autour de son tombeau , lui rendoient
chaque année des honneurs funèbres,
et le lendemain 'ils célébraient son retour
à la vie, et son ascension au ciel.
Il ajoute, que quelques personnes de
Biblos prétendoient, que c’étoit non en
honneur d’Adonisqu’ouavoitinstifuéccs
fêtes,mais en honneur de l’Osiris Egyptien
, qui avoit son tombeau chez eux.
Ils avoient raison en ce point, C’étoit le
même Dieu, mais ils avoient tort de les
distinguer l’un de l’autre. Ils apportoient
pour preuve une communication de
culte entre l’Egypte et Biblos. Les
Egyptiens fabriquoient tous les ans une
tête d’Osiris en Papyrus ( U) , qu’on
exposoitsur les eaux du Nil. Elle étoit
portée à la mer , et-les vents , par un
miracle, qui sc renouvelloit tous les ans,
la conduisoient toujours , au bout de
sept jours , sur le rivage de Biblos.
L ’imposture , aidée de la crédulité,
comme on le voit, a Fait partout des
miracles sans beaucoup de peine. On
trompoit encore le peuple par un autre
miracle , en teignant de rouge les eaux
du fleuve Adonis 5 et lorsque ce phénomène
arrivoit , on étoit averti du
tempsoù l’on devoitle pleurer, On sup-
posoit alors , que le Sanglier Cruel
venoit de blesser Adonis, et que le sang,
qui sortait de la plaie, avoit donné cette
teinte aux eaux- Il y a beaucoup d’apparence,
que la crédulité fit les plus
grands frais de ce miracle, qui ne
paroit pas aisé à exécuter sur un fleuve
fia peu considérable, Quoi qu’il en soit,
voilà les contes que l’on débitait sur
La Dieu mort et ressuscité.
Ovide nous donne l’histoire d’Ado-
çis ( i) , dont tous les aDs on célébroit
les funérailles , et il fait naître de son
sang les vents d’automne désignés par
la fleur de l’Anemone, que les vents les (I)
(I) Ovid. Métaroorpli.I. 10,
(a; Natal. Cames, p. $24.
Ct) Pausan. Cprintfi. p. 61,
(,f; PlvJar-b, Vilji Alcibiad. T. I. p. MO.
plus légers agitent et renversent. Otf
l’avoit lait naître de la Njpiphe Myr-
rlra changée en arbre de myrrhe , arbuste
consacré an Soleil, et dont les
Mages ont fait des présens à Christ.
On célébroit à Alexandrie avec beaucoup
de pompe les funérailles d’A-
donis (2), dont on portoit solemnel-
lernent l’image au tombeau où se fai-
soient ces prétendues funérailles. Ou
les célébroit aussi à Athènes. C’étoit
dans une chapelle attenante à celle de
Jupiter Sauveur {uu) , que les femmes
d’Argos pleuraient Adonis ( 3 )’.
Plutarque, dans la vie d’Alcibiade (4)
et de Nieias, nous dit, que quand la flotte
Athénienne parfitpourla Sicile, on tira
de mauvais augures , de ce que c’étoit
au moment de la célébration des fêtes
cl’Adonis, dans lesquelles ou portoit de
toutes parts dans les rues les images
du Dieu mort, que l’on alloit enterrer,
et où l’on voyoït une foule de femmes,
qui se frappant la poitrine imi-
toientparfaitement la triste pompe des
enlerremens , avec des chants fort
lugubres.
Ammien Marcellin nous retrace le
tableau de la douleur des dévotes à
Vénus et à son infortuné amant Adonis.
Procope e t S. Cyrille parlent aussi de ccs
fêtes lugubres en honneur d’Adonis,ct
des fêtes de joie, qui leur suceédoientà
l’occasion de sa résurrection (S). Elles
avoient passé d’Orient en Occident, suivant
Firmicus(6); ony pleuroit l’amant
de Vénus, et l’on montroit aux assis-
tans la large plaie qui lui avoit été faite,
comme on montre chez nous la plaie
que fit le coup de lance qui percale
côté du Christ. Néanmoins malgré
ces fictions et les légendes sacrées, qui
faisoient d’Adonis un homme réel ,
comme nous en faisons un de Christ,
Tclem Vit, Nici. p. 83a,
(5) Cy ril. I. 2. m l ’ ropb, Ezech.
