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Mai.
18.
e( me renouvelle ses offres de service, en déclarant
que son désir est que les malades puissent se promener
partout où cela leur sera agréable.
C’est aujourd’hui le jour de l’Ascension, fête célébrée
par les Espagnols avec beaucoup d’appareil. A
cette occasion, le brave alcade Flores avait cru devoir
me convier à d in e r; je l’ai remercié poliment
et me suis contenté d’aller prendre chez lui un verre
de limonade dans la soirée. MM. Quoy, Sainson et
Dudemaine avaient partagé son banquet qui n’avait
rien de somptueux.
Ceux qui auront lu la relation de M. Freycinet trouveront
sans doute une différence prodigieuse entre
l’accueil distingué, les honneurs et les triomphes dont
ce capitaine fut l’objet à Gouaham, et l’existence modeste
et même obscure que je menais à Umata. Mais il
faut faire attention que M. Freycinet se transporta
surde-champ à Agagna, où il se trouvait à la cour,
tandis que j’étais resté dans une province reculée. En
outre, M. Freycinet était accompagné par une dame
pour laquelle le galant Medinilla crut devoir déplojoer
toutes les ressources de la courtoisie castillane.
Après avoir pris mon bain accoutumé, dans l’après-
midi je fis un to u r de promenade le long de la rivière.
Le sol me paraît être d’une grande fertilité, bien que
la culture en soit partout bien négligée ; car on ne
trouve çà et là que des champs de tabac, de ta ro , ou
des plantations de bananiers entretenues avec peu de
soin. Entre les mains d ’un peuple actif, industrieux
et commerçant, il est probable que l’île de Gouaham
pourrait devenir un des lieux les plus agréables du
globe; mais qu’attendre d’une population comme celle
qui occupe aujourd’hui ce te rrito ire , gouvernée par
des lois absurdes, et soumise au monopole le plus
décourageant?
L’Anglais Hambilton est à l’extrémité, et son camarade
est aussi fort affaibli.
Dans la matinée, le vent jusqu’alors invariable
de la partie de l’E. a passé au N. O . , puis à l’O . , et
enfin au S. S. O. Toute la nuit il a soufflé de cette
partie avec des rafales brusques et violentes, une pluie
continuelle qui tombait par to rre n s , et une forte houle
qui entrait dans le hâvre. Si notre ancre du S. E. venait
à man q u er, la corvette irait se briser contre les
roches du fort Sant-Angel, et l’on doit concevoir nos
inquiétudes. Sans doute, aujourd’hui que nos matériaux
comme l’équipage sont en Heu de sûreté, la catastrophe
serait bien moins funeste qu’elle ne l’eût été
à Vanikoro : il serait pourtant douloureux que l’A strolabe
n ’eût échappé à tant de périls que pour venir
terminer sa carrière sur les récifs de Gouaham, comme
l’üranie naguère sur la plage des Malouines. Ce serait
ce qu’on appelle f a ir e naufrage au p o rt.
Le mauvais temps a cessé dans la matinée, et j’ai
vu avec bien de la satisfaction le vent reprendre sa
direction ordinaire du côté de l’E.
A neuf heures et demie du ma tin, je reçois un
billet de M. Quoy qui m’annonce la mort d ’Hambilton
, qui est décédé à onze heures du soir. C’est la
première victime des fièvres de Vanikoro, et de tout
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