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nous avait jetés depuis midi de près de douze milles
dans le nord. Je gouvernai de manière à doubler ce
cap à bonne distance dans la nuit.
Dans la journée suivante, nous avions un très-beau
temps, et nous cheminâmes rapidement avec une
belle brise du S. O. Mais elle fraîchit beaucoup trop,
et dès minuit c’était un violent coup de vent, avec
des rafales très-pesantes, qui soulevèrent une mer
très-courte, très-creuse el très-dure. Comme je m’estimais
déjà assez près et à la hauteur du cap Sparlel,
je me déterminai à courir de petits bords. Mais a six
beures, la fureur de la tempête fut telle que je ne pus
garder dehors que la voile d’étai de cape toute seule.
A huit heures du matin, le vent était parvenu au
plus haut degré d’intensité ; la pluie tombait par torrens,
les rafales se succédaient avec rage et presque
sans interruption, et la mer était horriblement to u rmentée.
En un mot, le temps était affreux, et son
apparence présageait encore des circonstances plus
sinistres. Je commençais à concevoir de graves inquiétudes
sur notre position, bien q u e je m’estimasse
à douze lieues tant du cap Spartel que du cap Trafalgar,
et je déplorais la fatalité qui nous exposait
à de nouveaux dangers pour ainsi dire à la vue du
port.
Tout-à-coup, à huit beures et demie, et comme par
enchantement, après une rafale épouvantable, le vent
saule brusquement au N. O ., l’horizon se découvre,
et dans toute l’étendue du N. E. à l’E. nous apercevons
la terre au travers de la brume. D’après la direclion
que j ’avais suivie dans la nuit, je ne doutai
pas que ce ne dût être la terre d’Afrique, et je forçai
de voiles au N. E. et N. E. ■/< E. pour la doubler au
vent.
Cependant,, à mesure que la terre s’éclaircit, sa
forme, ses accidens, el surtout ses gisemens, ne pouvaient
se rapporter en aucune manière à la côte d’Afrique.
Pour terminer cette incertitude, malgré le vent
et la mer, je mis en panne pour sonder, et nous eûmes
trente-sept brasses, fond de gravier !... Plus de doule,
nous étions sur la côte d’Espagne, et déjà fort enfoncés
dans la vaste baie de Cadix. En effet, nous
reconnûmes bientôt les îles voisines de ce p o rt, les
tours de garde, et le cap Trafalgar lui-même. Sans
perdre un instant, nous serrâmes le vent jusqu’au S.
S. E. pour doubler cette dernière pointe, en prolongeant
la côte à trois ou quatre lieues. La corvette
chargée de toile, malgré de pesantes rafales et une
mer assez dure, se comporta très-bien, et nous approchâmes
rapidement du cap de Trafalgar.
Pour causer Terreur dont je viens de parler, il
fallait que le courant nous eût portés dans la nuit de
plus de vingt milles au nord, au lieu de nous entraîner
dans Test, comme je le conjecturais. Je frémis
encore en pensant au danger que courut l’Astrolabe
en cette circonstance. Si les tourbillons de vent, qui
régnaient de sept à huit heures et demie du malin,
eussent seulement duré trois ou quatre heures de
plus, la corvette tombait inévitablement dans la dangereuse
baie de San-Lucar. Là elle eût été jetée à la
t o m e v . 3^
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Macs.