J u i l l e t .
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brise du S. E. s est rétablie, et nous avons couru de
pénibles bordées dans la baie pour gagner le mouillage.
Heureusement, vers onze heures du soir, une petite
pirogue nous accosta : elle nous amenait deux
personnes, MM. Barbier et Martin. Le premier a
été enseigne de vaisseau dans la marine française, et
a fait la campagne de la Sémillante dans ITnde ; mais
d fut renvoyé en 1815 pour cause d ’opinion. Aujourd’hui
il commande une petite goélette nommée le Lucifer,
sur laquelle il fait le commerce dans les Jlolu-
ques. M. Barbier s’est offert très-obligeamment à me
servfr de pilote pour me guider au mouillage, ce qui
m’a été fort utile sur une rade que je ne connaissais
point, et où l’on ne trouve de fond par soixante et
quatre-vingts brasses qu’à une demi-encâblure du
rivage.
Il a fallu louvoyer toute la nuit, ce qui a été très-
pénible pour notre équipage épuisé. Enfin, à cinq
heures dix minutes du matin, nous avons laissé tomber
l’ancre de bâbord par soixante-dix brasses, et
nous avons porté trois grelins sur le Lucifer; puis
nous avons travaillé à nous mettre à poste. A huit
heures et demie du matin, nous nous trouvions définitivement
tenus de l’avant avec une ancre de poste
mouillée par cinquante brasses de fond et quatre-
vingts brasses de grande touée, et derrière avec le
grelin de gomotou et une ancre à je t mouillée sur
huit ou dix pieds d’eau. Cette position, dans laquelle
il suffisait d’une rafale de l’ouest pour nous jeter à la
cote, ne laissait pas que de me causer certaines in- isas.
quiétudes; mais 51. Barbier m’assura qu’on n’avait
jamais de vents d’ouest violens, particulièrement dans
cette saison.
Quoique brisé par la fatigue, je me suis empressé
de descendre à terre avec M5I. Quoy et Gaimard,
afin de m’assurer si le gouverneur persistait dans ses
intentions bienveillantes pour l’expédition. En passant,
je ferai remarquer qu’à Manado, comme à Bouro
u , le débarquement à marée basse est fort désagréable,
attendu que le canot est obligé de s’arrêter
à près de soixante pas de la grève, et qu’il faut faire
tout ce trajet dans l’eau ou sur les épaules des matelots.
La résidence est accompagnée d’un fort bien re- pi, ccvi.
tranché, et muni de plusieurs pièces de canon en bon
état. La maison est elle-même vaste, aérée, bien meublée,
dans une situation agréable, ovi la vue domine la
rade entière. Le gouverneur et le résident, M. Pie-
termat, nous accueillirent avec cordialité, et nous conduisirent
sur-le-champ vers les deux babiroussas qui pi. ccxvi,
étaient beaux et bien portans. Nous vîmes en outre
plusieurs chevaux, buffles, cerfs, et autres animaux
appartenant au résident.
M. Merkus m’a renouvelé toutes ses offi-es de service,
et m’a assuré qu’il avait déjà donné les ordres
nécessaires pour que les naturels fussent occupés à
nous procurer tous les animaux, serpens, oiseaux,
poissons, plantes, etc., que le pays pouvait fournir
et qui pouvaient avoir quelque intérêt peur nous. Il
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