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1828.
Décembre.
parurent un des spectacles les plus curieux que l’on
puisse voir. Au fort de la tempête, les nuages arrivant
par masses énormes et compactes sur le côté oriental
de la T ab le , se divisaient sur ce point en deux phalanges
; l’une se précipitait par flocons rapides vers
la rad e , flocons qui disparaissaient complètement
vers le milieu de la montagne pour n ’y laisser régner
que des tourbillons d’un vent impétueux ; l’autre phalange,
s’échappant de l’autre côté de la Table, descendait
vers la mer entre la Tête-du-Lion et les montagnes
situées plus au sud. Dans tout l’espace de mer compris
entre Green-Point et la Queue-du-Lion, le long de
la côte, on sentait à peine le vent; souvent même on y
voyait régner des brises incertaines du N. et du N. O.
Quant au phénomène en lui-même, il tient aux
localités el à des faits physiques très-faciles à expliquer.
La montagne de la Table est une sorte de limite
naturelle entre deux régions atmosphériques très-
différentes l’une de l’autre. Toute la partie située au
sud, composée de montagnes plus ou moins élevées,
conserve une température modérée, et le plus habituellement
assez basse; toute la partie située au nord,
c’est-à-dire celle qui comprend la ville du Cap, les
environs de la rade et la rade elle-même, par la réflexion
et la concentration des rayons solaires en été
sur les sables qui s’y trouvent abondamment répandus
, devient pour ainsi dire une sorte de fournaise
ou foyer de chaleur très-active et permanente. Les
brumes épaisses chargées d’humidité, chassées par
les vents du S. et du S. S. E . , arrivent jusqu’aux
montagnes du Cap sans avoir rencontré d’obstacle
sur la vaste étendue des flots : là elles s’échappent par
les deux issues qui leur sont ouvertes; mais aussitôt
qu’elles parviennent dans l’atmosphère embrasée
du Cap, l’humidité qu’elles contiennent est sur-le-
champ vaporisée, et l’air seul violemment ébranlé
produit ces rafales qui se font sentir dans la direction
que les nuages auraient suivie s’ils n’avaient pas été
dissipés. Sans doute, si ces tourmentes pouvaient
durer plusieurs jours de suite, la partie de l’atmosphère
située au nord de la Table finirait par se charger
elle-même de brumes humides, et cet étrange jeu
de nuages cesserait d’avoir lieu. Celui même qui se
trouve au sommet de la Table en ces occasions ne
voit autour de lui qu’un brouillard humide, épais et
pénétrant, accompagné de rafales furieuses et presque
continuelles.
A huit beures du soir, M. Guilbert et moi, nous
uous rendîmes au dîner de M. Lowry-Cole, où se
trouvaient plusieurs officiers de ¿a Zélée et divers
passagers du Madagascar. L’hôtel qu’occupe le gouverneur
est une habitation charmante, entourée d’un
joli jardin qui fait partie de celui de la ville. M. Lowry
Cole me dit que le commodore Skipsey tenait
habituellemeut les bâtimens de sa division sur la rade
de Symons, pour ne pas exposer ses officiers aux tentations
de la ville du Cap, et pour qu’ils fussent plus
assidus aux exercices et aux manoeuvres fréquentes
auxquelles il assujettit les navires placés sous son.
commandement.