usitée- par-tout chez les Romains. Us
en firent faustus et f e l ix , frères de
Janus ou du Génie , qui ouvrait l’année
, comme on peut le voir dans Plutarque
(i).
Ainsi des mots Rogare et Donare ,
les Chrétiens ont fait S. Rogatien et
S. Donatien , qu’ils unissent toujours
dans leur invocation des Litanies.
On pojirroit faire là dessus une foule
de recherches curieuses , en comparant
les Calendriers anciens avec les nouveaux,
et il ne seroit pas difficile de prendre
souvent nos prêtres en défaut, et de
leur prouverqu’ils ont conservéunefoule
d’anciens Génies, ou Etres physiques et
moraux personnifiés , dont ils ont fait
des saints. On leur prouveroit que leur
S. George, dont on fête l’apparition en
Egypte, dans le même temps et dans les
mêmes lieux où l’on célébroit autrefois
celle de Persée, n’estque l’ancien Persée,
combattant le monstre auquel est exposée
une jeune fille, qu’d délivre;
que la légende et les figures sont les
mêmes. On pourrait leur faire voir,que
de la belle-Etoile de la couronne , apelée
Margarita ,(rr) à cause de son
rillant , laquelle est placée précisé-
ment au-dessus du Serpent d’Ophiucus,
qui dévelope au-dessous d’elle ses longs
replis, ils ont fait une Ste. Marguerite,
qui foule aux pieds un Serpent, et dont
ils célèbrent la fête en juillet, à-peu-
près au même jour , où les Calendriers
anciens marquent occidit Lucida
çoronçe, autrement , Margarita-
On fêta aussi S, Hyppolite traîné
par des chevaux , comme le fils de
Thésée, et on en montre les reliques à
S. Denis, Les -restes de Thésée furent
découverts, dit-ron , par Cimon, dans
l’île de Scyros, pù il avoit été enterré,
et transportés qvec pompe à Athènes.
On sacrifia à ces reliques , comme si
c’eût été luirmême qui fût revenu dans
pette ville. On répéta tous les ans ce sacrifice
solemnel , qu’on fixa au huitième
jour de novembre (2). On trouve
pareillement dans le Calendrier des
Chrétiens, la fête des Stes. Reliques,
fixée au 8 novembre.
Je ne pousserai pas plus loin ces le.
cherches, dont je supprime une grande
partie , parce que mon but dans cet
ouvrage n’est pas de relever toutes les
méprises de l’ignorance et de la crédulité
, mais , au contraire, de rappeler
notre Religion à sa véritable origine,
d’en faire voir la filiation, de montrer
le lien , qui l’unit à toutes les autres,
et sur-tout de fixer le vrai sens de ses
allégories, et de donner le mot de ses
énigmes, afin d’en faire voir la nature,
etdela venger du ridicule et du mépris,
dont l’ont voulu couvrir tous ceux qui
ont cherché à l’attaquer, faute de la
comprendre. Ce qu’il falloit attaquer,
c’est l’ignorance et la crédulité, qui
la défigurent et la déshonorent , en
prenant à la lettre ses ingénieuses allégories
et ses savans mystères. C’est
sous ce point de vue qu’elle est bi-
sarre , absurde , révoltante , et indigne
de l’homme : mais ce n’est pas là notre
Religion : c’est son spectre affreux.
Malheureusement il est vrai , que c’est
ce spectre qu’on nous présente toujours;
c’est lui qu’on nous force de recevoir
pour elle. C’est entre ses mains qu’on
met les chaînes cruelles , qu’on donne
à l’usage le plus doux de nos sens et
de notre raison. C’est là ce spectre,
qui marclie toujours escorté de bourreaux
et de prêtres plus cruels encore
qu’eux, C’est là le monstre, qui arme
d’un poignard sanglant, égorgea tant
de milliers d’hommes à la journée de
S. Barthélemi : qui a été dévorer les
habitans du nouveau monde , et nous
pii "a apporté l’or presque aussi h1'
neste aux Sociétés, que la supers-
tition, et après elle , le plus cruel
fléau que la nature ait produit. C’est
(a) Plut. Vitâ (1) Plut. Parallel, p. 307, Tiiesei sub tiuem,
ce fantôme affreux, qui allume encore
aujourd’hui les bûchers de Madrid et de
Goa : qui sous Louis XIV arrachoit les
enfans du sein de leurs mères , et qui
dévore le patrimoine des peuples.