(6) ïirmia. de Prof, lieiig. p. ai et 32,
les
les Chrétiens un peu instruits , il ne
parle pas du peuple, 11’ont pas pris le
change comme nous. Ils y ont toujours
vu le Soleil , et ont cru devoir ramener
à la physique et aux phénomènes annuels
de la révolution du Soleil toute
cette aventure romanesque de l’amant
de Vénus. Les hymnes d’Orphée même
sembloient les conduire à cette explication
, puisque les traits sous lesquels
Adonis est peint ne pouvoient convenir
qu’au Soleil, ou au Dieu qui circule dans
le Ciel avec les saisons, et qui ramène
la végétation par son retour vers nous,
voyageant tantôt dans les ombres du
Tartare, tantôt dansl’Olympelumineux,
comme nous avons vu plus haut. Aussi
Maerobe M w Ü nous adonné la Théologie
du Soleil sous ces différens noms,
n’a-t-il pas manqué d’expliquer toute
1 histoire allégorique d’Adonis, sa mort
et, sa résurrection , le partage égal de
la durée de sa vie entre Vénus et Proserpine
, par la marche même du Soleil
et son séjour égal alternativement
dans les six signes de l’hémisphère boréal
et les six signes de l’hémisphère
austral, par les six mois de printemps
et d’été, et par les six mois d’automne
et d’hiver; par l’alternative de productions
et de destructions qui s’opèrent
sur la terre , suivant que le Soleil dirige
sa course dans nos climats et vers
Be pôle élevé , ou qu’il repasse vers les
régions inférieures et vers ce pôle
labaissé, dont parle Virgile sous le nom
[d’Enfers (2).
I C’est alors que ce Dieu semble descendre
sur les bords du Styx , et visiter
Be séjour des enfers , où après avoir été
retenu pendant six mois, il revient ha-
jbiter parmi nous; et franchit le fameux
[Passage, qu’ont célébré tousles peuples
uu nord a l’Equinoxe du printemps.
L Maerobe voit l’empire de Vénus dans
( hémisphère supérieur et boréal, celui
pr Proserpine dans l’hémisphère in-
0 ) M a c ro b . S a tu rn a l. 1. r . c . 2 1 .
Heiig. Univ. Tome I II,
férieur et austral, et il expVi^,e ]e
deuil de Vénus par celui de la nature
au moment où les ténèbres reprennent
l’empire sur le jour, ç’est-
a-dire, lorsque le Soleil repasse l’Equateur
, pour fournir la carrière des six
signes inférieurs , domaine de Proserpine
, qui dans ce moment jouit de la
présence du Dieu, qui vient d’être ravi
aux tendres embrassemens de la Déesse
du printemps-et de la génération. Us
prétendent, ajoute cet auteur, que Vénus
retrouve ensuite Adonis , lorsque
le Soleil, après avoir parcouru les six
signes de l’hémisphère inférieur, repasse
dans notre némisphère , et rend
à la lumière et au jour leur empire sur
les nuits. Le Sanglier, qui lui porte le
coup de la mort, est l’image symbolique
de l’affreux hiver, représenté par l’animal
qui se nourrit dé ses fruits , et qui
se plaît dans l’humidité et dans la fange.
L ’hiver fait comme une plaie au Soleil,
en affaiblissant salumière et sa force,
On représente, sur le mont Liban, la
Déesse amante d’Adonis, par la figure
d’une femme plongée dans ]q douleur,
la tête voilée , et appuyée tristement
sur sa main gauche. Des larmes abondantes
, qui semblent couler de ses
yeux, annoncent non-seulement sa dour
leur, mais encore l’état de la nature
pendant cette saison humide, durant
laquelle la terre voilée par les brouillards
épais ne jouit plus de la vue du
Soleil, tandis que les torrens plus abon-
daus coulent de"toutes parts, au milieu
des campagnes dépouillées de leur ancienne
parure. Mais lorsque le Soleil
est sorti des souterrains profonds de la
terre , et a franchi le passage équinoxial
, ou la fameuse ligne de détnarca -
tion, et a rendu au jour son empire sur
les nuits ; alors la Déesse de la génération,
Vénus se réjouit, les prairies se
couvrent de verdure , les campagnes
t présentent déjà l’espérance des mois-
(2) V i r g î l . G e o rg . I. r. v . 242.
K