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 voisines enveloppés de nuages.  Toutefois,  MM.  Merkus, 
   Pietermat et moi,  nous  remontâmes à  cheval,  et  
 nous  allâmes  visiter  une  grande  étendue  de  terrain  
 que  l’on  venait  de  défricher  pour  faire  divers  essais  
 de  culture pour le compte du gouvernement.  Ce  te rrain  
 se  trouve  à  un  mille  du  lac  environ ,  dans  un  
 endroit dégagé d’a rb re s ,  où l’on  remarquait,  à cause  
 de  son  isolement,  un  immense  varigni.  A  l’entour  
 de  son  tro n c ,  je  recueillis  quelques  coléoptères.  Je  
 regrettais  parfois  l’étiquette  qui  m’enchaînait  près  
 du  gouverneur,  et  ne  me  permettait  point  d’errer  
 librement et à l’aventure  dans les bois  pour  recueillir  
 des objets ou des observations selon mon goût et mes  
 désirs. 
 Nous traversâmes ensuite une belle plaine couverte  
 de  riz  de marais,  cultivé  à  la  manière  des  Javans,  
 tandis  que  tout  celui  de  Célèbes  est  du  riz  de montagne, 
   qui offre  tout-à-fait l’aspect de  nos  champs  de  
 blé,  particulièrement  de  nos  moissons  d’orge;  puis  
 nous  arrivâmes  au  milieu  de  riches  plantations  de  
 café,  cultivées par des employés  du  gouvernement à  
 la manière  de Maurice  et  de  Bourbon ;  car  les  habitans  
 ne  se donnent  pas  autant de  soins; mais  comme  
 ces  arbrisseaux  à  Célèbes  rapportent  presque  toute  
 l’année,  iis  s’épuisent  promptement,  et  on  les  abandonne  
 pour  eu  planter  d’autres.  Cette  culture  ne  
 donne  presque  aucun  travail  aux  babitans;  ceux-ci  
 sont  obligés  de  foui'nir  une  quantité  déterminée  de  
 café au gouvernement qui le leur paie  16 ou  18 florins 
 le pikoul,  c’est-à-dire  de  35  à  40  francs  le poids  de  
 cent vingt-cinq livres. 
 Assaillis  par  la pluie,  nous  nous hâtâmes de regagner  
 notre logis,  où  le mauvais  temps  nous  consigna  
 le reste de  la soirée. 
 Mon  séjour  à  Tondano  était  fort  agréable;  grâce  
 aux attentions  de M. Blerkus,  je  n’avais  qu’à  former  
 des  désirs  pour  qu’ils  fussent  à  l’instant  accomplis;  
 l’existence  m’était  douce,  et  l’influence  de  la  température  
 agissait  de  la  manière  la  plus  favorable  
 sur  mon  tempérament  délabré.  Si  je  n’eusse  consulté  
 que  mon  goût  et  mon  intérêt  particulier,  je  
 n’aurais  donc  pas mieux  demandé  que  de  céder  aux  
 instances  de  l’aimable  gouverneur  qui  me  proposait  
 de rester quelques jours  à Tondano ;  j ’aurais  été bien  
 curieux  d’ailleurs  de visiter  les  cratères  et  les  fumerolles  
 des monlagnes  du  sud. Mais pouvais-je oublier  
 la  situation  déplorable  où se  trouvaient  nos malades  
 à  bord?  Un  séjour  prolongé  dans  l’atmosphère  embrasée  
 des  Moluques  ne  pouvait  qu’aggraver  leurs  
 maux  et  leurs  dangers.  Il était grand temps  de  ramener  
 l ’Astrolabe en Europe, et devant des motifs aussi  
 impérieux  toute autre considération devait  céder. 
 Ainsi,  dès  six  heures  du  malin,  nous  nous  acheminâmes  
 vers  âîanado, et  cette  fois  nous  primes l’ancienne  
 route  qui  est  plus  longue  que  l’autre  d’un  
 mille,  puisqu’elle  en  a  vingt-un.  Mais  elle me  parut  
 plus  douce,  et  surtout  elle  offre  plus  de  distractions, 
   car  elle  est  fréquemment  bordée  de  superbes  
 plantations  de  café  et  de  clos  immenses  couverts 
 1828. 
 Juillet. 
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