resplendit la beauté divine , véritable
et heureuse , vers laquelle toute la
nature tend , et qu’elle desire , mais
diversement, l’une en Une sorte, l’autre
en une autre. Car la Lune elle-même
tourne continuellement pour s’unir au
Soleil, comme à la source de toute fertilité.
Ainsi, la nature de l’ame reste
dans la Lune , retenant quelques vestiges
et quelques songes de la Vie. Ce
que dit un Poète , que l’ame s’envole,
comme un songe , nesf pas vrai de
l ’ame aussitôt qu’elle a quitté le corps,
mais bien lorsqu’elle a été abandonnée
par l’esprit , et qu’elle est réduite à
elle-même. C’est l’esprit pur qui retourne
au Soleil ; et l ame séparée de
l ’esprit est ce qu’on appelle, l’ombre.
Elle conserve quelque tempsune figure
très-légère du corps, qu’elle a animé ,
et dont elle a pris la conformation,
comme l’eau prend la forme du vase
qui la contient; mais peu-à-peu elle
rentre dans Ja Lune , de la substance
de laquelle elle a été prise.
« La Lune est l’élément des âmes ».
Or c’est dans la Lune , suivant Plutarque
, que les âmes rendent compte
de leur vie passée. C’est dans la plus
grande de ses cavités, ou dans l’immense
vallée qui s’offre à nos regards,
que se rendoient ces terribles arrêts.
Platon le fait arriver , comme nous
l’avons déjà d it, dans un3;rimmense
prairie où su rendent les morts, après
un voyage de mille ans. Il place dans
ce lieu des sièges ( i ) où sont assis
des juges , près de deux ouvertures ,
d’où partent deux.1 chemins , comme
dans Plutarque , l’un en haut: vers le
Ciel , et l’autre en bas .vers la terre.
Ne voyons-nous pas à-pen-prèsffa.mê-
me chose dans l ’Apocalypse (a). Au
moment où le Dragon est enchaîné dans
l’abyme , Jean voit des trônes et des
personnes assises dessus , à qui la puissance
de- juger fut donnée. Ne seni.
b|e-t-il pas voir le trône de Minos
d’Eaque et de Radhamante, dont par]B
Platon dans son Gorgias,(f^ , ainsi ime
dans le traité d’^lxiochus , qu’on lui
attribue ? C’est aussi après l'espace de
1000 ans, avantle dernier combat, que
livre aux âmes le mauvais principe,
qui veut encore les séduire , qu’arrive
le dernier jugement , le jugement universel
de tous les morts ; et dans lequel
se fait la/dernière séparation, et
où s’opère là seconde résurrection , qui
fait passer les: Elus dans l’empire de
la Lumière, dont leur esprit a tonte
la pureté- Car il n’y doit entrer rien
de squillé ., dit l’auteuf de l’Apoca-:
lypse(4\ Mais les âmes, bien purifiées,,
alors out .acquis la parfaite,; ressem*
blanee avec le rayon solaire, et conséquemment
avec la,Lumière d’Ormusd,
dont le Soleil est le foyer.
Cette séparation , qui les épure,
leur donne.une nouvelle légèreté, qui.
leur permet de s’élever jusquà l’Astre,
qui les attire, comme, dit J ulieji ,,m|
l’activité de ses rayons. Elles’ont alors;
recouvré , dit Virgile , la simpli-,
cité du feu Principe. , donec\ aum.
simplicis ignem etc. Les autres ; au,
contraire, surchargées de matière, sont,
entraînées vers l’abyme.; .et' la séparation
ne pouvant avoir lieuelles retournent
dans la matière et les ténèbres
; ce qui est pour eux u n e seconde
mort, non pas dans le sens de se-,
paration, mais de destruction et de
dégradation ou de chute dans l’abynie
ténébreux. Car leur marche se fait en
sens contraire de celles des âmes vertueuses,
qui, à chaque séparation,*
purifient et se perfectionnent-, tandis
que le , sort des au très se détérioré
Après ce Jugement, dit Plut.arque)
les amés s’en vont , les ifties pat ja
route qui conduit à la partie de *s
(1) Platon. Rep. 1. 2 o .p . 614.
(2) Apocal. c. 20. v . 4.
