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 188 VOYAGE 
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 1828. 
 M a is . 
 Pour la  première fois,  un  naturel  a  consenti  à me  
 céder deux bracelets pour  un grand couperet,  et Kavaliki  
 m’a livré ,  pour  trois  haches ,  un  petit  cochon  
 pesant au plus quinze  livres. 
 Nous  avons  reçu  aujourd’hui la  visite de plusieurs  
 habitans du village de Vanikoro, et notamment de Valiko, 
  premier chef de cette tribu. Valiko est un homme  
 de cinquante à cinquante-cinq a n s ,  au teint très-noir,  
 aux cheveux grisonnans, mais encore vif,  actif, et en  
 apparence  plus  intelligent que tous les naturels  de  la  
 race  noire que j ’avais  encore  remarqués.  P a r  l’entremise  
 de Hambilton,  je  l’interrogeai  sur  le  naufrage  
 des Maras ;  voici ce  qui résulta  de  ses  réponses ,  par  
 elles-mêmes  assez précises ,  et  en  outre  développées  
 par les explications de Tangaloa et de Kavaliki. 
 En  définitive,  aucun  navire  n ’aurait  péri  devant  
 Vanou; mais  l’un aurait échoué  devant Païou, à l ’endroit  
 même où  sont  encore  aujourd’hui  les  ancres  et  
 les  canons,  et  de  ce  bâtiment  proviennent  tous  les  
 objets  que  les  naturels  ont  livrés  à  M.  Dillon  et  à  
 r  Astrolabe ;\M3Xve  toucha et  s’engloutit  devant  Tanema  
 ,  en  dehors  même  du  récif,  sans  qu’on  pût en  
 rien sauver; presque tous les hommes qui le montaient  
 périrent  sans  venir  à  terre.  I.es  Maras  du  premier  
 navire,  en  grand  nombre ( cependant  il  n’en  désigne  
 que tre n te ,  dans  l’impossibité où il est d’en énumérer  
 davantage ) ,  s’établirent à  Païou,  et travaillèrent à la  
 construction d’un petit vaisseau. Quoique les naturels  
 eussent  du respect  pour ces étrangers  et ne  les abordassent  
 cju’en  leur baisant  les mains  en  signe  d’hom- 
 DE  L’ASTROLABE.  189 
 mage,  ce  qu’il  exprime  par  un  geste,  il  y  eut  des  
 querelles  où  périrent,  d’un  c ô té ,  cinq  naturels  de  
 Vanou ,  dont  trois  Arikis et  un  homme  de Tanema;  
 de  l’autre  p a rt,  il y  eut  deux Maras tués à  Païou. Au  
 bout de cinq lu n e s,  les Marâs  quittèrent  l’île  sur leur  
 petit bâtiment.  Valiko me montra un garçon de douze  
 à treize  ans pour m’expliquer qu’il avait Îe  même  âge  
 que cet enfant a l’époque du naufrage des Maras. 
 Il a été impossible  à Valiko de me donner  l’origine  
 du  nom  mara  qu’ils  assignèrent  aux  Français ;  seulement  
 ,  il  dit que quand on demandait à  ceux-ci d’où  
 il venaient, ils répondaient ; Mara.  Peut-être serait-ce  
 une  corruption  du  mot  mer  que  leur  prononçaient  
 leurs  hôtes?  Avant  ces  deux  navire s,  ils  n ’avaient  
 jamais  entendu  parler  des  Papalangui,  mot  qu’ils  
 ont adopté des  peuples  de la  race  polynésienne, pour  
 désigner  tous  les  blancs ;  mais  ils  savaient  que trois  
 bâtimens de cette nation avaient passé devant les côtes  
 de  Nitendi  sans y  toucher ;  sans  doute,  le  navire  de  
 Carteret  et  les deux  frégates  de  d’Entrecasteaux.  Ils  
 n ’en  virent  plus jusqu’à  l’arrivée  de  P i la ,  et  t  A strolabe  
 a  été  le  quatrième  navire  qu’ils  aient  vu.  
 Tous attestent qu’il  n ’y a  aucun homme du naufrage,  
 ni a Nitendi, ni à Toupoua,  ni à Taumako,  etc. Cependant  
 ,  il  y a en ce moment à Vanikoro des habitans de  
 chacune  de  ces  trois  îles. Kavaliki  et Tangaloa  affirment  
 ,  ainsi que Valiko,  qu’à Vanou il y a  quantité de  
 piecesde monnaie en cuivre,  en argent  et même en or.  
 Tangaloa , moyennant une hache  que je lui promets,  
 s engage à me montrer le  lieu  où  les ftlaras  construi- 
 Mars.