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 Février, 
 dessus le pont à  six heures vingt minutes, puis la nuit  
 nous en déroba l’aspect.  La nuit fut belle,  et  nous en  
 passâmes  une grande partie en  panne. 
 10.  A quatre  heures  du malin , nous  remîmes  le  cap  à  
 l’O.  S.  0 . ,   en  augmentant  de  voiles;  mais  la  brise  
 était  si  faible  que  nous  n ’approchions  de  Tikopia  
 qu’avec  une lenteur désolante. A midi, nous en étions  
 encore à douze milles.  En  approchant,  nous  reconnûmes  
 quelle n’avait pas plus de trois ou quatre milles  
 de circuit ;  elle  offre  dans  le N. un  pic  assez  pointu,  
 couvert d ’une riche végétation et dont la hauteur peut  
 aller à cent cinquante toises,  tandis qu’au S. E.  elle se  
 termine par un rocher isolé,  vertical,  cylindrique, de  
 PI. CLxxii.  trente ou quarante toises de h au teu r, dépouillé sur ses  
 flancs, mais  couronné  au sommet par une touffe d’arbrisseaux. 
   Toute la bande orientale de Tikopia  paraît  
 inaccessible,  de  ce  côté  scs flancs  étant toujours battus  
 par  les  flots  de  la mer.  A  travers  les  forêts  qui 
 couvrent l’île ,  on  distingue  un  grand nombre  de cocotiers. 
  Par son aspect et sa position, cet îlot solitaire,  
 tapissé  de  verdure,  et  jeté  comme  au  hasard sur la 
 1828. 
 F’cvrier. 
 surlace  des  flots,  semble  un  bouquet  d’arbres  qui  
 s’élève  au milieu d’une immense prairie. 
 A  la  vue  de  Tikopia,  l’impatiente  curiosité  dont  
 j ’étais  animé  depuis  la  première  nouvelle  des découvertes  
 de  Dillon ,  prit un  caractère encore plus  prononcé. 
  L à ,  seulement, j’allais  connaître  de la bouche  
 des  naturels  si les  rapports  de  ce  navigateur étaient  
 fondés ou bien s’ils n ’étaient que des histoires forgées à  
 plaisir.  N ’aurais-je donc  renoncé  aux honorables tra vaux  
 qui  m’attendaient  sur les îles de la Nouvelle-Zélande, 
   que  pour ajouter  foi  aux  rêves  d’un  aventu-  
 tu r ie rl...  Aussi je maudissais  de  bon  coeur  le  calme  
 désespérant  qui  ne nous permettait guère de marcher  
 qu’à pas  de tortue ,  et  fixés  sur  la  lunette mes  yeux  
 avides  interrogeaient  les  rives  de  Tikopia,  pour  découvrir  
 quelque indice  favorable à mes soupçons. 
 Enfin  vers  deux heures  la vigie annonce trois  pirogues  
 qui  se  dirigent  vers  nous.  Chacun  se  précipite  
 sur les  bastingages et hâte  de  ses  voeux  l’instant  qui  
 va mettre un terme à nos doutes. Les pirogues  approchent, 
   chacune d’elles est montée par  cinq ou six naturels. 
   Dans celle qui marche  en  tê te,  on  remarque  
 un  Européen  en  bonnet  de  laine,  chemise  rouge  et  
 pantalon  de  prunelle  blanche.  Il monte  sur-le-champ n. cLxxvir.  
 à bord, et répond à mes questions  qu’il est le Prussien  
 Martin  Bushart  qui  vient  d’accompagner  le capitaine  
 Dillon dans son voyage  aux îles Mallicolo.  Puis  il me  
 présente un certificat daté  de  la  baie  des  Iles,  le  18  
 décembre  1828. Ainsi plus de d o u te ,  les faits avancés  
 par Dillon  sont  exacts :  c’est  à  Vanikoro  que  Lapé