(3) Gorg. 624. Axiocb. 371.
(4) Ap ec . e. 21. y . 17.
lune, qui regarde le .Ciel; et dans
l’Hiuelle on place l’Elysée; les autres
jE contraire descendent dans la partie
qui regarde, la terre , et tombent
dans ses goufîies.
En résumant donc ce que nous avons
dit, d’après les principes 4 e la Philosophie
barbare , consignée dans Plutarque
et dans Platon , îL résulté que
ces Philosophes mettoient, entre la
mort et le jugement, et l’arrivée dans
le lieu où se faisoit ce jugement, un
intervalle de 1000 ans. Qu’alors il.se fai-
! soit un Jugement soient nel, après lequel
les âmes pures passoient dans la Lumière,
et- les autres., au contraire ,
I étaient ; rejettéas dans, l’abyme. On
donnoit au résultat de ce. jugement
définitif le nom de seconde mort ; ce
qui étoit pour les âmes vertueuses une
: seconde résurrection ; car on nè doit
pas oublier, que les anciens appeloient
- renaître , cesser de vivre , ou-se dégager
de la matière du corps à la
mort. C’etoit donc renaître une se-
| conde fois pour l’Esprit, que de se dégager
de l’enveloppe de l’ame , qui
n’avoit pas sa pureté, et qui tenoit encore
à la matière. Il retournoit à son
principe par deux degrés,, dont l’un
1 étoit la séparation qui se fait du corps
l d’avec, famé et l’eSprit' et le second,
f celle qui se fait de l’ame d’avec l’esprit.
(./est cette dernière, qui rend à
I l’esprit,, ou à notre intelligence toute
| sa perfection.,.et la pureté de son es-
I sence lumineuse. Pour les hommes
I coupables , la condamnation étoit une
! seconde mort, puisqu’elle les rendoit
I encore plus malheureux , que n’avoit
I fait la première, et qu’elle les unissoit,
I non pas à la matière organisée du corps ,
I appeloït mystiquement la mort,
Mais qu’elle les enchaînoit à la ma-
I ùere ténébreuse la plus désordonnée, et
I 1 ensevelissoit sous les débris de la matiére
livrée aux principes destructeu rs,
qu’elle renferme dans son sein. Si on applique
à l’Apocalypse cette théorie et
ces dogmes de la Philosophie ancienne
sur faîne, et sur son union au corps,
ou sur sa séparation d’avec le corps , on
verra qu’elle fait la base du.chapitre
que nous ; expliquons. Il y a d’abord
une condamnation, et une espèce de
proscription prononcée contre le monde
sublunaire , où s’opèrent les générations
, et que fauteur désigne, sous
le nom de Babylone.il y a une condamnation
ffe tous les mauvais Principes, ou
dés Génies qui.y président. U y a enfin
nne condamnation des hommes, qui se
sont laissés subjuguer par ces Princi pes,
èt qui est la suite d’un jugement prononcé
après les 1000 ans, qui se sont écou-
lé,s depuis leur mort ; pendant lequel
temps ils ne sont point rentrés dans
la vie (1). Car lès pln^ parfaits sont
déjà entrés ; ou retournés au champ
où doit siéger le grand Juge, et auquel
les autres n’arrivent qu’au bout
d’un voyage de 1000 ans. Les premiers
ne' craignent point le scrutin épuratoire,
et la seconde mort n’aura point
d’empire sur eux (r). Les Martyrs, et
tous ceux qui n’ont point donné sur
eux prise, à l’action de la matière
du corps ( 2 ) , et au mauvais Principe
, jouissent de la félicité préliminaire
d’iine vie , à laquelle les autres
ne sont admis qu’au bout de ioop (3)'
ans. Cette félicité n’est pas , comme
dit Plutarque, la vie divine à laquelle'
ils sont élpvés après le jugement, ou
à l’époque de la seconde mort : c’est-
une aisance momentanée. Aussi l’auteur
de l’Apocalypse ne donne - t -
il ici à ce règne momentané , qu’une
durée de icoo ans, tandis que dans
le chapitre X X I I , lorsqù’ils ont subi -
le jugement, après la seconde résurrection
et lorsqu’il sont établis dans
(3}, Plut.' de fa c ie , p. 942.
O o 3