et semblent aussi à leur aise dans
l ’eau que les requins et les tortues. Ils plongeront à la profondeur
de quinze toises, et rapporteront une demi-douzaine d huîtres
perlières avec tout autant de facilité que quelques-uns de
nos meilleurs nageurs iraient à trois toises pour rapporter
quelque chose du fond.
A l ’égard des idées religieuses de ces insulaires, le peu de
renseignemens qu’il m’a été possible d’obtenir peut être exposé
en quelques mots. Ils pensent que tout a été créé par un certain
être sage et puissant qui dirige et gouverne tout, et dont
la résidence est au-dessus des étoiles : qu’il veille sur tous ses
enfans et sur toutes les choses animées avec un soin et une
affection paternelle, qu’il pourvoit à la subsistance des hommes,
des oiseaux, des poissons et des insectes, le plus petit
animal étant destiné à servir de pâture au plus g ran d , et tous
devant servir au soutien du genre humain ; que le créateur
arrose ces îles de sa propre main , en laissant tomber d’en haut
les pluies en temps opportun ; qu’il a planté le co co tie r , 1 arbre
à pain et tous les autres arbres, ainsi que les buissons, les
plantes et les touffes d’herbe ; que les bonnes actions lui sont
agréables, mais que les mauvaises actions l ’offensent; qu’ils
seront heureux ou misérables par la su ite , suivant leur conduite
en celte v ie ; que les bons vivront alors sur un groupe
d’iles délicieuses, encore plus belles et plus agréables que les
leurs, tandis que les méchans seront séparés des bons et transportés
dans quelque île rocailleuse et désolée , où il n’y aura ni
cocotiers, ni arbres à p a in , ni eau fra îch e , ni poisson, ni
aucune trace de végétation. Ils n’ont ni temples, ni églises, ni
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