la répugnance qu’ils éprouvoient à admettre, comme des vérités, des faits et
des ^ogmes qui ne portent pas le caractère de la vraisemblance. A peine
en effet la philosophie a rendu à l'homme'le droit de penser, qu il tenoit de
la nature, et que lui avoit ravi depuis tant de siècles l’autorité tyrannique de
ses Prêtres , que le premier usage , qu’il a fait de sa liberté, a été de combattre
avec, les débris de ses fers l’antique Religion de ses pères , et de faire retomber
sur elle le mépris et la haihe, que méritoient ses ministres tout-à-la-fois avides,
Impérieux, vicieux et ignorans.
Cependant il eut.été plus juste de chercher d’abord à l'entendre avant de
l’injurier ; et si la crédulité aveugle est une foiblesse qui dégrade la raison ,
la prévention précipitée, qui condamne , est une injustice que la saine philosophie
désavoue. Le sage ne croit ni ne juge rien témérairement et saris
examen. Il cherche à s’éclairer, et s’il arrache le bandeau, que l’autorité et
éducation avoient attaché sur ses yeux dès sa plus tendre enfance, ce ne
doit être que, pour marcher plus sureînent à la lueur du flambeau de la raison
et de la science. *
La Religion chrétienne ne redoute point l’examen d’une critique éclairée ,
ni l’éclat de la lumière dont elle enseigne les mystères. Elle n’écarte de son
sanctuaire que le vice et l'ignorance. Formée dans les écoles de la philosophie
la plus ancienne , elle ne peut craindre de trouver une rivale et une ennemie
. dans sa propre mère ; et, si de nos-Jours celle-ci a semblé vouloir 1 avilir par
Je ridicule et le mépris',1 c’est que les nouveaux philosophes n’ont point
appelé à leur secours la science. Elle seule pouvoit lever le voile sacré, qui
déroboît le corps auguste de la nature à la vue du vulgaire profane. Ils
ont cru que ce qu’ils n’entendoient pas étoit inintelligible et absurde ; que
le mépris de la science ancienne leur tiendrait lieu de savoir , et ils n ont pas
apperçu, qu’en s'affranchissant delà crédulité du peuple , ils n’avoient pas
cessé pour cela d’être plongés dans les ténèbrês de la commune ignorance.
Il leur a paru plus aisé de censurer que d’apprendre, et plus court de rejeter
les énigmes sacrées, que d’en deviner le sens.
Cependant ils dévoient leur tn soupçonner un, et assez raisonnable,
pour que de pareils, dogmes aient été admis par une partie assez considérable
de la terre, et aient fait une fortune aussi étonnante dans le» opinions religieuses
des peuples qui nous ont précédé.
Les grands événemens sont ordinairement produits par de grandes causes ;
et comme les philosophes .rejettent avec raison cés .causes surnaturelles, imaginées
par les Sages de l’antiquité pour accréditer leurs opinions dans l’esprit
du vulgaire , ils auraient dû en chercher la source dans la science
ancienne, et étudier le caractère philosophique des Sages de 1 O rient, afin
de saisir le mot des énigmes, sacrées , dont la multitude se trouve dépositaire
sans espoir de les jamais comprendre. L’antiquité de ces Dogmes, leur
universalité , et le respect profond que tant de milliers d’hommes ont eu
pour eux, leur courage à les défendre, le soin qu’ils ont toujours pris de
les perpétuer et de les propager , tout devo.it leur empêcher de croire que
ce ne fût qu’un assemblage d’idées bisartes et monstrueuses , sorties d un
cerveau mal organisé , dont le délire fût devenu un délire presque universel.
Ce n’est pas ainsi que marche la nature. Le monde moral, comme le monde
physique, a des Lois invariables, dont on rcconnoît l’empire dans ses pius
grands écarts.
La Religion chrétienne, comme toutes les autres , est l’ouvrage de l'homme ;
l'homme doit y avoir laissé l’empreinte de son génie, qui n’est point extravagant,
quand il reçoit les idées que la nature lui imprime , et qui ne le
devient, que quand il s’efforce de_ donner de la réalité aux ombres et aux
images. ' ' -
Placés entre les uns et les autres-, entre ceux qui croient tout, et ceux,
qui rejettent tout , nous leur dirons, . examinons et rendons-ppus enfin,
compte de notre croyance et de celle de nos .pères ; voyons ce^ju il y
a dé vrai et ce qu’il y a de faux , sous quel rapport nos idées»
religieuses peuvent avoir un fond de. réalité, _et sous quel autre rapport
elles peuvent,être fausses. Pénétrés de respect et d’amour pour la vérité ,
nous irons la chercher jusqu’au fond de nos sanctuaires , et nous écarterons
le voile mystérieux qui la couvre. Peut-être y trouverons-nous encore ,
la Nature. J’avoue néanmoins que s’il est une Religion , qui semble devoir
échapper à l’analyse que nous avons entreprise de faire des Cultes , par le
moyen de l’astfomonie et de la physique , et ne pouvoir être confondue avec
les autres , dont elle a dans tous les temps affecté de se séparer, c'est sans
doute la Religion des Chrétiens. Née depuis peu de siècles en apparence,
sortie toüt-à-eôup de son obscurité, au milieu des ■ générations instruites!,^et
au seindes-lumières qui éclairaient l’Asie et lEurope sous le règne d’Apguste ,
appuyée de monumens soi-disant historiques , ou au moins qui ont passé jus*.
qu icipoür avoir toute l’authenticité de I histoire chez les peuples qui la prof essent
, attaquée et défendue presque dès son berceau , et victorieuse, sinon par
la force du raisonnement, au moins par celle de la crédulité , on pourrait
imaginer qu’elle demeurera encore victorieuse du combat que nous allons livrer
à: ses fictions sacrées et à ses Dogmes obscurs , que son Dieu seul testera en
possession de cette réalité historique, qjue pendant tant de siècles iL avoit
usurpée, et que près de scs sanctuaires va enfin échouer la méthode nouvelle
, qui nous a ouvert ceux des autres Religions. La haine qu’elle a toujours
vouée aux adorateuts de la Nature, du Soleil et des Astres, aux Divinités
Grecques , Romaines et Egyptiennes , confirment ertcore cette, conjecture
, et donnerait à penser qu’elle n’appartient en aucune manière aux
diverses sectes de la Religion universelle, si l’erreur d’un peuple sur le
véritable objet de son Culte prouvoit autre chose, que son ignorance, et si le
Culte d Hercule cessoit d’être celui du Soleil, parce que dans l’opinion des.
Grecs ce n’étoit que le Culte d’un grand homme et d’un Héros,
L,es Romains tournoient en ridicule les Divinités de l’Egypte, et cependant
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