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 1828. 
 Mars. 
 VOYAGE 
 plus difficiles. Jadis le naufrage des vaisseaux de Lapérouse, 
   en les enrichissant au-delà de toute espérance,  
 détruisit presque entièrement leur industrie primitive.  
 Ils avaient cessé de fabriquer aucune hache en coquillages  
 ou en pierre  :  tous leurs instrumens,  leurs a rc s,  
 leurs  ornemens ,  provenaient,  disaient-ils,  des  îles  
 voisines, et surtout de N iten d i,  dont les habilans venaient  
 échanger ces objets à Vanikoro contre des morceaux  
 de fer. Cependant celte mine de richesses commençait  
 à s’épuiser;  il  a fallu les deux expéditions  du  
 Research  et  de  F Astrolabe  pour  la  raviver,  en leur  
 apportant  une  foule  de haches ,  couteaux ,  ciseaux  ,  
 colliers, etc. Ces objets y sont maintenant si communs,  
 qu’il est de fait qu’en France il n’y a peut-être  pas un  
 village  où ils  soient  si  peu  appréciés  qu’à Vanikoro.  
 C’est  un  inconvénient  qui  se  fera  long-temps  sentir  
 aux  navigateurs  qui  voudront  visiter désormais  cette  
 île. 
 La fievre et le mauvais temps me  confinent à bord.  
 J e   commence  à  craindre  d’étre obligé  de  renoncer  à  
 l’excursion que je comptais faire à Païou, attendu qu’il  
 nous  faudra  profiter du  premier  vent favorable  pour  
 nous  échapper  des  récifs  de Vanikoro. 
 La pluie  a  cessé  dans  la  jo u rn ée,  mais  le  ciel  est  
 resté  très-chargé,  et  il a passé de  violentes rafales  de  
 la  partie du  sud-ouest ;  il a fallu filer tout le grelin de  
 gomotou pour ne  pas  l’exposer à  rompre. 
 Comme  il  n’est  guère  probable  que nos  Tikopiens  
 aient  pu  se  rendre avant  le jour  dans  leur  île,  il y  a  
 fort  à craindre  que  ces  bourrasques  n’aient  fait  cha197 
 virer leur misérable  pirogue,  et  nous avons plaint le  
 sort de ces  pauvres insulaires. 
 Les  charpentiers  ont travaillé à l’érection  du mausolée  
 sous la direction  de M.  Lottin.  M.  Quoy  désirait  
 vivement  faire  l’acquisition  de  trois  crânes  qu’il  
 avait observés  au village de Manevai,  pour ses observations  
 de  physiologie ;  mais  toutes  les  propositions  
 qu’il  a  pu  faire  aux  naturels  n’ont  pu  les  amener  à  
 se défaire de ces précieuses  reliques. 
 La fièvre  fait  dans  l’équipage  de  rapides  progrès ;  
 aujourd hui l’on compte déjà huit personnes attaquées  
 de cette triste maladie. 
 Nous  avons  reçu  la  visite  d’un  grand  nombre  de  
 naturels dont plusieurs étaient oints d’huile et noircis,  
 surtout  le  chef Kalaï,  que  sa  grande  toilette  rendait  
 presque  méconnaissable.  On  a  cru  que  ces  apprêts  
 pouvaient avoir  pour motif la mort d’un  vieillard  décédé  
 avant-hier  à  Manevai ;  et  quelques-uns  de  nos  
 officiers avaient déjà vu les femmes célébrer son deuil  
 par des  pleurs  et  des gémissemens. 
 Papaki  de  Manevai  nous  a  conté qu’il  avait  reçu  
 le tatouage  à Mami,  petite  île  voisine de  Nitendi,  et  
 qu’il avait visité les îles Taumako , Nioukabo,  Pileni,  
 Fonou-Fonou,  etc.,  dont il  a même nommé les chefs.  
 Nul  doute  que  ces  îles  n’appartiennent  aux  groupes  
 du  Duff  de Wüson  et  de Mendana,  près de l’île  du  
 Volcan  ou Tinakora des  naturels. 
 A six heures du matin, M. Cressien est reparti dans  
 la  baleiniere,  afin  de  poursuivre ses  reconnaissances  
 sur  la  partie septentrionale de l’ile  et  de  déterminer 
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