D E L ’A S T R O L A B E .
iSas. M. Vandervines, que je ne trouvai point chez lu i;
Août. pm'g j g jjjg rendis à l’hôtel de Provence où nous nous
trouvâmes tous réunis. Les convives de M. Demann
étaient l’intendant de la marine, M. Rowloff, le capitaine
Luftemberg, le capitaine Hay, et l’aide-de-camp
de M. Demann, jeune lieutenant de deuxième classe.
Le repas ne fut point somptueux, mais il fut très-gai,
et l’on porta divers toasts aux souverains et aux marins
français et hollandais, à l’heureux retour de l’Astrolabe,
etc. Nous nous séparâmes à six heures du
soir, et à huit heures j’étais de retour à bord.
A Batavia, j ’appris par les journaux qu’on remit à
ma disposition, le changement du ministère Villèle
en celui de Martignac, le renouvellement des Chambres
et l’affaire de Navarin, avec les nombreuses promotions
qui l’avaient suivie. Comme bon Français et
comme libéral, j’appris avec joie les deux premières
nouvelles, surtout en voyant que M. de Chabrol restait
encore à la marine '. Ennemi naturel de la barbarie
turque et partisan sincère de l’affranchissement
des Grecs, j ’appris avec joie l’échec que le Croissant
avait reçu dans la journée de Navarin ; mais j ’avoue
que je fus singulièrement étonné de voir tant préconiser
cette escarmouche. J e ne concevais point surtout
que l’Angleterre, habituée aux exploits de mer,
pût prêter sa voix à ce chorus de fanfaronnades. Les
> Depuis que je suis dans la marine, M. de Chabrol est, à ma connais-
sance, le seul ministre qui se soit occupé sérieusement et en conscience du
bien public. S ’il eût été secondé, nul doute qu’il n'eiîl beaucoup fait pour
elle.
trois premières puissances maritimes du monde en- isas,
tier contre une nation demi-sauvage!... Trois esca-
dres bien préparées. Lien armées, contre un amas
confus de bâtimens entassés sans ordre , et montés
par des marins indisciplinés et qui ne savaient ce que
c’était que de manoeuvrer des canons!... Ajoutez à
tout cela que les Turcs furent pris au dépourvu, pour
ne pas dire davantage !... En vérité, il m’a toujours
semblé, et il me semble encore qu’il n ’y a jamais eu
motif à pousser de tels bourras de triomphe. A voir
tout cet étalage, les Turcs n ’auraient-ils pas eu le droit
de dire : « Il fallait que nos vainqueurs eussent eu
grand’peur de nous? »
Je me rappelle aussi que je fus très-surpris de ne
pas voir dans un seul journal le rapport du chef de
la division française. Beaucoup de lettres particulières,
de récits plus ou moins enflés, voilà tout ce
qui frappa mes yeux; mais je ne me rappelle pas
avoir jamais vu le rapport vraiment officiel de cette
affaire.
Du reste, l’Astrolabe était toujours honorée par
le ministère d’un oubli complet, et nul de ses membres
n’avait eu part aux faveurs du moment. Deux heures
à Navarin avaient pesé bien plus dans la balance que
nos longues souffrances et nos douloureuses épreuves
tant de fois réitérées.
M. Lottin a trouvé ici une lettre de M. de Blosse-
ville ; cet officier se trouvait embarqué sur la gabarre
la Chevrette que commandait M. Fabré, et qui est
venue de Pondichéry à Batavia, deux mois avant