M a
! t Si
N OT E S .
lote. Notre navire était sous voiles lorsque je le rejoignis.
{E xtrait du Journal de M. Gaimard.)
Lé i6décembre 1827, à six heures du soir environ, l'A s trolabe
se reposait dans le beau canal d’Ëntrecasteaux des
violentessecousses qu’elle avait éprouvées dans la mer Australe.
Le lendemain nous parcourûmes les contours du canal pour
gagner l’établissement anglais d’Hobart-Town. Nous n’atteignîmes
cependant ce port que le 20 du mois, tant les rafales
qui tombaient du haut des montagnes avaient mis obstacle à
notre marche.
La cérémonie du salut accomplie, M. d’Urville se rendit
à terre, et je l’accompagnai, ainsi que plusieurs officiers, dans
sa visite au gouverneur. L ’aspect de la v ille, avec ses vastes rues
et les jolis édifices qui commencent à remplacer les cases des
premiers colons, nous offrit dès l’abord un spectacle agréable.
La maison du gouverneur, élevée au milieu de jardins
élégans dont les plantations paraissent récentes, brille d’une
propreté qui fait valoir encore le bon goût de sa construction.
Nous fûmes introduits dans un salon où le gouverneur, S. E.
le lieutenant-colonel Arthur , ne tarda pas à paraître. Son accueil
poli, mais empreint de toute la dignité britannique,mcfit
involontairementjeter quelques regards en arrière et penser aux
bons Hollandais d’Amboine, qui nous avaient reçus comme de
vieux amis attendus depuis long-temps. Après avoir parlé d’affaires,
M. Arthur nous invita à nous rendre hors de la ville à
son jardin de plaisance où se préparait une fête en l’honneur du
jour de naissance de son fils aîné. Cette galante invitation fut
a cceptée, et à cinq heures, le commandant, M. Gaimard et
m o i, nous remontâmes en canot la rivière Derwent jusqu’à
une anse pittoresque, où la présence d’un détachement de
troupes nous annonça le parc du gouverneur.
Nous fûmes reçus par un jeune aide-de canq), M. Fraiirk-
land, dont nous ne pûmes assez admirer, durant notre séjour
NOTES. 299
à Hobart-Town, la politesse , les talens et les excellentes manières.
M. Franckland nous présenta à madame Arthur el aux
dames réunies en assez grand nombre sous une tente. Ce qui
nous frappa d’abord, ce fut de voir que toute l ’assemblée était
vêtue de légères étoffes d’é té , tandis que nous, sous nos habits
de drap , nous grelottions aux rayons de ce pâle soleil austral
près de disparaître sous l ’horizon. La transition entre les chaleurs
de la zòne torride et ces climats tempérés avait été trop
brusque pour nous laisser le temps de nous acclimater; aussi
faisions-nous des voeux pour voir arriver le moment où le
dîner réunirait les convives dans un lieu bien clos et inaccessible
à cette jolie brise d’été, qui semblait réjouir ces dames.
Notre désappointement fut grand; au signal donné , la société
se ren d it, par de longs détours à travers le parc, dans une
grande salle de feuillage fraîche et parfumée, mais ouverte à
tous les vents.
Je dois avouer que le festin me parut d’une longueur excessive,
malgré l ’agréable composition de la société. La plupart
des dames étaient jeunes et jolies; leur mise était pleine
de gout. Les toasts furent fréquens et accompagnés d’airs
nationaux exécutés par la musique militaire; enfin , la séance
se prolongea assez pour que nous vissions que chacun désirait
comme nous un salon moins accessible au froid. Les calèches
et les canots transportèrent les convives à la maison de ville
du gouverneur, et un bal termina la soirée.
Pendant celte jolie fêle, le grand-juge de la colonie me
fit l ’honneur de m’entretenir des nouvelles les plus récentes,
reçues par les journaux de l’Europe. C’est de cette manière
que j ’appris un événement qui avait jeté la consternation dans
notre patrie , et dont les Anglais eux-mêmes ne parlaient
qu’avec un profond chagrin. La mort du respectable duc de
La Rochefoucauld et les odieux attentats qui avaient accompagné
ses obsèques avaient ému de douleur et d’indignation
jusqu’à cette colonie qui semble perdue au bout du monde.
.Te recueillis avec une bien douce émotion ces témoignages