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 Juillet. 
 coup  barré  par  une  roche  de  basalte  qu’il  a  fini  par  
 p erc er;  le volume  entier de  ses eaux s’introduit péniblement  
 par  cette  issue,  et  s’élance  avec  violence,  
 sous  la  Corme  d’une  gerbe  immense  qui  s'épanouit,  
 en  tombant de plus de quatre-vingts pieds de hauteur  
 Pl.  ccxJ.  dans  une  espèce  d’abîme  creusé  par  la  nature.  Les  
 rochers voisins,  les monts d’alentour répètent le bruit  
 que  p ro d u it,  dans  sa  c h u te ,  cette  immense  colonne  
 d ’eau  :  il en résultait un  grondement  sourd  et  continuel  
 que je ne pouvais distinguer de celui du tonnerre  
 qui se  faisait  entendre  précisément en  ce moment,  et  
 nous  menaçait  d’un  prochain  orage. 
 Penché  sur  le  boi'd  du  précipice,  je  contemplais  
 avec  un  sentiment  inexprimable  de  plaisir  mélancolique  
 le mouvement perpétuel et monotone des ondes,  
 leur  bruyant  fracas,  et  leur  bouillonnement  confus  
 au  fond  de  l’abîme  creusé  pour  les  recevoir.  Les  
 parois de celui-ci étaient formées par des roches  noircies  
 et  dépouillées  vers  leur  base,  mais  revêtues,  
 dans leur partie supérieure,  d’un  tapis  verdoyant  de  
 vingt  fougères  diverses.  M.  Merkus  me  fit  remarquer  
 de jolies  salanganes  '  qui voltigeaient au  travers  
 des  ondes  écumantes  et  dans  les  anfractuosités  du  
 précipice.  Leur  corps  d’un  bleu  satiné  en  dessous,  
 leurs  ailes  d ’un  bleu  chatoyant  et  presque  métallique, 
   surtout  leur  extrême  légèreté  et  leur petitesse,  
 donnaient  à  ces  oiseaux  une  grande  ressemblance 
 ï  On   sait  que  les  salanganes  sont  les  oiseaux  qui bâtissent  ces nids  succu-  
 lens  tant  estimés  des  C h in o is ,  et  connus  vulgairement  sous  le  nom  de  nids  
 d'hirondelles. 
 avec  quelques-uns  des  beaux  et  brillans  papillons  is^s.  
 propres  à  ces mêmes  contrées.  Juillet. 
 P a r  les  soins  d’un  des  derniers  résidens',  un  petit  
 pavillon  en  écorce  et  en baguettes  de  sagoutier a  été  
 élevé  sur  le  bord  du précipice,  et  offre  au  voyageur  
 une station commode pour contempler tout à  son aise  
 la  cascade  et  ses  divers  accidens.  Tout  entier  à  cet  
 imposant et magnifique spectacle,  je  trouvais  que les  
 instans passaient trop  vite à mon  gré;  mais  51.  Merkus  
 me  fit  remarquer  l’orage  qui  s’approchait,  et  
 m’engagea  à  remonter  sur-le-champ  à  cheval.  Nous  
 galopâmes  ensuite  avec  rapidité  le  long  de  belles  
 plantations  de  café;  nous  traversâmes  de  nouveau  
 Tonsea-Lama,  et nous  eûmes bientôt franchi le court  
 intervalle qui sépare cette place de Tondano. 
 Comme  on  l’observe  à  l’approche  des  grandes  
 villes de l’Europe ,  près  de Tondano,  la  route  s’élargit, 
   les  plantations et les  habitations,  devenues  plus  
 considérables,  annoncent  plus  d’opulence  de  la  part  
 des  habitans.  Un  corps  nombreux de  Kapala-Balaks  
 et de Hokkoums vint  nous  recevoir  en  dehors  de  la  
 ville.  Nous  défilâmes  entre  deux  haies  de  guerriers  p i .  c c x i i .  
 armés  de  sabres  et  de  boucliers  de  bois;  puis  nous  
 entrâmes  dans la  ville  dont j ’admirai  la  propreté,  les  
 maisons vastes et solides, et la nombreuse population,  
 augmentée  sans  doute  par  l’affluence  des  curieux  
 accourus  des  villages  voisins,  afin  de  voir  les  étrangers  
 et le gouverneur,  q u i,  pour e u x ,  est  une sorte  
 de  demi-dieu  sur  terre. 
 Enfin  nous  descendîmes  de  cheval  devant la mai- 
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