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d’eau toujours tranquille, tandis que les flots de la mer extérieure
sont souvent, dans ces parages , agités par de violentes
tempêtes.
Le sol de la plus grande île est montueux, et son piton principal
s’élève à une grande hauteur. D’épaisses forêts couvrent
sa surface et développent une végétation v ariée, dont l’humidité
perpétuelle du sol entretient la richesse. Les palétuviers
qui couvrent le rivage s’avancent jusque dans le sein des
eau x , de telle sorte qu’on trouve rarement une plage de sable
qu’on puisse aborder. C’est à l’humidité constante qui résulte
d’une telle disposition de terrain et à l’abondance des
pluies qui mondent ces îles si souvent enveloppées dé brumes,
qu’il faut attribuer la maligne influence qui règne dans le petit
archipel de V anikoro. Ordinairement la chaleur de m idi s’élève
au plus haut degré et détermine, sur les vases que la basse
mer découvre , une vaporisation qui se condense bientôt au-
dessus des île s, où elle ne tarde pas à retomber en torrens de
pluie chaude.
Le climat de V an ik o ro , mortel aux Européens, ne paraît
pas beaucoup plus clément envers les indigènes. Si l ’on en
juge par les apparences , peu d’individus parviennent à un
âge avancé ; un grand nombre de femmes et d’enfans languissent
dans une fièvre qui doit les consumer lentement, et sans
doute la maladie, pesant davantage sur les êtres les plus faibles,
en moissonne une foule avant l’âge d’adolescence.
Comme si cet état misérable de souffrance n’était pas un
moyen assez sûr de destruction , les babitans de Vanikoro se
font des guerres acharnées de village à village ; un homme
seul ne peut guère s’éloigner des limites de son district sans
être en danger de mort. Quelquefois ils en viennent aux mains
dans une bataille générale sur mer ou sur te r re , et ils paraissent,
comme les Grecs d’Homère, préluder au combat par des
provocations el des injures qu’ils commencent à s’adresser
avant d’être à portée des tra its, les deux chefs s’attaquant de
paroles et se répondant tour à tour.
NOTES. 35.5
Les naturels de Vanikoro sont grêles , chétifs en apparence;
leur peau est noire et leur visage offre pour trait principal
une extrême élévation du crâne qui est très-rétréci sur les
tempes. Ils entourent leurs cheveux d’un morceau d’étoffe qui
pend sur leurs épaules comme le bonnet d’un Catalan. Leur
corps est ceint d’une liane noire et luisante plusieurs fois tournée
autour des reins et qu’ils ne quittent jamais. Une pièce
d étoffe, qui part de cette ceinture, descend par devant jusque
sur les cuisses. Leurs b ra s , leurs jambes, leur tête sont ornés
de bracelets, de colliers, de coquilles ou de tresses de fleurs ; ils
se percent la cloison des narines pour y introduire un os arrondi,
et se passent dans le lobe de l’o re ille , élargi graduellement
, des morceaux de bois ron d , qui ont quelquefois quatre
ou cinq pouces de diamètre. Un arc de six pieds et un paquet
de flèches complètent l’équipement des hommes. Jamais ils ne
marchent sans ces armes dont ils sont toujours préparés à faire
usage. Leurs flèches, composées de longs roseaux, sont armées
à leur extrémité d’un fragment d’os humain fort aigu
qu’ils trempent dans une substance vénéneuse, à ce qu’ils
prétendent.
Leurs femmes n’offrent aucune espèce de beauté. A peine
trouve-t-on encore sur celles qui dépassent quatorze ans
quelques traces des grâces de la jeunesse ; une étoffe, tournée
autour de leurs reins, est leur unique vêtement, et pour parure
elles portent quelques colliers et chargent leurs oreilles
d’objets d’un poids et d’un volume étonnans.
Les deux sexes mâchent habituellement de la noix d’arec
melée avec de la chaux. Ce mélange , qui teint leurs lèvres
d’un rouge sanglant, ne contribue pas peu à enlaidir encore
ces pauvres êtres déjà si peu favorisés de la nature.
Ils construisent leurs villages de préférence sur le bord de la
mer; ce sont ordinairement quelques cases de roseaux fort ar-
tistement bâties et de forme ronde. Chaque village possède
une maison publique oû les hommes se réunissent pendant le
jour. Ils s’y occupent à tailler de l’écaille dont ils font des an-
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