Enfin c’est lui qui nous a donné la
Vendée et tous les maux et les crimes
qu’elle a produits.
S’il est quelqu’un qui puisse, sans
frémir, voir sa tyranie, et contempler
sans horreur tous les ravages qu’il a
commis, il mérite d’en être la victime.
Quiconque l’alimente et le défend est
lui-même le plus grand ennemi de
l’biimanité. C’est ce monstre qu’a enfanté
l’ignorance , et que la crédulité
a consacré sur nos autels, qu’il faut détruire.
Il faut faire asseoir à sa place,
sur les débris des monumens de la superstition,
lecnltedu chef de la nature,
Religion née à l’ombre des mystères, et
dont le corps sacré a été toujours voilé
au Peuplecomme la Divinité l’est à
l’homme. Celle là est grande , majestueuse
, lé plus bel ouvrage de l’hom-
înie , et la seule digne de nos res-
tpeefs. f
Considéré sous ce point de vue ,
■ comme une branche de la Religion
universelle, le Christianisme se réduit
en dernière analyse , d’après les explications
, ou plutôt la démonstration
, que nous venons d’en donner ,
pan culte de l’Etre invisible , qui com-
j« prend en soi tontes choses , principe
| » delà vie et de l’intelligence de tous les
» Etres, qui a placé le siège de sa gloire
t>» visible et de son énergie sur la terre
» dans ce Soleil, image de sa beauté et
» de sa puissance, sa première produc-
” lion , auquel est confié le soin de
” taire le bonheur de l’homme , et de
» réparer tous les ans les maux, qui
„ résultent de son absence , en versant
>1 dansla matière terrestrele bien qu’elle
n n’a pas d’elle-même, et qu’elle ne peut
» recevoir que de lui». Voila a-peu-
près le précis de la Religion Chrétienne,
dépouillée de toutes les fictions allégoriques,
et des abstractions, sous lesquelles
on l’a voilée , et qui n’étani
plus entendues en ont fait un monstre
effroyable. Détruisons donc , non pas
nos temples , non pas notre culte,
mais notre ignorance ; entendons nos
mystères. Ce sont ceux de la nature.
LaReligion Chrétienne ne peutqu’y
gagner, aussi bien que la raison et. l’humanité.
Fêtons , si nous voulons , lè
moment où le Soleil va nous rapporter
le don précieux de la Lumière , et ensuite
la chaleur et la fécondité , que la
nature entière tient de la cause invisible
et universelle, dont cet Astre n’est que
l’instrument. Louons l’Eternel : remer-
cions-le de ses bienfaits : unissons-nous
pour célébrer sa gloire : mais- point
d’images , point de légendes , point de
Prêtres sur-tout, qui trafiquent de notre
crédulité : que chacun soit à soi-meme
son prêtre, et. qu’il porte dans son coeur
vertueux l’autel pur, sur lequel iloffrira
des hommages à la Divinité ; ( sa.) ou
si nous élevons des temples, gravons-
y la fameuse inscription de Sais-, qui
est le résultat de la philosophie de
tous 1er -siècles , et qu’on y lise : « Ici
*5 on adore l’Etre qui est la cause-dc
,» tous les autres, qui lescomprend tous,
» et dont nul mortel n’a jamais percé
le voile » ; (tt) et plus bas gravons
l’histoire des malheurs, qu’ont éprouvés
les hommes, pour avoir osé en dire
davantage.
Relig. Unir. Tome III. V