de l’hisloire naturelle proprement dite, n ’offriront jamais
à l’homme étroit, qui ne demande que du positif,
aucune utilité réelle; et pourtant proscrirons-
nous ces sciences et ces arts, détruirons-nous ces observatoires,
ces académies, ces conservatoires, ces
musées, ces chaires, si largement dotées, qui, dans
tous les royaumes de l’Europe, témoignent de l’intérêt
que leur portent les rois et les nations? L’astronome
qui découvre une nébuleuse, une comète imperceptible
a la simple vue, ou qui saisit quelque perturbation
inaperçue dans les mouvemens des corps
célestes, le chimiste qui fait connaître un corps simple
jusqu’alors ignoré, le naturaliste qui accroît le nombre
des espèces enregistrées ou qui s’imagine avoir surpris
(¡uelqu’un des secrets de l’organisation des êtres, l’écrivain
qui, par des inspirations refusées à ses devanciers
ou par d’heureux et nouveaux artifices du langage,
fait goûter des jouissances neuves aux amis des lettres
, e t c ., e tc ., chacun de ces hommes croit avoir
acquis des droits à la reconnaissance de ses concitoyens
, et rarement on a vu de nos jours la fortune
trahir leur espoir. Pourtant nul de ces individus n’a
couru de dangers, aucune privation ne lui a été imposée
, les élémens conjurés contre lui n ’ont point altéré
son tempérament; c’est en vivant au sein de sa
patrie, de sa famille, de ses amis, qu’il est paisiblement
arrivé à cette gloire , à celte douce et confortable
aisance qui viennent le dédommager des momens
donnés à l’étude, plutôt qu’aux plaisirs ou à
l’oisiveté.
ET R E F L E X IO N S .
Si nous nous montrons si généreux pour ces hommes
dont l’existence a toujours été si facile, n ’accorderons
nous rien à ces navigateurs qui, s’éloignant de
tout ce qui leur est ch e r, se condamnent à un exil de
plusieurs années, el dévouant leur vie à une lutte
conlinuelle contre toutes les privations, contre tous
les dangers conjurés, se constituent en quelque sorte
les mandataires à titre général et spécial de la science,
et deviennent souvent ses martyrs? N’est-ce donc rien
que de tracer avec exactitude la vraie configuration
de côtes entières, jusqu’alors à peine indiquées, de
fixer d’une manière précise la position d'îles dont les
noms sont à peine connus, de retracer à nos yeux
étonnés les moeurs, les coutumes, la langue et la re ligion
de peuplades isolées sur les flots d’un immense
Océan, d’étudier toutes les races d’animaux qui habitent
ces terres, et d’en rapporter des échantillons authentiques
aussi bien que des végétaux singuliers qui
les couvrent et des substances inorganiques qui en
forment la base?... Ces conquêtes, si précieuses par
elles-mêmes, n ’acquièrent-elles pas un nouveau prix,
quand on réfléchit qu’elles ont été faites au prix de
mille sacrifices , de mille périls, qu’il n’a pas suffi de
les faire, mais qu’il a fallu les disputer durant des années
entières aux nombreuses causes de décomposition
que recèle un navire condamné à passer des mois
entiers sous les chaleurs humides de la zòne équatoriale,
ou dans les mers en courroux des latitudes
élevées?
Mais pourquoi mettre en doute les dires des grands