148
1828.
22 février.
C H A P I T R E XXXIV.
•SÉJOUR DE l ’a STROT.ABE A VANIKORO.
Mon premier soin fui d’amarrer solidement l’Astrolabe
au lieu où elle devait rester provisoirement,
jusqu’au moment où je pourrais la conduire dans un
endroit plus sûr. Son mouillage devant Ocili occupait
un espace tellement circonscrit, que je ne crus pas
devoir la laisser libre d’éviter avec la marée ; en conséquence
je l’établis à poste fixe sur trois amarres ,
savoir ; avec trente-cinq brasses de la grosse chaîne,
la petite chaîne toute entière, et quatre-vingts brasses
du grelin de gomotou. Par ce moyen la corvette se
trouvait maintenue à égale distance, environ quatre-
vingts brasses, de chacun des trois récifs les plus
voisins ; les bords de ces récifs offrent de vraies murailles
sous-marines, presque verticales, et de trente
à quarante pieds de hauteur.
Les sauvages sont revenus ce matin, un peu plus
nombreux que la veille, et ils ont apporté à vendre
quelques cocos, bananes et taros ; mais comme ils demandent
de la moindre chose des prix exagérés, les
marchés ont été peu animés. Il paraît que M. Dillon
a versé dans l’île, avec une incroyable profusion,
toutes sortes d’articles d’industrie européenne et
d ’objets en fer. Les naturels en sont complètement
rassasiés, e l, comme nous ne pouvons déployer de
semblables largesses , il en résulte que toutes nos offres
sont accueillies avec froideur, ou pour mieux
dire avec dédain i. Ainsi nous voilà réduits encore à
faire maigre chère à Vanikoro, et à nous contenter
des ressources que nous offriront la chasse et la pèche
pour alimenter nos tables et varier un peu l’éternelle
représentation du lard salé et des légumes secs.
A dix heures et demie je suis descendu sur la plage
d’Ocili, avec plusieurs personnes de l’équipage. J ’ai
trouvé le sol fertile, les forêts majestueuses , la végétation
admirable et à peu près semblable à celle de la
Nouvelle-Irlande et de la Nouvelle-Guinée ; j’ai observé
quelques insectes et plusieurs papillons des
Moluques. Les oiseaux sont farouches el peu nombreux.
Cependant il y a aussi des colombes qui forment
un excellent gibier, et des poules d’eau assez
maigres. Par malheur l’épaisseur des bois et des
fourrés ne permet guère de s’écarter du rivage ; un
I P ou r fixer le lecteu r à cet ég a rd , il suffira de lui apprendre que la compagnie
des Indes avait accordé à M . D illo n , pour distribuer dan.s la seule île
de V a n ik o ro , une quantité d’objets dont la valeur était égale à celle qui nous
était assignée par le gouvernement français (mille piastres) pour une campagne
de trois ans , et pour acheter des sauvages les vivres et les rafraîcliis-
semens nécessaires à la consommation de l ’équipage!....
18 iS .
F év rie r.