VOYAGE
F'".
bout de six ou sept lunes. Ce vieillard avait vu le
navire échoué à Tanema et les hommes qui en provenaient,
mais il n’avait pas vu ceux qui avaient appartenu
au navire échoué devant P a ïo u , attendu que sa
tribu était en guerre avec celle de ce district. Dans
les guerres des blancs avec les sauvages, il y eut deux
des premiers tués à Païou, et cinq n a tu re ls , dont
trois Arikis.
Cette version, conforme quant aux points les plus
importans à celle de Valiko , m’a paru la plus digne
de confiance, d’autant que Valiko, généralement doué
d’une intelligence supérieure à celle de ses concitoyens,
semblait être Lout-à-fait exempt de .passion
ou de crainte dans cette affaire.
3Ia fièvre ayant pris un caractère plus marqué, j’ai
commencé à adopter un régime de diète très-sévère,
d’après le système queje me suis fait sur ces sortes
de maladies.
Un ciel très-couvert et une faible brise de nord
nous amènent, vers onze heures et demie, des torrens
de pluie qui continuent tout le reste de la journée.
Ces temps déplorables n ’améliorent point l’état des
malades, et l’équipage compte déjà deux ou trois
hommes attaqués de la fièvre, oulre M. Caimard et
moi.
Cependant les travaux du cénotaphe sont poursuivis
avec activité, et rien ne saurait me déterminer à
quitter l’île, sans avoir payé ce dernier tribut aux
mânes de nos infortunés compatriotes.
Par l’organe d’Hambilton, je me suis procuré de
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nouveaux renseignemens de Tangaloa sur les îles
voisines de Yknikoro. Cet insulaire est allé à Taumako,
et il affirme que cette terre est à peu près
à égale distance de Nitendi et de Vanikoro; elle n ’est
guère plus grande que l’île Tevai, mais elle est haute,
bien peuplée, et a près d’elle une petite île. Nitendi,
ou Indendi, car la prononciation de ces hommes laisse
des doutes sur le vrai nom (Santa-Cruz des Espagnols)
, est dix fois plus grande et plus peuplée
que Vanikoro; elle est fertile en cochons, poules et
productions diverses. Un naturel a donné aussi à
M. Cuilbert un croquis de ces îles, très-imparfait il
est vrai, mais qui annonce déjà une sorte de raisonnement
de la part du sauvage qui l’a tracé.
M. Gressien, parti à cinq heures et demie du matin
avec la baleinière, pour reconnaître et sonder la passe
du N ., a poursuivi sa tâche avec constance, malgré
les flots de pluie qui ont tombé une partie de la
journée. Cet officier a reconnu la passe du N. E. et
l’a jugée praticable, bien qu’elle fût obstruée par des
bancs et des récifs nombreux ; en outre , il faudrait
mettre le cap à l’est pendant long-temps, et pour cela
il faudrait une brise d’ouest assurée. M. Gressien a
cru entrevoir une passe plus étroite dirigée droit au
N . , et il se propose de l’explorer à la prochaine
occasion.
La pluie a duré presque toute la journée, le ciel a
été constamment voilé par d’épais nuages, et n’a pas
offert un moment de beau temps. Dans ces climats
embrasés, on peut juger quelle influence funeste de-
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1828.
Mars,